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Publication du rapport d'enquête maritime M16A0140
Mot d'ouverture

Marc-André Poisson
Directeur d'Enquêtes - Marine, Bureau de la sécurité des transports du Canada
Moncton (Nouveau-Brunswick)
le 26 juillet 2017

Seul le texte prononcé fait foi.

Marc-André Poisson

Bonjour.

Tôt le matin du 16 juin 2016, presque une heure avant le lever du soleil, un petit bateau de pêche a chaviré à tout juste 240 mètres de la côte de Salmon Beach, au Nouveau-Brunswick.

L'équipage remontait des casiers à homard lorsqu'une des filières s'est emmêlée avec des engins de pêche d'un autre pêcheur. En raison des contraintes exercées par la filière emmêlée, le côté arrière droit du bateau a été tiré vers le fond, réduisant son franc-bord. Alors que tous les membres d'équipage travaillaient sur cette partie du bateau pour remonter le casier et démêler la filière, deux vagues se sont brisées sur le pont, ce qui a entraîné une accumulation de plus d'un pied d'eau dans le bateau. Puis, immédiatement après que le capitaine a donné l'ordre de libérer la filière, une autre vague s'est brisée sur le côté du bateau, et le bateau a chaviré.

Les trois membres d'équipage ont été projetés dans l'eau froide. Ils ne portaient ni gilet de sauvetage ni vêtement de flottaison individuel, ou VFI. Un membre d'équipage a toutefois réussi à grimper sur la coque du bateau chaviré. Dans le noir, criant à l'aide, il a attendu jusqu'à ce qu'un autre bateau passe à proximité. Il a été le seul survivant.

Ce type de tragédie survient trop fréquemment dans le secteur de la pêche commerciale canadienne, et cause la mort de 10 pêcheurs en moyenne chaque année. Il est vrai que le métier de pêcheur est difficile et parfois dangereux, mais au Canada, presque tous les autres secteurs sont régis par une réglementation provinciale en matière de santé et de sécurité au travail qui permet d'atténuer les risques et qui préconise un milieu de travail sain et sécuritaire. Cependant, la pêche commerciale n'est pas toujours visée par cette réglementation. Cette situation doit changer.

C'est pourquoi le BST recommande aujourd'hui que le gouvernement du Nouveau-Brunswick et Travail sécuritaire NB – l'organisme qui régit et met en œuvre la réglementation en matière de santé et de sécurité au travail dans cette province – exigent que les pêcheurs portent en tout temps un VFI adéquat lorsqu'ils sont sur le pont d'un bateau, et ce, peu importe les dimensions de ce dernier. Le BST demande aussi que Travail sécuritaire NB voit à ce que des programmes de vérification de la conformité à la réglementation soient créés.

En décembre dernier, au moment de la publication d'un rapport sur un accident semblable qui est survenu en Colombie-Britannique, le BST avait recommandé que Transports Canada et WorksafeBC fassent de même. La noyade est après tout la principale cause de décès dans le secteur de la pêche au pays, et les gouvernements fédéral et provinciaux doivent prendre des mesures afin de s'assurer que les pêcheurs portent un VFI. Car, comme le BST l'a indiqué à de nombreuses occasions, on ne sait jamais quand on peut se retrouver dans l'eau.

Pour empêcher que des accidents de pêche tragiques comme celui-ci continuent de se produire encore et encore, la collaboration entre les intervenants est nécessaire. Nous voulons que les gouvernements fédéral et provinciaux agissent de concert avec les chefs de file du milieu de la pêche, afin d'assurer que tous les pêcheurs travaillent en sécurité. Dans certaines régions du pays, notamment en Colombie-Britannique, au Québec, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador, cette collaboration existe déjà. Espérons que le Nouveau-Brunswick fera bientôt partie de ce groupe, et qu'il travaillera en collaboration avec les intervenants du secteur de la pêche et Transports Canada afin de trouver des méthodes d'exploitation plus sécuritaires. Le port obligatoire d'un VFI est un bon premier pas, et devrait contribuer à prévenir d'autres décès dans un secteur où ils sont déjà beaucoup trop nombreux. Conformément au processus habituel à l'égard des recommandations du BST, nous nous attendons à avoir une réponse de la province dans les 90 jours, et nous surveillerons de près ce qu'elle entend faire pour résoudre le problème.