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Rapport d'enquête ferroviaire R16W0074

Mouvement non contrôlé de matériel ferroviaire
Chemin de fer Canadien Pacifique
Manœuvre de formation au système de télécommande de locomotive 2300
Point milliaire 109,7, subdivision de Sutherland
Saskatoon (Saskatchewan)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 27 mars 2016, vers 2 h 35, heure normale du Centre, pendant qu'elle effectuait des manœuvres au triage Sutherland à Saskatoon (Saskatchewan), la manœuvre de formation au système de télécommande de locomotive 2300 du Chemin de fer Canadien Pacifique poussait une rame de wagons jusque dans la voie F6. Lorsque la manœuvre s'est arrêtée, le wagon-trémie couvert vide EFCX 604991 s'est dételé du train à l'insu de l'équipe. Le wagon non contrôlé a traversé le triage et s'est rendu jusque sur la voie principale, à l'intérieur de la zone de marche prudente de la subdivision de Sutherland. Le wagon a parcouru environ 1 mille et a franchi 2 passages à niveau publics munis de systèmes d'avertissement automatiques avant de s'arrêter de lui-même. Il n'y a eu aucun blessé ni aucun déraillement. Aucune marchandise dangereuse n'était en cause.

1.0 Renseignements de base

Le 27 mars 2016, la manœuvre de formation (la manœuvre) au système de télécommande de locomotive (STL) 2300 du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) effectuait des manœuvres de triage à l'extrémité est du triage Sutherland du CP à Saskatoon (Saskatchewan) (figure 1). Au moment de l'événement, la manœuvre était composée de 2 locomotives qui déplaçaient 16 wagons-trémies couverts vides. La locomotive CP 4441 était réglée pour être conduite à l'aide du STL. La manœuvre mesurait environ 1000 pieds de long et pesait environ 800 tonnes.

Figure 1. Lieu de l'événement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
Lieu de l'événement

L'équipe de manœuvre se composait de 2 chefs de trains — un contremaître, qui était responsable de la coordination des activités de triage, et un aide. Chaque membre de l'équipe était muni d'un appareil de télécommande BeltpackNote de bas de page 1, à l'aide duquel l'un ou l'autre des membres de l'équipe pouvait commander la locomotive. Les 2 membres de l'équipe de manœuvre étaient qualifiés en vertu du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF), se conformaient aux normes de repos et de condition physique, et connaissaient bien le territoire, mais ils n'avaient pas encore terminé toute la formation STL.

En plus des 2 chefs de train, un moniteur de formation STL contractuel (le moniteur) se trouvait dans la cabine de la locomotive. Le moniteur accompagnait l'équipe de manœuvre pendant leur quart de travail pour vérifier si les opérations de télécommande de locomotive (loco-commande) étaient exécutées correctement. Le moniteur était un ancien employé ferroviaire qui n'avait jamais travaillé au triage Sutherland auparavant et il n'était plus qualifié en vertu du REF.

1.1 L'événement

À 23 hNote de bas de page 2 le 26 mars 2016, l'équipe de manœuvre a commencé son quart de travail par une séance de breffage avec le coordonnateur de trains adjoint (CTA) avant d'activer la zone de protection des mouvements non accompagnés (PPZ)Note de bas de page 3. Pendant la séance de breffage, le CTA a donné aux membres de l'équipe des directives sur les activités de triage qu'ils devaient effectuer à l'extrémité est du triage au cours de leur quart.

Le contremaître et son aide se trouvaient tous deux au sol pour faciliter les activités de triage. Le contremaître assurait la conduite de la manœuvre et commandait la locomotive à l'aide du STL pendant que l'aide manœuvrait les aiguillages à l'extrémité est de la voie d'accès au triage F (figure 2).

Figure 2. Aménagement du triage Sutherland (Source : Chemin de fer Canadien Pacifique, avec annotations du BST)
ménagement du triage Sutherland

Vers 1 h 30 le 27 mars 2016, le train-bloc de potasse 602 du CP (train 602) qui se dirigeait vers l'est est arrivé à Sutherland sur la voie principale. Le train 602 était composé de 2 locomotives en tête et d'environ 110 wagons-trémies couverts chargés de potasse. Il pesait quelque 13 000 tonnes et mesurait environ 7500 pieds. Pour permettre à la queue du train 602 de dégager le passage à niveau de l'avenue Central au point milliaire 109,78 de la subdivision de Sutherland, l'équipe du train 602 a communiqué avec l'équipe de manœuvre pour lui demander la permission d'entrer dans la PPZ sur la voie principale à l'extrémité est du triage. Après avoir été autorisée à le faire, l'équipe du train 602 a longé le triage et a arrêté son train de sorte que les locomotives se trouvaient à l'ouest (et à l'écart) du passage à niveau de la 8th Street au point milliaire 107,26. L'équipe du train 602 a immobilisé le train sur la voie principale et a dételé les locomotives en vue de les conduire à l'atelier.

Vers 2 h 20, l'équipe de manœuvre a fait marche arrière à l'extrémité est de la voie F2. La manœuvre s'est attelée à une rame de 16 wagons-trémies couverts vides qui devaient être déplacés vers d'autres voies, puis les freins à main sur les wagons de la rame ont été desserrés. Conformément à la pratique courante, les freins à air des 16 wagons avaient été purgés auparavant, de sorte que seuls les freins de locomotive pouvaient contrôler la manœuvre. Entre-temps, l'aide avait marché le long de la voie d'accès et avait orienté l'aiguillage F6 est pour la voie F6.

Le contremaître a alors étiré le mouvement. Avec les locomotives en tête du mouvement, la manœuvre s'est dirigée vers l'est pour rouler sur la voie d'accès jusqu'à ce que tous les wagons aient dégagé l'aiguillage F2 est. L'aide a ensuite orienté l'aiguillage F2 est pour la voie d'accès, et la manœuvre s'est mise en marche arrière en direction de la voie F6, où l'équipe avait l'intention de laisser le wagon de queue de la manœuvre (le 16e), le wagon-trémie couvert EFCX 604991. L'aide est demeuré au sol près des aiguillages à l'extrémité est du triage F.

À 2 h 28 min 31 s, la manœuvre s'est arrêtée alors que le wagon EFCX 604991 se trouvait sur la voie F6 et que le reste de la manœuvre occupait l'extrémité est de la voie d'accès au triage F. Le contremaître a serré le frein à main du wagon EFCX 604991, a effectué un essai de l'efficacité du frein à main, puis a soulevé le levier de dételage pour que le wagon puisse se dételer de la manœuvre. Au même moment, l'équipe du train 602 a communiqué avec le contremaître par radio pour lui demander la permission d'entrer dans la PPZ à l'extrémité est de la voie d'accès au triage F en marche haut le pied (c.-à-d., avec seulement les 2 locomotives de tête) pour se rendre à la voie d'atelier afin d'y stationner les locomotives.

Le contremaître savait qu'une fois que le train 602 aurait dégagé la voie d'accès, l'arrivée d'aucun autre train qui pourrait interrompre ses activités n'était prévue jusqu'à la fin du quart de travail. Le contremaître a décidé de faire reculer toute la manœuvre jusque dans la voie F6 pour permettre aux locomotives du train 602 de se rendre à la voie d'atelier. Le contremaître a alors desserré le frein à main du wagon EFCX 604991 et est demeuré à l'extrémité est de la voie F6. À 2 h 31 min 18 s, la manœuvre a fait marche arrière jusque dans la voie F6, atteignant une vitesse de 10 mi/h. À 2 h 33 min 58 s, la manœuvre s'est arrêtée après avoir parcouru 935 pieds.

Lorsque la manœuvre s'est arrêtée, le wagon EFCX 604991, dont la mâchoire était déjà ouverte, s'est dételé et s'est mis à rouler de façon non contrôlée sur toute la longueur de la voie F6, a franchi l'aiguillage F6 ouest qui était orienté en sens inverse, a roulé le long de la voie d'accès à l'extrémité ouest du triage F et est sorti du triage pour s'engager sur la voie principale. Ni l'équipe de manœuvre ni le CTA, qui se trouvait dans le bureau de triage, ne savait qu'un wagon s'était dételé de la rame de 16 wagons sur la voie F6.

Peu de temps après, une autre équipe qui était arrivée au bureau de triage Sutherland à bord d'un véhicule routier a remarqué qu'un wagon non contrôlé roulait en direction ouest sur la voie principale. L'équipe a immédiatement signalé la situation au CTA, qui a appelé l'équipe de manœuvre pour lui laisser savoir qu'un wagon était sorti du triage. Le CTA a demandé à l'équipe de manœuvre de se diriger vers l'ouest pour aller récupérer le wagon. L'équipe de manœuvre a serré le nombre de freins à main nécessaires sur les 15 autres wagons sur la voie F6, a dételé les locomotives et s'est rendue en marche haut le pied jusqu'à la voie F2, où il n'y avait aucun wagon, pour se rendre à l'extrémité ouest du triage. Une fois rendue à l'extrémité ouest du triage, l'équipe de manœuvre a remarqué que le wagon EFCX 604991 ne faisait plus partie de la rame de wagons laissés sur la voie F6 et s'est rendu compte que c'était ce wagon qui s'était mis à rouler de façon non contrôlée.

Comme il n'y avait aucun dérailleur en place pour protéger la voie principale, le wagon a roulé de façon non contrôlée sur une distance d'environ 1 mille et a franchi 2 passages à niveau publics, celui de l'avenue Central (point milliaire 109,78) et celui de la 115th Street (point milliaire 109,88), qui étaient tous deux munis de systèmes d'avertissement de passage à niveau. Le wagon s'est arrêté au point milliaire 110,5 sur la voie principale, à l'intérieur de la zone de marche prudenteNote de bas de page 4. Il n'y a eu aucun blessé ni aucun déraillement. Aucune marchandise dangereuse n'était en cause.

Au moment de l'événement, le ciel était dégagé, les vents soufflaient du nord-est à 10 km/h, et la température était d'environ −4 °C.

1.2 Déclenchement du système d'avertissement et protection du passage à niveau

En ce qui a trait au temps d'annonce d'approche et aux termes du Règlement sur les passages à niveau (novembre 2014) (RPN) de Transports Canada (TC), les Normes sur les passages à niveau (juillet 2014) (NPN) de TC stipulent ce qui suit :

16. CIRCUIT

16.1 Temps d'annonce d'approche

16.1.1  La durée durant laquelle le système d'avertissement doit fonctionner, avant l'arrivée du matériel ferroviaire à la surface de croisement doit être la plus élevée de l'une ou l'autre des valeurs suivantes :

  1. vingt (20) secondes, à moins que la distance de dégagement du passage à niveau […] est supérieure à 11 m (35 pi), sinon augmenter ce délai de 20 secondes d'une seconde pour chaque 3 m (10 pi) supplémentaire ou fraction de 10 pi;
  2. le temps de passage du véhicule type […];
  3. le temps de passage des piétons, des cyclistes et des personnes utilisant un appareil fonctionnel […];
  4. le délai de descente des barrières en plus du temps que met la lisse de la barrière pour descendre en position, plus cinq (5) secondes;
  5. le temps d'annonce minimum requis pour l'interconnexion des feux de circulation […];
  6. le temps que met le véhicule type pour parcourir la distance de visibilité d'arrêt et franchir complètement la distance de dégagementNote de bas de page 5.

La mise en application des exigences prévues dans le RPN et les NPN se fait de façon graduelle échelonnée sur 7 ans. Certaines exigences pourraient s'appliquer plus tôt si une modification physique est apportée au passage à niveau. Par exemple, les exigences relatives aux systèmes d'avertissement de passage à niveau n'entreront en vigueur que le 28 novembre 2021, ou plus tôt si des modifications sont apportées au passage à niveau. Pendant et après la période de mise en application graduelle, tous les passages à niveau munis de systèmes d'avertissement sont régis par le plan de conception spécifique de chaque passage à niveau, qui doit être conservé à l'emplacement du passage à niveau tel que l'exige le RPN en ces termes :

Plan de conception – compagnie de chemin de fer

  1. (1) Le plan de conception du système d'avertissement d'un passage à niveau doit être conservé à l'emplacement de celui-ci et indiquer clairement les renseignements suivants :
    1. la configuration des composants du système d'avertissement;
    2. le schéma de l'ensemble des circuits et de l'équipement de signalisation;
    3. les paramètres relatifs au fonctionnement des composants du système d'avertissement;
    4. le type de feux, y compris l'angle de déflexion des lentilles, le cas échéant, et les coordonnées d'alignement des dispositifs lumineux;
    5. les détails relatifs à toute interconnexion avec un dispositif de contrôle de la circulation.

Entretien du système d'avertissement

(2) Le système d'avertissement doit être conforme au plan de conception et être entretenu conformément à la section 17.1 des Normes sur les passages à niveau.

Plan de conception – installation ou modification

(3) Lorsqu'un composant du système d'avertissement est modifié ou installé, un plan de conception reflétant la modification ou l'installation doit être préparé et être laissé à l'emplacement du passage à niveau jusqu'à ce qu'il soit remplacé par un plan de conception réviséNote de bas de page 6.

1.2.1 Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada

La règle 103(b) du REF stipule ce qui suit :

Lorsque prescrit par une instruction spéciale ou lorsque des voitures ou des wagons non précédés par une locomotive, un chasse-neige ou autre matériel roulant équipé d'un sifflet et d'un phare avant, sont déplacés sur un passage à niveau public, un membre de l'équipe doit protéger manuellement le passage à niveau public jusqu'à ce qu'il soit entièrement occupéNote de bas de page 7.

1.3 Renseignements sur la subdivision

La subdivision de Sutherland du CP est une voie principale simple qui s'étend de Wynyard (Saskatchewan), point milliaire 0,0, jusqu'à Saskatoon, point milliaire 113,5. La circulation des trains est régie par la régulation de l'occupation de la voie (ROV), tel que prévu par le REF, et elle est supervisée par un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) qui se trouve à Calgary (Alberta). Un territoire ROV est un territoire non signalisé (c.-à-d., une zone exempte de signalisation). Le trafic ferroviaire aux passages à niveau de l'avenue Central et de la 115th Street est d'environ 7 trains par jour.

1.3.1 Passage à niveau de l'avenue Central

L'avenue Central est une route à 4 voies sur un axe nord-sud et sur laquelle la limite de vitesse est de 50 km/h. Dans le secteur, la limite de vitesse des trains est de 10 mi/h. Le trafic routier sur l'avenue Central est de 16 000 véhicules en moyenne par jour pour un produit vectoriel (nombre de trains par jour multiplié par le nombre quotidien de véhicules franchissant un passage à niveau) de 112 000.

La voie principale et la voie d'accès au triage croisent l'avenue Central à un angle de 42 degrés. Les approches routières ont une légère pente ascendante en direction du passage à niveau. Le passage à niveau est protégé par des croix de Saint-André standard et un système d'avertissement qui se compose de feux clignotants, d'une sonnerie, de barrières et de feux clignotants en porte-à-faux. Sur la voie principale, le système d'avertissement était conçu pour assurer un temps d'annonce d'approche de 37 secondes pour des trains roulant à 10 mi/h.

Pour éviter le plus possible que les trains qui effectuent des manœuvres dans le triage dérangent le public, le passage à niveau de l'avenue Central était conçu avec un temps d'approche court pour la voie d'accès. L'approche courte retardait le déclenchement du système d'avertissement jusqu'à ce qu'un train se trouve à 240 pieds du passage à niveau, et était conçue pour assurer un temps d'annonce d'approche de 32 secondes pour des trains roulant à 5 mi/h. Cependant, la limite de vitesse sur la voie d'accès était de 15 mi/h. Pour veiller à ce que le temps d'annonce d'approche au passage à niveau de l'avenue Central soit suffisant pour un mouvement circulant sur la voie d'accès, la section 9.4 de l'indicateur 32 du CP pour la subdivision de Sutherland, pour le passage à niveau de l'avenue Central (point milliaire 109,78), précisait ce qui suit [traduction] :

Les mouvements sur la voie d'accès ne doivent pas obstruer le passage à niveau avant que les barrières soient à l'horizontale.

Le passage à niveau de l'avenue Central répondait aux exigences relatives au plan de conception. Toutefois, les systèmes d'avertissement automatiques sont généralement conçus selon l'usage prévu du passage à niveau et, de ce fait, assurent un temps d'annonce d'approche suffisant en fonction des vitesses prévues des véhicules routiers et du matériel ferroviaire. Par conséquent, bien que le passage à niveau ait répondu aux exigences réglementaires, il n'était pas conçu pour protéger contre les mouvements non contrôlés qui s'engagent sur la voie principale à partir du triage Sutherland.

Les données téléchargées de la guérite du passage à niveau de l'avenue Central ont été examinées. L'examen a permis d'établir que le système d'avertissement s'était déclenché à 2 h 35 min 55 s et que le mouvement non contrôlé occupait le passage à niveau à 2 h 36 min 5 s (soit 10 secondes plus tard).

Après l'événement, le cycle du système d'avertissement du passage à niveau a été enregistré sur vidéo pour permettre l'observation de la position des barrières pendant la séquence de déclenchement du système (figure 3). Ceci a permis d'établir que les barrières n'auraient pas été complètement à l'horizontale lorsque le wagon, qui roulait de façon non contrôlée, s'est engagé sur le passage à niveau 10 secondes après le déclenchement du système d'avertissement.

Figure 3. Photo montrant l'angle des barrières sur l'avenue Central 10 secondes après le déclenchement du système d'avertissement du passage à niveau
Photo montrant l'angle des barrières sur l'avenue Central 10 secondes après le déclenchement du système d'avertissement du passage à niveau

1.3.2 Passage à niveau de la 115th Street

La 115th Street est une route à 2 voies sur un axe est-ouest et sur laquelle la limite de vitesse est de 50 km/h. Dans le secteur, la limite de vitesse des trains est de 30 mi/h. Le trafic routier est de 2740 véhicules en moyenne par jour pour un produit vectoriel de 19 180.

La voie principale croise la 115th Street à un angle de 45 degrés. Les approches routières ont une légère pente ascendante en direction du passage à niveau. Le passage à niveau est protégé par des croix de Saint-André standard et un système d'avertissement qui se compose de feux clignotants, d'une sonnerie et de feux clignotants en porte-à-faux. Des arbres et des édifices résidentiels le long de l'emprise ferroviaire obstruent la voie ferrée de la vue des conducteurs sur la route en direction est et en direction ouest.

Aucune donnée de la guérite du passage à niveau de la 115th Street n'était disponible aux fins d'examen. Toutefois, du personnel du CP qui se trouvait dans le bureau de triage (point milliaire 109,7) a déclaré avoir vu les feux du passage à niveau se déclencher.

1.4 Levier de dételage

Des attelages se trouvent aux 2 extrémités des wagons ferroviaires afin de relier les wagons entre eux. Au contact avec un autre wagon, la mâchoire d'attelage est conçue pour passer automatiquement de la position ouverte à la position fermée et verrouillée. Lorsque des mâchoires sont attelées l'une à l'autre, la mâchoire d'attelage pivote autour du pivot de mâchoire de sorte que sa face de traction s'engage avec la face de traction de la mâchoire d'attelage de l'autre wagon. Les extrémités des mâchoires rentrent ensuite dans chacun des corps d'attelage. Une fois qu'elle est entièrement rentrée, l'extrémité de la mâchoire est retenue par un verrou. Le verrou est conçu pour se loger entre l'extrémité de la mâchoire et le corps d'attelage pour empêcher l'ouverture intempestive de la mâchoire d'attelage.

Pour dételer les wagons, on ouvre manuellement les mâchoires d'attelage à l'aide d'un levier de dételage. L'employé se tient à côté du wagon pour manipuler ce levier pour ne pas avoir à se placer entre les wagons (figure 4). Lorsque l'on soulève à la main le levier de dételage, celui-ci déplace le lève-verrou d'attelage à la verticale, mouvement qui soulève le verrou et libère l'extrémité de la mâchoire d'attelage. Une autre rotation du levier de dételage force la tige du verrou à engager le déclencheur de la mâchoire d'attelage, ce qui ouvre la mâchoire.

Figure 4. Levier de dételage sur un wagon semblable (Source : Ian A. McCord)
Levier de dételage sur un wagon semblable

La protection anticheminant du lève-verrou d'attelage permet d'éviter le déverrouillage intempestif de la mâchoire d'attelage en empêchant le verrou de se déplacer vers le haut, à moins que le lève-verrou d'attelage ne soit activé par le levier de dételage. Il n'est pas possible de se servir du levier de dételage pour engager le verrou. Une fois que le verrou a été soulevé par le levier de dételage, il faut séparer les wagons et les atteler de nouveau pour verrouiller la mâchoire en place.

1.5 Utilisation de dérailleurs

Un dérailleur (figure 5) est un dispositif conçu pour faire dérailler délibérément du matériel roulant afin

Figure 5. Exemple d'un dérailleur à charnière placé entre les rails en position de déraillement
Exemple d'un dérailleur à charnière placé entre les rails en position de déraillement

Lorsqu'il est en position de déraillement, le dérailleur soulève le boudin de la roue, faisant dévier la roue latéralement pour la faire tomber du champignon du rail du côté extérieur de la voie. Un mouvement imprévu s'arrête lorsque les roues s'enlisent dans le ballast de la voie.

Il existe d'autres moyens de protection pour empêcher un mouvement non contrôlé de rouler jusque sur la voie principale ou d'obstruer une autre voie, notamment

1.5.1 Règlement concernant la sécurité de la voie

La section E du Règlement concernant la sécurité de la voie approuvé par TC, également connu sous le nom de Règlement sur la sécurité de la voie, stipule, en partie, ce qui suit :

Des dérailleurs doivent être posés où du matériel roulant laissé sur une voie autre qu'une voie principale ou qu'une voie d'évitement risque de rouler par gravité et obstruer une voie principale ou une voie d'évitementNote de bas de page 8.

1.6 Système de télécommande de locomotive

Le STL comprend les 3 éléments suivants :

  1. une ou des locomotives télécommandées;
  2. un ordinateur de commande de bord, qui est installé dans la locomotive télécommandée servant d'interface avec les commandes;
  3. une unité de commande de l'opérateur (UC), communément appelée Beltpack. L'UC est un appareil léger de télécommande qui s'attache au gilet de sécurité de l'opérateur.

Les membres de l'équipe peuvent assurer, à tour de rôle, la commande des locomotives selon les besoins (échange du signal de commande), mais un seul membre de l'équipe peut assurer la commande à la fois. L'UC est munie (sans s'y limiter) d'un sélecteur de vitesse, d'une commande de marche avant ou arrière, et d'une commande de freins qui comporte une fonction de freinage d'urgence (figure 6).

Figure 6. Unité de commande de l'opérateur (UC) (Source : Chemin de fer Canadien Pacifique; étiquettes traduites par le BST)
Unité de commande de l'opérateur (UC)

1.7 Utilisation des systèmes de télécommande de locomotive au Chemin de fer Canadien Pacifique

Par le passé, une équipe de triage était composée de 3 employés, soit un mécanicien de locomotive (ML), un contremaître de triage qui coordonnait les mouvements de triage et un aide de triage. Le contremaître et l'aide donnaient des directives de triage par radio au ML qui était aux commandes de la locomotive.

Vers la fin des années 1980, les opérations de loco-commande ont commencé au Canada. TC a approuvé l'utilisation de cette technologie pour les manœuvres de triage et les activités de triage à butte conformément au REF. L'introduction des opérations de loco-commande a éliminé le rôle du ML pour les manœuvres de triage. La commande de la locomotive est devenue la responsabilité du contremaître de triage et de l'aide de triage, qui étaient habituellement des chefs de train qualifiés.

Au début des années 1990, le CP a lancé, pour la première fois, des opérations de loco-commande à la plupart de ses grands terminaux au Canada et aux États-Unis. Au milieu des années 2000, le CP a commencé à délaisser les opérations de loco-commande à cause, surtout, de problèmes de fiabilité à l'époque. En 2011, les opérations de loco-commande ont été abandonnées au triage Sutherland. Depuis lors, la fiabilité de cette technologie s'est améliorée.

En 2015, le CP a repris les opérations de loco-commande à travers le Canada pour les manœuvres à l'intérieur des triages et sur les embranchements industriels qui se trouvaient habituellement à 20 milles tout au plus des triages du CP. Les équipes de manœuvre en loco-commande se composaient de 2 chefs de train qualifiés en vertu du règlement et qui avaient également terminé la formation STL.

Bien que la vitesse des manœuvres de triage en loco-commande ait été limitée à 15 mi/h, il n'y avait aucune restriction à l'égard du tonnage ou de la longueur. Au moment de l'événement, le CP avait repris les opérations de loco-commande ou prévoyait le faire à 15 endroits, y compris au triage Sutherland. Le CP prévoit faire un usage plus répandu des opérations de loco-commande à travers le pays dans le but de réduire les coûts d'exploitation tout en améliorant la sécurité et l'efficacité (annexe A).

1.8 Formation du Chemin de fer Canadien Pacifique sur les systèmes de télécommande de locomotive

Au CP, la formation STL ne fait pas partie du programme de formation des chefs de train. Avec la reprise des opérations de loco-commande, la formation était offerte localement et était donnée par un agent contractuel. Les stagiaires étaient déjà des chefs de train qualifiés. Tout chef de train qui avait été qualifié en tant qu'opérateur de loco-commande antérieurement devait recevoir de nouveau la formation.

La formation STL consistait en 1 semaine de formation théorique en classe suivie de 2 semaines de formation pratique sous la surveillance de 2 moniteurs STL à l'emploi d'une entreprise contractuelle. Une partie de la formation théorique comprenait des mouvements à l'aide du STL effectués dans une zone éloignée du triage où les stagiaires pouvaient se pratiquer à utiliser le STL. La formation visait à enseigner aux employés comment

Au triage Sutherland, une fois la partie théorique de la formation terminée, les nouveaux opérateurs de loco-commande étaient affectés à une manœuvre de formation STL en cours d'emploi qui remplaçait une manœuvre de triage normale. Ce volet de formation pratique permettait aux stagiaires de mettre leurs connaissances en pratique en effectuant des travaux de triage normaux en compagnie de 2 moniteurs contractuels qui les accompagnaient pour toute la durée de la formation pratique. Les moniteurs STL étaient surtout des ML à la retraite. Les moniteurs n'étaient pas qualifiés en vertu du REF par la compagnie ferroviaire pour laquelle ils donnaient de la formation, mais chaque moniteur participait au programme e-RAILSAFENote de bas de page 9 . Les moniteurs devaient fournir des rapports d'étape et signer pour l'obtention de la qualification, de pair avec un superviseur local du CP. Après avoir terminé leur formation pratique, les employés étaient considérés comme ayant reçu la formation STL et commençaient à travailler à ce titre.

1.9 Formation des membres de l'équipe de manœuvre

Le 6 juillet 2015, les membres de l'équipe de manœuvre ont tous deux commencé leur formation de chef de train.

Le 7 janvier 2016, l'aide s'est qualifié en tant que chef de train après avoir terminé 90 parcours de formation. Une fois l'aide qualifié, son nom a figuré sur la liste de réserve pendant environ 3 jours puis l'aide a commencé à travailler dans le triage au sein d'une équipe de triage de 3 personnes, qui comprenait également un ML. Ceci lui a donné la possibilité de recevoir des conseils d'un membre d'équipe plus chevronné au besoin.

Le 27 janvier 2016, le contremaître s'est qualifié en tant que chef de train après avoir terminé 75 parcours de formation. Une fois le contremaître qualifié, son nom a figuré sur la liste de réserve pendant 5 jours puis le contremaître s'est vu confier un poste dans le triage à titre de contremaître et d'aide au sein d'une équipe de triage de 3 personnes, qui comprenait également un ML. Ceci lui a donné la possibilité de recevoir des conseils d'un membre d'équipe plus chevronné au besoin.

Le 29 février 2016, l'équipe de manœuvre a commencé la partie théorique de sa formation STL. Le 21 mars 2016, après que les membres de l'équipe ont effectué 2 semaines de formation STL pratique (sur le terrain), la compagnie a décidé qu'ils avaient besoin d'une semaine de plus de formation pratique en compagnie d'un moniteur qui prenait place dans la cabine de la locomotive. L'équipe de manœuvre était censée terminer cette semaine additionnelle de formation STL pratique le 28 mars 2016.

En tant qu'employés nouvellement qualifiés, les 2 membres de l'équipe portaient des gilets verts lorsqu'ils étaient en serviceNote de bas de page 10.

1.10 Renseignements sur le triage Sutherland

Le triage Sutherland est situé au point milliaire 109,7 de la subdivision de Sutherland, dans un quartier de banlieue, 3 milles à l'est de Saskatoon. À l'extrémité est du triage, il y a une pente qui atteint son sommet dans les environs du point milliaire 109,05. À partir du sommet, le terrain accuse une pente descendante vers l'ouest d'environ 0,25 % en moyenne, dont la pente la plus prononcée (0,40 %) se trouve près de l'aiguillage ouest de triage (point milliaire 109,83).

En raison de la pente, l'extrémité ouest des voies C1 à C5 et des voies G5 à G7, qui servent surtout à l'entreposage de wagons, est protégée à l'aide de 6 dérailleurs à charnière. Toutefois, à l'extrémité ouest la plus basse du triage, la voie D1, l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F, et les voies F1 à F13 et G1 à G4, qui servent principalement aux activités de triage, ne sont pas munies de dérailleurs.

1.10.1 Équipes au triage Sutherland

En tout, 77 employés d'exploitation (chefs de train et ML) étaient affectés au triage Sutherland.

En janvier 2016, le CP a réduit le nombre d'équipes de triage, passant de 3 équipes de 3 personnes par jour à 2 équipes de 3 personnes par jour. Bien que le volume de trafic soit demeuré sensiblement le même au triage Sutherland pendant ce temps, pour alléger la charge de travail liée aux manœuvres de triage, les wagons étaient agencés de façon plus stratégique aux autres gares de triage. L'agencement des wagons ayant été amélioré, le personnel moins nombreux effectuait le travail nécessaire grâce à l'efficacité accrue des manœuvres sans freins à air et au recours aux heures supplémentaires au besoin.

En mars 2016, le CP a entrepris la formation STL pour les équipes de triage et a réinstauré l'usage de 3 équipes par jour pour la durée de la formation STL. Toutefois, chaque équipe de loco-commande était composée de 2 stagiaires accompagnés de 2 moniteurs. Le CP avait prévu former 16 employés pour les opérations de loco-commande. De ces 16 employés, 11 comptaient moins de 18 mois d'expérience opérationnelle. Les employés qui n'avaient pas reçu la formation STL ne seraient pas autorisés à travailler en tant qu'opérateur de loco-commande. Une fois la formation des équipes de loco-commande terminée, le CP avait l'intention de passer de nouveau à 2 équipes de triage par jour, chaque équipe étant composée de 2 chefs de train qualifiés.

Deux des équipes venaient tout juste de terminer la formation STL la semaine précédant l'événement et travaillaient des quarts normaux de triage à l'aide du STL. La troisième équipe était l'équipe de manœuvre en cause dans l'événement. L'équipe de manœuvre était encore en formation et était censée terminer sa formation à la fin de son quart de travail le lendemain de l'événement (28 mars 2016).

Chaque semaine, les affectations locales étaient affichées aux fins de postulation. Les postes étaient attribués aux employés ayant le plus de séniorité parmi ceux qui avaient postulé. Certains postes étaient plus populaires que d'autres en raison du taux de rémunération, des journées de congé et des heures de travail. En général, les quarts de travail en soirée et de nuit étaient les moins populaires. Les postes de triage étaient considérés comme étant les moins favorables parce qu'ils sont les moins bien rémunérés.

Lorsque personne ne postulait pour un poste en particulier, le poste était normalement attribué à l'employé ayant le moins de séniorité. Ainsi, il n'était pas rare que les 2 employés ayant le moins d'expérience au terminal soient appelés à travailler ensemble pour effectuer des manœuvres de triage, surtout durant des quarts en soirée et de nuit. Dans l'événement à l'étude, l'équipe de manœuvre était composée des 2 employés ayant le moins de séniorité et le moins d'expérience de tous les employés d'exploitation au triage Sutherland.

À titre de comparaison, les compagnies dans d'autres secteurs du transport, tels que l'aviation, ont des politiques en place pour atténuer le risque que 2 opérateurs peu expérimentés travaillent ensembleNote de bas de page 11.

1.11 Changements opérationnels au triage Sutherland

Au début de 2016, le CP a mis en œuvre un certain nombre de changements opérationnels au triage Sutherland, y compris

1.11.1 Manœuvres sans freins à air

Jusqu'en janvier 2016, beaucoup de manœuvres au triage Sutherland étaient effectuées en utilisant les freins automatiques du train (c.-à-d., avec freins à air). Il incombait à l'équipe de décider d'utiliser les freins à air ou non. En janvier 2016, en vue d'accélérer les activités de triage, le CP a adopté une pratique locale exigeant que les manœuvres au triage Sutherland soient effectuées sans utilisation des freins automatiques du train (c.-à-d., sans freins à air) dans la plupart des circonstances.

Lors des manœuvres sans freins à air, les wagons sont dételés manuellement puis « manœuvrés par lancement » (c.-à-d., poussés et séparés) et ils roulent sur leur propre élan jusqu'aux voies, normalement à une faible vitesse d'environ 4 mi/h ou moins. Pour manœuvrer par lancement en toute sécurité, le ou les premiers wagons sur chaque voie doivent être immobilisés à l'aide d'un nombre suffisant de freins à main avant que d'autres wagons y soient manœuvrés par lancement. Pour déterminer le nombre suffisant de freins à main, l'équipe doit tenir compte du nombre total de wagons qui seront manœuvrés sur la voie par lancement. Le nombre de freins à main serrés n'est pas consigné, et rien n'exige qu'il le soit. Les wagons qui sont manœuvrés par lancement s'arrêtent généralement lorsqu'ils entrent en contact avec le ou les wagons déjà immobilisés et s'y attellent.

D'autre part, lors des manœuvres avec freins à air, chaque wagon doit être poussé jusqu'à ce qu'il s'arrête complètement, car dès qu'un wagon en mouvement se sépare des autres, il se produit un serrage d'urgence des freins au moment où les conduites d'air se séparent.

1.11.2 Reprise des opérations de télécommande de locomotive

Au début de mars 2016, les opérations de loco-commande ont repris au triage Sutherland.

Le CP a affiché un bulletin pour annoncer l'ouverture de 6 postes de formation STL. Puisque seulement 3 employés chevronnés ont posé leur candidature pour ces postes, 3 autres employés ayant le moins de séniorité ont été affectés aux autres postes.

Les 6 employés ont alors reçu de la formation STL. Après 3 semaines de formation, 2 équipes se sont qualifiées pour la loco-commande et ont commencé à effectuer des opérations normales de loco-commande. La troisième équipe (l'équipe de manœuvre en cause dans l'événement) a reçu une semaine additionnelle de formation pratique au cours de laquelle 1 moniteur prendrait place dans la cabine de la locomotive.

1.11.3 Instauration d'une zone de protection des mouvements non accompagnés au triage Sutherland

Le 2 mars 2016, le CP a diffusé le bulletin d'exploitation no SSA-012-166 à l'intention de tous les employés d'exploitation, du service mécanique et de l'ingénierie. Le bulletin établissait pour la première fois une PPZ au triage Sutherland à compter du 7 mars 2016. La PPZ allait du passage à niveau de la 8th Street (point milliaire 107,26) sur la voie principale jusqu'au point d'obstruction à l'extrémité est des voies F1 à F13 et des voies G1 à G6 (figure 2). Le bulletin comprenait tous les détails et toutes les instructions relatives à l'utilisation de la PPZ et précisait ce qui suit :

Les mouvements devant se déplacer à l'intérieur de la PPZ devaient demander la permission à l'équipe de loco-commande avant d'entrer dans la PPZ et devaient suivre les directives de l'équipe de manœuvre.

1.12 Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire

Le 1er avril 2015, le Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (Règlement sur le SGS) est entré en vigueur et a remplacé le Règlement de 2001 sur le SGS. Bon nombre des modifications contenues dans le Règlement de 2015 sur le SGS découlaient des recommandations issues de l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire de 2007et de l'étude de 2008 sur la sécurité ferroviaire du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités.

Aux termes du règlement, les compagnies ferroviaires de compétence fédérale doivent élaborer et mettre en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS), créer un index de tous les processus requis, maintenir des dossiers, informer le ministre de tout changement qu'elles se proposent d'apporter à leurs activités, et soumettre au ministre toute la documentation liée à leur SGS, sur demande.

Le Règlement sur le SGS exige également que la compagnie élabore et mette en œuvre un processus d'évaluation des risques (annexe B). Les paragraphes 5(f) et 15(1) du Règlement sur le SGS stipulent notamment que la compagnie de chemin de fer doit effectuer une évaluation des risques lorsqu'elle se propose d'apporter un changement à son exploitation ferroviaire qui pourrait avoir une incidence sur la sécurité du public ou du personnel ou sur la protection des biens et de l'environnement.

De tels changements pourraient comprendre, mais sans s'y limiter

Le règlement exige que l'évaluation des risques cerne les risques pour lesquels des mesures correctives s'imposent ainsi que les mesures correctives prises.

Les paragraphes 5(k) et 28(1) du Règlement sur le SGS stipulent notamment que la compagnie de chemin de fer doit avoir un processus à l'égard de l'établissement des horaires. Le processus décrit dans le règlement exige que la compagnie applique les principes de la science de la fatigue lorsqu'elle établit les horaires de ses employés d'exploitation. Rien n'exige qu'on tienne compte de l'expérience des employés qui pourraient être jumelés pour effectuer un quart de travail.

Les articles 25 à 27 du Règlement sur le SGS exigent que la compagnie de chemin de fer ait en place un processus pour gérer les connaissances. La compagnie de chemin de fer doit dresser une liste prévoyant

Le SGS de la compagnie de chemin de fer doit également comprendre

Au chapitre de la gestion des connaissances, le CP avait dressé une liste détaillée des fonctions essentielles pour les ML et les chefs de train, et avait un processus pour s'assurer et vérifier que ces employés possédaient les compétences et les qualifications requises pour exercer leurs fonctions essentielles à l'exploitation ferroviaire en toute sécurité. Toutefois, le CP n'avait pas une telle liste ni un tel processus pour les opérateurs de loco-commande et les activités Beltpack connexes. Bien que le CP ait effectué des contrôles d'efficacité des opérations de loco-commande pour s'assurer que les employés avaient les compétences, les connaissances et les qualifications voulues pour exercer leurs fonctions en toute sécurité, le CP n'estimait pas la loco-commande comme étant une fonction essentielle, de sorte que cette activité ne figurait pas sur le plan de gestion des connaissances du SGS du CP.

1.12.1 Guide de mise en place et d'amélioration des systèmes de gestion de la sécurité ferroviaire

En 2010, en vue d'aider les compagnies de chemin de fer à mettre en œuvre les SGS, TC a élaboré un document d'orientation intitulé Systèmes de gestion de la sécurité ferroviaire – Guide : Guide de mise en place et d'amélioration des systèmes de gestion de la sécurité ferroviaire (TP 15058F).

Le guide traite de la nécessité de consigner les évaluations des risques, y compris les stratégies de contrôle mises en œuvre, et souligne que les compagnies doivent analyser toute nouvelle activité et tout changement important apporté à leur exploitation. En outre, le guide précise qu'une analyse complète des activités existantes n'est pas nécessaire à condition que les stratégies d'atténuation du risque actuelles soient consignées. Le guide stipule également ce qui suit :

Pour les activités actuelles, bon nombre des risques ont déjà été examinés, et des stratégies de contrôle du risque font partie des règles, normes, procédures et pratiques d'exploitation du chemin de fer. Dans ce cas, le processus d'évaluation des risques fait ressortir cette relation et se concentre ensuite sur les résultats des enquêtes sur les accidents et incidents, les analyses des données sur la sécurité, le suivi des plaintes, les inspections et les vérifications pour que le risque soit réduit à un niveau acceptable. Cette analyse devrait signaler aux compagnies de chemin de fer les domaines où elles pourraient prendre des initiatives qui dépassent leurs pratiques actuelles en vue d'améliorer leur rendement global en matière de sécuritéNote de bas de page 14.

1.13 Évaluation des risques pour les opérations de télécommande de locomotive et pour la zone de protection des mouvements non accompagnés au triage Sutherland

Conformément au Règlement sur le SGS, le CP a un plan SGS en place et effectue des évaluations des risques lorsqu'il apporte des changements à son exploitation.

À partir de janvier 2016, le CP a apporté plusieurs changements opérationnels au triage Sutherland. À cause de ces changements opérationnels, le CP a effectué une évaluation combinée des risques qui portait à la fois sur les opérations de loco-commande et sur l'instauration d'une PPZ. L'évaluation combinée des risques a été menée par un surintendant et 7 autres participants dont un ML, un consultant qui prenait part à la mise en application du STL et à la formation connexe, et un certain nombre de cadres de l'exploitation, de l'ingénierie et du service mécanique. L'évaluation des risques n'a pas tenu compte des répercussions de la réduction du nombre d'équipes de train ni du changement dans la pratique locale qui consistait à effectuer les manœuvres principalement sans freins à air.

L'évaluation des risques a cerné un certain nombre de dangers possibles liés aux changements proposés, dont 1 était une surcharge de tâches pour les opérateurs. L'évaluation des risques a également relevé un certain nombre d'événements ou conséquences indésirables comme résultats possibles de ces dangers. Toutefois, l'évaluation des risques n'a pas spécifiquement cerné le danger possible lié au manque d'expérience des membres d'équipe ni la conséquence possible d'un mouvement non contrôlé, de sorte qu'aucune mesure corrective n'a été envisagée pour régler ces questions.

1.14 Formation et qualification des employés d'exploitation ferroviaire

1.14.1 Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires

Au Canada, les compagnies ferroviaires de compétence fédérale doivent se conformer au Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviairesNote de bas de page 15 (le Règlement) adopté en 1987. Le Règlement décrit les qualifications minimales pour les ML, les mécaniciens de manœuvre, les chefs de train et les contremaîtres de triage. Le Règlement s'applique à tous les employés ferroviaires qui exercent les fonctions précisées dans la catégorie d'emploi, qu'ils soient syndiqués ou non. Un extrait de ce règlement se trouve à l'annexe C.

Depuis l'entrée en vigueur du Règlement, des changements opérationnels importants se sont produits au sein de l'industrie ferroviaire, notamment les équipes sont plus petites, les opérations de loco-commande se sont répandues à l'échelle du pays, et le recours aux équipes formées de cadres qui se qualifient grâce à un programme de formation accélérée est devenu chose courante tant au CP qu'à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN). Malgré ces changements importants dans l'exploitation ferroviaire, le Règlement n'a pas été modifié depuis 30 ans.

Lorsque le Règlement est entré en vigueur, la plupart des employés d'exploitation ferroviaire étaient syndiqués et le recours aux équipes formées de cadres n'était pas répandu. À l'époque, il y avait un système de promotion progressif passant du poste syndiqué de serre-freins/aide de triage à celui de chef de train/contremaître de triage, puis au poste de ML. Au fur et à mesure que l'industrie et la technologie ont évolué, le rôle du serre-freins a fini par être éliminé, et il n'était plus nécessaire de posséder 2 ans d'expérience en tant que serre-freins, et tous les nouveaux employés d'exploitation étaient embauchés en tant que chefs de train. Par conséquent, les nouveaux employés syndiqués étaient considérés comme étant qualifiés en tant qu'aide de triage, chef de train et contremaître de triage dès qu'ils avaient terminé leur formation de chef de train.

Bien que le Règlement exige que les compagnies de chemin de fer déposent un rapport et soumettent des renseignements à TC sur le programme de qualification de leurs employés et tout changement qu'elles y apportent, les documents soumis peuvent être des résumés et ne comprennent pas nécessairement tout le syllabus de cours. TC peut procéder à l'occasion à un examen sommaire de tous les documents qui lui sont soumis, mais aux termes du Règlement, TC n'est pas tenu d'examiner en détail le syllabus de cours ni d'en approuver le contenu.

Au fil des ans, le mode de prestation de la formation a changé, et la formation des chefs de train syndiqués a été accélérée au point où certains nouveaux candidats au poste de chef de train peuvent maintenant se qualifier en 6 mois.

Le paragraphe 19(2) du Règlement exige que la compagnie de chemin de fer mette sur pied et modifie les programmes de formation de ses employés en consultation avec les syndicats représentant ses employés dans les différentes catégories d'emploi. Ceci signifie que les exigences particulières relatives à la qualification telles que les syllabus de cours, l'expérience nécessaire pour se qualifier (temps de service dans la catégorie d'emploi ou nombre de parcours) et la qualification progressive des candidats syndiqués dans toutes les catégories d'emploi font l'objet de négociations entre la compagnie et les syndicats pertinents.

1.14.2 Employés non assujettis au Règlement

Les programmes de formation pour les catégories d'employés d'exploitation syndiqués, tels que les opérateurs de loco-commande et les CCF, ne sont pas assujettis au Règlement, mais la plupart des compagnies ferroviaires ont des plans de formation et des manuels pour ces postes. En outre, étant donné que les exigences relatives à la durée de la formation, au nombre de parcours et à l'expérience nécessaire font partie des conventions collectives, elles ne s'appliquent pas aux cadres ni aux superviseurs de la compagnie qui exercent les fonctions de ML et de chef de train. Cette lacune a permis aux compagnies ferroviaires d'élaborer et de mettre en œuvre des programmes de formation accélérée pour la qualification des employés cadres sans expérience opérationnelle préalable.

Le CP exige que tous ses cadres d'exploitation soient qualifiés en tant que chef de train ou de ML et qu'ils conservent leurs qualifications. Le CP s'attend à ce que tous les autres employés non syndiqués se qualifient eux aussi en tant que chef de train ou ML, à moins qu'ils soient jugés médicalement inaptes à le faire. Le CN a des pratiques semblables. De nos jours, les 2 compagnies ferroviaires ont recours de temps à autre à des équipes formées de cadres pour conduire des trains à divers terminaux lorsque cela s'avère nécessaire. Les équipes formées de cadres peuvent être envoyées à n'importe quel terminal sur le réseau ferroviaire lorsqu'il y a manque de personnel dans une région desservie. Ainsi, il y a eu certains cas où des équipes formées de cadres ont conduit des trains sans avoir reçu une formation adéquate, ce qui a donné lieu à un incident graveNote de bas de page 16 et à un accidentNote de bas de page 17.

La formation du CP pour ses employés syndiqués et ses cadres d'exploitation ferroviaire répondait aux exigences réglementaires actuelles.

1.14.3 Rapport final du Comité d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire de 2007

En décembre 2006, le ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités a lancé l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire. L'examen avait pour but de cerner les lacunes de la Loi sur la sécurité ferroviaire et de formuler des recommandations pour améliorer le régime réglementaire afin de répondre aux changements au sein de l'industrie ferroviaire et de ses activités. En novembre 2007, le comité d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire a soumis au ministre son rapport final intitulé Renforcer les liens : un engagement partagé pour la sécurité ferroviaire – Examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire.

La section 9.5 du rapport, qui portait plus particulièrement sur la formation des équipes d'exploitation, stipulait notamment ce qui suit :

Aux États-Unis, c'est la FRA [Federal Railroad Administration] qui agrée toutes les équipes de conduiteNote de bas de page 18. Par ailleurs, le ministère des Transports des États-Unis agrée tous les membres des équipes de conduite dans les secteurs du transport aérien et du transport maritime. Au Canada, Transports Canada agrée également tous les membres des équipages de conduite dans les secteurs du transport aérien et du transport maritime, mais rien ne prévoit l'agrément par Transports Canada des employés d'exploitation ferroviaire.

La Direction générale de la sécurité ferroviaire de Transports Canada a des programmes pour assurer l'acquisition des compétences voulues par les équipes de conduite et les contrôleurs de la circulation ferroviaire. On a cependant l'impression qu'étant donné que l'industrie est l'unique responsable de l'agrément des candidats, celle-ci manque peut-être d'objectivité. Même si l'on a songé à recommander d'autres méthodes d'acquisition des compétences pour les corps de métiers itinérants, nous croyons savoir que le règlement en vigueur sera remplacé par un nouveau règlement sur la formation et que ce dernier traitera de cette questionNote de bas de page 19.

Par conséquent, le comité d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire n'a fait aucune recommandation à l'égard de la formation des employés d'exploitation.

Reconnaissant que le Règlement était désuet et pour tenter de tenir compte de certains changements opérationnels qui s'étaient produits depuis l'entrée en vigueur du Règlement, l'industrie ferroviaire, y compris l'Association des chemins de fer du Canada (ACFC), a rédigé en ébauche des Règles concernant les normes de compétence minimales des employés ferroviaires. En 2009, les règles ont été soumises à TC aux fins d'approbation. Bien que TC ait approuvé les règles à l'époque, le Règlement n'a jamais été abrogé et il demeure en vigueur à ce jour.

1.14.4 Exigences réglementaires pour les équipes d'exploitation ferroviaire aux États-Unis

Les compagnies de chemin de fer des États-Unis doivent s'assurer que seuls les employés qui répondent aux normes de sécurité minimales fédérales travailleront comme ML et comme chefs de train. Ces normes de sécurité fédérales sont précisées dans le Code of Federal Regulations (CFR), Title 49, Part 240 - Qualification and Certification of Locomotive Engineers (October 2012) et dans le CFR, Title 49, Part 242 - Qualification and Certification of Conductors (October 2012) du Department of Transportation des États-Unis. La FRA est responsable de la surveillance et de la mise en application de ces règlements.

Les normes décrivent les normes de sécurité minimales fédérales relatives à l'admissibilité, la formation, l'examen, l'agrément et la surveillance des employés d'exploitation, mais elles n'empêchent pas une compagnie de chemin de fer d'adopter et d'appliquer des exigences plus rigoureuses. L'annexe D renferme un résumé des règlements des États-Unis pour les équipes d'exploitation.

1.15 Lacunes possibles en matière de surveillance réglementaire au Canada

Le BST a examiné les pratiques de travail et de formation actuelles et historiques pour les employés syndiqués et les cadres d'exploitation ferroviaire à la lumière de rapports précédents du BST, du rapport final du comité d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire de 2007, et de la réglementation pertinente du Canada et des États-Unis. L'examen a permis de cerner des lacunes possibles dans le Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires dans les domaines suivants :

1.15.1 Normes de compétence

TC agrée tous les membres d'équipage dans les secteurs du transport aérien et du transport maritime, mais rien ne prévoit l'agrément des employés d'exploitation ferroviaire. L'industrie ferroviaire est l'unique responsable de l'agrément des candidats. Puisqu'aucune surveillance réglementaire indépendante des compétences des équipes d'exploitation n'est exercée au Canada, il se pourrait que la formation de qualification des équipes d'exploitation manque d'objectivité.

La réglementation des États-Unis exige qu'un élément de formation pratique soit effectué pour qu'un employé d'exploitation, peu importe sa catégorie d'emploi, se qualifie ou se qualifie de nouveau pour un poste donné alors que la réglementation canadienne ne renferme aucune exigence relative au renouvellement de la qualification.

La réglementation canadienne comprend des normes de compétence pour les moniteurs de formation en cours d'emploi pour les ML et les mécaniciens de manœuvre, mais aucune exigence pour les moniteurs de formation en cours d'emploi pour les chefs de train et les contremaîtres de triage. Par conséquent, un chef de train ou contremaître peu expérimenté nouvellement qualifié pourrait se voir confier le rôle de moniteur de formation en cours d'emploi pour d'autres candidats au poste de chef de train.

Puisque la réglementation ne s'applique qu'aux employés de la compagnie, il n'y a aucune norme de compétence pour les moniteurs contractuels (formateurs) qui ne sont pas à l'emploi de la compagnie. Par conséquent, il n'y a aucun moyen de s'assurer que les moniteurs contractuels ont les compétences requises pour donner de la formation ou pour agir à titre d'examinateur pour toute catégorie d'emploi.

1.15.2 Qualification progressive

Par le passé, l'approche en vue de la qualification des équipes d'exploitation était plus progressive et elle offrait plus de possibilités de mentorat pendant que les nouveaux employés d'exploitation acquéraient de l'expérience. Puisque le poste de serre-freins a été éliminé et que les chefs de train opèrent des STL, les possibilités de mentorat au sein des équipes qui prévalaient auparavant sont désormais plus limitées en raison du processus de formation accélérée.

Exception faite des candidats au poste de ML syndiqué, de moniteurs de formation en cours d'emploi pour les ML, et de mécanicien de manœuvre,

1.15.3 Opérations à l'aide du système de télécommande de locomotive

Le Règlement est entré en vigueur en 1987, soit avant la mise en œuvre très répandue de la technologie de loco-commande au sein de l'industrie ferroviaire. Le Règlement n'exige pas que les employés de toute catégorie d'emploi reçoivent une formation particulière pour les opérations de loco-commande. De même, rien n'exige que les opérateurs de loco-commande se qualifient de nouveau pour ces opérations.

Au Canada, les chefs de train effectuent habituellement des opérations de loco-commande (Beltpack) à l'intérieur des triages. Par contre, ces mouvements peuvent emprunter la voie principale afin de faire une manœuvre aller-retour pour faciliter les manœuvres de triage. Les chefs de train peuvent également exploiter des transferts sur la voie principale sur une distance d'au plus 20 milles à des vitesses ne dépassant pas 15 mi/h, sans restriction quant au tonnage ou à la longueur du train. Les chefs de train reçoivent peu de formation sur la conduite des locomotives ou la conduite des trains et la réglementation actuelle n'exige pas une telle formation.

1.15.4 Équipes formées de cadres

Un nouveau cadre peut suivre une formation accélérée pour ensuite devenir responsable de la formation et de l'agrément de nouveaux employés, même si le cadre n'a peut-être que peu d'expérience.

Les équipes formées de cadres peuvent être envoyées un peu partout au pays pour combler des lacunes de personnel dans une région desservie. Ainsi, des équipes formées de cadres pourraient conduire des trains sur n'importe quelle subdivision sans avoir reçu une formation de familiarisation adéquateNote de bas de page 20.

1.15.5 Formation et surveillance réglementaire

Le Règlement ne renferme aucune orientation précisant des exigences relatives au matériel didactique pour la formation, au contenu des examens ni sur la façon d'administrer les examens pour aucune des catégories d'emploi.

Malgré le fait que les CCF prennent part à la plupart des volets de l'exploitation des trains et qu'ils sont responsables de la sécurité de la circulation des trains sur un territoire donné conformément aux règles, bulletins et instructions de la compagnie en vigueur, il n'existe pas de catégorie d'emploi pour eux et donc aucune exigence relative à la formation ou au renouvellement de la qualification.

Il n'y a pas de catégorie d'emploi pour les opérateurs de loco-commande ni aucune exigence relative à la formation ou au renouvellement de la qualification pour eux non plus.

Au moment de la rédaction du Règlement, les compagnies ferroviaires avaient un programme progressif de cheminement professionnel pour les corps de métier itinérants. Il y avait plus de possibilités de mentorat des employés pendant un certain temps, ce qui permettait aux employés d'acquérir une précieuse expérience en cours d'emploi. Le programme actuel de formation accélérée pour les employés syndiqués et les cadres n'offre pas ces avantages.

La réglementation des États-Unis exige que le matériel didactique de formation ou les examens soient examinés, critiqués ou agréés par l'organisme de réglementation. La réglementation canadienne n'a pas de telles exigences. Bien que les compagnies de chemin de fer déposent auprès de TC des renseignements à l'égard de leurs programmes de formation, TC n'évalue pas si les programmes de formation ferroviaires sont adéquats et n'assure aucune autre surveillance de la formation des employés d'exploitation ferroviaire.

Les employés d'exploitation peuvent être mis à pied pour de longues périodes pouvant durer plusieurs années, et la plupart des compagnies ferroviaires ont des politiques prévoyant les étapes de familiarisation ou de formation de recyclage en vue de la réintégration de ces employés au sein de l'effectif. Toutefois, l'application des politiques peut varier d'un terminal à l'autre et d'un employé à l'autre en fonction de leur expérience. En outre, il n'existe aucune exigence réglementaire relative à une familiarisation ou une formation de recyclage obligatoire pour aucune des catégories d'emploi d'exploitation lorsque des employés d'exploitation retournent au travail.

1.16 Enquêtes du BST faisant ressortir des manquements en matière de réglementation sur la formation des équipes d'exploitation

Depuis 2002, le BST a fait enquête sur 4 événements (y compris un accident mortel mettant en cause un membre d'équipe) qui découlaient directement de manquements en matière de formation des équipes d'exploitation et de lacunes connexes dans la réglementationNote de bas de page 21.

1.16.1 R02W0060 – Déraillement d'un train du CN au point milliaire 251,3, subdivision de Redditt

Le 26 avril 2002, le train de marchandises E-201-31-24 du CN qui roulait en direction ouest est parti de Winnipeg (Manitoba) et s'est engagé sur la voie principale nord de la subdivision de Redditt. Au moment où le train franchissait une liaison pour passer de la voie principale nord à la voie principale sud, 8 wagons ont déraillé au point milliaire 251,3. Le déraillement a causé des dommages à la voie principale sur une distance d'environ 300 pieds, de même qu'à un passage routier inférieur et au système de fibre optique enfoui sous la surface. Par mesure de précaution, on a fait évacuer 6 maisons d'un quartier résidentiel adjacent à la voie principale. Personne n'a été blessé et il n'y a eu aucun déversement de produits.

À l'égard de la formation de l'équipe d'exploitation, l'enquête a permis de constater ce qui suit :

En réponse au rapport, TC a laissé savoir qu'à l'automne 2003, il entreprendrait un examen du Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires et qu'à partir des résultats de cet examen, TC ferait des recommandations à l'industrie au sujet de la formation des ML et des vérifications dynamiques.

1.16.2 R04W0035 – Déraillement d'un train du CN dans le triage Symington au point milliaire 145,20, subdivision de Sprague

Le 17 février 2004, la manœuvre YATS-02-17 du CN effectuait des manœuvres de triage au triage Symington, à Winnipeg (Manitoba). Vers 11 h 50, heure normale du Centre, 17 plates-formes intermodales porte-conteneurs ont déraillé à l'aiguillage W4RE, à l'extrémité est des voies de réception ouest (point milliaire 145,20 de la subdivision de Sprague). Au moment de l'événement, l'opérateur de la loco-commande prenait place dans un véhicule routier qui devançait considérablement le mouvement et il était dos au mouvement, comme l'exception à la règle 115 du REF le permettait; ainsi, le mouvement ne faisait l'objet d'aucune surveillance. De plus, il n'y avait aucune ligne directrice imposée par la réglementation ou par la compagnie au sujet de l'utilisation d'un véhicule routier d'assistance pendant des manœuvres exécutées à l'aide du STL. La voie ferrée a été endommagée sur une distance de quelque 1600 pieds. Personne n'a été blessé et aucune marchandise dangereuse n'a été en cause.

À l'égard de la formation de l'équipe d'exploitation, l'enquête a permis de constater que la surveillance réglementaire de la formation et du renouvellement des qualifications des opérateurs de loco-commande n'a pas suivi le rythme de l'amélioration de la technologie et des perfectionnements de l'exploitation.

TC a reconnu que le Règlement était désuet et qu'il devrait être refondu. TC envisageait de créer un groupe de travail pour réviser le Règlement.

1.16.3 R13W0260 – Décès accidentel d'un employé du CN au point milliaire 61,0, subdivision de Tisdale

Le 18 novembre 2013, le train de marchandises L586-41-18 du CN effectuait des manœuvres de triage à l'entrée de la voie d'échange de Murphys au point milliaire 61,0 de la subdivision de Tisdale du CN, près de Tisdale (Saskatchewan). Vers 18 h 18, heure normale du Centre, pendant les heures d'obscurité, alors qu'il faisait marche arrière vers l'ouest à une vitesse d'environ 12 mi/h, le train a heurté et blessé grièvement un chef de train stagiaire. L'employé a été transporté à l'hôpital en ambulance, mais a succombé à ses blessures en cours de route.

À l'égard de la formation de l'équipe d'exploitation, l'enquête a permis de constater ce qui suit :

L'enquête a permis de constater que, malgré le fait que TC avait approuvé de nouvelles règles en 2009, ces dernières ne sont jamais entrées en vigueur parce le règlement actuel n'a pas été abrogé.

1.16.4 R15V0046 – Mouvement du CP qui dépasse les limites d'autorisation au point milliaire 103, subdivision de Cranbrook

Le 11 mars 2015, un CCF du CP a arrêté le train de marchandises 672-024 du CP près du point milliaire 102 de la subdivision de Cranbrook après que le convoi a quitté Cranbrook (Colombie-Britannique) et roulé vers l'est sans autorisation sur une distance de 5 milles. L'équipe de train était formée de cadres. Bien que qualifiés pour leurs postes respectifs, les cadres qui formaient l'équipe n'avaient pas une bonne connaissance du territoire.

L'enquête a permis de constater ce qui suit :

1.17 Erreurs d'inattention pendant l'exécution de tâches faisant appel aux compétences et à l'expérience de l'opérateur

Les erreurs d'inattention figurent parmi les erreurs la plupart du temps liées aux tâches routinières et bien rodées. Les erreurs d'inattention se produisent lorsque le contrôle de l'exécution d'une étape de la tâche n'est pas effectué au moment opportun ou n'est pas effectué du tout parce que l'opérateur concentre son attention sur un autre aspect de la tâche ou sur une autre préoccupation.

Étant donné que les erreurs d'inattention se produisent habituellement pendant l'exécution de tâches routinières et bien rodées, ce type d'erreurs peut être commis tant par des employés débutants que par des employés chevronnés. Toutefois, il y a une condition indispensable à ce type d'erreur — il faut que l'attention soit capturée, c'est-à-dire que l'attention de l'opérateur se tourne vers un autre aspect de la tâche. Puisque les opérateurs qui font l'apprentissage de nouvelles tâches ou de nouveaux aspects d'une tâche connue doivent accorder plus d'attention à ces nouveaux éléments de leurs rôles qui n'ont pas encore été mis en pratique, la sollicitation accrue de l'attention peut être plus propice aux erreurs liées à l'attention capturéeNote de bas de page 23.

Les employés deviennent plus compétents grâce à l'acquisition d'expérience en cours d'emploi — un processus d'apprentissage par l'expérience et l'observation d'employés plus expérimentés qui effectuent le travail correctement.

Avec le temps, un apprentissage efficace par l'expérience améliore le jugement, les aptitudes et l'efficacité d'un individu. Au fur et à mesure qu'une personne acquiert de l'expérience, les tâches sont mieux connues et mises en pratique, ce qui exige qu'on consacre moins d'attention aux aspects de la tâche qui étaient précédemment nouveaux et ce qui diminue la probabilité d'erreurs liées à l'attention capturée.

1.18 Rapport de la Federal Railroad Administration sur la sécurité des opérations de télécommande de locomotive

En 2002, afin de mieux comprendre les répercussions des opérations de télécommande de locomotive (loco-commande) sur le plan de la sécurité, la FRA a lancé un programme de recherches comportant plusieurs études.

En mars 2006, la FRA a publié son rapport intitulé Final Report: Safety of Remote Control Locomotive (RCL) OperationsNote de bas de page 24. Le rapport cernait la possibilité de surcharge de tâches pour les opérateurs de loco-commande étant donné qu'ils devraient effectuer des tâches additionnelles qui incombaient auparavant aux ML ou aux aiguilleurs aux États-Unis. Le rapport indiquait ce qui suit [traduction] :

Dans le but de gérer les nombreuses tâches, un opérateur de loco-commande pourrait se concentrer exclusivement sur une tâche ou quelques-unes et ignorer toutes les autres, ce qui pourrait l'amener à canaliser son attention. L'attention canalisée peut mener à une situation où l'opérateur de loco-commande ignore des renseignements importants dans l'environnement d'exploitation, et pourrait entraîner une diminution de la connaissance de la situation de l'opérateur de loco-commande. Une augmentation des tâches de l'opérateur de loco-commande peut également amener l'opérateur à commettre des erreurs en raison d'une mauvaise compréhension, d'une perte ou d'un manque d'attention, ou d'une distraction causée par le grand nombre de tâches à accomplirNote de bas de page 25.

Le rapport soulignait également les répercussions possibles, sur le plan de la sécurité, du jumelage de membres d'équipe inexpérimentés étant donné le roulement de personnel intensif prévu dans l'industrie ferroviaireNote de bas de page 26.

Par le passé, un grand nombre des employés qui ont été formés pour utiliser la technologie de loco-commande à ses débuts possédaient une vaste expérience de l'exploitation ferroviaire. Les employés chevronnés connaissaient bien la sécurité ferroviaire, les règles d'exploitation et la complexité du travail dans des cours de triage achalandéesNote de bas de page 27.

La capacité pour un opérateur de s'acquitter de ses fonctions dans des situations très exigeantes dépend de la quantité de ressources attentionnelles dont il dispose dans l'exercice de ses fonctions. Par exemple, la préparation et la planification des manœuvres de triage et l'exécution d'opérations de loco-commande, tout en coordonnant et en approuvant les mouvements à l'intérieur d'une PPZ, augmentent la charge de travail et exigent plus d'attention, ce qui réduit la capacité disponible pour d'autres tâches. Si l'opérateur doit exécuter de nombreuses tâches qui exigent une attention séquentielle et concentrée, et si une tâche exige soudainement plus d'attention, l'exécution des autres tâches pourrait être compromiseNote de bas de page 28.

En mai 2006, la FRA a publié le rapport intitulé Final Report: A Comparative Risk Assessment of Remote Control Locomotive Operations versus Conventional Yard Switching Operations. Cette étude avait pour but de permettre une meilleure compréhension des opérations de télécommande de locomotive et de leur sécurité relative par rapport aux manœuvres de triage traditionnelles. L'étude s'est intéressée seulement aux manœuvres dans les triages et n'a pas porté sur les opérations de télécommande de locomotive sur les voies principales, les embranchements industriels ou autres, ou sur les voies d'évitement. Le rapport soulignait que la FRA venait tout juste de commencer la collecte de données sur les accidents liés aux opérations de loco-commande et qu'il faudrait plusieurs années de collecte de données avant d'avoir suffisamment de données pour procéder à une analyse.

1.19 Pratiques exemplaires pour le développement des compétences

Le Rail Safety and Standards Board du Royaume-Uni a publié un document d'orientation intitulé Good Practice Guide on Competence Development. Le guide, élaboré de concert avec l'industrie ferroviaire, avait pour but de présenter des pratiques exemplaires pour l'élaboration de systèmes exhaustifs visant à gérer les compétences plutôt que de simplement s'assurer de la conformité aux règlementsNote de bas de page 29.

La compétence signifie la capacité globale de fonctionner de façon efficace dans un poste et est le résultat d'un ensemble de compétences fonctionnelles, techniques et non techniques. Selon le guide, les compétences non techniques comprennent la capacité de demeurer conscient de la situation, la prise de décisions et la gestion de la charge de travail, capacités qui ont été reconnues comme ayant joué un rôle clé dans des incidents et des accidentsNote de bas de page 30.

Dans le cadre de l'apprentissage d'un rôle, la compétence se développe selon un continuum, passant du stade de débutant, à pas tout à fait compétent, puis à compétent et à expertNote de bas de page 31. Au cours de ce continuum, les apprentis passent par une série de stades prévisibles. Lorsqu'un niveau minimal de compétence est atteint, on peut décrire l'apprenti comme étant « consciemment compétent » ou comme étant rendu à un stade où il peut accomplir les tâches efficacement mais en faisant appel à un niveau important de ressources attentionnelles. Lorsque l'apprenti devient compétent ou expert, l'exécution des tâches devient plus automatique et exige moins de ressources attentionnellesNote de bas de page 32.

1.20 Statistiques du BST sur les événements de mouvements imprévus ou non contrôlés

Entre 2008 et 2017, 541 événements de mouvements imprévus ou non contrôlésNote de bas de page 33 sur l'ensemble des chemins de fer au Canada ont été signalés au BST (Tableau 1).

Tableau 1. Événements de mouvements imprévus ou non contrôlés signalés au BST entre 2008 et 2017
Mouvement non contrôlé en raison de 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Total
Perte de maîtrise 6 0 2 3 0 3 0 1 4 2 21
Manœuvres sans freins à air 17 14 10 16 12 24 21 22 18 21 175
Immobilisation insuffisante 25 37 25 32 43 42 38 35 29 39 345
Total 48 51 37 51 55 69 59 58 51 62 541

En général, les mouvements non contrôlés sont attribuables à 1 des 3 causes suivantes :

  1. Perte de maîtrise – Se produit lorsque les freins à air disponibles ou les systèmes de la locomotive n'arrivent pas à retenir un train arrêté sous surveillance ou lorsqu'un ML ou un opérateur de système Beltpack n'est pas en mesure de maîtriser un train au moyen des freins à air disponibles.
  2. Manœuvres sans freins à air – Se produisent lorsqu'un matériel roulant est manœuvré dans un triage en utilisant seulement les freins à air de la locomotive (c.-à-d., il n'y a pas de freins à air disponibles sur les wagons manœuvrés). Lorsqu'un mouvement non contrôlé se produit, ces situations peuvent se traduire par des wagons qui sortent du triage, de la voie d'évitement ou d'un embranchement industriel et entrent sur la voie principale.
  3. Immobilisation insuffisante – Un wagon, une rame de wagons ou un train est laissé sans surveillance et se met à rouler de façon non contrôlée, en général, parce
    • qu'aucun frein à main n'a été serré ou un nombre insuffisant de freins à main ont été serrés;
    • qu'un wagon (ou plusieurs wagons) est équipé de freins à main défectueux ou inefficaces;
    • que les freins à air du train se desserrent pour différentes raisons.

Le tableau 2 répertorie ces événements en fonction de leurs conséquences.

Tableau 2. Conséquences des mouvements non contrôlés
Conséquence 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Total
Déraillements de 1 à 5 wagons 23 29 18 22 26 26 28 28 27 28 255
Déraillements de plus de 5 wagons 5 1 0 0 2 2 0 1 2 1 14
Collision 24 30 24 32 28 40 35 32 23 34 302
Incidence sur la voie principale* 9 4 4 7 7 10 6 4 5 5 61
Présence de marchandises dangereuses 16 12 8 10 7 14 17 14 9 18 125
Nombre de blessés ou de décès 1 1 0 0 2 49 0 0 1 1 55

* Se trouvait sur la voie principale au départ, s'est engagé sur la voie principale ou a obstrué la voie principale.

Des 541 événements signalés,

Depuis 1994, le BST a enquêté sur 27 autres événements qui mettaient en cause des mouvements non contrôlés (annexe E). L'accident survenu à Lac-Mégantic en 2013 est le plus important d'entre eux.

1.21 Autres événements mettant en cause des mouvements non contrôlés au triage Sutherland

Entre 1995 et 2005, il s'est produit 5 événements mettant en cause des mouvements non contrôlés au triage Sutherland comme il suit :

Dans chacun des 5 événements, le matériel avait roulé de façon non contrôlée en direction ouest. Dans 4 cas, le mouvement non contrôlé s'est produit après que la locomotive ou les wagons ont été laissés puis se sont mis en mouvement sous l'effet de la gravité quand les freins se sont desserrés.

À un moment donné après 2005, les équipes de manœuvre au triage Sutherland ont commencé à effectuer des manœuvres de triage surtout en se servant des freins automatiques de train sur tous les wagons. Lorsqu'on se sert des freins automatiques, si un wagon se sépare du mouvement, les freins à air du wagon se serrent automatiquement. Entre 2005 et 2015, aucun événement mettant en cause un mouvement non contrôlé n'a été signalé au triage Sutherland.

1.22 Autres enquêtes du BST mettant en cause des opérations effectuées à l'aide du système de télécommande de locomotive

1.23 Enquête du BST sur l'accident de Lac-Mégantic et recommandation R14-04 du Bureau

Le 6 juillet 2013, peu avant 1 h, heure avancée de l'Est, le train de marchandises MMA-002, en direction est, de la compagnie Montreal, Maine & Atlantic Railway, qui était garé sans surveillance pour la nuit sur la voie principale à Nantes (Québec) (point milliaire 7,40 de la subdivision de Sherbrooke), a commencé à se déplacer. Le train a roulé sur environ 7,2 milles, atteignant une vitesse de 65 mi/h. Vers 1 h 15, lorsque le MMA-002 s'est approché du centre de la ville de Lac-Mégantic (Québec), 63 wagons-citernes qui transportaient du pétrole brut (UN 1267) et 2 wagons couverts ont déraillé. Par suite du déraillement, environ 6 millions de litres de pétrole brut se sont déversés. Des incendies se sont déclarés et des explosions se sont produites, détruisant 40 édifices, 53 véhicules et les voies ferrées à l'extrémité ouest du triage Megantic. En tout, 47 personnes ont subi des blessures mortelles. Le centre-ville ainsi que la rivière et le lac adjacents ont été contaminés.

Depuis 1996, le BST a soulevé la nécessité d'avoir des moyens de défense robustes pour empêcher les trains de partir à la dérive, et depuis, des cas de matériel parti à la dérive ont continué de se produire au Canada. Bien qu'en général on considère que les cas de matériel parti à la dérive ne se produisent pas souvent, ils peuvent néanmoins comporter de très grands risques et avoir des conséquences extrêmement graves, surtout si des marchandises dangereuses sont en cause, comme l'a démontré l'événement de Lac-Mégantic. C'est pourquoi le Bureau a recommandé que

Le ministère des Transports exige que les compagnies ferroviaires canadiennes mettent en place des moyens de défense physiques additionnels pour empêcher le matériel de partir à la dérive.
Recommandation R14-04 du BST

1.23.1 Mesures prises par Transports Canada et l'industrie ferroviaire à la suite de la recommandation R14-04 du BST

Le 29 octobre 2014, TC a émis une injonction ministérielle relative aux moyens de défense physiques additionnels pour les trains avec locomotives en marche laissés sur la voie principale. En voici un extrait :

4a) Veiller à ce qu'au moins un autre mécanisme ou mesure d'immobilisation soit également utilisé, en plus de respecter toutes les exigences relatives à l'immobilisation prévues à la règle 112 du REF, Lorsqu'un mouvement ou du matériel roulant est laissé sans surveillance sur une voie principale. Les mesures ou les mécanismes d'immobilisation supplémentaires doivent empêcher le matériel roulant de partir à la dérive. Au moins un des éléments suivants doit être utilisé :

  • des dérailleurs utilisés en permanence en fonction de leurs spécifications de conception;
  • des dispositifs mécaniques d'urgence;
  • un frein de stationnement à verrouillage mécanique une fois approuvé par l'Association of American Railroads (AAR);
  • un dispositif de veille automatique avec immobilisation où la pression d'air est maintenue ou la mise en marche automatique est assurée;
  • le déplacement du matériel roulant vers une voie protégée grâce à des dérailleurs ou un terrain concave vérifié par un levé ou le profil de la voie;
  • d'autres dispositifs d'immobilisation appropriés acceptés par Transports CanadaNote de bas de page 34.

TC a également exigé que les compagnies de chemin de fer formulent des règles relatives à l'immobilisation du matériel ferroviaire. À la suite de longues consultations avec l'industrie, la règle 112 du REF nouvellement révisée a été approuvée par le ministre des Transports et est entrée en vigueur le 15 octobre 2015. La règle 112 du REF révisée, Matériel roulant laissé sans surveillance, comprend 7 mesures de contrôle qui peuvent servir de moyens secondaires d'immobilisation physique en vue de réduire le risque de mouvements non contrôlés.

1.23.2 Réévaluation par le Bureau de la réponse de Transports Canada à la recommandation R14-04 du BST (mars 2017)

En mars 2017, le Bureau a réévalué la réponse de TC à la recommandation R14-04 et a reconnu les efforts déployés par TC pour la révision de la règle 112 du REF. Toutefois, malgré les mesures prises, le nombre d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés n'a pas changé au cours de la dernière année (soit 42 événements en 2016 et en 2015 et une moyenne quinquennale de 39)Note de bas de page 35. Le Bureau a réitéré qu'on ne devrait pas considérer les freins à air comme moyen de défense physique en raison de leur manque de fiabilité. Comme il est bien connu que les freins à air ont tendance à fuir et que le taux de fuite est généralement imprévisible, ce moyen de défense ne conviendrait pas comme dispositif d'appoint aux freins à main.

La réévaluation ajoute que

Le Bureau est heureux de constater que TC a mis en œuvre plusieurs initiatives, y compris une règle renforcée et un plan de surveillance exhaustif de cette nouvelle règle. Toutefois, comme le résultat souhaité, soit une importante réduction du nombre de mouvements incontrôlés, n'a pas encore été réalisé, le Bureau estime que la réponse à la recommandation est en partie satisfaisante.

1.24 Liste de surveillance du BST

La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu'il faut s'employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.

L'enjeu gestion de la sécurité et surveillance restera sur la Liste de surveillance du BST jusqu'à ce que

  • les entreprises qui possèdent un SGS démontrent qu'il fonctionne bien, c'est-à-dire qu'il permet de déceler les risques et que des mesures de réduction des risques efficaces sont mises en œuvre;
  • TC intervienne lorsque des entreprises ne peuvent assurer efficacement la gestion de la sécurité et le fasse de façon à corriger les pratiques d'exploitation jugées non sécuritaires.

L'enjeu gestion de la sécurité et surveillance figure sur la Liste de surveillance 2016. Tel que l'a démontré l'événement à l'étude, tous les dangers possibles liés à des changements opérationnels doivent être cernés au cours des évaluations des risques pour veiller à ce que des stratégies d'atténuation appropriées soient élaborées et mises en œuvre pour réduire le risque de mouvements non contrôlés.

2.0 Analyse

Aucune défectuosité du matériel ou de la voie n'a contribué à l'événement à l'étude. L'analyse portera sur le mouvement non contrôlé, l'utilisation de dérailleurs, la surveillance réglementaire de la formation et de la compétence, l'expérience des employés d'exploitation, les évaluations des risques et la protection des passages à niveau.

2.1 L'événement

L'incident s'est produit lorsque le wagon à l'extrémité ouest (EFCX 604991) de la manœuvre de formation (la manœuvre) au système de télécommande de locomotive (STL) 2300 du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) s'est mis à rouler de façon non contrôlée en direction ouest et est sorti de la voie F6 du triage Sutherland.

Le contremaître était responsable des activités de triage de la manœuvre et il devait également contrôler tous les autres mouvements de train à l'intérieur de la zone de protection des mouvements non accompagnés (PPZ) à l'extrémité est du triage F, qui avait été placée sous sa responsabilité un peu plus tôt durant le quart. Le contremaître s'apprêtait à dételer le wagon à l'extrémité ouest de la manœuvre (le 16e), EFCX 604991.

Après avoir arrêté la manœuvre, alors que le wagon EFCX 604991 se trouvait à l'extrémité est de la voie F6 et que le reste de la manœuvre occupait l'extrémité est de la voie d'accès au triage F, le contremaître a serré le frein à main du wagon EFCX 604991, a effectué un essai de l'efficacité du frein à main et a soulevé le levier de dételage en préparation pour le dételage, conformément à la procédure normale.

Au même moment, l'équipe du train-bloc de potasse 602 du CP (train 602) a communiqué avec le contremaître par radio pour lui demander la permission de s'engager sur la voie d'accès à l'extrémité est du triage F, à l'intérieur de la PPZ, afin de conduire les locomotives jusqu'à la voie d'atelier. Le contremaître savait qu'une fois que les locomotives du train 602 seraient stationnées sur la voie d'atelier, il n'y aurait plus d'interruptions pour le reste de la soirée et a par la suite permis au train 602 d'entrer dans la PPZ.

Pour dégager l'extrémité est de la voie d'accès au triage F afin de permettre au train 602 de circuler dans la PPZ, le contremaître a décidé de pousser toute la manœuvre vers l'ouest jusque dans la voie F6. Pour se préparer à pousser la manœuvre vers l'ouest jusque dans la voie F6, le contremaître a desserré le frein à main du wagon EFCX 604991 mais il n'a pas actionné de nouveau l'attelage avant d'entreprendre le mouvement. La manœuvre s'est dirigée vers l'ouest et, lorsqu'elle s'est arrêtée, le wagon EFCX 604991, dont la mâchoire était déjà détachée, s'est dételé de la manœuvre et s'est mis à rouler de façon non contrôlée dans le triage. Comme il n'y avait aucun dérailleur en place à l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F, le wagon a poursuivi son mouvement non contrôlé jusque sur la voie principale à l'ouest du triage Sutherland.

Après s'être engagé sur la voie principale, le wagon a poursuivi sa route vers l'ouest et a franchi 2 passages à niveau publics munis de systèmes d'avertissement de passage à niveau, situés au point milliaire 109,78 et au point milliaire 109,88 respectivement, avant d'arrêter sa course à l'intérieur de la zone de marche prudente au point milliaire 110,5.

Un territoire de régulation de l'occupation de la voie n'a aucun signal pour avertir un train qui arrive que la voie devant lui est occupée. Ni l'équipe ni le coordonnateur de trains adjoint (CTA), qui travaillait dans le bureau de triage, n'a remarqué que le wagon était sorti du triage et s'était engagé sur la voie principale à l'intérieur de la zone de marche prudente. Une autre équipe, qui arrivait au bureau du triage, a averti le CTA qu'un wagon roulait de façon non contrôlée. Si personne n'avait vu le wagon sortir du triage, il serait probablement demeuré au point milliaire 110,5, protégé par les règles applicables en zone de marche prudente, qui exigent que les trains s'approchent à une vitesse qui leur permet de s'arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité du matériel. Si des mouvements non contrôlés peuvent entrer sur la voie principale sans être détectés, des trains ou des mouvements en approche pourraient ne pas être avertis en temps opportun et ne pas être capables de prendre les mesures qui s'imposent, ce qui augmente le risque de collisions.

2.2 Interruption de la tâche pendant les activités de triage

Dans l'événement à l'étude, le contremaître a modifié son plan de manœuvre pour acquiescer à la demande d'un autre train de circuler à l'intérieur de la PPZ. Le plan initial consistait à déplacer une rame de wagons jusqu'à l'extrémité est de la voie F6, de dételer le wagon de queue et de le laisser sur la voie F6 pour le déplacer plus tard durant le quart. Le contremaître avait commencé à mettre son plan à exécution et avait arrêté le mouvement sur la voie F6, avait serré le frein à main du dernier wagon et avait soulevé le levier de dételage lorsqu'il a reçu la demande du train 602 de circuler dans la PPZ.

Étant donné qu'il était plus efficace de permettre au train 602 de traverser la PPZ le plus tôt possible, le contremaître a élaboré un nouveau plan qui consistait à pousser toute la manœuvre jusque dans la voie F6 pour dégager la voie d'accès et permettre au train 602 de se rendre à la voie d'atelier. Pour ce faire, il aurait fallu que le contremaître actionne de nouveau l'attelage en laissant le frein à main du wagon serré, sépare le wagon de queue du mouvement, pousse le mouvement vers l'arrière pour atteler de nouveau le wagon, effectue un essai de l'attelage pour s'assurer que l'attelage était bien actionné, puis desserre le frein à main avant de pousser la manœuvre jusque dans la voie F6 à 10 mi/h. Lorsque la tâche de triage a été interrompue par l'équipe du train 602 qui demandait la permission d'entrer dans la PPZ, le contremaître ne s'est pas souvenu avoir soulevé le levier de dételage et que le wagon EFCX 604991 était en fait dételé.

2.3 Tâches additionnelles et erreurs d'inattention

Les erreurs d'inattention figurent parmi les erreurs la plupart du temps liées aux tâches routinières et bien rodées. Les erreurs d'inattention se produisent lorsque le contrôle de l'exécution d'une étape de la tâche n'est pas effectué au moment opportun ou n'est pas effectué du tout parce que l'opérateur concentre son attention sur un autre aspect de la tâche ou sur une autre préoccupation. Étant donné que les erreurs d'inattention se produisent habituellement pendant l'exécution de tâches routinières et bien rodées, ces erreurs sont commises tant par des employés débutants que par des employés chevronnés.

Il y a une condition indispensable à ce type d'erreurs — il faut que l'attention soit capturée, c'est-à-dire que l'attention de l'opérateur se concentre sur un autre aspect de la tâche. Puisque les opérateurs qui font l'apprentissage de nouvelles tâches ou de nouveaux aspects d'une tâche connue doivent porter davantage attention à ces nouveaux éléments de leurs rôles qui n'ont pas encore été mis en pratique, la sollicitation accrue de l'attention est plus propice aux erreurs liées à l'attention capturéeNote de bas de page 36.

Dans l'événement à l'étude, les membres de l'équipe de manœuvre étaient à l'emploi de la compagnie ferroviaire depuis environ 9 mois et s'étaient qualifiés en tant que chefs de train environ 3 mois avant l'événement. Ils possédaient relativement peu d'expérience et n'avaient pas encore terminé leur formation sur le système de télécommande de locomotive (STL).

Les changements opérationnels qui avaient été apportés récemment au triage Sutherland (c.‑à-d., la réduction du nombre d'équipes de triage, les manœuvres de triage sans freins à air, la reprise des opérations de télécommande de locomotive [loco-commande] et l'instauration d'une PPZ) avaient imposé de nouvelles tâches aux équipes de triage. En plus des fonctions normales de chef de train comme la planification et la préparation des mouvements de triage, les équipes de triage devaient également effectuer les mouvements pendant que le contremaître assumait la responsabilité additionnelle de coordonner et d'approuver tous les mouvements à l'intérieur de la PPZ. Ainsi, le contremaître devait consacrer une plus grande part de ses ressources attentionnelles aux nouveaux aspects de la tâche qu'il apprenait de sorte que moins de ressources attentionnelles étaient disponibles pour surveiller la tâche de triage. L'apprentissage des tâches additionnelles liées aux opérations de loco-commande et à la gestion de la PPZ de concert avec le manque relatif d'expérience du contremaître de triage ont augmenté la probabilité d'une erreur d'inattention à l'égard du dételage qui a entraîné le mouvement non contrôlé.

2.4 Expérience de l'équipe de manœuvre

L'équipe de manœuvre était composée des 2 employés les plus récents et ayant le moins d'expérience de tous les employés qui travaillaient au triage Sutherland à ce moment-là. Une fois qu'il s'était qualifié en tant que chef de train en janvier 2016, le contremaître était immédiatement devenu contremaître au sein d'une équipe de 3 personnes. Ainsi, le contremaître a travaillé pendant le premier mois environ avec un mécanicien de locomotive (ML) expérimenté et a eu la possibilité de recevoir des conseils d'un membre d'équipe plus chevronné au besoin. Ceci a changé lors de la reprise des opérations de loco-commande et la création d'équipes de triage de 2 personnes.

Les membres de l'équipe de manœuvre ont commencé leur formation STL théorique en classe le 29 février 2016. Après avoir terminé cette formation, ils ont été affectés à une manœuvre de formation STL en cours d'emploi qui remplaçait une manœuvre de triage normale. Une fois que l'équipe a terminé la formation pratique de 2 semaines, le CP a déterminé qu'ils avaient besoin d'une semaine additionnelle (3e) de formation STL pratique. L'équipe de manœuvre était censée terminer cette semaine additionnelle de formation STL pratique le 28 mars 2016. L'incident s'est produit le 27 mars 2016.

Malgré le peu d'expérience qu'il avait, le contremaître s'était vu confier ce rôle parce qu'il était le membre de l'équipe de manœuvre qui avait le plus de séniorité. En outre, aucune exigence réglementaire ni consigne ne prescrit le temps de service ou l'expérience qu'un chef de train doit avoir avant de commencer la formation STL ou d'agir à titre de contremaître de triage pour des opérations de loco-commande. Étant donné que les postes de triage sont habituellement attribués aux employés d'exploitation qui ont le moins de séniorité, il n'est pas rare pour une équipe de triage qui effectue des opérations de loco-commande d'être formée de 2 chefs de train qui ont peu d'expérience opérationnelle et de la loco-commande.

2.5 Jumelage d'opérateurs inexpérimentés

L'apprentissage par l'expérience est un volet important d'un programme de formation global. Un apprentissage par l'expérience efficace améliore le jugement, les aptitudes et la capacité de travailler de façon sécuritaire. Au fur et à mesure qu'une personne acquiert de l'expérience, les tâches sont mieux connues et mises en pratique, ce qui exige qu'on consacre moins d'attention aux aspects de la tâche qui étaient précédemment nouveaux et ce qui diminue la probabilité d'erreurs liées à l'attention capturée.

Dans le cadre de son examen des opérations de loco-commande, la Federal Railroad Administration a cerné comme étant une préoccupation la probabilité accrue d'une canalisation de l'attention lorsque des membres d'équipe ayant relativement peu d'expérience apprennent les opérations de loco-commande en plus de leurs tâches habituelles. Ces problèmes peuvent être aggravés si des opérateurs inexpérimentés sont jumelés pour former une équipe. Plusieurs enquêtes ferroviaires du BST ont cerné le manque d'expérience de l'équipe d'exploitation (formée de cadres ou d'employés syndiqués) comme facteur ayant contribué à plusieurs incidents et accidents. Les défis que pose le jumelage de membres d'équipe inexpérimentés sont les mêmes dans d'autres secteurs du transport.

Il faut que les employés d'exploitation nouvellement qualifiés, qui pourraient être aussi en train d'apprendre de nouvelles tâches et procédures, travaillent pendant un certain temps en compagnie d'employés chevronnés afin d'acquérir suffisamment d'expérience opérationnelle pour être en mesure de travailler de façon autonome et sécuritaire, surtout dans un environnement dynamique de gare de triage. Dans l'événement à l'étude, les 2 membres de l'équipe d'exploitation étaient inexpérimentés et ils apprenaient encore de nouvelles tâches, mais ils ont tout de même été jumelés pour former l'équipe de manœuvre. Si on ne tient pas compte de l'expérience des employés d'exploitation lors du jumelage des équipes d'exploitation, ceci augmente le risque que des erreurs opérationnelles et des accidents se produisent.

2.6 Surveillance réglementaire de la compétence et de la formation des employés d'exploitation ferroviaire

Par le passé, les chefs de train devaient acquérir de l'expérience en tant que serre-freins avant d'être formés pour devenir chefs de train. Ainsi, les stagiaires et les serre-freins profitaient de l'expérience acquise en travaillant en compagnie de chefs de train et de ML plus chevronnés. Cette approche plus progressive à la qualification des équipes d'exploitation offrait plus de possibilités de mentorat pendant que les nouveaux employés d'exploitation travaillaient avec des employés ayant plus de séniorité et qu'ils acquéraient de l'expérience. Au fil du temps, les pratiques ont évolué, et les nouveaux employés et les cadres peuvent dorénavant être formés en tant que chefs de train, et dans certains cas en tant que ML, grâce à un processus de formation accélérée sans avoir nécessairement acquis de l'expérience opérationnelle au préalable.

Depuis l'entrée en vigueur du Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires (le Règlement) il y a 30 ans, d'importants changements opérationnels se sont produits au sein de l'industrie ferroviaire, notamment

Malgré ces changements importants dans les activités des compagnies ferroviaires, le Règlement n'a pas suivi le rythme de l'environnement d'exploitation ferroviaire au fil de son évolution. En ce qui a trait à l'environnement d'exploitation actuel, le Règlement a d'importantes lacunes dans les domaines suivants :

Si la réglementation actuelle n'est pas mise à jour, des lacunes persisteront et Transports Canada (TC) ne sera pas en mesure d'assurer une surveillance réglementaire efficace ni une mise en application de programmes de formation pour les employés syndiqués et les cadres d'exploitation ferroviaire, les opérateurs de loco-commande, les contrôleurs de la circulation ferroviaire et les moniteurs contractuels, de sorte que le risque d'opérations ferroviaires non sécuritaires se perpétuera.

2.6.1 Systèmes de gestion de la sécurité

En plus du Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires, les articles 25 à 27 du Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (Règlement sur le SGS) exigent que la compagnie de chemin de fer ait un processus pour gérer les connaissances, ce qui comprend la formation et la qualification des employés d'exploitation. En ce qui a trait à la gestion des connaissances, le CP avait dressé une liste détaillée de toutes les fonctions essentielles pour les ML et les chefs de train, et avait un processus pour s'assurer et vérifier que ces employés possédaient les compétences et les qualifications requises pour exercer leurs fonctions essentielles à la sécurité ferroviaire. Toutefois, le CP n'avait ni une liste ni un processus semblable pour les opérateurs de loco-commande et les activités Beltpack connexes. Bien que le CP ait effectué des contrôles d'efficacité des opérations de loco-commande en vue de s'assurer que les employés avaient les compétences, les connaissances et les qualifications voulues pour exercer leurs fonctions en toute sécurité, le CP n'estime pas la loco-commande comme étant une fonction essentielle, de sorte que cette activité ne figure pas sur le plan de gestion des connaissances du système de gestion de la sécurité (SGS) du CP.

2.7 Statistiques sur les mouvements imprévus ou non contrôlés

Les mouvements non contrôlés n'ont pas tous des conséquences graves, comme dans le cas de Lac-Mégantic. Les mouvements non contrôlés peuvent se produire pour toute une gamme de raisons. Par conséquent, différentes stratégies d'atténuation pourraient s'avérer nécessaires. Il existe des moyens de défense administratifs (p. ex., le Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada [REF] et les instructions d'exploitation de la compagnie) et des moyens de défense physiques (p. ex., les dérailleurs et les cales de roue) pour protéger contre le risque d'un mouvement non contrôlé. Toutefois, ces moyens de défense ne sont pas toujours utilisés de façon uniforme.

Entre 2008 et 2017 inclusivement, 32 % (soit 175/541) des mouvements non contrôlés au Canada étaient directement attribuables aux manœuvres sans freins à air, comme dans l'événement à l'étude. Parmi les 541 événements, 56 % (302/541) ont entraîné une collision alors que 11 % (61/541) ont eu une incidence sur la voie principale, comme ce fut le cas dans l'événement à l'étude. Même si le nombre d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés a baissé à 51 en 2016, ce chiffre a augmenté à 62 en 2017. La moyenne quinquennale de 59,8 (2013-2017) était plus élevée d'environ 10 % par rapport à la moyenne de 10 ans de 54,1 (2008-2017).

Par suite de l'enquête du BST sur l'accident de Lac-Mégantic, le Bureau a recommandé que TC exige des compagnies ferroviaires canadiennes qu'elles mettent en place des moyens de défense physiques additionnels pour empêcher le matériel de partir à la dérive (recommandation R14-04). En réponse, TC a mis en œuvre plusieurs initiatives, y compris le renforcement de la règle 112 du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF) et un plan de surveillance exhaustif de la nouvelle règle. Quoique le BST soit heureux de constater les mesures prises par TC, le Bureau a souligné que le résultat souhaité, soit une importante réduction du nombre de mouvements non contrôlés, n'a pas encore été réalisé. Le nombre d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés (c.-à-d., matériel roulant parti à la dérive) a augmenté d'environ 10 % au cours des 5 dernières années comparativement à la tendance des 10 dernières années.

2.8 Protection de la voie principale contre les mouvements non contrôlés

Le Règlement concernant la sécurité de la voie (Règlement sur la sécurité de la voie) approuvé par TC exige qu'un dérailleur soit posé lorsque du matériel laissé sur une voie autre qu'une voie principale ou une voie d'évitement risque de rouler par gravité et d'obstruer une voie principale ou une voie d'évitement. Bien qu'il existe d'autres moyens de protection pour empêcher un mouvement non contrôlé de rouler jusque sur la voie principale, aucun autre moyen n'était en place au moment de l'événement.

Comme l'a démontré l'événement à l'étude, la gravité n'est pas le seul facteur qui puisse entraîner le mouvement non contrôlé d'un wagon jusque sur la voie principale. La manœuvre en palier est la principale méthode de composition des trains. Au cours d'une manœuvre en palier, les wagons sont poussés ou manœuvrés par lancement sur les voies pour composer les trains. Les wagons peuvent ne pas toujours s'atteler correctement et certains peuvent occasionnellement se mettre à rouler de façon non contrôlée malgré le profil d'ensemble de la voie. Puisque la pose de dérailleurs est exigée seulement aux endroits où du matériel laissé sur une voie risque de se déplacer sous l'effet de la gravité, la voie principale n'est pas protégée contre les mouvements non contrôlés en toute circonstance. Si les compagnies ferroviaires ne protègent pas la voie principale contre les mouvements non contrôlés en toute circonstance, du matériel qui se met à rouler de façon intempestive pendant des activités de triage pourrait s'engager sur la voie principale ou l'obstruer, ce qui augmente le risque de collisions.

2.8.1 Protection de la voie principale au triage Sutherland

Au triage Sutherland, le profil de la voie à l'extrémité est du triage atteint son sommet dans les environs du point milliaire 109,05. À partir du sommet, le terrain accuse une pente descendante vers l'ouest d'environ 0,25 % en moyenne, dont la pente la plus prononcée (0,40 %) se trouve près de l'aiguillage ouest de triage (point milliaire 109,83). En raison de la pente, des dérailleurs sont en place pour protéger l'extrémité ouest du triage C et des voies G5 à G7. Toutefois, à l'extrémité ouest la plus basse du triage, un certain nombre de voies, y compris la voie D1, la voie d'accès au triage F, et les voies F1 à F13 et G1 à G4, ne sont pas munies de dérailleurs.

Au triage Sutherland, malgré une pente descendante vers l'ouest de 0,25 % en moyenne, malgré le fait qu'il s'était déjà produit des mouvements non contrôlés lorsque du matériel roulant laissé sur une voie s'était mis à rouler par gravité, et malgré l'exigence du Règlement sur la sécurité de la voie relative à la pose d'un dérailleur en pareilles circonstances, aucun dérailleur n'était en place à l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F et à d'autres parties du triage G pour empêcher des mouvements non contrôlés de s'engager sur la voie principale.

2.9 Protection des passages à niveau contre les mouvements non contrôlés

Une fois le wagon EFCX 604991 rendu sur la voie principale, il a franchi 2 passages à niveau publics à l'ouest du triage Sutherland qui étaient tous deux protégés par un système d'avertissement de passage à niveau. Le wagon a tout d'abord franchi le passage à niveau de l'avenue Central (point milliaire 109,78), puis le passage à niveau de la 115th Street (point milliaire 109,88).

L'approche courte du passage à niveau de l'avenue Central était conçue pour assurer un temps d'annonce d'approche de 32 secondes pour des trains roulant à 5 mi/h. Pour veiller à ce que le temps d'annonce d'approche soit suffisant pour les véhicules routiers, le CP exigeait que les mouvements circulant sur la voie d'accès au triage F n'obstruent pas le passage à niveau de l'avenue Central avant que les barrières du système d'avertissement soient à l'horizontale.

Lors de l'événement à l'étude, le système d'avertissement du passage à niveau de l'avenue Central n'était déclenché que depuis 10 secondes et les barrières n'étaient pas complètement à l'horizontale lorsque le wagon EFCX 604991 a occupé le passage à niveau (figure 3). Compte tenu du volume de trafic à ce passage à niveau, la situation posait un risque important pour les véhicules routiers. Si un mouvement non contrôlé peut s'engager sur un passage à niveau avant que le système d'avertissement de passage à niveau soit complètement déployé, le risque d'accident à un passage à niveau est plus grand.

En général, les systèmes d'avertissement sont conçus selon l'usage prévu du passage à niveau et ils assurent un temps d'annonce d'approche suffisant en fonction de la vitesse prévue des véhicules routiers et du matériel ferroviaire. Bien que le passage à niveau de l'avenue Central ait répondu aux exigences du plan de conception et aux exigences réglementaires, il n'était pas conçu pour protéger contre les mouvements non contrôlés qui pouvaient s'engager sur la voie principale à partir du triage Sutherland. Par conséquent, le système d'avertissement de passage à niveau de la voie d'accès au triage F qui se trouvait au passage à niveau de l'avenue Central n'assurait pas un temps d'annonce d'approche suffisant pour protéger le public contre des mouvements non contrôlés.

2.10 Évaluations des risques

La Liste de surveillance 2016 du BST souligne la nécessité d'une mise en œuvre efficace des SGS pour faire en sorte que les dangers soient cernés de façon proactive et que les risques soient maintenus à un niveau acceptable. Le Règlement sur le SGS exige que la compagnie effectue une évaluation des risques lorsqu'elle se propose d'apporter un changement à son exploitation qui pourrait avoir une incidence sur la sécurité du public ou du personnel ou sur la protection des biens et de l'environnement

De tels changements pourraient comprendre, mais sans s'y limiter

Entre 1995 et 2005, il s'est produit 5 événements mettant en cause des mouvements qui se sont mis à rouler de façon non contrôlée en direction ouest au triage Sutherland. Dans 4 cas, le mouvement non contrôlé s'est produit après que la locomotive ou les wagons ont été laissés puis se sont mis en mouvement sous l'effet de la gravité quand les freins se sont desserrés. Après 2005, les équipes de triage du CP ont commencé à effectuer des manœuvres de triage au triage Sutherland surtout en se servant des freins automatiques de train sur tous les wagons. Lorsqu'on se sert des freins automatiques, si un wagon se sépare du mouvement, les freins à air du wagon se serrent automatiquement et arrêtent le wagon. Entre 2005 et 2015, aucun mouvement non contrôlé n'a été signalé au triage Sutherland.

Au début de 2016, plusieurs changements opérationnels ont été adoptés au triage Sutherland. Ces changements opérationnels ont amené le CP à effectuer une évaluation combinée des risques conformément au Règlement sur le SGS. L'évaluation des risques a porté sur les opérations de loco-commande et sur l'instauration d'une PPZ, mais l'évaluation des risques n'a pas tenu compte des répercussions de la réduction du nombre d'équipes de manœuvre ni du changement dans la pratique locale qui consistait à effectuer les manœuvres principalement sans freins à air.

L'évaluation des risques a cerné un certain nombre de dangers possibles liés aux changements proposés, dont 1 était une surcharge de tâches pour les opérateurs. L'évaluation des risques a également relevé un certain nombre d'événements ou de conséquences indésirables comme résultats possibles des dangers. Une surcharge de tâches pour les opérateurs figurait comme danger pour 5 des 6 événements indésirables possibles. Toutefois, l'évaluation des risques n'a pas spécifiquement cerné le danger possible lié au manque d'expérience des membres d'équipe ni la conséquence possible d'un mouvement non contrôlé.

Par conséquent, aucune mesure corrective visant à éviter la possibilité d'un mouvement non contrôlé, telle que la pose d'un dérailleur, n'a été envisagée ni mise en œuvre pour protéger contre les mouvements non contrôlés pendant les manœuvres sans freins à air. Ceci constitue une lacune dans le SGS du CP au chapitre des évaluations des risques liés aux changements opérationnels. Si des résultats néfastes, comme des mouvements non contrôlés, ne sont pas cernés, des stratégies d'atténuation risquent de ne pas être mises en œuvre.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'incident s'est produit lorsque le wagon à l'extrémité ouest (EFCX 604991) de la manœuvre de formation au système de télécommande de locomotive 2300 du Chemin de fer Canadien Pacifique s'est mis à rouler de façon non contrôlée en direction ouest et est sorti de la voie F6 du triage Sutherland.
  2. Après avoir arrêté la manœuvre, alors que le wagon EFCX 604991 se trouvait à l'extrémité est de la voie F6 et que le reste de la manœuvre occupait l'extrémité est de la voie d'accès au triage F, le contremaître a serré le frein à main du wagon EFCX 604991, a effectué un essai de l'efficacité du frein à main et a soulevé le levier de dételage en préparation pour le dételage, conformément à la procédure normale.
  3. Pour dégager l'extrémité est de la voie d'accès au triage F afin de permettre au train-bloc de potasse 602 du Chemin de fer Canadien Pacifique de circuler dans la zone de protection des mouvements non accompagnés, le contremaître a décidé de pousser toute la manœuvre vers l'ouest jusque dans la voie F6.
  4. Pour se préparer à pousser la manœuvre vers l'ouest jusque dans la voie F6, le contremaître a desserré le frein à main du wagon EFCX 604991 mais il n'a pas actionné de nouveau l'attelage avant d'entreprendre le mouvement.
  5. La manœuvre s'est dirigée vers l'ouest et, lorsqu'elle s'est arrêtée, le wagon EFCX 604991, dont la mâchoire était déjà détachée, s'est dételé de la manœuvre et s'est mis à rouler de façon non contrôlée dans le triage.
  6. Comme il n'y avait aucun dérailleur en place à l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F, le wagon a poursuivi son mouvement non contrôlé jusque sur la voie principale à l'ouest du triage Sutherland.
  7. Lorsque la tâche de triage a été interrompue par l'équipe du train-bloc de potasse 602 du Chemin de fer Canadien Pacifique qui demandait la permission d'entrer dans la zone de protection des mouvements non accompagnés, le contremaître ne s'est pas souvenu avoir soulevé le levier de dételage et que le wagon EFCX 604991 était en fait dételé.
  8. L'apprentissage des tâches additionnelles liées aux opérations de télécommande de locomotive et à la gestion de la zone de protection des mouvements non accompagnés de concert avec le manque relatif d'expérience du contremaître de triage ont augmenté la probabilité d'une erreur d'inattention à l'égard du dételage qui a entraîné le mouvement non contrôlé.
  9. Au triage Sutherland, malgré une pente descendante vers l'ouest de 0,25 % en moyenne, malgré le fait qu'il s'était déjà produit des mouvements non contrôlés lorsque du matériel roulant laissé sur une voie s'était mis à rouler par gravité, et malgré l'exigence du Règlement concernant la sécurité de la voie relative à la pose d'un dérailleur en pareilles circonstances, aucun dérailleur n'était en place à l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F et à d'autres parties du triage G pour empêcher des mouvements non contrôlés de s'engager sur la voie principale.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Si des mouvements non contrôlés peuvent entrer sur la voie principale sans être détectés, des trains ou des mouvements en approche pourraient ne pas être avertis en temps opportun et ne pas être capables de prendre les mesures qui s'imposent, ce qui augmente le risque de collisions.
  2. Si on ne tient pas compte de l'expérience des employés d'exploitation lors du jumelage des équipes d'exploitation, ceci augmente le risque que des erreurs opérationnelles et des accidents se produisent.
  3. Si la réglementation actuelle n'est pas mise à jour, des lacunes persisteront et Transports Canada ne sera pas en mesure d'assurer une surveillance réglementaire efficace ni une mise en application de programmes de formation pour les employés syndiqués et les cadres d'exploitation ferroviaire, les opérateurs de télécommande de locomotive, les contrôleurs de la circulation ferroviaire et les moniteurs contractuels, de sorte que le risque d'opérations ferroviaires non sécuritaires se perpétuera.
  4. Si les compagnies ferroviaires ne protègent pas la voie principale contre les mouvements non contrôlés en toute circonstance, du matériel qui se met à rouler de façon intempestive pendant des activités de triage pourrait s'engager sur la voie principale ou l'obstruer, ce qui augmente le risque de collisions.
  5. Si un mouvement non contrôlé peut s'engager sur un passage à niveau avant que le système d'avertissement de passage à niveau soit complètement déployé, le risque d'accident à un passage à niveau est plus grand.
  6. Si des résultats néfastes, comme des mouvements non contrôlés, ne sont pas cernés, des stratégies d'atténuation risquent de ne pas être mises en œuvre.

3.3 Autres faits établis

  1. Étant donné que les postes de triage sont habituellement attribués aux employés d'exploitation qui ont le moins de séniorité, il n'est pas rare pour une équipe de triage qui effectue des opérations de télécommande de locomotive d'être formée de 2 chefs de train qui ont peu d'expérience opérationnelle et de la télécommande de locomotive.
  2. Bien que le Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) ait effectué des contrôles d'efficacité des opérations de télécommande de locomotive en vue de s'assurer que les employés avaient les compétences, les connaissances et les qualifications voulues pour exercer leurs fonctions en toute sécurité, le CP n'estime pas la télécommande de locomotive comme étant une fonction essentielle, de sorte que cette activité ne figure pas sur le plan de gestion des connaissances du système de gestion de la sécurité du CP.
  3. Le nombre d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés (c.-à-d., matériel roulant parti à la dérive) a augmenté d'environ 10 % au cours des 5 dernières années comparativement à la tendance des 10 dernières années.
  4. Le système d'avertissement de passage à niveau de la voie d'accès au triage F qui se trouvait au passage à niveau de l'avenue Central n'assurait pas un temps d'annonce d'approche suffisant pour protéger le public contre des mouvements non contrôlés.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 26 avril 2016, le Bureau de la sécurité des transports du Canada a transmis à Transports Canada (TC) l'avis de sécurité ferroviaire 09/16 au sujet de la protection de la voie principale contre les mouvements non contrôlés au triage Sutherland du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP). L'avis indiquait que, malgré les changements opérationnels apportés au triage Sutherland, aucun dérailleur n'avait été posé à l'extrémité ouest du triage pour protéger contre les mouvements non contrôlés possibles. L'avis indiquait également que, compte tenu des dangers possibles liés au matériel qui pourrait partir à la dérive, TC pourrait vouloir examiner comment la voie principale est protégée au triage Sutherland du CP pour s'assurer que les risques et les conséquences de mouvements non contrôlés sont minimisés.

En réponse à l'avis, TC a laissé savoir qu'il croyait que l'utilisation du système de télécommande de locomotive n'avait pas contribué à l'incident à l'étude. À cet égard, TC a indiqué notamment ce qui suit :

4.1.2 Chemin de fer Canadien Pacifique

À la suite de l'événement, le CP a repris les manœuvres avec freins à air sur les wagons au triage Sutherland. Au moment de la parution du présent rapport, les locomotives télécommandées n'étaient plus utilisées pour les opérations de triage. Les manœuvres de triage étaient de nouveau effectuées par des équipes traditionnelles (équipes de 3 personnes).

Le CP a apporté les modifications suivantes à sa politique et procédure internes d'évaluation des risques :

4.2 Préoccupations liées à la sécurité

4.2.1 Mouvements non contrôlés

Les mouvements non contrôlés peuvent se produire à cause d'une perte de maîtrise, de manœuvres sans freins à air ou d'une immobilisation insuffisante. Dans l'événement à l'étude, la manœuvre de formation (la manœuvre) au système de télécommande de locomotive 2300 du Chemin de fer Canadien Pacifique effectuait des manœuvres sans freins à air alors qu'elle poussait une rame de wagons jusque dans la voie F6 au triage Sutherland à Saskatoon (Saskatchewan). Lorsque la manœuvre s'est arrêtée, un wagon vide s'est dételé du train à l'insu de l'équipe. Le wagon s'est mis à rouler de façon non contrôlée, a traversé le triage et s'est engagé sur la voie principale à l'intérieur de la zone de marche prudente de la subdivision de Sutherland. Le wagon a parcouru environ 1 mille et a franchi 2 passages à niveau publics munis de systèmes d'avertissement automatiques de passage à niveau avant de s'arrêter de lui-même.

Pour l'ensemble des compagnies ferroviaires de compétence fédérale, entre 2008 et 2017, 541 mouvements imprévus ou non contrôlés ont été signalés au BST. Comme ce fut le cas dans l'événement à l'étude, 32 % (175/541) des mouvements non contrôlés étaient directement attribuables aux manœuvres sans freins à air. Parmi les 541 événements, 56 % (302/541) ont entraîné une collision et 11 % (51/541) ont eu une incidence sur la voie principale, comme dans l'événement à l'étude.

Depuis 1994, le BST a enquêté sur 27 autres événements mettant en cause des mouvements non contrôlés. Le BST a soulevé la nécessité d'avoir des moyens de défense robustes pour empêcher les mouvements non contrôlés depuis le milieu des années 1990Note de bas de page 37. Le plus important de tous les événements mettant en cause des mouvements non contrôlés sur lesquels le BST a fait enquête est celui survenu en 2013 à Lac-MéganticNote de bas de page 38.

On peut catégoriser les mouvements non contrôlés comme étant des événements qui ne se produisent pas souvent mais qui peuvent comporter des risques élevés. En particulier, les mouvements non contrôlés qui ont une incidence sur la voie principale comportent le plus grand risque de résultat néfaste. Les événements de ce genre peuvent avoir des conséquences graves, surtout si des marchandises dangereuses sont en cause. Comme on a pu le constater à Lac-Mégantic, le coût en termes de vies humaines et de répercussions sur les collectivités peut être incalculable. C'est pourquoi le Bureau a recommandé que

Le ministère des Transports exige que les compagnies ferroviaires canadiennes mettent en place des moyens de défense physiques additionnels pour empêcher le matériel de partir à la dérive.
Recommandation R14-04 du BST

En réponse à la recommandation du BST, Transports Canada (TC) a émis une injonction ministérielle relative aux moyens de défense physiques additionnels pour les trains avec locomotives en marche laissés sur la voie principale. TC a également exigé que les compagnies de chemin de fer formulent des règles relatives à l'immobilisation du matériel ferroviaire. À la suite de longues consultations avec l'industrie, la règle 112 du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF) nouvellement révisée a été approuvée par le ministre des Transports et est entrée en vigueur le 15 octobre 2015. La règle 112 du REF révisée, Matériel roulant laissé sans surveillance, comprend 7 mesures de contrôle qui peuvent servir de moyens secondaires d'immobilisation physique en vue de réduire le risque de mouvements non contrôlés.

En mars 2017, le Bureau a réévalué la réponse de TC à la recommandation R14-04 et a reconnu les efforts déployés par TC pour la révision de la règle 112 du REF. La réévaluation indiquait que

Le Bureau est heureux de constater que TC a mis en œuvre plusieurs initiatives, y compris une règle renforcée et un plan de surveillance exhaustif de cette nouvelle règle. Toutefois, comme le résultat souhaité, soit une importante réduction du nombre de mouvements incontrôlés, n'a pas encore été réalisé, le Bureau estime que la réponse à la recommandation est en partie satisfaisante.

Le Bureau reconnaît que les mouvements non contrôlés n'ont pas tous des conséquences graves, comme dans le cas de Lac-Mégantic. Les mouvements non contrôlés peuvent se produire pour toute une gamme de raisons et, par conséquent, différentes stratégies d'atténuation s'avéreront nécessaires.

Il existe des moyens de défense administratifs (p. ex., le REF et les instructions d'exploitation de la compagnie) et des moyens de défense physiques (p. ex., les dérailleurs et les cales de roue) pour protéger contre le risque d'un mouvement non contrôlé. Toutefois, ces moyens de défense ne sont pas toujours utilisés de façon uniforme.

Dans l'événement à l'étude, au triage Sutherland, le terrain accusait une pente descendante vers l'ouest de 0,25 % et il s'y était déjà produit des mouvements non contrôlés lorsque du matériel roulant laissé sans surveillance s'était mis à rouler par gravité. Malgré l'exigence du Règlement concernant la sécurité de la voie approuvé par TC relative à la pose d'un dérailleur en pareilles circonstances, aucun dérailleur n'était en place à l'extrémité ouest de la voie d'accès au triage F pour empêcher des mouvements non contrôlés de s'engager sur la voie principale.

Bien que le nombre d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés ait baissé à 51 en 2016, il a augmenté à 62 en 2017. Comparativement à la moyenne de 10 ans (2008-2017) qui est de 54,1 mouvements non contrôlés par année, le nombre moyen d'événements mettant en cause des mouvements non contrôlés au cours des 5 années les plus récentes (2013-2017) a augmenté de 10 % pour passer à 59,8, et l'année 2017 a connu le deuxième plus grand nombre de mouvements non contrôlés (62). Les mouvements non contrôlés continuent de présenter un risque pour le réseau de transport ferroviaire et peuvent avoir des résultats néfastes. Par conséquent, le Bureau s'inquiète du fait que les moyens de défense actuels ne sont pas suffisants pour réduire le nombre de mouvements non contrôlés et pour améliorer la sécurité.

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Endroits où le Chemin de fer Canadien Pacifique utilise le système de télécommande de locomotive et endroits où il se propose de le faire

Endroit Nombre de locomotives munies d'un système de télécommande Type de service
Bredenbury 3 Industriel
Coquitlam 8 Triage
Calgary 6 Triage
Edmonton 5 Triage /Industriel
Hamilton 1 Industriel
Lethbridge 3 Triage
London 1 Industriel
Montréal 4 Triage
Moose Jaw 5 Triage
Regina 1 Triage
Sutherland 2 Triage
Thunder Bay 1 Triage
Toronto 2 Industriel
Welland 1 Industriel
Winnipeg 4 Triage

Annexe B – Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire

L'article 5 du Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (Règlement sur le SGS) stipule ce qui suit :

La compagnie de chemin de fer élabore et met en œuvre un système de gestion de la sécurité qui comprend :

  1. un processus visant la responsabilité et l'obligation de rendre compte;
  2. un processus à l'égard de la politique de sécurité;
  3. un processus pour veiller au respect des règlements, des règles et des autres instruments;
  4. un processus pour gérer les accidents ferroviaires;
  5. un processus pour cerner les préoccupations en matière de sécurité;
  6. un processus visant les évaluations des risques;
  7. un processus pour mettre en œuvre et évaluer les mesures correctives;
  8. un processus pour établir les objectifs et élaborer des initiatives;
  9. un processus pour signaler les infractions et les dangers pour la sécurité;
  10. un processus pour gérer la connaissance;
  11. un processus à l'égard de l'établissement des horaires;
  12. un processus visant l'amélioration continue du système de gestion de la sécurité.

L'article 15 du Règlement sur le SGS stipule ce qui suit :

Processus visant les évaluations des risques

  1. (1) La compagnie de chemin de fer effectue une évaluation des risques dans les circonstances suivantes :
    1. lorsqu'elle cerne une préoccupation en matière de sécurité dans son exploitation ferroviaire à la suite des analyses effectuées en vertu de l'article 13;
    2. lorsqu'elle se propose d'entreprendre le transport de marchandises dangereuses ou le transport de marchandises dangereuses différentes de celles qu'elle transporte déjà;
    3. lorsqu'un changement proposé à son exploitation ferroviaire — y compris les changements ci-après — peut avoir une incidence sur la sécurité du public ou du personnel ou sur la protection des biens et de l'environnement :
      1. l'introduction ou l'élimination d'une technologie ou une modification apportée à une technologie,
      2. l'ajout ou l'élimination d'une installation ferroviaire ou une modification apportée à une installation ferroviaire,
      3. une augmentation du volume des marchandises dangereuses qu'elle transporte,
      4. une modification apportée au trajet emprunté pour le transport des marchandises dangereuses,
      5. une modification touchant le personnel, y compris une augmentation ou une réduction du nombre d'employés ou une modification apportée à leurs responsabilités ou à leurs fonctions.

Composantes

  1. L'évaluation des risques, à la fois :
    1. décrit les circonstances qui ont entraîné l'obligation d'effectuer l'évaluation des risques;
    2. cerne et décrit les risques associés à ces circonstances;
    3. cerne les facteurs dont il est tenu compte dans l'évaluation des risques, y compris les personnes qui peuvent être touchées et si les biens ou l'environnement sont touchés;
    4. indique, pour chaque risque, la probabilité qu'il se produise et la gravité de ses conséquences;
    5. cerne les risques qui exigent des mesures correctives;
    6. cerne les mesures correctives visant chacun de ces risques.

Les articles 25 à 27 du Règlement sur le SGS stipulent ce qui suit :

Processus pour gérer la connaissance

Liste

  1. (1) La compagnie de chemin de fer établit une liste prévoyant :
    1. les fonctions essentielles à la sécurité ferroviaire;
    2. les postes dans la compagnie de chemin de fer dont relève la responsabilité de l'exercice de chacune de ces fonctions;
    3. les compétences et les qualifications requises pour exercer chacune de ces fonctions en toute sécurité.

Employés — compétences et qualifications

  1. Elle veille à ce que tout employé exerçant l'une ou l'autre des fonctions visées à l'alinéa (1)a) possède les compétences et les qualifications visées à l'alinéa (1)c).

Employés — connaissances

  1. Elle veille à ce que tout employé exerçant l'une ou l'autre des fonctions visées à l'alinéa (1)a) connaisse ce qui suit :
    1. les exigences des instruments visés au paragraphe 10(1) que l'employé doit connaître pour exercer ses fonctions en toute sécurité;
    2. les lois fédérales qui peuvent avoir une incidence sur la sécurité ferroviaire et que l'employé doit connaître pour exercer ses fonctions en toute sécurité;
    3. les procédures — y compris toute procédure mentionnée dans la présente partie — normes, instructions, bulletins ou autres documents internes de la compagnie de chemin de fer qui peuvent avoir une incidence sur la sécurité ferroviaire et que l'employé doit connaître pour exercer ses fonctions en toute sécurité.

Autres personnes

  1. La compagnie de chemin de fer veille à ce que toute personne, autre qu'un employé, qu'elle autorise à accéder au chemin de fer et dont les activités peuvent avoir une incidence sur la sécurité ferroviaire connaisse ce qui suit :
    1. les exigences des instruments visés au paragraphe 10(1) que la personne doit connaître pour exercer ses activités en toute sécurité;
    2. les lois fédérales qui peuvent avoir une incidence sur la sécurité ferroviaire et que la personne doit connaître pour exercer ses activités en toute sécurité;
    3. les procédures — y compris toute procédure mentionnée dans la présente partie — normes, instructions, bulletins ou autres documents internes de la compagnie de chemin de fer qui peuvent avoir une incidence sur la sécurité ferroviaire et que la personne doit connaître pour exercer ses activités en toute sécurité.

Plan et méthodes

  1. La compagnie de chemin de fer inclut, dans son système de gestion de la sécurité :
    1. un plan pour veiller à ce que tout employé exerçant l'une ou l'autre des fonctions visées à l'alinéa 25(1)a) possède les compétences et les qualifications visées à l'alinéa 25(1)c) et les connaissances visées au paragraphe 25(3);
    2. une méthode pour vérifier que tout employé exerçant l'une ou l'autre des fonctions visées à l'alinéa 25(1)a) possède les compétences et les qualifications visées à l'alinéa 25(1)c) et les connaissances visées au paragraphe 25(3);
    3. une méthode pour superviser tout employé exerçant l'une ou l'autre des fonctions visées à l'alinéa 25(1)a);
    4. une méthode pour vérifier que la personne visée à l'article 26 possède les connaissances visées à cet articleNote de bas de page 39.

Annexe C – Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires

Le Règlement sur les normes de compétence des employés ferroviaires stipule, notamment, ce qui suit :

Dispositions générales

  1. La compagnie de chemin de fer doit donner à ses employés la formation nécessaire pour l'application du présent règlement.
  2. (1) La compagnie de chemin de fer ne peut permettre à un employé de remplir les fonctions de mécanicien de locomotive, de mécanicien de manœuvre, de chef de train ou de contremaître de triage, que si l'employé :
    1. a la compétence requise pour cette catégorie d'emploi, conformément à l'article 14; et
    2. dans le cas d'un mécanicien de locomotive ou d'un mécanicien de manœuvre, a obtenu la note de passage requise pour la formation en cours d'emploi propre à cette catégorie d'emploi.
    […]
  3. La compagnie de chemin de fer doit donner aux candidats au poste de mécanicien de locomotive ou de mécanicien de manœuvre une formation en cours d'emploi dans les sujets requis qui est suffisante pour leur permettre de démontrer aux moniteurs et aux examinateurs qu'ils ont la compétence nécessaire pour s'acquitter des fonctions requises.
  4. L'examinateur ne peut accorder une note de passage pour la formation en cours d'emploi au candidat au poste de mécanicien de locomotive ou de mécanicien de manœuvre que s'il :
    1. est convaincu que le candidat a la compétence nécessaire pour s'acquitter des fonctions requises :
      1. en obtenant du mécanicien de locomotive ou du mécanicien de manœuvre avec qui le candidat a effectué ses voyages de formation en cours d'emploi, une évaluation de la compétence du candidat,
      2. en évaluant la compétence du candidat à la conduite d'une locomotive ou d'un train, ou des deux, selon les exigences de la catégorie d'emploi pour laquelle le candidat subit un examen; et
    2. a rempli, signé et versé au dossier que conserve le service du personnel sur le candidat un document attestant que celui-ci a réussi la formation en cours d'emploi.
  5. L'examinateur fixe la note globale du candidat à partir des examens oraux ou écrits, ou des deux, sur les sujets requis, que le candidat subit en classe.
  6. L'employé qui reçoit une formation en cours d'emploi en vue d'accéder au poste de mécanicien de locomotive ou de mécanicien de manœuvre peut, pendant toute la durée de sa formation, exercer les fonctions de la catégorie d'emploi à laquelle il est candidat, s'il le fait sous la direction d'un moniteur de formation en cours d'emploi.
    1. La compagnie de chemin de fer doit, à des intervalles ne dépassant pas trois ans, faire subir à tous les employés d'une catégorie d'emploi un réexamen sur les sujets requis.
    2. La note de passage d'un réexamen est de 80 pour cent.
    […]
    1. Dans les 90 jours qui suivent l'entrée en vigueur du présent règlement, la compagnie de chemin de fer doit déposer auprès du Comité deux exemplaires de chaque genre d'examen théorique qu'elle utilise et deux exemplaires d'une description détaillée de chacune de ses méthodes d'évaluation des connaissances pratiques.
    2. La compagnie de chemin de fer doit aviser le Comité de tout changement de genre d'examen théorique ou de méthode d'évaluation des connaissances pratiques, dans les 90 jours qui suivent la mise en œuvre du changement.
    […]

Compétence requise des candidats

    1. Les sujets requis pour accéder à un poste d'une catégorie d'emploi auprès d'une compagnie de chemin de fer sont ceux indiqués par un « X » à l'annexe, abstraction faite des sujets ou questions qui traitent de matériel que la compagnie de chemin de fer n'utilise pas.
    2. La compagnie de chemin de fer ne peut accepter dans une catégorie d'emploi que les personnes qui ont obtenu une note globale d'au moins 80 pour cent dans les sujets requis.

Compétence requise des moniteurs de formation en cours d'emploi

  1. La compagnie de chemin de fer ne peut autoriser une personne à exercer les fonctions de moniteur de formation en cours d'emploi pour la catégorie d'emploi de mécanicien de locomotive, que si celle-ci :
    1. satisfait aux exigences applicables au mécanicien de locomotive et obtient une note globale d'au moins 90 pour cent; et
    2. a au moins deux années d'expérience à titre de mécanicien de locomotive, y compris une période minimale de trois mois de service dans la région où elle est censée donner la formation en cours d'emploi.
  2. La compagnie de chemin de fer ne peut autoriser une personne à exercer les fonctions de moniteur de formation en cours d'emploi pour la catégorie d'emploi de mécanicien de manœuvre, que si celle-ci :
    1. satisfait aux exigences applicables au mécanicien de manœuvre et obtient une note globale d'au moins 90 pour cent; et
    2. a au moins un an d'expérience à titre de mécanicien de manœuvre, y compris une période minimale de trois mois de service dans la région où elle est censée donner la formation en cours d'emploi.

Compétence requise des moniteurs de formation théorique

  1. La compagnie de chemin de fer ne peut employer une personne à titre de moniteur de formation théorique dans l'un des sujets requis, que si celle-ci a obtenu une note d'au moins 90 pour cent dans un examen écrit sur le sujet.

Compétence requise des examinateurs

  1. L'employé ou le cadre d'une compagnie de chemin de fer qui agit comme moniteur de formation en cours d'emploi ou moniteur de formation théorique est habilité à remplir les fonctions d'examinateur pour les sujets dans lesquels il est compétent pour agir comme moniteur.

Programmes de formation et consultation

    1. La compagnie de chemin de fer doit mettre sur pied à l'intention de ses employés des programmes de formation pour chaque catégorie d'emploi.
    2. La compagnie de chemin de fer doit mettre sur pied et modifier ses programmes de formation en consultation avec les syndicats ouvriers représentant les employés des diverses catégories d'emploi.
    3. La compagnie de chemin de fer doit, dans les 90 jours qui suivent l'entrée en vigueur du présent règlement, déposer auprès du Comité une description de tous ses programmes de formation pour chaque catégorie d'emploi.
    4. La compagnie de chemin de fer doit déposer auprès du Comité une description de tout changement apporté à ses programmes de formation, dans les 90 jours de la mise en œuvre du changement.

Rapports

  • 20 (1) Pour chaque année civile, la compagnie de chemin de fer doit déposer auprès du Comité, au plus tard le 31 mars de l'année suivante, un rapport exhaustif sur les programmes de formation qu'elle offre à ses employés.
  •      (2) Le rapport mentionné au paragraphe (1) doit préciser ce qui suit :
    1. le nombre total d'employés de chaque catégorie d'emploi;
    2. pour chaque catégorie d'emploi, le nombre total d'employés ayant reçu une formation;
    3. le nombre d'employés ayant reçu une formation qui satisfont aux exigences de formation de chaque catégorie d'emploi et le nombre de ceux qui n'y satisfont pas;
    4. les techniques ou les moyens nouveaux ou améliorés qui servent aux programmes de formation à l'intention des employésNote de bas de page 40.

Annexe D – Résumé du Code of Federal Regulations, Title 49, Part 240 and Part 242 - Training program certification requirements de la Federal Railroad Administration du Department of Transportation des États-Unis

Les parties 240 et 242 du Code of Federal Regulations (CFR), Title 49, précisent ce qui suit :

[traduction]

Annexe E – Enquêtes du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur des mouvements non contrôlés

Numéro Numéro d'événement Date Description Endroit
1 R16W0059 2016-03-01 Matériel roulant à la dérive, Cando Rail Services, Manœuvre 2200 du Co‑op Refinery Complex, Point milliaire 91,10, Subdivision de Quappelle Regina (Saskatchewan)
2 R15D0103 2015-10-29 Wagons partis à la dérive et déraillement en voie non principale, Chemin de fer Canadien Pacifique, Rame de wagons entreposée, Point milliaire 2,24, Embranchement d'Outremont Montréal (Québec)
3 R15T0173 2015-07-29 Dérive, collision et déraillement de matériel roulant en voie non principale, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 0,0, subdivision de Halton Concord (Ontario)
4 R13D0054 2013-07-06 Train parti à la dérive et déraillement en voie principale, Train de marchandises MMA-002 de la Montreal, Maine & Atlantic Railway, Point milliaire 0,23, Subdivision de Sherbrooke Lac-Mégantic (Québec)
5 R12E0004 2012-01-18 Collision en voie principale entre du matériel roulant à la dérive et le train A45951-16 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 44,5, Subdivision de Grande Cache Hanlon (Alberta)
6 R11Q0056 2011-12-11 Train parti à la dérive, Train de marchandises LIM-55 du Chemin de fer QNS&L, Point milliaire 67,20, Subdivision de Wacouna Dorée (Québec)
7 R09D0053 2009-09-09 Collision hors d'une voie principale, Locomotive 6425 de VIA Rail Canada Inc., Centre de maintenance de Montréal de VIA Rail Canada Inc. Montréal (Québec)
8 R09T0057 2009-02-11 Train à la dérive et déraillement hors d'une voie principale, Southern Ontario Railway, Train de manœuvre 0900 d'Hagersville, Points milliaires 0,10 et 1,9, Embranchement Hydro Nanticoke (Ontario)
9 R08V0270 2008-12-29 Train parti à la dérive et collision hors d'une voie principale, Kettle Falls International Railway, Mission de Waneta, Point milliaire 141,20, Subdivision de Kettle Falls Waneta (Colombie-Britannique)
10 R07H0015 2007-07-04 Matériel roulant à la dérive, Chemin de fer Canadien Pacifique, Tranche de wagons à la dérive, Point milliaire 119,5, Subdivision de Winchester Smiths Falls (Ontario)
11 R07V0109 2007-04-23 Déraillement sur une voie autre que la voie principale, Kootenay Valley Railway, Manœuvre 0700 Trail, Point milliaire 19,0, Subdivision de Rossland Trail (Colombie-Britannique)
12 R06V0183 2006-09-03 Train à la dérive et déraillement, Train de travaux 114 du White Pass and Yukon Railway, Point milliaire 36,5, Subdivision Canadian Log Cabin (Colombie-Britannique)
13 R06V0136 2006-06-29 Matériel roulant parti à la dérive et déraillement, Train de marchandises L-567-51-29 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 184,8, Subdivision de Lillooet près de Lillooet (Colombie-Britannique)
14 R05H0011 2005-05-02 Wagons à la dérive et collision en voie principale, Train de marchandises numéro 441 de l'Ottawa Central Railway, Point milliaire 34,69, Subdivision d'Alexandria Maxville (Ontario)
15 R04V0100 2004-07-08 Matériel roulant à la dérive, Train M‑359-51-07 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 57,7, Subdivision de Fraser Bend (Colombie-Britannique)
16 R03T0026 2003-01-21 Collision dans un triage, Wagon numéro HOKX 111044 du Chemin de fer Canadien Pacifique, Point milliaire 197,0, Subdivision de Belleville, Triage Toronto Agincourt (Ontario)
17 R03T0047 2003-01-22 Collision dans un triage, Wagon-citerne PROX 77811 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 25,0, Subdivision de York Toronto (Ontario)
18 R99D0159 1999-08-27 Wagons partis à la dérive, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 69,4, Subdivision de Kingston, Embranchement Wesco Cornwall (Ontario)
19 R98M0029 1998-09-24 Dérive de wagons, collision et déraillement en voie principale, Train numéro A402-21-24 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 105,4, Subdivision de Mont-Joli du Chemin de fer de la Matapédia Mont-Joli (Québec)
20 R98M0020 1998-07-31 Dérive d'un wagon et collision en voie principale, Train de voyageurs numéro 14 de VIA Rail Canada Inc. et un five-pak à la dérive, Point milliaire 105,7, Subdivision de Mont-Joli du Chemin de fer de la Matapédia Mont-Joli (Québec)
21 R97C0147 1997-12-02 Dérive de wagons et déraillement, Train numéro 353-946 du Chemin de fer Canadien Pacifique, Subdivision de Laggan Field (Colombie-Britannique)
22 R96C0172 1996-08-12 Collision en voie principale, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Train numéro 117 et 20 wagons partis à la dérive, Point milliaire 122,9, Subdivision d'Edson Près d'Edson (Alberta)
23 R96C0209 1996-10-09 Wagons partis à la dérive, Chemin de fer Canadien Pacifique, Manoeuvre de triage CP 0700, Point milliaire 166,2, Subdivision de Willingdon, voie d'échange de Clover Bar Edmonton (Alberta)
24 R96T0137 1996-04-24 Cinq wagons-citernes partis à la dérive, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 0,0, Subdivision d'Hagersville Nanticoke (Ontario)
25 R96C0086 1996-04-13 Train parti à la dérive, Train de marchandises numéro 607-042 du Chemin de fer Canadien Pacifique, Point milliaire 133,0, Subdivision de Laggan Field (Colombie-Britannique)
26 R95M0072 1995-12-14 Wagons partis à la dérive, Train numéro 130-13 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 0,0, Subdivision de Pelletier Edmundston (Nouveau-Brunswick)
27 R94V0006 1994-01-18 Train parti à la dérive, Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, Point milliaire 175, Subdivision de Grande Cache Latornell (Alberta)