Language selection

Rapport d'enquête aéronautique A01P0127

Perte d'espacement
Centre de contrôle régional de Nav Canada
Contrôle terminal de Vancouver -
Arrivées basse altitude
Aéroport international de Vancouver
(Colombie-Britannique)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Boeing 767-200 du vol 163 d'Air Canada (ACA163) arrive à Vancouver par le nord-est et se trouve sous guidage radar en prévision d'un atterrissage sur la piste 26R. Au même moment, l'Airbus A340-300 du vol 018 de Singapore Airlines (SIA018) arrive par le sud-ouest et se trouve sous guidage radar en prévision d'un atterrissage sur la piste 26R. Au moment où ACA163 se trouve en étape de base à droite en train de descendre d'environ 4 800 pieds à 3 000 pieds, SIA018 est établi en étape de base à gauche, en palier à 4 000 pieds. Pendant le virage en finale, une perte d'espacement se produit, et les deux avions se rapprochent à moins de 600 pieds et de 1½ mille marin avant que l'espacement exigé ne soit rétabli.

Renseignements de base

Figure 1. Position relative des avions après le contact initial avec le contrôleur des arrivées basse altitude. Les étoiles correspondent à la position de chaque avion, tandis que les pointillés montrent la trajectoire suivie par chaque avion dans les instants qui ont précédé.
Figure of Position relative des avions après le contact initial avec le contrôleur des arrivées basse altitude. Les étoiles correspondent à la position de chaque avion, tandis que les pointillés montrent la trajectoire suivie par chaque avion dans les instants qui ont précédé.

L'équipage d'ACA163 contacte pour la première fois le contrôleur des arrivées basse altitude de Vancouver à 11 h 02 min 48, heure avancée du PacifiqueNote de bas de page 1 et signale qu'il passe 6 000 pieds en descente vers 5 000 pieds. À ce moment-là, l'avion vire à gauche au cap de 080° et descend à quelque 1 000 pieds par minute (pi/min) tout en maintenant une vitesse de l'ordre de 250 nœuds. Le contrôleur des arrivées basse altitude autorise ACA163 à maintenir 3 000 pieds et met en garde l'équipage contre la présence de turbulence car son avion va suivre un gros-porteur.

L'équipage de SIA018 contacte pour la première fois le contrôleur des arrivées basse altitude quelque 20 secondes plus tard, alors que son avion se trouve en descente et approche de 5 000 pieds. Le contrôleur accuse réception du message et autorise l'avion à poursuivre sa descente vers 4 000 pieds et à s'y mettre en palier à un cap de 070°. La figure 1 montre la position relative des deux avions après ce contact initial avec le contrôleur des arrivées basse altitude.

À 11 h 03 min 31, le contrôleur ordonne à ACA163 de virer à droite au cap de 170°. Neuf secondes plus tard, le contrôleur ordonne à SIA018 de faire un virage à gauche jusqu'au cap de 350°. Une fois établis sur ces trajectoires inverses, les deux avions ont une vitesse de rapprochement combinée de quelque 480 nœuds [8 milles marins (nm) par minute].

Figure 2. Position relative des deux avions dans les premiers instants du virage en finale d'ACA163.
Photo of Position relative des deux avions dans les premiers instants du virage en finale d'ACA163.
Figure 3. Perte d'espacement.
Figure of Perte d'espacement.

À 11 h 04 min 06, le contrôleur des arrivées basse altitude guide ACA163 au radar jusqu'à un cap de 230° et autorise l'avion à faire une approche de la piste 26R à l'aide du système d'approche aux instruments (ILS), le tout assorti de l'obligation de maintenir une vitesse de 170 nœuds. Quand l'équipage d'ACA163 reçoit l'autorisation d'approche ainsi que la limite de vitesse qui s'y rattache, l'avion est en train de passer 4 800 pieds en descente tout en maintenant une vitesse d'environ 250 nœuds. L'équipage d'ACA163 entame un virage à droite et commence à réduire la vitesse pour respecter la limite qui lui a été imposée; pendant la manœuvre, le taux de descente de l'avion diminue à quelque 450 pi/min.Les deux avions se rapprochent à quelque 3,3 nm l'un de l'autre et convergent toujours à un rythme d'environ 8 nm par minute lorsque le contrôleur ordonne à l'équipage de SIA018 de virer au cap de 290° à 4 000 pieds (voir la figure 2). Il ordonne ensuite à l'équipage d'ACA163 d'accélérer sa descente vers 3 000 pieds à cause du trafic. Après réception de l'ordre « d'accélérer » la descente, le taux de descente d'ACA163 augmente à quelque 1 000 pi/min, le rayon du virage se resserre et la vitesse reste à 170 nœuds.

Il y a perte d'espacement lorsque les deux avions se rapprochent à moins de 1½ nm et de 600 pieds dans une zone où un espacement horizontal de 3 nm ou un espacement vertical de 1 000 pieds est obligatoire. L'espacement est rétabli au moment où ACA163 arrive à l'altitude de 3 000 pieds à laquelle il a été autorisé.

Par la suite, l'équipage de SIA018 signale qu'il a l'aéroport en vue, et il reçoit une autorisation modifiée lui permettant d'effectuer une approche à vue de la piste 26L. De son côté, l'équipage d'ACA163 termine son approche ILS de la piste 26R.

Les deux avions possèdent un système d'avertissement de trafic et d'évitement d'abordage (TCAS). Aucun des deux équipages ne signale recevoir ou exécuter un avertissement de trafic ou un avis de résolution du TCAS, les équipages des deux avions faisant savoir qu'ils ont l'autre appareil en vue.

Le rôle principal de Nav Canada consiste à assurer un écoulement sûr et efficace de la circulation aérienne à l'intérieur de l'espace aérien canadien ainsi que de l'espace aérien international pour lequel l'organisme a accepté la responsabilité de fournir des services de circulation aérienne.

Dans le cadre de leurs fonctions, les contrôleurs de la circulation aérienne de Nav Canada sont tenus de s'assurer de la présence continue d'un espacement convenable entre les aéronefs. Les normes d'espacement précises varient et sont détaillées dans le Règlement de l'aviation canadien. Pour veiller au maintien d'un espacement approprié, les contrôleurs doivent planifier, prendre les mesures qui s'imposent pour exécuter leur plan et surveiller les résultats dudit plan. Toute défaillance dans la planification, l'exécution ou la surveillance est considérée comme une irrégularité susceptible de mener à une perte d'espacement.

Les équipages de conduite et les contrôleurs suivent des procédures normalisées, dont l'utilisation permet de ne pas avoir à donner des explications détaillées et à transmettre des messages radio trop longs. En cas de guidage radar, il est important que l'équipage de conduite respecte les directives du contrôleur si l'on veut garantir le succès du plan du contrôleur. Toutefois, l'équipage de conduite ne connaît généralement que la partie du plan du contrôleur qui lui parvient par l'entremise du système de communications.

Dans des circonstances normales, le fait de réduire la vitesse d'un avion a comme conséquence naturelle de faire diminuer le taux de descente de cet appareil.

Nav Canada est conscient des risques plus grands qu'il y a à ordonner des changements d'altitude à des appareils sous guidage radar qui suivent des trajectoires inverses. Au niveau du contrôle, Nav Canada considère qu'un tel plan ne pardonne pas la moindre erreur, car il impose au contrôleur une surveillance accrue, il augmente le risque d'erreur due à la distraction et il rend toute erreur potentielle beaucoup plus difficile à corriger. Des exemples d'événements antérieurs au cours desquels le recours à cette procédure de contrôle n'a pas donné de bons résultats ont été portés à la connaissance des contrôleurs par l'entremise du système de communication interne de Nav Canada (Bulletin de sécurité des Services de la circulation aérienne - Squawk 7700, numéro 9501).

Analyse

Après examen des renseignements disponibles tirés du radar et des radiocommunications, il y a tout lieu de croire que le contrôleur s'attendait à ce que l'avion d'Air Canada (qui arrivait par le nord) atteigne l'altitude à laquelle il avait été autorisé (3 000 pieds) avant la perte de l'espacement latéral.

Toutefois, quand le contrôleur a autorisé ACA163 à faire une approche ILS, il a également ordonné une réduction de vitesse à 170 nœuds. L'équipage d'ACA163 a réagi en entamant un virage et en réduisant la vitesse afin de respecter la limite imposée. Comme ACA163 décélérait dans le but de se conformer à la limite de vitesse, cette manœuvre a eu comme conséquence naturelle de faire diminuer la vitesse descensionnelle de l'appareil. Quand le contrôleur s'est rendu compte du taux de descente réduit d'ACA163, il était trop tard pour corriger la situation avant l'apparition de la perte d'espacement. La contrainte de temps imposée au contrôleur a été due en partie au recours à un guidage radar qui a amené les deux avions sur des trajectoires inverses à des altitudes quasiment identiques.

Le contrôleur a réagi en faisant virer SIA018 à gauche, ce qui a aidé à réduire la vitesse de rapprochement des deux avions. Le contrôleur a également ordonné à ACA163 d'accélérer la descente jusqu'à 3 000 pieds à cause du trafic. C'est ce message qui a fourni à l'équipage d'ACA163 la première indication comme quoi un conflit de trafic était imminent et qu'une augmentation du taux de descente s'imposait. L'équipage de conduite a réagi en augmentant le taux de descente, en continuant de respecter la limite de vitesse et en resserrant le virage pour aller chercher le faisceau du radiophare d'alignement de piste.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le contrôleur ne s'est pas assuré de la présence d'un espacement vertical avant la perte de l'espacement latéral.

Autres faits établis

  1. Le fait d'ordonner des changements d'altitude pendant le guidage radar de deux avions à l'arrivée sur des trajectoires inverses impose au contrôleur une surveillance accrue, il augmente le risque d'erreur due à la distraction et il rend toute erreur potentielle beaucoup plus difficile à corriger à cause de la vitesse de rapprochement élevée des avions.
  2. Il faut s'attendre à ce qu'une demande de modification de la vitesse d'un avion se traduise par une modification du taux de descente de celui-ci.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée par le Bureau le .