Perte de maîtrise en vol sur un moteur
Waglisla Air Ltd.
Grumman G21A GOOSE C-FUMG
4 mi au sud de Prince Rupert
(Colombie-Britannique)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le pilote et quatre passagers sont partis de l'hydroaérodrome de Seal Cove à Prince Rupert (Colombie-Britannique) à bord de l'avion amphibie pour effectuer un vol de 41 milles marins à destination de Kincolith. Après le décollage sur l'eau, l'avion s'est écrasé dans les arbres à trois milles marins au sud de Seal Cove. Le pilote et un passager ont subi des blessures mortelles; les trois autres passagers ont été grièvement blessés.
Le Bureau a déterminé que le pilote a eu des problèmes de moteur pendant le décollage et la montée et qu'après avoir mis l'hélice gauche en drapeau, il a perdu la maîtrise en direction de l'appareil. L'avion s'est incliné à gauche, est descendu rapidement et s'est écrasé au sol.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
Le Grumman G21A Goose immatriculé C-FUMG effectuait un vol d'affrètement à partir de l'hydroaérodrome de Seal Cove située à Prince Rupert (Colombie-Britannique) et devait se rendre à Kincolith. L'appareil transportait un pilote, quatre passagers et environ 600 livres de bagages et de fret. L'appareil effectuait son premier vol de la journée.
Avant le décollage, le pilote a communiqué par radio avec la station d'information de vol (FSS)1 de Prince Rupert et a obtenu des renseignements sur la circulation aérienne locale et sur les conditions météorologiques. L'appareil a décollé de l'eau vers 11 h 41, heure normale du Pacifique (HNP)2, et il s'est dirigé vers le sud en suivant la trajectoire de départ normale.
Pendant le décollage et la montée, le bruit de l'un des moteurs de l'appareil, ou des deux, ne correspondait pas au bruit d'un moteur qui fonctionne normalement. Peu après le décollage, le pilote a communiqué par radio avec le répartiteur de la compagnie à Seal Cove et a indiqué...
- Voir l'annexe B pour la signification des sigles et abréviations.
- Les heures sont exprimées en HNP (temps universel coordonné [UTC] moins huit heures) sauf indication contraire.
- Les unités correspondent à celles des manuels officiels, des documents, des rapports et des instructions utilisés ou reçus par l'équipage.
...qu'il avait des problèmes de moteur, qu'il revenait à Seal Cove et qu'il allait avoir besoin d'aide sur la rampe. Après que l'hélice gauche a arrêté de tourner, l'appareil s'est incliné à gauche et est descendu rapidement jusqu'au sol.
L'appareil s'est écrasé dans les arbres à une altitude d'environ 150 pieds, à environ trois milles marins (nm) au sud de Seal Cove. Le pilote et un des passagers ont subi des blessures mortelles; les trois autres passagers ont été grièvement blessés.
Des recherches ont été entreprises environ 45 minutes après le départ de l'appareil. L'avion a été repéré par un hélicoptère de la Garde côtière qui est venu en aide aux survivants.
L'accident s'est produit de jour vers 11 h 45 HNP, par 54° 17′ de latitude Nord et 134° 14′ de longitude Ouest3.
1.2 Victimes
Équipage | Passagers | Tiers | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | 1 | 1 | - | 2 |
Blessés graves | - | 3 | - | 3 |
Blessés légers/indemnes | - | - | - | - |
Total | 1 | 4 | - | 5 |
1.3 Dommages à l'aéronef
L'appareil a subi des dommages importants attribuables à l'impact.
1.4 Autres dommages
Aucun.
1.5 Renseignements sur le personnel
Pilote
Âge - 42 ans
Licence - pilote professionnel
Date d'expiration du certificat de validation 1er fév - 1994
Nombre d'heures de vol - 12 400
Nombre d'heures de vol sur type en cause - 1 600
Nombre d'heures de vol dans les 90 derniers jours - 125
Nombre d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours - 30
Nombre d'heures de service avant l'accident - 4
Nombre d'heures libres avant la prise de service - 15
1.5.1 Généralités
Le pilote avait reçu son entraînement initial sur le Grumman G21A chez un autre employeur en 1988. Son entraînement périodique et son vol de vérification les plus récents avaient été effectués en vertu d'un contrat passé avec un autre exploitant de Grumman G21A en juin 1993. Sa vérification de compétence pilote (PPC) la plus récente sur type avait été effectuée le 6 juin 1993 par Transports Canada, et tous les points de l'évaluation avaient été satisfaisants.
Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Le vol était effectué conformément aux exigences du manuel d'exploitation de la compagnie.
Le pilote occupait le poste de pilote instructeur au sein de la compagnie aérienne Waglisa, la compagnie en cause dans l'accident, et il avait donné de la formation à d'autres pilotes sur les procédures d'urgence; en outre, au moment de l'accident, il rédigeait un manuel de formation et d'exploitation pour le compte de la compagnie Waglisa sur ce type d'aéronef.
L'entraînement initial que le pilote avait reçu sur ce type d'aéronef lui avait été donné alors qu'il travaillait pour le compte d'une autre compagnie, la Trans Provincial Airlines; dans le cadre de cet entraînement, il avait dû exécuter de nombreux atterrissages sur un seul moteur.
1.5.2 Normes d'entraînement au pilotage
Les manuels utilisés par la compagnie pour l'entraînement sur le G21A ne traitaient pas des caractéristiques de pilotage de l'appareil. Les mesures privilégiées dans le cas d'une panne moteur pendant la montée initiale, lorsque la vitesse est inférieure à la vitesse minimale de contrôle sur un seul moteur (Vmca), sont de réduire la puissance du moteur qui fonctionne et de se poser droit devant. Ces mesures avaient été expliquées pendant l'entraînement périodique du pilote sur G21A.
1.6 Renseignements sur l'aéronef
1.6.1 Généralités
Constructeur - Grumman Aircraft Engineering Corporation
Type - et modèle G21A Goose
Année de construction - 1944
Numéro de série - B145
Certifica de navigabilité (Permis de vol) - valide
Nombre d'heures de vol cellule - 22 683
Type de moteur (nombre)- Pratt & Whitney R985-AN14B (2)
Type d'hélice/ de rotor (nombre) Hartzell HCB3R30-2E (2)
Masse maximale autorisée au décollage - 9 200 lb
Type(s) de carburant recommandé(s) essence aviation à indice d'octane 91
Type de carburant utilisé essence aviation 100 LL
1.6.2 Entretien
L'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'examen des livrets d'entretien n'a révélé aucune anomalie non corrigée pertinente aux circonstances de l'accident.
L'appareil avait fait l'objet d'une inspection des 100 heures le 8 octobre 1993. Le moteur droit avait été remplacé à ce moment-là. Pendant la période qui s'est écoulée entre l'inspection et l'accident, l'appareil a effectué 29,5 heures de vol. Pendant cette période, le seul entretien non prévu avait été le remplacement du démarreur du moteur gauche. Le moteur gauche (Pratt & Whitney R985-AN14B) totalisait 668,4 heures de fonctionnement depuis la révision. Le moteur droit (Pratt & Whitney R985-AN14B) totalisait 29,5 heures de fonctionnement depuis la révision.
L'appareil avait effectué environ 2,4 heures de vol la veille. Aucune anomalie relative au moteur ou à un autre système de l'appareil n'avait été signalée.
1.6.3 Masse et centrage
La masse maximale autorisée de l'appareil est de 9 200 livres lorsque les flotteurs d'extrémité sont rentrés, et de 8 800 livres lorsque les flotteurs d'extrémité sont sortis. Afin de pouvoir utiliser la masse maximale autorisée la plus élevée, les flotteurs d'extrémité sont rentrés avant que l'appareil ne quitte la surface de l'eau, dès que les ailerons deviennent efficaces pendant la course au décollage.
Une fiche de contrôle de chargement de la compagnie, qui indiquait le poids estimé des passagers et du fret, avait été remplie avant le départ. La masse au décollage, qui était d'environ 8 700 livres, et le centrage, étaient dans les limites prescrites.
1.6.4 Circuit de carburant de l'avion
Le circuit de carburant comprend deux réservoirs de carburant de 110 gallons américains (91,6 gallons impériaux), un dans chaque aile, raccordés au moyen du robinet sélecteur carburant à une tubulure commune sur la cloison du poste de pilotage, laquelle alimente alors chaque moteur au moyen d'un réservoir-collecteur monté sur la cloison. Par conséquent, les deux moteurs auraient été touchés en cas de contamination du carburant.
Des purgeurs de carburant, utilisés pour vérifier si le circuit de carburant contient de l'eau et d'autres impuretés, sont situés sur les réservoirs-collecteurs, et ils sont actionnés à l'aide de robinets accessibles au pilote à l'intérieur du poste de pilotage. Les orifices de vidange carburant sont situés à l'extérieur de l'appareil. Lorsque le circuit de carburant est purgé, il faut l'aide d'une deuxième personne si un échantillon doit être recueilli pour vérifier l'état du carburant. Il est courant pour les pilotes de la compagnie de purger le circuit de carburant en laissant un peu de carburant s'écouler sur le sol, et de vérifier cet échantillon visuellement à partir du poste de pilotage pour voir s'il contient de l'eau.
Avant le décollage, environ 30 gallons impériaux de carburant avaient été versés dans chaque réservoir, ce qui augmentait la quantité totale à 50 gallons impériaux par réservoir. On n'a pu déterminer si le carburant avait été vérifié avant le vol à la recherche d'impuretés.
1.6.5 Circuit d'allumage de l'avion
Sur ce type particulier d'aéronef, on a signalé de nombreux cas d'accumulation d'humidité dans la rampe d'allumage et dans les magnétos, causant des ratés du moteur.
1.7 Renseignements météorologiques
1.7.1 Généralités
D'après les prévisions météorologiques après coup du Service de l'environnement atmosphérique d'Environnement Canada, le vent de surface dans la région de Prince Rupert soufflait à moins de 5 noeuds et sa direction était variable au moment de l'accident. Le vent en altitude soufflait probablement de l'ouest ou du sud-ouest entre 10 et 15 noeuds, entre 1 000 et 4 000 pieds. La masse d'air était assez humide et présentait une instabilité potentielle. La couverture nuageuse dans la région était généralement formée de nuages épars à fragmentés et comprenait des couches de stratocumulus dont la base se situait entre 3 000 et 6 000 pieds, et le sommet, à 8 000 pieds. Quelques cumulus bourgeonnants encastrés dont la base se situait à 2 000 pieds, et le sommet, à 12 000 pieds, produisaient des averses de pluie isolées. La visibilité était généralement de 15 milles; par contre, elle était d'un demi-mille localement dans des averses de neige au-dessus de 500 pieds. Le niveau de congélation se situait près de 1 000 pieds. Du givre transparent modéré pouvait se produire dans les cumulus bourgeonnants, et un léger givre mixte était possible dans les couches de stratocumulus. Le vent était trop faible pour produire de la turbulence mécanique importante, mais de la turbulence modérée occasionnelle pouvait se produire au voisinage des cumulus bourgeonnants.
On a indiqué que la visibilité dans la région, à peu près au moment de l'accident, se prêtait au vol à vue, mais il y avait de la pluie et des averses de neige mixtes et un peu de brouillard.
1.7.2 Conditions météorologiques favorisant la formation de givre dans le carburateur
Le givrage du carburateur est un phénomène associé à l'accumulation de glace dans la buse du carburateur, ce qui peut produire une diminution de l'admission d'air et, par conséquent, une perte de puissance. Le givrage du carburateur peut survenir dans une vaste plage de températures et d'humidités relatives (normalement mesuré en fonction de l'amplitude température/point de rosée), mais il est plus probable à des températures se situant près du point de congélation.
Au moment de l'accident, la température et le point de rosée à Prince Rupert étaient de trois degrés et d'un degré Celsius respectivement. La partie AIR 2-3 de la Publication d'information aéronautique .A.I.P.) de Transports Canada stipule que ces conditions peuvent produire un important givrage du carburateur à n'importe quel régime moteur.
1.8 Renseignements sur l'aérodrome
L'hydroaérodrome de Seal Cove avoisine la ville de Prince Rupert. La base d'hydravions et d'avions amphibies de la compagnie est située à côté des installations du quai et d'une rampe qui permet le chargement du Goose à terre. L'appareil peut ensuite descendre la rampe jusqu'à l'eau en vue du décollage.
Le plan d'eau offre une longueur d'environ 8 500 pieds pour la course au décollage dans la direction sud. L'appareil qui décolle survole ensuite les rapides Butze, après quoi le plan d'eau s'élargit pour former le bassin Morse. Les appareils qui volent en direction nord vers Kincolith peuvent faire demi-tour dans la zone plus large du bassin Morse.
Il y a des zones qui conviennent à un amerrissage en cas d'urgence à partir de Seal Cove jusqu'au lieu de l'accident, à l'exception des rapides Butze, qui sont étroits et où le courant de marée est fort et variable.
1.9 Enregistreurs de bord
L'appareil n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur phonique (CVR), ce qui n'était pas contraire à la réglementation.
1.10 Renseignements sur l'avion et sur l'impact
1.10.1 Généralités
Les dommages observés sur les arbres le long de la trajectoire de vol laissent penser que l'avion était incliné à gauche lorsqu'il a heurté des arbres d'environ 100 pieds de haut. L'aile gauche a alors été arrachée depuis le côté extérieur du moteur gauche. Le fuselage, auquel l'aile droite et la queue étaient toujours attachées, a heurté d'autres arbres avant de heurter le sol presque verticalement. Le fuselage a poursuivi sa course et a pivoté sur le nez, puis l'appareil s'est immobilisé dans une assiette de piqué, l'aile gauche basse. L'avant de l'appareil a été écrasé jusqu'à un point situé près de la cloison séparant la cabine passagers du poste de pilotage.
Il y avait une forte odeur de carburant sur les lieux, car les dommages à l'appareil ont provoqué une fuite de carburant. On a constaté que les pales de l'hélice gauche étaient en drapeau. Deux pales de l'hélice droite ont subi des dommages légers, et l'autre pale, des dommages importants; cette pale était détachée du moyeu. L'aile gauche était détachée près du joint de la section centrale et également du côté extérieur du moteur à cause de l'impact du bord d'attaque contre les arbres. Le moteur gauche était détaché de l'aile, et le moteur droit l'était partiellement. L'avant du fuselage était repoussé vers l'arrière jusqu'à un point situé près de la cloison séparant la cabine passagers du poste de pilotage. Les deux tubes de niveau de carburant étaient rompus. Le fuselage arrière était déformé, et la gouverne de profondeur gauche avait été arrachée. Tous les sièges occupés par les passagers s'étaient détachés de leurs supports.
Les flotteurs d'extrémité étaient rentrés au moment de l'impact. Toutes les gouvernes y étaient, et tous les dommages subis par l'appareil ont été attribués à la violence de l'impact.
1.10.2 Examen des moteurs et des hélices
Les moteurs et les hélices ont été acheminés à l'atelier du bureau régional du BST. Le démontage et l'examen des moteurs n'ont révélé aucune défaillance ni mauvais fonctionnement avant l'impact.
L'hélice gauche était moins endommagée que l'hélice droite. Une pale de l'hélice droite s'était détachée pendant l'accident, et une autre s'était déplacée dans son collier de fixation. Les pales de l'hélice droite présentaient des éraflures dans le sens de la corde et des dommages en torsion, ce qui indique que le moteur droit produisait de la puissance à l'impact.
Les deux régulateurs d'hélice satisfaisaient aux spécifications de fonctionnement. Toutefois, le régulateur de l'hélice droite n'atteignait que
2 108 tr/min, plutôt que 2 340 tr/min tel qu'il est spécifié, parce que le bras d'entrée avait été endommagé par l'impact et qu'il ne pouvait donc pas être utilisé sur toute sa course pendant les essais.
Des quantités infimes d'eau ont été trouvées dans la cuve à niveau constant du carburateur gauche et dans la pompe d'accélération du carburateur droit. On n'a pu déterminer d'où provenait cette eau, mais la quantité n'était pas suffisante pour causer des problèmes de moteur.
L'essai des pompes carburant entraînées par les moteurs a permis de constater que les pompes satisfaisaient aux exigences relatives au débit, à la pression et aux fuites internes. Le rotor et l'intérieur de la pompe gauche étaient corrodés, probablement à cause de la présence d'eau dans la pompe depuis l'accident.
On a effectué l'essai au banc des magnétos de chaque moteur. Les magnétos du moteur droit étaient toutes les deux en excellent état et fonctionnaient bien; elles produisaient une bonne étincelle à haut et à faible régimes. Bien qu'on ait décelé un peu de corrosion près des plots de contact, les deux magnétos du moteur gauche fonctionnaient également bien; elles produisaient une bonne étincelle à haut et à faible régimes.
On a constaté que les deux commandes de réchauffage carburateur moteur étaient sur COLD.(fermé). Toutefois, puisque les câbles de raccordement étaient sectionnés, la position de ces commandes à l'impact n'a pu être vérifiée.
L'examen effectué par le Laboratoire technique du BST a permis d'établir que l'embout de la tige de commande de mélange gauche s'était rompu en surcharge et que cette surcharge était probablement due à la force de l'impact.
1.10.3 Examen du circuit de carburant de l'avion
Le fuselage a fait l'objet d'un examen plus poussé au bureau régional du BST environ un mois après l'accident.
Les réservoirs-collecteurs gauche et droit ont été vidangés. Le réservoir-collecteur gauche contenait environ un demiard d'eau et une petite quantité de carburant. Le réservoir- collecteur droit contenait environ une chopine d'eau. Les purgeurs des réservoirs de carburant ont été enlevés, et environ deux gallons de carburant et un petit peu d'eau ont été recueillis du réservoir gauche. Le réservoir droit contenait une petite quantité de carburant et une quantité infime d'eau.
Le panneau d'accès inférieur de chaque réservoir de carburant a été enlevé pour permettre l'examen de l'intérieur de ces réservoirs. À l'intérieur, les réservoirs étaient propres et semblaient avoir été récemment remis en état. Les crépines en forme de dé à coudre des deux réservoirs étaient en bon état. Les parois et le haut du réservoir droit étaient perlés d'eau; les parois et le haut du réservoir gauche étaient également humides, mais pas aussi perlé que le réservoir droit.
Le bouchon du réservoir droit était intact et semblait assurer un bon joint sur le col de remplissage du réservoir. Le bouchon gauche avait été endommagé par l'impact, et sa partie supérieure (dôme convexe) manquait. Toutefois, la partie obturatrice du bouchon et le joint d'étanchéité étaient restés dans le col de remplissage. Ce joint d'étanchéité n'était pas en aussi bon état que le droit, mais il était adéquat.
1.10.4 Analyse d'un échantillon de carburant provenant de l'avion
L'origine de l'eau trouvée dans les réservoirs de carburant pendant l'examen de l'appareil n'a pu être déterminée. Le premier examen en laboratoire de l'échantillon de carburant contenant de l'eau a conclu que l'eau était peut-être de l'eau du robinet. Toutefois, un deuxième examen a été effectué par mesure de vérification, et il a été conclu que l'échantillon était probablement de l'eau de mer.
1.10.5 Analyse d'échantillons de carburant provenant du réservoir de ravitaillement
L'examen des échantillons de carburant prélevés dans le réservoir de ravitaillement de Seal Cove a permis de constater que les échantillons ne contenaient pas d'impuretés. Les autres utilisateurs de la station de ravitaillement n'avaient fait aucun rapport de carburant contaminé.
1.10.6 Examen des instruments
Huit des instruments de vol et moteur de l'avion, bien que fortement endommagés pendant l'impact, ont été examinés au Laboratoire technique du BST à Ottawa (rapport technique LP 02/94).
L'analyse des instruments moteur a révélé que le moteur gauche tournait à faible régime au moment de l'impact, ce qui correspond à la position de mise en drapeau de l'hélice, et que le moteur droit tournait à environ 1 300 tr/min. L'anémomètre n'a pu fournir aucun renseignement fiable sur la vitesse de l'appareil à l'impact. Le variomètre affichait 2 000 pieds par minute en descente, soit la vitesse descensionnelle maximale.
1.11 Renseignements médicaux
Rien n'indique qu'une incapacité ou des facteurs physiologiques aient pu perturber les capacités du pilote.
1.12 Incendie
Rien n'indique qu'il y ait eu un incendie, que ce soit avant ou après l'accident.
1.13 Questions relatives à la survie des occupants
1.13.1 Suivi du vol
Le répartiteur de la compagnie est de service à la base de Seal Cove pendant les heures de vol normales. Après avoir reçu l'appel radio du pilote, il a envoyé le préposé aux quais à la rampe d'hydravions pour prêter main-forte au pilote de l'appareil qui revenait. Toutefois, l'appareil n'est pas arrivé immédiatement, et le répartiteur a supposé que le pilote n'avait plus besoin d'aide et qu'il se dirigeait à Kincolith comme prévu.
1.13.2 Radiobalise de détresse
La radiobalise de détresse (Pointer C4000) ne s'est pas déclenchée à l'impact. Elle était montée dans le compartiment à bagages arrière. Après l'accident, on a constaté que son commutateur était sur OFF. Le câble était attaché à la prise de l'interrupteur à distance monté dans le poste de pilotage. La position de l'interrupteur à distance à l'impact n'a pu être déterminée parce que le poste de pilotage était lourdement endommagé. Toutefois, puisque le commutateur de la radiobalise était sur OFF, la radiobalise ne se serait pas déclenchée, quelle que soit la position de l'interrupteur à distance.
1.13.3 Protection et survie des occupants
L'avion n'était pas équipé de bretelles de sécurité, et la réglementation de Transports Canada n'exige pas que cette catégorie d'aéronef en soit équipée. Si les occupants arrière avaient utilisé des bretelles de sécurité, ils auraient peut-être subi des blessures moins graves.
La réduction du volume interne due à l'endommagement important de la section avant du fuselage pendant l'impact au sol a considérablement réduit les chances de survie des occupants avant.
1.14 Caractéristiques de pilotage de l'avion
1.14.1 Exigences relatives à l'homologation de l'avion
Le personnel du Laboratoire technique du BST a effectué une recherche sur les exigences relatives à l'homologation de l'appareil, en particulier sur ses qualités de pilotage et ses performances sur un seul moteur. Aucune information relative à des tests en vol n'a été trouvée, et les seules caractéristiques de vol qui ont pu être trouvées figuraient dans le manuel de vol de l'appareil. Toutefois, l'information dans le manuel de vol concernant le comportement de l'avion sur un seul moteur, sa manoeuvrabilité et ses performances, était limitée.
L'homologation du G21A était basée sur l' Aeronautics Bulletin.no 7-A (1934) de la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis. Ce bulletin précise que si un seul moteur tombe en panne après que la vitesse minimale de décollage a été atteinte, l'appareil doit encore pouvoir monter du niveau de la mer à 1 000 pieds-mer. En outre, à 1 000 pieds-mer, l'appareil doit pouvoir conserver une trajectoire droite les ailes à l'horizontale.
L'examen des dossiers techniques de Transports Canada sur le type d'appareil en question aux Archives nationales a permis de remonter jusqu'à l'origine des dossiers en 1937. On n'a trouvé aucune référence concernant les caractéristiques de pilotage de l'appareil sur un seul moteur.
1.14.2 Performances et pilotage de l'avion sur un seul moteur
L'avion a été conçu conformément aux normes d'homologation de 1937, et ces normes ne sont pas aussi strictes que celles qui s'appliquent aux aéronefs d'aujourd'hui.
Des pilotes expérimentés qui connaissent bien cet appareil ont déclaré qu'il a des performances limitées et de mauvaises qualités de pilotage pendant le vol sur un seul moteur. Lorsque l'appareil est chargé à une masse proche de celle de l'appareil en question, les performances sur un seul moteur ne permettent pas le vol soutenu les ailes à l'horizontale.
Par exemple, la Vmca du G21A est d'environ 10 à 15 noeuds inférieure à la vitesse normale de montée sur deux moteurs. Lorsqu'un moteur ne fonctionne plus, la traînée de l'appareil produit une diminution rapide de la vitesse. Si la vitesse chute au-dessous de la Vmca, il surviendra une perte de maîtrise en direction.
À cause des piètres qualités de pilotage de l'appareil pendant une panne moteur, des mesures immédiates doivent être prises (c.-à-d. faire piquer l'appareil) pour conserver la vitesse au-dessus de la Vmca. Une importante perte d'altitude peut alors se produire.
Si la vitesse devient inférieure à la Vmca, les mesures privilégiées en cas de panne d'un moteur pendant la montée initiale consistent à réduire la puissance du moteur qui fonctionne et à atterrir droit devant.
Un appareil G21A particulier peut également présenter des caractéristiques de pilotage et des performances en vol quelque peu différentes, probablement à cause des nombreux réglages effectués sur l'appareil au cours de sa durée de vie.
2.0 Analyse
2.1 Introduction
Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Rien n'indique que des facteurs physiologiques aient pu perturber les capacités du pilote à effectuer le vol en toute sécurité.
On n'a découvert aucun indice de défaillance de la cellule ou de mauvais fonctionnement de l'un ou l'autre des moteurs avant l'impact. Tous les dommages subis par l'appareil ont été attribués à l'impact. À cause des dommages importants subis par la section avant de l'appareil lors de l'impact, on a jugé que le pilote et le passager avant n'avaient aucune chance de survivre à l'accident.
L'analyse examine les problèmes de moteur rencontrés pendant le décollage et la montée, les caractéristiques de pilotage et de performances sur un seul moteur du G21A, et la perte de maîtrise en direction.
2.2 Problèmes de moteur pendant le décollage et la montée
2.2.1 Examen des moteurs
La cause des problèmes de moteur rencontrés pendant le décollage et le montée n'a pu être déterminée. Le démontage et l'examen des deux moteurs n'ont révélé aucune anomalie qui aurait pu empêcher les moteurs de fonctionner normalement ou qui aurait pu inciter le pilote à mettre l'hélice gauche en drapeau.
Les dommages dus à la corrosion sur le rotor, l'intérieur de la pompe carburant entraînée par le moteur gauche, et près des plots de contact de la magnéto gauche, peuvent avoir été causés par l'exposition aux conditions environnementales après l'accident et n'auraient pas influé sur les performances et le fonctionnement du moteur avant l'accident.
Le régime de 1 300 tr/min affiché sur le tachymètre et les dommages à l'hélice droite indiquent que le moteur droit produisait de la puissance à l'impact. Toutefois, on n'a pu déterminer si cette puissance inférieure à la normale était due aux problèmes de moteur pendant le décollage et la montée, ou à une réduction de la puissance par le pilote avant l'impact.
2.2.2 Contamination du carburant
L'avion transportait suffisamment de carburant pour le vol. Rien n'indique que le carburant de la station de ravitaillement était contaminé. On n'a pas déterminé si le circuit de carburant de l'appareil avait été purgé avant le vol à la recherche d'impuretés. Néanmoins, la méthode utilisée par la compagnie pour vérifier si le circuit de carburant contenait des impuretés était inadéquate. Il n'est probablement pas possible de vérifier correctement à partir du poste de pilotage si la flaque de carburant, laissée sur le sol par la purge du circuit, contient de l'eau ou d'autres impuretés.
La quantité d'eau trouvée dans les réservoirs de carburant pendant l'examen de l'appareil peut avoir été suffisante pour produire une faible puissance ou causer le mauvais fonctionnement d'un moteur. Puisque les deux analyses d'échantillon de carburant ont produit des résultats contradictoires, l'origine de cette eau n'a pu être déterminée. Par conséquent, on n'a pu déterminer si le carburant dans les réservoirs de l'appareil était contaminé avant l'accident. Toutefois, il est possible que la présence d'eau ait été causée par la condensation qui s'est formée après l'accident dans les réservoirs partiellement remplis.
Les quantités infimes d'eau trouvées dans les moteurs à la suite de l'accident ne correspondent pas à une contamination importante des réservoirs de carburant. En outre, il est peu probable que ces quantités infimes d'eau auraient été suffisantes pour produire une faible puissance ou causer le mauvais fonctionnement d'un moteur.
2.2.3 Givrage du carburateur
L'enquête n'a révélé aucun signe de givrage du carburateur. Toutefois, la température et le point de rosée au moment de l'accident favorisaient un important givrage du carburateur à tous les régimes moteur.
Une diminution de régime et de puissance moteur, qu'aurait pu produire le givrage du carburateur, peut correspondre aux problèmes de moteur rencontrés pendant le décollage et la montée, et au régime de 1 300 tr/min du moteur droit à l'impact. Toutefois, on n'a pu déterminer si le givrage du carburateur avait influé sur les performances ou le fonctionnement de l'un ou l'autre des moteurs.
2.3 Homologation de l'avion et pilotage sur un seul moteur
L'avion avait été conçu conformément aux normes d'homologation de 1937. Toutefois, l'appareil ne satisfaisait pas aux critères d'homologation actuels établis par la réglementation moderne.
Le G21A aurait, semble-t-il, des performances limitées et de mauvaises caractéristiques de vol sur un seul moteur. À cause de la différence de 10 à 15 noeuds entre la Vmca sur un seul moteur et la vitesse normale de montée sur deux moteurs, des mesures immédiates doivent être prises afin d'empêcher la vitesse de chuter au-dessous de la Vmca si un moteur tombe en panne. Si la vitesse chute au-dessous de la Vmca, le pilote doit réduire la puissance du moteur qui fonctionne pour pouvoir garder la maîtrise en direction de l'appareil et se poser droit devant. Les manuels utilisés par la compagnie pour l'entraînement sur le G21A ne traitaient pas des caractéristiques de pilotage de l'appareil, mais les mesures privilégiées dans le cas d'une panne d'un moteur avaient été expliquées au pilote pendant son entraînement, et le pilote les avaient exécutées.
2.4 Perte de maîtrise en direction
L'avion n'était pas équipé d'un FDR ni d'un CVR; par conséquent, la position et l'altitude réelles de l'avion pendant le départ ainsi que la chronologie exacte des événements n'ont pu être déterminées. Toutefois, le fait que l'appareil se soit incliné à gauche et soit descendu rapidement jusqu'au sol indique que le pilote a perdu la maîtrise en direction peu de temps après avoir mis l'hélice gauche en drapeau.
La perte de maîtrise en direction à gauche laisse penser, en premier lieu, que la vitesse a chuté au-dessous de la Vmca alors que la puissance du moteur droit n'avait pas été modifiée et, en deuxième lieu, que les mesures privilégiées pour conserver la maîtrise de l'appareil en cas de chute de la vitesse au-dessous de la Vmca après une panne moteur pendant la montée initiale n'ont pas été prises immédiatement ou n'ont pas été efficaces. Le pilote peut avoir réduit la puissance du moteur droit avant l'impact.
Il est également possible qu'un des moteurs soit tombé en panne pendant que le pilote essayait de faire demi-tour alors que le moteur avait des ratés, et que la panne moteur ait fait chuter la vitesse rapidement si bien que le pilote a perdu la maîtrise en direction de l'appareil.
2.5 Radiobalise de détresse
La radiobalise de détresse ne s'est pas déclenchée à l'impact parce que son commutateur était sur OFF. L'interrupteur à distance monté dans le poste de pilotage n'aurait pas pu mettre la radiobalise en marche ni actionner le mécanisme de déclenchement automatique monté sur cette dernière, après l'impact au sol.
3.0 Faits établis
- L'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
- Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur.
- D'après l'examen médical et les dossiers médicaux, rien n'indique que des facteurs physiologiques aient pu perturber les capacités du pilote.
- Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule, que ce soit avant ou pendant le vol.
- La masse et le centrage étaient dans les limites prescrites.
- Pendant le décollage et la montée, le bruit d'un des moteurs de l'appareil, ou des deux, ne correspondait pas au bruit d'un moteur qui fonctionne normalement.
- Après la mise en drapeau de l'hélice gauche, le pilote a perdu la maîtrise en direction de l'appareil.
- La cause des problèmes de moteur rencontrés pendant le décollage et la montée n'a pu être déterminée.
- Aucun problème mécanique n'empêchait les moteurs de fonctionner normalement.
- On n'a pu déterminer si le givrage du carburateur avait eu une incidence sur les performances ou le fonctionnement de l'un ou l'autre des moteurs.
- Rien n'indique qu'il y ait eu des impuretés dans le carburant de la station de ravitaillement.
- On n'a pas déterminé si le circuit de carburant de l'appareil avait été purgé avant le vol et si le carburant avait été vérifié à la recherche d'impuretés.
- La méthode de purge utilisée quotidiennement par les pilotes de la compagnie pour vérifier si le circuit carburant contenait de l'eau ou d'autres impuretés n'était pas adéquate.
- L'analyse des deux échantillons a produit des résultats contradictoires; en conséquence, l'origine de l'eau décelée dans les réservoirs de carburant de l'appareil n'a pu être déterminée.
- On n'a pu déterminer si le carburant des réservoirs de l'appareil contenait des impuretés avant l'accident.
- À cause de la différence de 10 à 15 noeuds entre la Vmca et la vitesse normale de montée, des mesures immédiates doivent être prises pour empêcher la vitesse de chuter au- dessous de la Vmca si un moteur tombe en panne.
- Le type d'appareil ne satisfaisait pas aux critères de conception établis par la réglementation moderne.
- Les manuels utilisés par la compagnie pour l'entraînement sur le G21A ne traitaient pas des caractéristiques de pilotage de l'appareil.
- La radiobalise de détresse ne s'est pas déclenchée à l'impact parce que son commutateur était sur OFF.
3.1 Causes
Le pilote a eu des problèmes de moteur pendant le décollage et la montée et qu'après avoir mis l'hélice gauche en drapeau, il a perdu la maîtrise en direction de l'appareil. L'avion s'est incliné à gauche, est descendu rapidement et s'est écrasé au sol.
4.0 Mesures de sécurité
Le Bureau n'a, jusqu'ici, recommandé aucune mesure de sécurité.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président, John W. Stants, et des membres Zita Brunet et Hugh MacNeil.
Annexes
Annexe A - Liste des rapports pertinents
L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :
- LP 001/94 - Control Factors Analysis Grumman G21A Goose .Analyse des facteurs de contrôle du Grumman G21A Goose);
- LP 170/93 - Rod End Failure Analysis .Analyse de la rupture d'un embout de tige);
- LP 002/94 - Instrument Analysis (Report on Findings) .Analyse des instruments [Compte rendu de constatations]).
On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports.
Annexe B - Sigles et abréviations
- A.I.P
- Publication d'information aéronautique
- BST
- Bureau de la sécurité des transports
- CVR
- enregistreur phonique
- FDR
- enregistreur de données de vol
- FSS
- station d'information de vol
- h
- heure(s)
- HNP
- heure normale du Pacifique
- lb
- livre(s)
- nm
- mille(s) marin(s)
- PPC
- vérification de compétence pilote
- tr/min
- tour(s) par minute
- UTC
- temps universel coordonné
- Vmca
- vitesse minimale de contrôle sur un seul moteur