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Rapport d'enquête ferroviaire R07V0109

Déraillement sur une voie autre que la voie principale
Kootenay Valley Railway (KVR)
Manœuvre 0700 Trail
Point milliaire 19,0 de la subdivision Rossland
Trail (Colombie-Britannique)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 23 avril 2007 vers 14 h 36, heure avancée du Pacifique, la manœuvre 0700 Trail est partie à la dérive dans une pente de 4,1 p. 100 située entre Warfield et Trail (Colombie-Britannique), causant le déraillement de deux locomotives et de huit wagons-trémies couverts chargés de sulfate d'ammonium en granules. Un contremaître et un aide ont pu quitter le train avant le déraillement et ont subi des blessures mineures. Le mécanicien est resté à bord du train et a perdu la vie. Environ 20 p. 100 du chargement (43 836 kilogrammes) des wagons-trémies couverts et quelque 500 gallons de carburant diesel se sont répandus lors de l'accident.

This report is also available in English.

Autres renseignements de base

L'accident

Le 23 avril 2007 vers 7 h, heure avancée du PacifiqueNote de bas de page 1, les membres de l'équipe de la manœuvre 0700 Trail (la manœuvre), en l'occurrence un mécanicien, un contremaître et un aide, prennent leur service à Trail (Colombie-Britannique), point milliaire 18,4 de la subdivision Rossland (voir la figure 1). Ils sont censés faire des manœuvres d'aiguillage à Trail et se rendre ensuite à Warfield (Colombie-Britannique), point milliaire 21,2 de la subdivision Rossland, pour exécuter d'autres manœuvres d'aiguillage, après quoi ils doivent rentrer à Trail avec onze wagons. Après avoir terminé les manœuvres à Trail, ils partent pour Warfield.

Figure 1. Diagramme montrant l'endroit où l'accident a eu lieu (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens )
Figure 1. Diagramme montrant l'endroit où l'accident a eu lieu

Après avoir terminé les opérations d'aiguillage à Warfield, l'équipe attelle le train aux onze wagons auxquels on doit faire descendre la pente raide menant à Trail : huit wagons-trémies couverts chargés de sulfate d'ammonium en granules et trois wagons-citernes de résidus.

Avant de partir de Warfield, on serre et on desserre le frein automatique pour s'assurer qu'il fonctionne bien, et on inspecte les wagons dont les robinets de retenueNote de bas de page 2 sont réglés à la position haute pression.

Durant le trajet en direction de Trail, l'aide prend place dans la locomotive de tête et le contremaître accompagne le mécanicien dans la seconde locomotive (servant de locomotive de commande)Note de bas de page 3.

Pour contrôler le mouvement, le mécanicien fait une utilisation combinée du frein automatique et du frein direct, complétée par l'utilisation du freinage rhéostatique. Peu de temps après s'être engagé dans la section la plus escarpée de la pente, le mécanicien commande un freinage d'urgence. Le frein rhéostatique Note de bas de page 4 (FR) se met hors circuit, et le mécanicien serre à fond le frein direct de la locomotive; la vitesse du train continue toutefois d'augmenter. Le contremaître communique par radio avec le chef de triage pour l'aviser que le train est parti à la dérive, et il informe l'aide et le mécanicien qu'ils doivent quitter le train. Le contremaître et l'aide sautent du train en marche et subissent des blessures mineures. Le mécanicien reste à bord. On voit une fumée épaisse qui s'élève d'un bout à l'autre du train.

Le train continue de prendre de la vitesse. À une vitesse d'environ 40 mi/h, tandis que le train roule dans une courbe de 16 degrés vers la droite, au point milliaire 19,216, les wagons deux à huit à partir de l'avant du train quittent la voie à l'extérieur de la courbe et se séparent de la partie avant du train. Les trois wagons-citernes de résidus, soit les wagons neuf à onze, restent à la verticale sur les rails.

Les deux locomotives et le wagon-trémie couvert restant continuent sur leur lancée, franchissent le passage supérieur de la route 22 et déraillent ensuite à l'extérieur de la courbe de 16 degrés vers la droite qui se trouve au point milliaire 19,038. La locomotive de tête se renverse à côté du rail, tandis que la seconde locomotive se renverse et finit sa course en contrebas. On retrouve par la suite le corps du mécanicien, blessé mortellement, sous la seconde locomotive.

Environ 500 gallons de carburant diesel provenant des deux locomotives et environ 20 p. 100 du chargement de 43 800 kilogrammes des wagons-trémies couverts (chargés de sulfate d'ammonium en granules) se sont répandus. Le sulfate d'ammonium n'est pas un produit dangereux réglementé.

Lors du déraillement, le ciel était clair, la visibilité était bonne et la température était de 16 °C.

Examen des lieux

Les trois wagons-citernes de résidus n'ont pas déraillé et se sont immobilisés au point milliaire 19,2 (voir la figure 2 et la photo 1).

Figure 2. Lieux où les déraillements se sont produits

 Lieux où les déraillements se sont produits</p>
Photo 1. Déraillement au point milliaire 19,2
Déraillement au point milliaire 19,2

Les wagons-citernes étaient précédés par un wagon-trémie couvert chargé (CP 385119) qui est resté attelé aux wagons-citernes; lorsqu'il s'est arrêté, son bogie arrière était encore sur les rails, mais son bogie avant avait déraillé. Les six wagons-trémies couverts qui précédaient ce wagon avaient déraillé à l'extérieur de la courbe.

Les deux locomotives et le wagon-trémie qui restait se sont immobilisés après avoir déraillé à l'extérieur de la courbe, au point milliaire 19,038 (voir la photo 2).

Photo 2. Déraillement au point milliaire 19,038
 Déraillement au point milliaire 19,038

L'examen des wagons-citernes a révélé que les pistons des cylindres de frein des premier et troisième wagons étaient en position de serrage et que les robinets de retenue étaient en position d'échappement direct. Puisque ces wagons n'étaient pas chargés, il n'était pas nécessaire que leurs robinets de retenue soient en fonction. On a mesuré la pression d'air dans les cylindres de frein à peu près 24 heures après le déraillement, et on a relevé des pressions de 48 livres par pouce carré (lb/po²) pour le wagon no CGTX 65316, de 0 lb/po² pour le wagon no PROX 33301, et de 56 lb/po² pour le wagon no PROX 34166.

L'examen des wagons-trémies couverts a révélé que les poignées des robinets de retenue des cylindres de frein étaient dans différentes positions; il y en avait quatre qui étaient dans la position haute pression (y compris un robinet de retenue qui avait été arraché et qu'on a retrouvé durant le nettoyage des lieux après le déraillement); il y en avait deux qui étaient à la position d'échappement, une qui était à la position d'échappement direct lent, et une qui était entre la position haute pression et la position d'échappement direct lent.

Un examen plus poussé a permis de constater que les roues des deux locomotives et celles des premier et troisième wagons-trémies couverts à partir de la tête du train montraient des signes évidents de bleuissement (dénotant un freinage intensif). Les roues du deuxième wagon-trémie couvert n'étaient pas bleuies, mais les semelles de frein de ces roues montraient des signes de détérioration provoquée par la chaleur qui indiquaient un freinage intense, mais pas aussi intense que celui des wagons adjacents. Sur les cinq wagons-trémies couverts qui suivaient, on n'a relevé que des signes d'un freinage intense limité, sinon aucun signe de freinage intense. Les trois wagons-citernes de résidus qui étaient en queue de train ne montraient aucun signe de freinage intense. Les semelles de frein des wagons qui montraient des signes de freinage intense avaient aussi des surfaces de contact d'aspect glacé.

Un examen plus poussé du matériel roulant déraillé n'a pas révélé la présence de défauts mécaniques antérieurs au déraillement qui auraient pu compromettre leur fonctionnement sûr.

Sur les deux sites de déraillement, les premières marques trouvées sur la voie ont été des marques de boudins de roues qui ont été relevées sur le champignon des rails extérieurs et qui correspondaient aux points de déraillement. Quelques pieds au-delà de chaque point de déraillement, compte tenu du sens d'avancement, on a relevé des marques de boudins de roues sur les traverses, du côté extérieur du rail extérieur de la courbe.

Renseignements sur l'équipe

Deux équipes de trois hommes étaient affectées à la manœuvre, et travaillaient normalement suivant un cycle de quatre jours de travail suivis de quatre jours de repos, chaque journée de travail consistant en un tour de service de 12 heures.

Les membres de l'équipe qui conduisait le train accidenté se conformaient tous aux normes en matière de repos et de condition physique, ils avaient les qualifications voulues pour occuper leurs postes respectifs et connaissaient bien le territoire. Le mécanicien comptait 25 ans d'expérience au sein du Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP), dont 15 ans pendant lesquels il avait été affecté à la manœuvre. L'aide travaillait pour le CFCP depuis un peu moins de 2 ans, dont 10 mois au cours desquels il avait été affecté périodiquement à la manœuvre. Quant au contremaître, il avait quatre années d'expérience de travail pour le CFCP, au cours desquelles il avait été affecté à la manœuvre la plupart du temps.

Comme le mécanicien avait été mêlé à deux incidents antérieurs, en l'occurrence un incident lors duquel quatre wagons chargés d'ammoniac anhydre étaient partis à la dérive en 2005, et le déraillement d'un wagon qui a été poussé au-delà de l'extrémité d'une voie en impasse en 2005, la compagnie de chemin de fer avait élaboré à l'intention du mécanicien un plan de mesures ciblées qui insistait sur les deux aspects suivants :

L'application des mesures ciblées a débuté le 3 février 2005 et supposait que la compagnie procède à des tests de compétence au hasard, qui devaient inclure l'analyse des données du consignateur d'événements. Le premier test a été effectué le 25 février 2005. Sur les huit tests documentés qu'on a menés entre cette date et celle du déraillement, il y en a eu trois qui ont été effectués par un gestionnaire du service de ligne, dont une évaluation du rendement du mécanicien quant au respect des instructions de l'indicateur no 52 relatives à la conduite de trains dans la côte Warfield. Lors des cinq autres tests, contrôlés par le gestionnaire du secteur, le gestionnaire a vérifié si le mécanicien maîtrisait et appliquait bien les consignes d'embarquement/de débarquement, les consignes d'utilisation du sifflet aux passages à niveau, les procédures radio et la procédure de vérification de l'efficacité des freins à main. On n'a relevé aucune information documentée qui montre que les données du consignateur d'événements de locomotive (CEL) ont été téléchargées et analysées durant ces huit tests. La dernière évaluation du mécanicien a eu lieu une semaine avant l'accident.

Groupe de traction / matériel roulant

Le train qui est parti de Warfield comptait deux locomotives GP 38-2, huit wagons-trémies couverts chargés et trois wagons-citernes de résidus. Il pesait approximativement 1 255 tonnes et mesurait environ 795 pieds.

Les locomotives disposaient du freinage rhéostatique (FR) mais elles n'étaient pas équipées du FR à grande capacité ou d'un dispositif de maintien du FR. Le FR à grande capacité fournit son effort retardateur maximal entre 6 et 23 mi/h, tandis que le FR standard développe son effort retardateur maximal à une vitesse d'environ 23 mi/h. Le dispositif de maintien du FR, quant à lui, fait en sorte que le FR demeure engagé quand on commande un serrage d'urgence des freins à air du train. Les locomotives plus récentes sont équipées en usine du dispositif de maintien du FR. Certaines compagnies de chemin de fer ont aussi modifié en rattrapage leurs locomotives plus anciennes pour les doter du dispositif de maintien du FR.

Puisque le FR des locomotives utilise les moteurs de traction pour générer un effort retardateur, il ne contribue pas à la production de chaleur au point d'interface entre les tables de roulement et les semelles de frein. Ce mode de freinage n'est pas sujet à l'évanouissement dû au frottement, contrairement aux systèmes de freinage à frottement comme le frein automatique et le frein direct. C'est pour cette raison que le FR s'avère particulièrement important quand un train descend des pentes en région montagneuse.

Les huit wagons-trémies couverts ont été construits entre 1970 et 1981 et ils étaient équipés soit d'une timonerie de frein classique, soit de freins montés en bogie. Les trois wagons-citernes de résidus ont été construits en 1996, en 2005 et en 2007 et étaient équipés de freins montés en bogie. Tous les wagons étaient en bon état de fonctionnement.

Les locomotives ont été transportées jusqu'à l'atelier Ogden du CFCP, à Calgary. L'inspection des locomotives a révélé que leurs systèmes de freinage à air fonctionnaient bien. Les locomotives étaient en bon état de fonctionnement.

Renseignements sur la voie

La subdivision Rossland va de Castlegar (Colombie-Britannique), point milliaire 0,0, à Warfield, point milliaire 22,0. Entre le point milliaire 0,6 et le point milliaire 16,0, la circulation est régie grâce au système de régulation de l'occupation de la voie (ROV), en vertu du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF). On considère que la voie principale prend fin au point milliaire 16,0. Au-delà du point milliaire 16,0, en direction de Warfield, tous les mouvements sont régis en conformité avec la règle 105 du REF. La règle 105 exige que tous les mouvements circulent à vitesse réduite, soit à une « vitesse permettant de s'arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité d'un matériel roulant ». De plus, les instructions de la compagnie fixent la vitesse maximale autorisée à 10 milles à l'heure.

Le tronçon de voie situé entre le point milliaire 18,4 et le point milliaire 21,2 est appelé côte Warfield. Dans ce secteur, la voie descend en direction sud une pente dont la déclivité atteint 4,1 p. 100 par endroits, et elle décrit des courbes atteignant les 20 degrés. Dans l'industrie ferroviaire, on considère habituellement que des pentes de plus de 1,8 p. 100 sont des déclivités montagneuses. Dans le secteur du déraillement, la voie principale est simple et elle est faite de rails éclissés de 130 livres qui ont été fabriqués par Algoma Canada en 1961, posés sur des selles de rail de 14 pouces à double épaulement et retenus à chaque traverse de bois mou par quatre crampons de 6 pouces fichés dans chaque selle de rail. Le ballast consiste en une couche de 3 pouces de pierre concassée. Les cases étaient garnies et les extrémités des traverses étaient recouvertes de ballast. La voie était généralement en bon état. La voie a été entretenue conformément aux dispositions du Règlement sur la sécurité de la voie de Transports Canada et des Notices techniques du CFCP. La courbe du point milliaire 19,216 avait une vitesse de conception de 19 mi/h.

Kootenay Valley Railway

La Kootenay Valley Railway est un chemin de fer interne sur courtes distances qui appartient en propre au CFCP et qui est exploité par celui-ci. L'entreprise a été formée en 1997 après qu'on eut décidé qu'il était préférable d'établir une compagnie conforme au concept de chemin de fer interne sur courtes distances, plutôt que de vendre la compagnie à un exploitant indépendant.

Conduite du train

L'indicateur 52 du CFCP, portant sur le secteur du service intérieur (Colombie-Britannique), renferme les instructions d'exploitation spécifiques et les consignes qui s'appliquent à la descente de la côte Warfield (voir la figure 3). Ces consignes, les plus restrictives de l'ensemble du réseau du CFCP, donnent des précisions sur les mesures qu'on doit prendre dans la pente et sur les endroits où il faut les prendre. Les consignes, consistant à utiliser le freinage rhéostatique complété par l'action des freins à air pour régler la vitesse du train, visent à éviter l'évanouissement des freins dû au frottement et à empêcher que le matériel roulant parte à la dérive.

Figure 3. Consignes du CFCP concernant la conduite des trains
Consignes du CFCP concernant la conduite des trains

Renseignements consignés

On a téléchargé les données des consignateurs d'événements des deux locomotives de la manœuvre 0700 Trail. Le tableau 1 reproduit ces données et les événements qui y correspondent.

Tableau 1. Analyse des données des consignateurs d'événements des deux locomotives de la manœuvre 0700 Trail et des principaux événements qui y correspondent.
Heure Position Événement
14:29:31- 14:29:54 Pendant que le train roule à 8,6 mi/h et que la commande des gaz est à zéro, un serrage du frein de l'ordre de 20 lb/po² est commandé. Le mouvement s'arrête et on observe que les freins sont serrés à la queue du train.

14:30:16 On place la commande des gaz à la position 4 tandis que le frein automatique est serré, afin de vérifier l'efficacité des freins. On détermine que le serrage des freins est efficace.

14:30:42 On desserre les freins et l'équipe confirme que les freins des 8 wagons chargés dont on a réglé le dispositif de retenue restent serrés.

14:32:11 On change de direction et le mouvement s'ébranle en direction du croisement de la West Kootenay Power, point milliaire 21,03 (sommet de la pente).

14:33:45 Point milliaire 21,15 On réduit de 10 lb/po² la pression de la conduite générale, laquelle est de 90 lb/po². Le train roule à 9 mi/h.

14:34:22 Point milliaire 21,04 On réduit de nouveau la pression de 4 lb/po², à 86 lb/po². Le mouvement roule alors à 11 mi/h.

14:34:36 Point milliaire 21,02 Le train roule à 12 mi/h (4 mi/h au-dessus de la vitesse autorisée), la commande des gaz est à la position zéro; le frein direct de la locomotive est desserré et le FR n'est pas en circuit.

14:34:41- 14:34:46 Point milliaire 20,98 Le mouvement roule à 12 mi/h, on serre le frein direct de la locomotive à une pression de 16 lb/po², et on serre davantage les freins du train en commandant une nouvelle réduction de 4 lb/po² de la pression de la conduite générale, à 82 lb/po².

14:34:52 – 14:35:03 Point milliaire 20,94 Le mouvement roule à 11 mi/h, le FR est appliqué à la position 2, on réduit encore de 2 lb/po² la pression de la conduite générale, qui est maintenant de 80 lb/po², et on réduit à 11 lb/po² la pression du frein direct de locomotive.

14:35:27 Point milliaire 20,84 Le mouvement roule à 10 mi/h, le FR est poussé à fond, à la position 8, le frein direct de locomotive est à 11 lb/po², et on réduit encore une fois la pression de la conduite générale, à 78 lb/po².

14:36:00 Point milliaire 20,72 La vitesse a augmenté et atteint 12 mi/h, et la pression du frein direct de locomotive est augmentée à 15 lb/po².

14:36:20 Point milliaire 20,65 La vitesse a augmenté et atteint 14 mi/h, on commande un serrage d'urgence du frein automatique, et le FR s'annule.

14:36:25 Point milliaire 20,63 La vitesse a atteint 15 mi/h et le frein direct de locomotive est serré à fond, à une pression de 31 lb/po².

14:36:27 – 14:39:37 Point milliaire 19,05 La vitesse atteint un maximum de 42 mi/h et les locomotives déraillent vers l'extérieur d'une courbe de 16 degrés.

Comparaison entre trains

Le BST a comparé la conduite du train impliqué dans l'accident et celle d'un train similaire auquel on a fait descendre la côte Warfield après l'accident (voir le tableau 2).

Tableau 2. Comparaison des manipulations des commandes de freinage entre le train impliqué dans accident et un train de contrôle dont la descente de la côte Warfield a été réussie.
Train impliqué dans l'accident Train dont la descente a été réussie
Heure P.M. * Heure P. M.

*Abréviations : Press. cond. gén. : Pression de la conduite générale; Press. frein dir. : Pression du frein direct; Position FR : Position du frein rhéostatique; P.M. : Point milliaire.
14:29:49 21.086 Press. cond. gén.*(lb/po²) 98 to 78

On fait l'essai des robinets de retenue. Il se passe quatre minutes et vingt sept secondes avant que le train amorce la descente.
Position FR Hors-circuit
Press. frein direct (lb/po²) 26
Vitesse (mi/h) 0
14:33:45 21.152 Press. cond. gén. 100 to 90 15:21:49 21.231 Press. cond. gén. 99
Position FR* Hors-circuit Position FR Hors-circuit
Press. frein. dir.* 0 Press. frein. dir. 0
Vitesse 9.2 Vitesse 1
14:34:16 20.919 Press. cond. gén. 90 to 80 15:24:40 20.953 Press. cond. gén. 99 to 94
Position FR 2 Position FR 1
Press. frein. dir. 16 Press. frein. dir. 0
Vitesse 11 Vitesse 5.4
14:35:19 20.867 Press. cond. gén. 80 to 78 15:25:37 20.866 Press. cond. gén. 94
Position FR 5.3 Position FR 4.3
Press. frein. dir. 11 Press. frein. dir. 5
Vitesse 10 Vitesse 6.4
14:36:00 20.718 Press. cond. gén. 78 15:26:47 20.717 Press. cond. gén. 94 to 88
Position FR 8 Position FR 8
Press. frein. dir. 15 Press. frein. dir. 5
Vitesse 12 Vitesse 9.6
14:36:20 20.649 Press. cond. gén. Urgence 15:27:15 20.642 Press. cond. gén. 88
Position FR Annulé Position FR 6.5
Press. frein. dir. 15 Press. frein. dir. 5
Vitesse 14 Vitesse 9.6
14:36:25 20.629 Press. cond. gén. Urgence 15:27:26 20.616 Press. cond. gén. 88
Position FR Annulé Position FR 5.1
Press. frein. dir. 20 Press. frein. dir. 5
Vitesse 15 Vitesse 8.6
14:38:16 19.866 Press. cond. gén. Urgence 15:33:04 19.858 Press. cond. gén. 88
Position FR Annulé Position FR 3.6
Press. frein. dir. 31 Press. frein. dir. 5
Vitesse 30 Vitesse 8.6
14:39:26 19.184 Press. cond. gén. Urgence 15:38:07 19.186 Press. cond. gén. 88 to 86
Position FR Annulé Position FR 4.3
Press. frein. dir. 31 Press. frein. dir. 9
Vitesse 42 Vitesse 5.7
14:39:39 19.021 Press. cond. gén. Urgence 15:40:02 19.002 Press. cond. gén. 86
Position FR Annulé Position FR 1.8
Press. frein. dir. 32 Press. frein. dir. 9
Vitesse 0 Vitesse 5.7

Essais réalisés par Wabtec Corporation

La compagnie Wabtec Corporation de Wilmerding, en Pennsylvanie (États-Unis), a utilisé un banc d'essai de freins à airNote de bas de page 5 pour réaliser, à la demande du BST, une série de tests destinés à évaluer le degré de remplissage de la conduite générale au moment où le train amorçait la descente de la côte Warfield. Les tests ont montré que, dans des circonstances idéales :

Tous les wagons auraient été alimentés complètement avant de descendre la côte.

Même si la pression des cylindres de frein des wagons dont les robinets de retenue avaient été réglés a été un peu plus élevée pendant les essais, les robinets de retenue ont eu peu d'effet sur les pressions obtenues dans les cylindres de frein au moment du serrage d'urgence du frein automatique.

Wabtec a aussi effectué des tests pour déterminer la puissance nette exercée sur les sabots de frein par le circuit de freinage à air de wagons similaires à ceux qui ont été détruits lors du déraillement. Les wagons similaires avaient un âge, une configuration de freinage et un historique de millage comparables à ceux des wagons accidentés. Le rapport a conclu que la capacité de freinage des wagons similaires mis à l'essai satisfaisait vraisemblablement aux normes de l'Association of American Railroads (AAR).

Évanouissement dû à la chaleur

L'évanouissement par échauffement est un phénomène qu'on associe habituellement à la conduite de trains dans des territoires montagneux où les pentes sont raides. Lorsqu'on serre les freins à sabot, la friction ou le frottement entre le sabot de frein et la table de roulement convertit en chaleur l'énergie cinétique créée par la rotation de la roue. Plus la force exercée sur la roue ou la vitesse de la roue est grande, plus la quantité de chaleur produite est élevée. Par suite d'une accumulation de chaleur excessive, le coefficient de friction entre le sabot de frein et la roue diminue, ce qui entraîne une réduction importante de l'effort de freinage. À des vitesses plus grandes, la chaleur s'accumule et accentue encore davantage la diminution de la capacité de freinage.

La spécification no M-926 de l'Association of American Railroads (AAR), publiée en 1964, est la norme qui régit la fabrication des semelles de frein composites à haut coefficient de frottement pour les wagons de chemin de fer. À cette époque, la norme s'appliquait aux wagons de 100 tonnes dont le poids brut sur rail (PBR) était de 263 000 livres. L'essai en pente de la norme M-926 de l'AAR exige que les semelles de frein soient exposées à une force nette de 1 450 livres, à une vitesse de 20 mi/h et pendant 45 minutes, et qu'elles produisent un effort retardateur minimal de 400 livres. Un freinage vigoureux, comme celui du train qui a descendu la pente lors de l'accident, peut excéder de beaucoup les critères de serrage limités qui sont exposés dans cette norme, portant sur des essais en « pente douce ». Quand des freinages durent moins longtemps et se font à des vitesses plus lentes que ceux qui sont exigés dans la norme (portant sur des essais en pente douce), les températures peuvent excéder le seuil de surchauffe des sabots de frein quand les forces exercées sur les sabots sont grandes, comme par exemple durant un serrage d'urgence des freins d'un train ou d'un serrage à fond du frein direct de locomotive.

Rapport no LP 133/07Note de bas de page 6 du laboratoire du BST

On a demandé au laboratoire du BST de réaliser des simulations dynamiques à partir des données des CEL des deux trains. Si l'on suppose que les circuits de freinage à air des deux trains, soit le train impliqué dans l'accident et le train de contrôle, dont la descente a été réussie, étaient alimentés à la pression voulue et en bon état de fonctionnement, on peut tirer les conclusions suivantes :

Transports Canada

Transports Canada a inspecté des wagons similaires à ceux qui ont été impliqués dans le déraillement et a vérifié le fonctionnement de leurs robinets de retenue. On a constaté que 48 p. 100 des cylindres de frein ne maintenaient pas la pression pendant 15 minutes, durée nécessaire pour descendre la côte Warfield (voir le paragraphe intitulé Mesures de sécurité prises).

Analyse

La fumée qui s'élevait du train durant la descente, l'aspect bleui des roues des locomotives et de deux wagons de la rame et l'état des semelles de frein que l'on a constaté après l'accident, indiquent que certaines des semelles de frein ont été soumises à un serrage intensif pendant la descente. Les tests réalisés sur des wagons similaires dont le degré d'usure était similaire indiquent que la capacité de freinage des wagons impliqués dans l'accident était vraisemblablement conforme aux normes de l'AAR. En outre, l'examen des dossiers d'entretien n'a fait ressortir aucun défaut qui aurait pu contribuer au déraillement. Les dossiers d'entretien mécanique des locomotives, les essais et l'inspection des locomotives qu'on a faits après l'accident, et l'examen des données du consignateur d'événements de locomotive indiquent que l'équipement de frein à air et le FR des deux locomotives étaient en bon état de fonctionnement.

Les observations faites sur place ont indiqué que la locomotive et les trois premiers wagons-trémies couverts ont fourni un effort de freinage intensif, mais que les huit wagons qui suivaient n'ont montré que des signes intermittents de freinage intensif. Pour un train dont le circuit de freinage est alimenté à la pression voulue et est en bon état de fonctionnement, et qui serait soumis aux mêmes conditions de freinage, on s'attendrait à un effort de freinage uniforme sur toute la longueur du train. Après l'accident, le BST a demandé à Wabtec de l'aider à déterminer si le système de frein à air du train a eu assez de temps pour se réalimenter entre un desserrage suivant une réduction de 22 lb/po² de la pression de la conduite générale et un nouveau serrage des freins, survenu 3 minutes et 4 secondes plus tard, au moment où le train commençait à descendre la pente. Wabtec a procédé à une simulation de cet événement et a conclu que, si tous les robinets d'arrêt sont à la position voulue et si le système de freins à air du train est en bon état de fonctionnement, il y a suffisamment de temps pour que le circuit de freins se réalimente complètement.

Durant l'examen sur place après l'accident, les enquêteurs du BST ont constaté que tous les robinets d'arrêt étaient à la position voulue; toutefois, des éléments de preuve indiquent qu'il y a eu un freinage vigoureux mais non uniforme du train, ce qui suggère que le fonctionnement du circuit de freinage à air n'a pas été optimal. Dans un train, le système de frein à air est alimenté par la source d'alimentation en air (locomotives), laquelle pompe l'air de l'avant vers l'arrière. Bien que les tests de Wabtec aient démontré qu'il y avait suffisamment de temps pour réalimenter le circuit dans des circonstances idéales, les observations faites après l'accident indiquent que le circuit de freinage du train n'était peut-être pas complètement réalimenté au moment où le train a amorcé la descente. Il a été impossible de déterminer les raisons de cet état de fait.

Étant donné que la pression de la conduite générale du train était de 100 lb/po², les pressions générées par le serrage d'urgence dans les cylindres de frein auraient été d'environ 87 lb/po². Compte tenu des variations de la pression des cylindres de frein qu'on a mesurées sur trois des wagons 24 heures après l'accident, on considère qu'il ne serait pas inhabituel que les pressions des cylindres de frein diminuent considérablement au cours de cette période.

La spécification no M-926 de 1964 de l'AAR, en l'occurrence la norme qui régit la fabrication des semelles de frein composites à haut coefficient de frottement, tient compte du freinage de wagons de 100 tonnes dont le poids brut sur rail (PBR) est de 263 000 livres pendant une période de 45 minutes. La spécification exige que les semelles de frein soient exposées à une force nette de 1 450 livres et qu'elles produisent un effort retardateur minimal de 400 livres. Toutefois, les wagons d'aujourd'hui ont un PBR de 315 000 lbNote de bas de page 7. Les normes actuelles relatives aux performances des semelles de frein en matière composite sont peut-être inadéquates, en ce sens qu'elles ne permettent pas de s'assurer que les semelles de frein peuvent effectivement résister aux efforts de freinage soutenus qui sont nécessaires pour faire ralentir les wagons plus lourds actuels lorsque ceux-ci descendent des longues pentes en territoire montagneux, et plus particulièrement dans des conditions de freinage d'urgence.

Le reste de l'analyse portera principalement sur les pratiques de la compagnie de chemin de fer relativement à la conduite sûre des trains qui descendent la côte Warfield, et sur les décisions qui ont été prises concernant la conduite du train.

Le déraillement s'est produit lorsque le train à la dérive a atteint une vitesse à laquelle il lui était impossible de franchir les courbes raides en toute sécurité. Les données du consignateur d'événements de locomotive ont indiqué qu'un peu avant de dérailler, le train roulait à 42 mi/h, soit 32 mi/h de plus que la vitesse maximale autorisée (10 mi/h) et 23 mi/h de plus que la vitesse de conception maximale de la courbe (19 mi/h). Les dommages relevés à l'extrémité des traverses, l'absence de dommages sur les traverses entre les rails et les marques relevées sur le champignon du rail au point de déraillement dénotaient un déraillement consécutif au soulèvement de roues, causé par une vitesse excessive.

La côte Warfield comporte des pentes dont la déclivité atteint 4,1 p. 100. D'après la norme de l'industrie, toute déclivité supérieure à 1,8 p. 100 est considérée comme étant une déclivité montagneuse. À la suite d'un certain nombre de dérives précédentes (y compris celles qui sont examinées dans les rapports nos R97C0147 et R01W0007 du BST), le CFCP a élaboré des consignes qui visent à permettre aux équipes de disposer d'une marge de sécurité adéquate quand elles descendent des déclivités montagneuses.

L'enquête a révélé qu'il y avait eu plusieurs écarts par rapport aux consignes d'exploitation uniformisées, lorsque le train a descendu la côte Warfield. Voici les écarts qui ont été relevés :

Le train roulait au-dessus de la vitesse recommandée quand il a passé le sommet de la côte et a entrepris sa descente. L'utilisation combinée du frein automatique, du frein direct et du frein rhéostatique à laquelle on a eu recours pour limiter la vitesse du train a causé un évanouissement dû au frottement, et a fait en sorte que le train prenne trop de vitesse pour pouvoir passer sans danger dans les courbes raides. Le mécanicien connaissait les procédures relatives à la conduite du train, mais il se peut qu'il n'ait pas saisi tout ce qui pourrait se produire si l'on n'appliquait pas à la lettre cette procédure dans les déclivités extrêmes de ce secteur montagneux.

Dans un système complexe qui met en jeu une action réciproque des humains et des machines, il est inévitable qu'on s'écarte des règles établies. C'est pourquoi bien des experts en sécurité préconisent l'application de « barrières multiples » et voudraient qu'on prévoie des moyens de défense multiples et diversifiés pour atténuer les risques d'erreurs humaines normales. Le dispositif de maintien du freinage rhéostatique est un des moyens de défense additionnels dont on a étudié l'application dans les pentes montagneuses escarpées, et qui est d'ailleurs employé par quelques compagnies de chemin de fer d'Amérique du Nord. Ce dispositif permet de se servir simultanément du FR et du freinage d'urgence.

L'examen des locomotives et des premier et troisième wagons-trémies couverts a révélé que leurs freins avaient fourni un effort de freinage intense et qu'ils étaient devenus très chauds. Sur le deuxième wagon-trémie, on a constaté que les semelles de frein avaient subi des dégradations dues à la chaleur, mais que les roues n'étaient pas bleuies, ce qui indique un effort de freinage intense, mais moindre que celui des deux wagons adjacents. En raison de la température élevée des semelles de frein qui a résulté de ce freinage, on a déterminé que l'efficacité du freinage du train a été affectée par une diminution cumulative de l'ordre de 50 à 70 p. 100 provoquée par l'évanouissement des freins dû au frottement. La température élevée au point d'interface entre les tables de roulement et les semelles de frein a résulté de la vitesse élevée du train ainsi que de la durée et l'intensité du serrage des freins.

Le FR des deux locomotives GP 38-2 était conçu pour avoir une efficacité maximale à une vitesse de 19 mi/h. Or, comme le fonctionnement du FR a été annulé avant que celui-ci ait atteint son efficacité maximale, les freins à frottement du train ont dû compenser et assumer une charge additionnelle, d'où un risque accru d'évanouissement dû au frottement et de déraillement. En outre, l'analyse en laboratoire a permis de déterminer que l'application de toute la puissance de FR combinée à la force de freinage d'urgence résiduelle aurait permis de maintenir une vitesse non fatale, même si le coefficient de friction était réduit en raison de l'évanouissement dû à la chaleur.

Une comparaison entre la conduite du train impliqué dans l'accident et celle d'un train similaire qui a descendu avec succès la côte Warfield indique qu'on aurait pu contrôler la vitesse du mouvement en respectant à la lettre les lignes directrices de la compagnie concernant la conduite des trains. La procédure recommandée de la compagnie voulait que l'on commande un serrage minimum du frein automatique et que l'on combine l'action du FR et du frein direct des locomotives, à laquelle s'ajoutent des augmentations graduelles de l'action du frein automatique.

À bord du train impliqué dans l'accident, on a essayé de faire ralentir le train après que celui-ci eut dépassé la vitesse maximale recommandée, et on a utilisé pour ce faire le frein automatique, dont l'action a été complétée par celle du frein direct des locomotives et, éventuellement, par le FR. Le non-respect des consignes établis a donc fait en sorte qu'on sollicite davantage la capacité de freinage globale du train pour en limiter la vitesse, ce qui a occasionné un évanouissement des freins dû au frottement et une diminution de la capacité de freinage de réserve.

L'examen des dossiers de la compagnie indique que le mécanicien du train impliqué dans l'accident avait été mêlé à des événements antérieurs au sujet desquels on avait dit que la conduite du train avait été déficiente. Même si la compagnie a mis au point un plan de mesures ciblées visant à corriger ces lacunes, la plupart des mesures supposaient une observation passive d'activités autres que la conduite des trains. Bien que la supervision ait fait ressortir des lacunes du mécanicien en matière de conduite des trains, les mesures de suivi n'ont pas permis de corriger complètement ces lacunes.

Après l'accident, Transports Canada a procédé à un examen des procédures et des pratiques des équipes de la Kootenay Valley Railway, et a découvert un taux élevé de défaillance des robinets de retenue, lesquels ne maintenaient pas la pression voulue dans les cylindres de frein. Toutefois, les tests réalisés par Wabtec pour le compte du BST ont fait ressortir que, même si les robinets de retenue faisaient effectivement augmenter la pression dans les cylindres de frein, les robinets de retenue perdaient de leur efficacité à mesure que le nombre de serrages augmentait. Même si des robinets de retenue bien réglés et fonctionnant correctement ont pu avoir un effet notable dans les premiers temps de la descente, les essais ont démontré que les robinets de retenue ont eu peu d'effet sur la pression des cylindres de frein lorsqu'on a commandé le serrage d'urgence des freins.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le train roulait au-dessus de la vitesse recommandée quand il a passé le sommet de la côte et a amorcé la descente. L'utilisation combinée du frein automatique, du frein direct et du frein rhéostatique à laquelle on a eu recours pour limiter la vitesse du train a causé un évanouissement dû au frottement, et a fait en sorte que le train prenne trop de vitesse pour pouvoir passer dans les courbes raides en toute sécurité.
  2. Le mécanicien connaissait les procédures relatives à la conduite du train, mais il se peut qu'il n'ait pas saisi tout ce qui pourrait se produire si l'on n'appliquait pas à la lettre cette procédure dans les déclivités extrêmes de ce secteur montagneux.
  3. On a sollicité la plus grande partie de la capacité globale de freinage du train pour contrôler sa vitesse, ce qui a occasionné un évanouissement des freins dû au frottement qui a entraîné une diminution cumulative de l'efficacité des freins de l'ordre de 50 à 70 p. 100.
  4. Comme le fonctionnement du FR a été annulé avant que celui-ci atteigne son efficacité maximale, les freins à frottement du train ont dû compenser et assumer une charge additionnelle, d'où un risque accru d'évanouissement dû au frottement et de déraillement.
  5. Bien qu'il y ait eu suffisamment de temps pour réalimenter le circuit avant que le train amorce la descente, on a relevé des indices de freinage non uniforme d'un bout à l'autre du train. Il a été impossible de déterminer les raisons de cet état de fait.
  6. Les normes actuelles relatives aux performances des semelles de frein en matière composite sont peut-être inadéquates, en ce sens qu'elles ne permettent pas de s'assurer que les semelles de frein peuvent effectivement résister aux efforts de freinage soutenus qui sont nécessaires pour ralentir les wagons plus lourds actuels lorsque ceux-ci descendent des longues pentes en territoire montagneux, et plus particulièrement dans des conditions de freinage d'urgence.

Autres faits établis

  1. Même si des robinets de retenue bien réglés et fonctionnant correctement ont pu avoir un effet notable dans les premiers temps de la descente, les essais ont démontré que les robinets de retenue ont eu peu d'effet sur la pression des cylindres de frein lorsqu'on a commandé le serrage d'urgence des freins.
  2. L'application de toute la puissance de freinage rhéostatique combinée à la force résiduelle de freinage d'urgence aurait permis de maintenir une vitesse non fatale et de prévenir le déraillement, même si l'évanouissement dû à la chaleur causait une diminution du coefficient de friction.
  3. Bien que la supervision ait fait ressortir des lacunes du mécanicien concernant la conduite des trains, les mesures de suivi n'ont pas permis de corriger complètement ses lacunes.

Mesure de sécurité prise

Le 9 mai 2007, le BST a émis un avis de sécurité ferroviaire dans lequel il était question de l'absence de dispositif de maintien du freinage rhéostatique (FR) à bord des deux locomotives GP 38-2, et on suggérait que Transports Canada détermine dans quelle mesure les chemins de fer canadiens devraient modifier ou mettre à niveau leurs locomotives plus vieilles en y installant un dispositif de maintien du frein rhéostatique, notamment pour assurer la sécurité de l'exploitation ferroviaire dans les régions montagneuses. Transports Canada a donné son adhésion à l'avis et a indiqué que le Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) évaluait la faisabilité de travaux de modification de son parc de vieilles locomotives à courant continu (CC). En date de juin 2008, le CFCP avait terminé son évaluation mais n'avait pas encore présenté son rapport à Transports Canada.

Transports Canada a émis un avis assorti d'un ordre le 4 mai 2007, après qu'une inspection eut révélé que des robinets de retenue ne permettaient pas de conserver dans les cylindres de frein la pression nécessaire pour permettre aux trains de descendre en toute sécurité la pente de 4 p. 100 qui se situe entre Warfield et Trail. L'ordre exigeait que, avant de descendre la pente située entre les points milliaires 21 et 19 de la subdivision Rossland, les équipes s'assurent que :

Par la suite, le Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) a émis un correctif intitulé « Additional Requirements Prior to Descending Warfield Hill », stipulant ce qui suit :

L'avis assorti d'un ordre a été levé le 23 avril 2008 après que Transports Canada eut examiné et évalué les mesures correctives que le CFCP avait instaurées lors de la révision de ses instructions d'exploitation concernant la côte Warfield.

Transports Canada propose qu'on modifie le Règlement relatif à l'inspection et à la sécurité des locomotives de chemin de fer de façon qu'il exige qu'une vérification du fonctionnement du frein rhéostatique soit incluse aux inspections de sécurité des locomotives, et qu'un dispositif de maintien du frein rhéostatique soit installé sur les locomotives qui, après une inspection de sécurité, sont affectées à des trains roulant dans des pentes de 2 p. 100 et plus, ou à des territoires où les déclivités sont de 2 p. 100 ou plus.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .