Impact avec le sol
Yellowhead Helicopters Limited
Bell 206B II (hélicoptère) C-GWXJ
8 nm au sud-ouest de Gordondale (Alberta)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Les services Lands and Forests de l'Alberta Department of Environmental Protection avait affrété l'hélicoptère Bell 206B (numéro de série 1791) pour effectuer des inspections aériennes de la gestion du bois d'oeuvre. Une inspection de zones de coupe avait été faite dans la matinée au sud de Grande Prairie (Alberta), et une autre devait avoir lieu dans l'après-midi, cette fois au nord-ouest. Le décollage de Grande Prairie a été signalé à 13 h 38, heure avancée des Rocheuses (HAR)Note de bas de page 1 cet après-midi là. Ce fut le dernier message radio. Plusieurs tentatives infructueuses ont été faites pour entrer en communication radio avec l'hélicoptère à partir de 14 h 55. Un hélicoptère de recherche des environs, avec trois agents forestiers à son bord, a reçu l'autorisation de décoller à 15 h 45. À 17 h, ils ont signalé qu'ils avaient repéré l'hélicoptère porté manquant. Par mesure de précaution, un deuxième hélicoptère a été dépêché sur les lieux, avec un agent forestier et deux techniciens médicaux d'urgence à son bord, au cas où des soins médicaux seraient nécessaires.
L'hélicoptère porté manquant s'est écrasé à quelque 52 milles au nord-ouest de Grande Prairie, aux environs des zones de coupe qui devaient être inspectées. L'appareil s'est écrasé dans des arbres en forte inclinaison à droite et en piqué prononcé. Il a été détruit sous le choc et par l'incendie qui a suivi. Le pilote et les deux agents forestiers qui se trouvaient à son bord ont subi des blessures mortelles.
Renseignements de base
Les dossiers montrent que le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Il totalisait quelque 8 280 heures de vol, dont 6 057 heures sur Bell 206B. Il travaillait pour le compte de la compagnie depuis le printemps 1995. Des représentants de la compagnie, des agents forestiers et d'autres clients ont précisé que le pilote était très consciencieux, compétent et prudent.
Le 25 septembre 1997, un groupe affréteur était arrivé à l'aéroport avec un passager de plus. Le pilote n'avait pas prévu cette éventualité au moment où il avait calculé la charge de carburant pour le vol. Pour pouvoir prendre ce passager supplémentaire à bord, sans dépasser la masse maximale autorisée au décollage, le pilote a siphonné le réservoir de l'hélicoptère à l'aide d'un tuyau pour déverser le carburant dans un récipient posé au sol. Au cours du siphonnage, le pilote a inhalé des vapeurs de carburant. Après le vol, en fin de journée, il s'est senti malade et a consulté un médecin qui l'a soigné pour inhalation de vapeurs de carburant et pneumonie chimique. Le pilote a relaté les faits dans une lettre qu'il a adressée à Sécurité du système, Région des Prairies et du nord, Transports Canada, aux fins de diffusion aux pilotes. Après avoir informé la compagnie de cet incident, il a été interdit de vol pendant 10 jours.
Le pilote avait effectué un vol le 6 octobre et un vol le 7 octobre et n'avait plus volé jusqu'au jour de l'accident. L'agent forestier qui avait accompagné le pilote durant le vol de la matinée a déclaré que le pilote était de bonne humeur et dans son état normal. Il avait volé une douzaine de fois avec le pilote au cours de l'année.
Les carnets de bord et les dossiers de maintenance montrent que l'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'examen des dossiers de la compagnie n'a révélé aucune anomalie technique connue avant le vol. L'examen du moyeu du rotor principal et du rotor de queue ont révélé qu'ils n'ont pas été endommagés par l'incendie et qu'ils étaient entraînés par le moteur au moment de l'impact.
L'examen des accessoires moteur et des composants n'a pu être effectué à cause des dommages attribués à l'impact et à l'incendie. Le moteur et les composants des commandes de vol ont été examinés au Laboratoire technique du BST. L'accouplement de sortie de la turbine de travail moteur présentait une rupture typique de contraintes de torsion excessives. L'analyse du métal projeté sur les aubes du premier étage de la turbine primaire et sur son distributeur a permis de constater qu'il s'agissait d'un alliage en aluminium identique à celui qui recouvre l'intérieur du cône du compresseur. L'examen après sectionnement des servomécanismes hydrauliques des commandes de vol n'a révélé aucun signe de dommage ou de mauvais fonctionnement antérieur à l'impact. Le liquide hydraulique extrait des servomécanismes ne montrait aucun signe important de contamination ou de détérioration. L'examen en laboratoire du tableau annonciateur a permis de conclure qu'aucun voyant n'était allumé au moment de l'impact. La radiobalise de repérage d'urgence (ELT) n'a pas été retrouvée; elle a peut-être été détruite par l'incendie.
Des marques d'impact relevées sur des arbres révèlent que l'hélicoptère est descendu à un angle d'inclinaison à droite de 90 degrés et à un angle de piqué de 50 degrés environ. Le premier arbre a été étêté à 35 pieds au-dessus du sol et à 31 pieds avant le point d'impact au sol. Deux arbres, qui se trouvaient plus près du point d'impact final au sol, ont été cassés en de très nombreuses parties. La première pale du rotor principal qui est entrée en contact avec le sol a pénétré dans le sol à une profondeur de 28 pouces et s'est rompue. La deuxième pale s'est enfoncée dans le sol à une profondeur de 18 pouces, mais elle est demeurée fixée au mât rotor. Le violent incendie alimenté par le carburant, qui a suivi l'impact et qui a pris naissance proche des réservoirs de carburant perforés, a brûlé l'herbe et les arbres sur une superficie de 50 pieds sur 60 pieds. Les deux passagers ont été éjectés de l'appareil sous le choc; le pilote est resté dans le poste de pilotage.
Le message d'observations météorologiques émis à 14 h par Environnement Canada pour Grande Prairie, à 52 milles au sud-est du lieu de l'accident, était le suivant : nuages épars à 14 000 pieds au-dessus du sol (agl), ciel couvert avec plafond à 25 000 pieds, visibilité de 25 milles, température de 10 degrés Celsius et vents calmes. Le bulletin de 14 h pour Dawson Creek, à 24 milles à l'ouest du lieu de l'accident, faisait état des conditions suivantes : nuages fragmentés en altitude, visibilité de 20 milles, température de 10 degrés Celsius, et vents de l'ouest à 14 milles à l'heure. Aucune de ces stations n'a signalé de changement significatif de la situation météorologique dans l'heure qui a suivi. Le personnel d'une station de gazoduc qui se trouvait près du lieu de l'accident n'a pas signalé de condition météorologique particulière au cours de la journée de l'accident.
Le paragraphe 404.04(3) du Règlement de l'aviation canadien (RAC) stipule que le ministre :
- peut demander que, avant une date prévue, le titulaire d'un certificat médical subisse les tests ou examens médicaux ou fournisse les renseignements médicaux supplémentaires, qui sont nécessaires pour déterminer s'il continue de répondre aux exigences relatives à l'aptitude physique et mentale précisées dans les normes de délivrance des licences du personnel;
- peut suspendre, ou refuser de renouveler, le certificat médical du titulaire s'il ne se conforme pas à la demande visée à l'alinéa a) avant la date prévue.
De plus, le paragraphe 404.06(1) de la partie IV du RAC précise ce qui suit :
...il est interdit au titulaire d'un permis, d'une licence ou d'une qualification d'exercer les avantages du permis, de la licence ou de la qualification si, selon le cas :
- une des circonstances suivantes se produit et peut réduire la capacité du titulaire à exercer en toute sécurité ces avantages :
- le titulaire souffre d'une maladie, d'une blessure ou d'une invalidité,
- le titulaire prend une drogue,
- le titulaire reçoit un traitement médical.
Rien dans les dossiers médicaux du pilote n'indique qu'il aurait été réexaminé par un médecin examinateur d'aviation après son exposition aux vapeurs de carburant.
Les rapports d'autopsie indiquent que les trois occupants sont décédés de traumatismes multiples. Le pilote était atteint de coronaropathie athéroscléreuse avec sténose couvrant jusqu'à 75 % des artères interventriculaire antérieure gauche et auriculo-ventriculaire. La maladie était suffisamment grave pour provoquer des pertes soudaines de conscience, du fait de la pulsation cardiaque anormale dont elle s'accompagnait, également appelée arythmie. L'examen microscopique des poumons du pilote n'a révélé aucun changement incapacitant résiduel résultant de son exposition aux vapeurs de carburant. Rien dans les dossiers médicaux d'aviation et les électrocardiogrammes du pilote n'indiquait que le pilote souffrait de coronaropathie.
Analyse
Étant donné que l'hélicoptère a été presque entièrement détruit par le choc et par l'incendie qui a suivi, il n'a pas été possible de déterminer si des anomalies techniques ou un mauvais fonctionnement des systèmes avant l'impact avaient contribué à l'accident. Quoi qu'il en soit, aucune anomalie n'a été relevée en ce sens.
Les informations recueillies sur les lieux de l'accident sont typiques d'un accident provoqué par des conditions météorologiques défavorables qui fait perdre le sens de l'orientation au pilote et la maîtrise de l'hélicoptère faute de repères visuels. Toutefois, les observations météorologiques faites par des personnes se trouvant dans le secteur n'étayent pas l'hypothèse d'une situation météorologique hors de l'ordinaire durant l'après-midi de l'accident.
Les renseignements médicaux obtenus sont insuffisants pour pouvoir déterminer quelle influence l'inhalation de vapeurs de carburant du 25 septembre 1997 et les effets toxiques ultérieurs ont pu avoir sur le foie, l'appareil respiratoire, l'appareil cardio-vasculaire et le système immunitaire du pilote.
L'hypothèse voulant que le pilote ait perdu conscience ou ait perdu le sens de l'orientation puis la maîtrise de l'hélicoptère, ou les deux, à cause de sa coronaropathie athéroscléreuse, ne peut être écartée.
L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :
- LP 170/97 - Instrument Examination (Examen des instruments);
- LP 171/97 - Helicopter Components Examination (Examen des composants de l'hélicoptère);
- LP 176/97 - Engine Components Examination (Examen des organes moteur).
Faits établis
- Les dossiers révèlent que le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur.
- Les dossiers de l'hélicoptère révèlent que l'appareil était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
- L'hélicoptère a été presque entièrement détruit par le choc et par l'incendie qui a suivi.
- D'après l'examen des composants, rien n'indique que des anomalies techniques auraient contribué à l'accident.
- L'enquête a permis d'établir que le moteur tournait à un régime élevé au moment de l'impact.
- L'autopsie n'a pas permis de déterminer si la pneumonie chimique du pilote provoquée par l'inhalation de vapeurs de carburant avait eu des effets résiduels.
- Le pilote était atteint de coronaropathie avancée.
Causes et facteurs contributifs
La cause de la perte de maîtrise qui a amené l'hélicoptère à se mettre en virage prononcé à droite et à descendre en piqué prononcé jusqu'au sol n'a pu être déterminée.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.