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Présentation lors de l’International Air Safety Summit (IASS) de 2017

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Kathy Fox
Présidente, Bureau de la sécurité des transports du Canada
Dublin, Irlande
23 octobre 2017

Seul le texte prononcé fait foi.

Diapositive : Titre

Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser à vous aujourd'hui.

Au Bureau de la sécurité des transports du Canada, nous reconnaissons grandement l'excellent travail de la Flight Safety Foundation. En fait, vos études et vos rapports sont souvent cités dans nos rapports d'enquête.

Diapositive : Programme

Aujourd'hui, je souhaite me concentrer sur deux sujets : la Liste de surveillance du BST de 2016 et la collision d'un A320 avec le relief à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en mars 2015.

Parlons d'abord de la Liste de surveillance.

Diapositive : Liste de surveillance

Nous avons créé notre première Liste de surveillance en 2010, dans le but de mettre en lumière les enjeux qui créent les risques les plus importants pour le système de transport du Canada. De nombreux problèmes étaient bien connus, mais ils continuaient de se manifester de façon répétée. La création de la Liste de surveillance nous a aidés à attirer l'attention de l'industrie et des gouvernements, et a donné à ceux-ci un plan directeur pour le changement. Et la Liste de surveillance a produit des résultats. Avec le temps, les enjeux qui figurent sur cette liste ont évolué. À mesure que certains enjeux ont été résolus et retirés de la Liste, d'autres y sont apparus et les ont remplacés.

À l'heure actuelle, la liste fait état de dix enjeux : quatre sont liés au transport ferroviaire, un au transport maritime, trois au transport aérien, et deux au transport dit « multimodal ».

Je vais maintenant décrire les enjeux liés au transport aérien et au transport multimodal ainsi que les mesures demandées par le BST.

Diapositive : Approche non stabilisée

Le premier enjeu dont je veux vous parler concerne les situations avec approche non stabilisée. Vous pouvez voir ici une saisie d'écran tirée d'une animation créée par le BST à la suite de l'enquête sur l'écrasement d'un Boeing 737 à Resolute Bay, au Nunavut en 2011.

Du côté des transporteurs commerciaux, et en dépit des politiques des compagnies aériennes sur les approches stabilisées,  les résultats de vos recherches indiquent que seulement de 3,5 % à 4 % des approches ne sont pas stabilisées, mais que 97 % d'entre elles se poursuivent jusqu'à l'atterrissage. Autrement dit, quand l'approche n'est pas stabilisée, les équipages de conduite ne remettent les gaz que dans 3 % des cas. À moins que des mesures importantes ne soient prises, les équipages de conduite continueront de poursuivre les approches non stabilisées jusqu'à l'atterrissage, augmentant ainsi le risque d'accident à l'approche et à l'atterrissage.

Je sais que cet enjeu est complexe et je félicite la Flight Safety Foundation pour avoir mené des recherches de façon continue sur ce problème et donné aux pilotes une meilleure compréhension de leur processus de prise de décision.

Diapositive : Approche non stabilisée ‒ mesures requises

Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance jusqu'à ce que :

Diapositives : Sorties en bout de piste

Le deuxième enjeu dont je veux vous parler concerne les sorties en bout de piste.

Chaque année, des millions d'atterrissages se produisent sans incident sur les pistes canadiennes. Or, des accidents surviennent pendant la phase d'atterrissage ou en cas de décollage interrompu. Il peut en résulter des dommages aux aéronefs, des blessures, voire des décès — et les conséquences peuvent être particulièrement graves lorsqu'il n'y a pas d'aire de sécurité appropriée à l'extrémité de la piste.

Bien sûr, nous n'avons pas oublié les images-chocs de l'Airbus du vol 358 d'Air France, qui s'est enflammé après être sorti de la piste 24L de l'Aéroport international Lester B. Pearson-Toronto, il y a plus de dix ans.

Diapositive : Sorties en bout de piste ‒ mesures à prendre

Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance jusqu'à ce que :

Diapositive : Risques de collisions sur les pistes

Compte tenu des millions de décollages et d'atterrissages effectués chaque année, les incursions sur les pistes sont rares, mais leurs conséquences peuvent être catastrophiques. De 2011 à 2015, la moyenne des incursions sur les pistes au Canada a atteint un peu plus d'une incursion par jour. Seules quelques-unes d'entre elles, c'est-à-dire moins d'un pour cent, étaient considérées comme graves. Toutefois, le risque demeure quand même trop élevé.

L'écran montre un schéma de la piste 14 de l'Aéroport international Macdonald-Cartier d'Ottawa (Ontario), où un de Havilland Dash-8 et un Piaggio P-180 ont été impliqués dans une incursion en décembre 2013.

Diapositive : Risque de collisions sur les pistes ‒ mesures à prendre

Au BST, nous demeurons préoccupés du fait que des incursions similaires graves continueront de se produire sur les pistes jusqu'à ce que de meilleures mesures de protection soient prises. Plus précisément, dans le but de réduire le risque de collision catastrophique, nous aimerions que des avertissements soient transmis directement aux pilotes pour les aviser qu'un avion ou un véhicule se trouve sur la piste utilisée pour le décollage ou l'atterrissage.

 

Diapositive : Enjeu lié au transport multimodal ‒ gestion de la sécurité et surveillance

Toutes les entreprises de transport sont responsables de la gestion des risques pour la sécurité de leur exploitation.

Certaines estiment que le niveau de sécurité est adéquat tant qu'elles se conforment à la réglementation, mais cette dernière ne peut, à elle seule, prévoir tous les risques spécifiques d'une activité. C'est pourquoi le BST a maintes fois souligné les avantages d'un système de gestion de la sécurité (SGS), cadre reconnu à l'échelle internationale, pour permettre aux entreprises de gérer efficacement les risques et de rendre leur exploitation plus sécuritaire.

Diapositive : Gestion de la sécurité et surveillance ‒ mesures à prendre

Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance jusqu'à ce que :

Diapositive : Enjeu lié au transport multimodal ‒ lenteur de la réaction de Transports Canada aux recommandations du BST

Depuis sa création en 1990, le BST a formulé plus de 580 recommandations dans le but de remédier à des lacunes de sécurité systémiques à haut risque dans les secteurs aérien, maritime, ferroviaire et pipelinier. La plupart de ces recommandations étaient adressées à Transports Canada.

Cependant, la roue du progrès tourne lentement et TRANSPORT CANADA a trop souvent attendu des années, avant de mettre en œuvre les mesures prévues en réponse aux recommandations du BST. Dans certains cas, il a fallu attendre des décennies.

Par exemple, lorsque nous avons publié la Liste de surveillance précédente, 52 recommandations adressées à Transports Canada n'avaient pas été entièrement traitées depuis plus de dix ans. De ce nombre, 39 étaient en suspens depuis plus de 20 ans. Et depuis, leur nombre s'est accru.

Diapositive : Lenteur de la réaction de Transports Canada aux recommandations du BST ‒ mesures à prendre

Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance jusqu'à ce que :

Diapositive : Activités en cours liées à la Liste de surveillance

Cela met fin à la partie sur la Liste de surveillance du BST. Je vais maintenant changer de sujet et parler d'une enquête du BST à grande incidence qui, selon moi, devrait intéresser autant les transporteurs que les propriétaires d'aéroports.

Diapositive : A15H0002 (animation)

Tout juste après minuit le 29 mars 2015, un Airbus A320 effectuant le vol 624 d'Air Canada a heurté le relief à 740 pieds, soit 225 mètres, avant la piste 05 en tentant d'atterrir à l'aéroport international Stanfield de Halifax pendant une tempête de neige. Il y avait 133 passagers et 5 membres d'équipage à bord.

Je vais maintenant montrer une brève animation qui décrit les principaux faits concernant cet accident, puis je parlerai plus en détail de certains éléments de l'accident.

Diapositive : Restrictions visant l'utilisation du mode d'angle de trajectoire de vol (FPA) sur un appareil Airbus

De nombreux facteurs ont été à l'origine de cet accident. Mentionnons entre autres, le fait que le pilote utilisait le mode FPA, qui guide l'aéronef sur un FPA cible pour effectuer une approche de non-précision. Ce mode fournit un « angle dans l'espace » fixe, mais n'assure pas le guidage vertical fixe.

Par conséquent, lorsque l'aéronef navigue dans ce mode, les perturbations externes, comme les variations des vents ou la turbulence, peuvent éloigner l'aéronef de la trajectoire d'approche initiale du FPA sélectionné. Si ces perturbations écartent l'aéronef sous sa trajectoire d'approche initiale, celui-ci poursuivra sa descente une fois que le pilote automatique aura rétabli le FPA sélectionné, mais selon une trajectoire de vol sous la trajectoire de vol initiale et parallèle à celle-ci.

Si les perturbations se maintiennent durant la descente et que l'équipage de conduite ne fait aucun ajustement pour rétablir la trajectoire de vol initiale, l'écart d'altitude entre les trajectoires de vol initiale et réelle ira en augmentant. L'aéronef volera alors sous le profil d'approche vertical publié. Les pilotes savent peut-être cela instinctivement, mais il est possible qu'ils ne tiennent pas toujours compte des limites du FPA par rapport aux autres formes de guidage vertical de précision pendant une approche réelle.

C'est exactement ce qui s'est produit dans l'accident dont il est question ici.

Ce n'est que dans les dernières secondes du vol que les pilotes ont désactivé le pilote automatique pour effectuer un atterrissage manuel. Presque immédiatement, ils se sont rendu compte qu'ils avaient volé trop bas et trop tôt et qu'ils n'atteindraient pas la piste.

Procédures d'utilisation normalisées d'Air Canada

Selon les procédures d'utilisation normalisées d'Air Canada, l'équipage de conduite n'était pas tenu de surveiller l'altitude de l'avion et la distance du seuil de piste ni d'ajuster l'angle de la trajectoire de vol.

Toutefois, cette pratique ne correspondait pas aux pratiques contenues dans les manuels d'utilisation destinés aux équipages de conduite d'Air Canada, ni à celles d'Airbus.

Personne ne s'en est rendu compte, ni l'exploitant, ni l'organisme de réglementation qui avait initialement approuvé les procédures.

Le paragraphe 5 de la section Autres faits établis indique :

Transports Canada avait examiné et approuvé le manuel d'utilisation de l'aéronef et les procédures d'utilisation normalisées d'Air Canada. Toutefois, il n'avait pas relevé la divergence entre les procédures d'Air Canada et le manuel d'utilisation destiné à l'équipage de conduite d'Airbus sur la nécessité de surveiller la trajectoire de vol verticale de l'aéronef au-delà du repère d'approche finale en mode de guidage par angle de trajectoire de vol.

Diapositive : Balisage des aérodromes

Pendant l'approche, l'équipage de conduite a demandé au contrôleur de régler les feux d'approche et les feux de piste à leur intensité maximale. Or, ce réglage n'a pas été fait. Le contrôleur, distrait par les chasse-neige sur la piste et par un aéronef à proximité qui occupait la voie de circulation, n'a pas réglé les feux.

Cette situation a été mentionnée au paragraphe 7 de la section Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs : « De nombreux facteurs (nombre limité d'indices visuels, peu de temps qu'a eu l'équipage de conduite pour les apercevoir, potentielles illusions visuelles et intensité réduite des feux d'approche et de piste) ont empêché l'équipage de conduite de s'apercevoir que la trajectoire d'approche amenait l'aéronef en deçà de la piste. »

De plus, bien que la distance minimale publiée pour cette approche était d'un mille marin, Air Canada disposait d'une spécification d'exploitation approuvée par Transports Canada qui autorisait les pilotes à effectuer des approches à la moitié de la distance publiée. Toutefois, il n'y avait pas de lien entre cette distance réduite et les exigences relatives au balisage lumineux d'approche.

Cela a été mentionné au paragraphe 5 de la section Faits établis quant aux risques du rapport : [à l'écran] « Si l'exigence de visibilité minimale pour exécuter une approche ne tient pas compte du type de balisage lumineux d'approche installé sur la piste, le balisage risque d'être inadéquat pour permettre aux équipages de conduite, dans des conditions de visibilité réduite, d'évaluer la position de l'aéronef et de décider s'ils peuvent ou non poursuivre l'approche jusqu'à l'atterrissage en toute sécurité. »

Diapositive : Approche de l'Aéroport international Lester B. Pearson-Toronto

Un aéronef en approche a donc été autorisé à effectuer une approche de non-précision avec une visibilité limitée à un demi-mile. En outre, les pilotes n'ont pas été tenus de vérifier l'altitude par rapport à la distance du seuil de la piste.

Et comme il y avait une tempête de neige, les risques étaient accrus.

Le paragraphe 10 de la section Autres faits établis du rapport mentionne :[à l'écran] « Le manuel d'exploitation de vol d'Air Canada ne précisait pas que les références visuelles requises devraient permettre aux pilotes d'évaluer la position de l'aéronef et la vitesse de changement de position pour continuer l'approche jusqu'à l'atterrissage. »

et

Le paragraphe 11 de la section Autres faits établis du rapport mentionne : [à l'écran] « Au Canada, les spécifications d'exploitation pour les approches de non-précision autorisent une visibilité minimale sans tenir compte du type de balisage lumineux d'approche installé sur la piste. »

Nous avons également analysé ce qui s'est passé après la collision avec le relief.

Diapositive : Services d'intervention d'urgence de l'aéroport ‒ ce qui n'a pas fonctionné

Après l'évacuation, il s'est écoulé près d'une heure avant que tous les passagers soient transportés et abrités dans des installations. Ce délai était dû en partie aux conditions météorologiques particulièrement mauvaises et au fait que l'aéronef avait rompu des lignes électriques commerciales à proximité de la piste, ce qui a causé une panne des systèmes d'alimentation de secours et perturbé le réseau radio de l'aéroport. Mais nous avons également relevé des lacunes dans les plans d'intervention d'urgence du transporteur et de l'aéroport, notamment en ce qui concerne les dispositions à prendre pour assurer le transport rapide de tous les occupants.

Diapositive : Sécurité des passagers

Vingt-cinq personnes ont subi des blessures, de mineures à graves, et ont été transportées à l'hôpital.

L'enquête a révélé plusieurs problèmes touchant la sécurité des passagers.

Diapositive : Problèmes médicaux ‒ apnée obstructive du sommeil (AOS)

Le capitaine avait reçu auparavant un diagnostic d'apnée obstructive du sommeil (AOS), un problème médical causé par une obstruction partielle ou complète du flux aérien durant le sommeil. C'est un risque pour la santé bien documenté qui peut diminuer la performance pendant l'état de veille. L'AOS est également associée à un risque accru d'accident de travail et de véhicules motorisés.

Un traitement inadéquat d'une AOS significative du point de vue clinique est incompatible avec la certification.

Même si rien n'indiquait que la fatigue était une cause ou un facteur contributif de l'accident, le capitaine risquait quand même de ressentir une fatigue causée par la perturbation chronique du sommeil, puisqu'il ne recevait que rarement le traitement médical pour l'AOS.

De plus, puisque le médecin examinateur de l'aviation civile (MEAC) de TC est habituellement la seule personne à examiner physiquement le demandeur et à faire une recommandation de certification médicale, il serait raisonnable de s'attendre à ce que les lignes directrices qu'il reçoit comprennent de l'information sur l'AOS. Or, le Guide pour les médecins examinateurs de l'aviation civile (2004) de TC ne contient aucun renseignement précis sur l'AOS.

Une des sections les plus importantes d'un rapport du BST est la section Mesures de sécurité prises.

Diapositive : Mesures de sécurité prises

À la suite de l'accident, les pilotes d'Air Canada ont reçu des consignes plus précises sur les références visuelles requises pour poursuivre une approche, ainsi qu'un avertissement clair quant aux limites du pilote automatique et de la navigation verticale à l'aide du mode d'angle de trajectoire de vol de l'Airbus.

Le manuel d'exploitation de vol de l'entreprise a aussi été révisé et met davantage l'accent sur la surveillance des instruments pendant toutes les approches sous l'altitude minimale de descente.

L'aéroport international de Halifax a amélioré le dispositif de balisage lumineux d'approche des pistes 05 et 32, et Air Canada a recommandé que des améliorations similaires soient apportées à d'autres aéroports au pays.

La Halifax International Airport Authority a aussi pris des mesures pour examiner, réviser et mettre à jour son plan d'intervention d'urgence et améliorer ses ressources d'urgence, y compris l'alimentation électrique de secours.

NAV CANADA a émis une directive à l'intention du personnel de contrôle de la circulation aérienne concernant une anomalie constatée dans les boutons de préréglage du panneau d'éclairage, et a devancé la publication des procédures révisées du système mondial de navigation par satellite pour la piste 05.

Au Canada, les accidents mettant en cause de gros avions à réaction de ligne sont rares. Même si cet accident était très grave, ses conséquences auraient pu être encore pires. Cela devrait nous faire prendre conscience que toutes les parties en cause – Transports Canada, les aéroports, les sociétés aériennes, les équipages et même les passagers – ont un rôle à jouer pour que chaque vol soit aussi sûr que possible.

Diapositive : Pour nous joindre

Merci.

Diapo 15 : Mot-symbole Canada