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Faits établis par l’enquête A18Q0030 du BST – Sortie en bout de piste à l’atterrissage survenue en février 2018 à Havre-Saint-Pierre (Québec)

Les enquêtes menées par le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sont complexes. Un accident résulte rarement d’une seule cause. Plusieurs facteurs sont à l’origine de la sortie en bout de piste survenue en février 2018 à Havre-Saint-Pierre (Québec). Ceux-ci sont contenus dans les 8 faits établis ci-dessous quant aux causes et facteurs contributifs. L’enquête a également permis d’établir 13 faits quant aux risques.

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

  1. Le commandant a poursuivi l’approche au-delà du repère d’approche finale alors que la visibilité rapportée était inférieure aux minimums relatifs à l’interdiction d’approche.
  2. Lors de l’approche, le balisage lumineux de piste avait été réduit à l’intensité moyenne, soit à 30 % du maximum, ce qui diminuait la probabilité d’acquérir la référence visuelle requise pour effectuer l’atterrissage sur la piste.
  3. Le commandant a poursuivi la séquence d’atterrissage sans voir ni connaître la longueur de piste restant devant lui et sans pouvoir évaluer avec précision la position de l’avion.
  4. L’appareil s’est posé à environ 3800 pieds après le seuil, soit à 700 pieds de l’extrémité de la piste, et a terminé sa course 220 pieds au-delà de la piste, dans un banc de neige.
  5. La déviation par rapport aux procédures d’utilisation normalisées à un moment critique du vol a été source de confusion entre les membres d’équipage, si bien que l’appareil n’a pas été configuré pour l’atterrissage, ce qui a augmenté la distance d’atterrissage.
  6. Le commandant, concentré sur la manœuvre d’atterrissage et sous l’influence d’un rétrécissement de l’attention, n’a pas su prendre la décision d’effectuer une remise des gaz, a perdu la notion du temps et a survolé la piste pendant 20 secondes sans réaliser qu’il lui était désormais impossible de se poser et de s’arrêter avant la fin de la piste.
  7. En l’absence de politiques, de procédures claires et de formation, le premier officier n’avait pas les outils nécessaires pour passer de la consultation passive à une assertivité suffisante pour convaincre le commandant d’effectuer une remise des gaz.
  8. L’interdiction d’approche a été inefficace pour stopper cette approche alors que la visibilité au sol était inférieure aux minimums relatifs à l’interdiction d’approche.

Faits établis quant aux risques

Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

  1. Si Transports Canada ne simplifie pas les minimums opérationnels d’approche et d’atterrissage, les équipages de conduite risquent de poursuivre une approche qui est en réalité interdite, ce qui augmente le risque d’accidents liés à l’approche et à l’atterrissage.
  2. Si les membres d’équipage de conduite n’ont pas une conscience situationnelle commune, ils ne peuvent ni anticiper ni coordonner leurs actions, ce qui augmente le risque d’accident lié à l’approche et à l’atterrissage.
  3. Si les pilotes poursuivent une approche sous l’altitude minimale de descente avec une seule référence visuelle, ils risquent de continuer l’atterrissage alors qu’ils n’ont pas acquis les références visuelles supplémentaires requises pour atterrir en toute sécurité.
  4. Si un exposé de sécurité n’est pas donné aux passagers avant l’atterrissage pour leur rappeler d’attacher leur ceinture, certains d’entre eux risquent de ne pas l’attacher avant l’atterrissage, ce qui augmente le risque de blessure en cas d’accident.
  5. Si les sièges passagers installés à bord d’aéronefs légers ne sont pas munis de ceintures-baudriers, les passagers sont exposés à un plus grand risque de blessure plus ou moins grave, voire mortelle, en cas d’accident.
  6. Si l’exécution du plan de mesures d’urgence de l’aéroport est interrompue et que le service de protection contre les incendies n’est pas appelé rapidement pour sécuriser le lieu de l’accident, il existe un risque de blessure pour les personnes sur le lieu de l’accident et de dommages aux installations aéroportuaires et à l’environnement.
  7. Si les pistes d’une longueur de 1200 m ou plus ne sont pas pourvues d’une aire de sécurité d’extrémité de piste d’au moins 150 m ou d’un autre dispositif d’arrêt des aéronefs offrant un niveau de sécurité équivalent, il existe un risque de blessure pour les occupants d’aéronefs en cas de sortie en bout de piste.
  8. Si les exploitants d’aéroport ne sont pas tenus de fermer une piste lorsque la limite d’un critère du plan de déneigement est dépassée, le risque de sortie de piste est plus grand.
  9. Si les exposés d’approche des procédures d’utilisation normalisées ne couvrent pas tous les éléments limitatifs pour l’approche, les pilotes risquent d’effectuer une approche hors des limites établies, ce qui augmente le risque d’accident lié à l’approche et à l’atterrissage.
  10. Si les pilotes ne sont pas bien préparés à exécuter une remise des gaz à chaque approche, ils risquent de ne pas être prêts à réagir immédiatement au moment où cette manœuvre devient impérative, ce qui augmente le risque d’accident lié à l’approche et à l’atterrissage.
  11. Si des enregistrements de conversations de poste de pilotage ne sont pas disponibles, il est impossible d’évaluer avec précision la gestion des ressources de l’équipage, l’exécution et le respect des procédures d’utilisation normalisées de même que la gestion de la charge de travail, ce qui risque de nuire à la détection des lacunes de sécurité et donc à l’amélioration de la sécurité.
  12. Si Transports Canada ne fait pas la surveillance des opérations de vol pour évaluer l’efficacité de la gestion des ressources de l’équipage, de la gestion des menaces et erreurs, de la prise de décision et des procédures d’utilisation normalisées, y compris leur degré d’application et de respect, ces procédures risquent d’être inefficaces, ce qui augmente le risque d’accident et en particulier le risque d’accident lié à l’atterrissage et à l’approche.
  13. Si un mécanisme n’est pas instauré au Canada pour stopper une approche qui est en réalité interdite, il y a un risque accru d’accident lié à l’approche et à l’atterrissage.