Collision en vol
entre
le Cessna 172 C-GXSD de Transport Air
et
le Diamond DA 20-A1 Katana C-GADA d'Aérotaxi
à l'aéroport de Saint-Hubert (Québec)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
En vol de croisière de nuit, le Cessna 172, immatriculé C-GXSD, numéro de série 17261853, subit une panne électrique totale alors qu'il se trouve juste au sud de Montréal (Québec). Le pilote décide d'interrompre le vol et d'atterrir à l'aéroport de Saint-Hubert (Québec) sur la piste 24L. Pendant que le Cessna 172 atterrit, le Katana, immatriculé C-GADA, numéro de série 10281, avec un instructeur et un élève à son bord, est autorisé à décoller sur la piste 06R de l'aéroport de Saint-Hubert. Les avions entrent en collision juste à l'ouest de la voie de circulation Foxtrot. Les deux appareils subissent des dommages importants. Les trois occupants sont légèrement blessés.
Renseignements de base
Le pilote du Cessna 172, seul occupant à bord, effectue un vol d'entraînement. Toutes les cartes et publications aéronautiques à jour nécessaires sont à bord de l'aéronef. L'appareil décolle de jour de l'aéroport de Québec selon les règles de vol à vue (VFR) et le pilote prévoit revenir de nuit, la journée même. Des escales sont prévues à l'aéroport de Saint-Jean (Québec), puis à celui de Winchester (Ontario). À 18 h 47, heure normale de l'Est (HNE)Note de bas de page 1, le pilote signale au centre de contrôle de Montréal (ACC) qu'il se trouve juste à l'ouest de la région de contrôle terminale à 3 000 pieds d'altitude. Le contrôleur terminal secteur satellite lui demande d'afficher le code transpondeur 5200 et lui fournit le calage altimétrique. Après que le pilote acquiesce, le contrôleur lui demande d'éviter la région de contrôle terminale en la contournant au sud, puis de passer au-dessus de Valleyfield (Québec), et de survoler le radiophare omnidirectionnel (VOR) très haute fréquence (VHF) de Saint-Jean avant de poursuivre son vol vers Québec. À 19 h 4, le pilote informe l'ACC qu'il veut éviter la zone de contrôle de Saint-Jean et passer au-dessus de Beloeil (Québec). Cette communication est la dernière reçue du pilote. Aucune anomalie n'est signalée lors de ces communications. Cependant, lors du vol, le pilote constate que l'ampèremètre indique un taux de décharge continuel, c'est-à-dire une sous-tension du système électrique.
Le radar capte les signaux de l'avion à 3 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl) pendant que l'appareil poursuit son vol dans l'espace aérien contrôlé de classe E selon l'itinéraire convenu. Dans l'espace aérien contrôlé de classe E, le contrôle de la circulation aérienne (ATC) n'assure l'espacement que des aéronefs qui volent selon les règles de vol aux instruments (IFR). Le vol VFR n'est assujetti à aucune disposition particulière.
À 19 h 7, à la fin du crépuscule, à une distance d'environ 13 milles marins (nm) à l'ouest du VOR de Saint-Jean, le transpondeur se met à transmettre de façon intermittente jusqu'à ce qu'il cesse de répondre moins d'une minute plus tard. Par la suite, aucun autre écho radar secondaire n'est enregistré. Environ au même moment, les radios de l'aéronef commencent à émettre un grésillement. Le pilote tente alors en vain de communiquer avec l'ACC. Constatant la rupture des communications bilatérales, le pilote, comme l'exige la réglementation, règle son transpondeur sur le code 7600 afin d'avertir l'ATC de la situation. Toutefois, le code d'urgence n'est pas capté par le radar des services de la circulation aérienne (ATS). Peu de temps après, l'intensité de l'éclairage dans la cabine diminue jusqu'à ce que les lumières s'éteignent. L'appareil subit une panne électrique totale à 24 nm de l'aéroport de Saint-Hubert et à 14 nm de l'aéroport de Saint-Jean.
Lorsque le pilote réalise que le système électrique est en panne, il décide d'atterrir sur la piste 24L de l'aéroport de Saint-Hubert, bien que l'aéroport de Saint-Jean se trouve à 10 nm plus près de sa position. Il prend cette décision parce qu'il n'est pas certain des heures de service de la tour de Saint-Jean, qui en fait ferme à 21 h, et parce qu'il est convaincu que le radar des ATS continue à suivre le vol. En effet, le radar continue de capter les échos de l'appareil, mais en mode primaire seulement. L'appareil garde le cap entre la zone de contrôle de Saint-Hubert et celle de Saint-Jean et semble se diriger comme prévu vers Beloeil. La procédure d'urgence qu'un pilote doit suivre pour avertir les stations radar qu'il est en difficulté et dans l'impossibilité d'établir le contact radio est la suivante : il doit faire deux circuits triangulaires par la gauche avec des parcours de deux minutes avant de reprendre sa route et il doit répéter cette procédure toutes les 20 minutes.
Lorsque l'appareil se trouve dans l'espace aérien de classe E, le contrôleur terminal tente à cinq reprises, entre 19 h 13 min 34 s et 19 h 15 min 57 s, de communiquer en vain avec le Cessna 172. Il n'existe pas de directive précise qu'un contrôleur doit suivre lorsqu'un appareil en VFR, circulant dans l'espace aérien de classe E, ne répond plus au signal transpondeur et cesse de communiquer sur la fréquence ATC. Dans l'espace aérien de classe E, le pilote peut quitter la fréquence et fermer son transpondeur sans aviser le contrôleur; cependant, en VFR, il est d'usage de régler le transpondeur pour répondre au code 1200.
Vers 19 h 18, le Cessna 172 pénètre dans l'espace aérien de classe D de Saint-Hubert qui s'étend de 2 000 pieds à 6 000 pieds asl. L'espace aérien de classe D est un espace aérien contrôlé dans lequel les vols IFR et VFR sont autorisés, mais les vols VFR doivent établir des communications bilatérales avec l'organisme ATC compétent avant d'y pénétrer. De plus, dans l'espace aérien de classe D de Saint-Hubert, le transpondeur de l'aéronef doit être en marche. L'ATC assure l'espacement des vols IFR seulement et fournit les renseignements sur la circulation aux autres aéronefs.
À 19 h 23 min 3 s, le contrôleur tente en vain, une fois de plus, de communiquer avec le Cessna 172 qui est toujours dans l'espace aérien de classe D et qui vole à moins de 4 nm de la zone de contrôle de Saint-Hubert. Cette communication est la dernière que le contrôleur effectue concernant le Cessna 172. Selon le Manuel d'exploitation - Contrôle de la circulation aérienne (MANOPS), si le contrôleur a des raisons de croire qu'un aéronef est en panne radio, il doit informer les unités radar appropriées des circonstances et demander à ces unités d'essayer d'observer l'apparition d'un code radar secondaire de surveillance (SSR) spécial ou d'un circuit de détresse triangulaire.
L'enregistrement radar indique qu'à 19 h 24, à la verticale de l'aéroport de Saint-Mathias, le pilote a effectué un virage à gauche de 90 degrés puis a pénétré dans la zone de contrôle de Saint-Hubert à 19 h 27 min 12 s. Il y avait deux appareils dans la zone de contrôle : un avion venait de décoller de la piste 06R et l'autre appareil tournait en base droite pour la piste 06R. Deux minutes plus tard, à 19 h 29 min 23 s, le Cessna 172 a rejoint la finale de la piste 24L à 2 nm du seuil, à 70 nœuds, et il a alors disparu de l'écran des ATS. L'appareil a atterri à mi-piste vers 19 h 31. Une quantité limitée d'échos radar du Cessna 172 dans la zone de contrôle a été enregistrée de façon intermittente. Le radar a détecté le Cessna 172 à sept reprises; la cible primaire apparaissait entre 5 et 14 secondes, puis disparaissait pendant 4 à 23 secondes. Plus de la moitié des échos étaient de mauvaise qualité et étaient représentés par un point. Le plancher du radar se situait à environ 900 pieds asl dans cette région.
Après s'être assuré que la piste 06R et l'axe de la piste étaient libres, le contrôleur d'aéroport autorise le pilote du Katana à décoller. Le Katana se trouve alors sur la voie de circulation Tango à l'écart de la piste 06R. L'élève-pilote amorce sa course au décollage en vue d'effectuer un vol d'entraînement de nuit en VFR. Le phare d'atterrissage, les feux de navigation et le feu stroboscopique sont allumés. Lors du roulement au décollage, à environ 55 nœuds, l'instructeur du Katana aperçoit le Cessna 172 qui roule en sens inverse à quelques mètres devant lui; il tire alors sur le manche pour passer au-dessus du Cessna pour éviter la collision. Le train d'atterrissage du Katana heurte le toit du Cessna 172 et le Katana s'écrase sur la piste où il s'immobilise sur le ventre à la hauteur de la voie de circulation Foxtrot. La collision a eu lieu à 950 pieds du seuil de la piste, 45 secondes après que le Katana a reçu l'autorisation de décoller. Les conditions météorologiques étaient propices au vol à vue, le vent était calme et il n'y avait aucune restriction à la visibilité.
L'aéroport de Saint-Hubert est certifié et est doté d'une tour de contrôle qui était en service avec le personnel requis au moment de l'événement. Un contrôleur et un surveillant étaient en fonction. La tour était équipée d'un écran radar. Les contrôleurs d'aéroport n'utilisent pas les données radar pour assurer l'espacement des avions, mais ils les utilisent pour indiquer leur position. La piste 06R/24L mesure 3 920 pieds de longueur sur 100 pieds de largeur; elle n'était pas munie de feux d'approche qui auraient pu permettre de déterminer la piste en service.
Selon le manuel d'exploitation de l'aéroport, le service d'incendie de la ville de Saint-Hubert est le premier intervenant en cas d'urgence à l'aéroport. Étant donné que l'aéroport n'accueille aucun vol régulier, les normes concernant les délais d'intervention ne s'appliquent pas. Les véhicules d'urgence du motoriste Pratt & Whitney, qui est situé sur l'aéroport, sont arrivés sur le lieu de l'accident à 19 h 41, et ceux de la ville de Saint-Hubert une minute plus tard.
Le taux de décharge continuel indiqué sur l'ampèremètre avertissait le pilote que l'alternateur ne fournissait plus d'énergie et que seule la batterie alimentait les circuits électriques de l'avion. La procédure à suivre, publiée dans la section III du manuel de vol (FOM) du Cessna 172, consiste tout d'abord à couper l'alternateur pour réduire la dépense énergétique suscitée par le circuit du champ d'excitation de ce dernier. On recommande ensuite de diminuer la consommation en coupant l'alimentation de l'équipement non essentiel au vol et d'atterrir dès que possible. Selon l'avionneur, la batterie peut normalement fournir l'électricité à l'équipement essentiel pendant environ deux heures.
Puisque le pilote ignorait qu'une indication de sous-tension signalait une panne d'alimentation du réseau en courant continu, il n'a pas suivi la procédure proposée par l'avionneur. Il croyait que le voyant lumineux rouge de surtension s'allumait dans le cas d'une défectuosité de l'alternateur. En fait, le voyant de surtension s'allume uniquement après que le détecteur de surtension a décelé une surtension et coupé l'alternateur. Le pilote n'a pas consulté de liste de vérifications ni le manuel de vol de l'appareil lors du vol.
Quoique la panne de communication soit survenue à l'intérieur de l'espace aérien de classe E, hors de la zone de contrôle de Saint-Hubert, le pilote pouvait entrer dans la zone sans autorisation et poursuivre le vol VFR. Cependant, il devait atterrir à l'aéroport de Saint-Hubert après avoir suivi les procédures d'arrivée pour les aéronefs sans radio (NORDO). Le pilote devait survoler l'aéroport à une altitude supérieure à 500 pieds au-dessus du circuit, puis descendre et rejoindre le circuit dans le secteur vent debout de la piste en service. Par la suite, il devait s'engager sur l'étape vent de travers par le travers d'un point situé à peu près à mi-chemin entre les deux extrémités de piste et s'intégrer au circuit en vent arrière. Le pilote devait faire constamment attention aux signaux optiques pour obtenir l'autorisation d'atterrir. Le pilote ne connaissait pas bien cette procédure.
Le pilote du Cessna 172 et celui du Katana possédaient les licences et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Le pilote du Cessna 172 était titulaire d'une licence de pilote privé et totalisait 120 heures de vol; il était en voie d'obtenir une licence de pilote professionnel. Il avait obtenu son annotation pour le vol de nuit le 27 janvier 1998. Le pilote du Katana avait obtenu sa licence de pilote professionnel le 10 janvier 1997 et sa qualification d'instructeur le 11 avril 1997.
Le Katana était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
Transport Air a acheté le Cessna 172 en novembre 1997. L'aéronef totalisait 2 083 heures de vol. Avant de remettre l'appareil en service à l'école de pilotage, l'exploitant a modifié le système avionique. Il a installé de nouvelles radios, un indicateur VOR/ILS et un transpondeur. Il a aussi changé la courroie de l'alternateur. Le connecteur du câble de champ de l'alternateur a également été remplacé le 17 décembre 1997. L'aéronef a été remis en service le 20 décembre 1997. Après la remise en service du Cessna 172, trois inspections périodiques ont été effectuées. Le 22 janvier 1998, lors d'une révision des 50 heures, la batterie a été mise en recharge. Le 7 février 1998, le Cessna 172 a subi une révision des 100 heures, puis le 22 février, une inspection des 50 heures. Lors de ces trois inspections, le filage électrique a été vérifié, et aucune anomalie n'a été notée. Au moment de l'accident, l'aéronef avait effectué environ six heures de vol depuis la dernière inspection des 50 heures. L'appareil était certifié et équipé conformément à la réglementation en vigueur.
L'examen de l'épave a révélé que le câble de la borne positive de l'alternateur était fortement endommagé. Seulement 7 des 133 brins du câble alimentaient le système électrique de l'avion au moment de l'accident. Le Laboratoire technique du BST a déterminé que, vraisemblablement, des charges de fatigue causées par une flexion inversée du câble ont provoqué l'usure progressive puis la rupture d'une centaine de brins situés près de la borne. Par la suite, les brins qui restaient se sont fusionnés quand la charge électrique a excédé leur capacité. Le chapitre 515 de la section 7 de l'Advisory Circular AC43-13-1A de la Federal Aviation Administration stipule les normes d'installation pour les câbles électriques. Afin de réduire les charges de fatigue, le rayon de pliage d'un câble près d'un connecteur ne peut être inférieur à trois fois son diamètre extérieur. Dans le cas à l'étude, étant donné que le câble avait un diamètre de 0,25 pouce, le rayon de pliage devait être d'au moins 0,75 pouce.
Analyse
Le Cessna 172 a subi une panne électrique totale causée par la défaillance du câble de la borne positive de l'alternateur. Pour générer les charges de fatigue par flexion inversée qui ont entraîné la dégradation du câble, le rayon de pliage de ce dernier devait être inférieur à la norme recommandée. L'enquête n'a pas permis d'établir la durée d'affaiblissement du câble; toutefois, il est peu probable que sa détérioration ait débuté après la révision du 22 février, soit moins de six heures avant sa rupture. Il est probable que le câble ait été plié au-delà de la norme établie lorsque l'alternateur a été manipulé lors des travaux d'entretien. L'alternateur et son câblage auraient dû être examinés à cinq reprises : lors du remplacement du câble de champ de l'alternateur et de sa courroie, et lors des trois dernières inspections périodiques. L'enquête n'a pas révélé pourquoi l'exploitant n'a pas décelé l'usure du câble et sa mauvaise installation. Il est possible que le personnel qui a effectué les révisions périodiques et les travaux sur l'alternateur ignoraient, soit les normes régissant le pliage des câbles électriques, soit les conséquences d'une mauvaise installation, ou les deux.
L'indication de sous-tension du système électrique permettait de prévoir, au moins dans l'heure, la panne électrique. La description du système électrique de l'appareil et les conséquences d'une indication de sous-tension, tels qu'ils sont présentés dans le manuel de vol de l'appareil, permettaient au pilote de réaliser que l'alternateur ne fournissait pas à la demande électrique nécessaire au vol. On peut donc conclure que le pilote ne connaissait pas suffisamment bien le système électrique de l'avion tel qu'il est décrit dans le manuel de vol. Si le pilote avait reconnu la nature du problème, il aurait été en mesure de signaler la situation au contrôleur par radio puis d'atterrir de jour avant la panne.
Le contrôleur terminal a probablement cessé de suivre l'appareil parce qu'il ne s'est pas rendu compte de ce qui se passait. Pourtant, des indices indiquaient que le système de communication de l'avion était en panne. Plus précisément, la dernière communication du pilote laissait présager des communications ultérieures puisque la trajectoire prévue amenait l'appareil, qui volait à 3 000 pieds asl, à pénétrer sous peu dans l'espace aérien de classe D de Saint-Hubert. Par conséquent, le contrôleur n'avait aucun motif de croire que le pilote avait fermé le transpondeur et changé de fréquence radio avant de pénétrer dans l'espace aérien de classe D où une communication bilatérale avec l'ACC et la mise en marche du transpondeur étaient obligatoires. Si le Cessna 172 était descendu plus bas que 2 000 pieds asl pour passer au-dessous de l'espace aérien de classe D, le contrôleur pouvait au moins s'attendre à ce que le pilote affiche le code 1200, propre au vol VFR. L'appareil, qui était toujours visible sur l'écran radar, avait pénétré dans l'espace aérien de classe D de Saint-Hubert depuis 4 minutes et 30 secondes, quand le contrôleur terminal a tenté de le rejoindre pour la dernière fois. Comme le pilote n'a pas accusé réception de l'appel et que le transpondeur ne répondait pas, le contrôleur pouvait en déduire que l'appareil avait subi une panne de communication totale. Le contrôleur terminal aurait dû signaler la situation à la tour de Saint-Hubert, d'autant plus que la rupture de communication s'est produite de nuit, alors que le Cessna 172 évoluait à moins de 4 nm de la zone de contrôle de Saint-Hubert, à l'intérieur d'un espace aérien où l'usage des deux émetteurs/récepteurs était obligatoire. Le contrôleur de la tour aurait alors été avisé de la présence du Cessna 172.
Les facteurs suivants ont probablement influencé la décision du contrôleur terminal de traiter la rupture de communication et la perte de l'information transpondeur comme une situation normale : la panne électrique s'est produite dans l'espace aérien de classe E, la cible primaire du Cessna 172 a conservé son cap en suivant le trajet prévu, et aucune manœuvre pour alerter le système radar n'a été exécutée par le pilote. Si le pilote, qui se savait suivi par radar, avait décrit deux figures triangulaires par la gauche, le contrôleur aurait été avisé de la situation et aurait informé les unités de contrôle appropriées des circonstances. Puisque les échos radar primaires étaient sporadiques et qu'aucun bloc de données connexe qui aurait signalé une situation d'urgence n'apparaissait sur l'écran radar, le contrôleur d'aéroport pouvait difficilement discerner la présence du Cessna 172 sur l'écran radar et déduire que l'appareil atterrirait sur la piste opposée à celle en service. Le contrôleur d'aéroport pouvait également s'attendre à ce que l'avion NORDO exécute les procédures d'arrivée correspondantes et obtienne une autorisation avant de se poser. Le contrôleur d'aéroport a balayé visuellement la piste et l'axe de la piste avant d'autoriser le décollage du Katana. Le contraste entre le Cessna 172, tous feux éteints, et l'arrière-plan de nuit rendait l'aéronef pratiquement indiscernable pour le contrôleur et l'équipage du Katana. On peut conclure que le contrôleur d'aéroport a accompli ses tâches conformément aux procédures établies et selon les responsabilités qui lui étaient assignées.
Parce qu'il croyait que le radar suivait le vol, le pilote du Cessna 172 a supposé, à tort, que le contrôleur d'aéroport de Saint-Hubert connaissait sa présence et assurait l'espacement des aéronefs et la disponibilité de la piste 24L, même s'il n'avait reçu aucun signal optique de la tour l'autorisant à joindre l'étape finale et à atterrir. Le pilote devait s'assurer que ses intentions étaient connues, d'autant plus qu'au moment de la collision, il faisait nuit, et que seul le contact visuel rendait possible un atterrissage en toute sécurité.
La panne électrique de l'appareil a entraîné des pannes multiples; tous les systèmes, jauges et instruments de vol/moteurs alimentés par électricité étaient devenus inutilisables. Le système de communication, le système d'éclairage intérieur et extérieur, et le système de navigation ont cessé de fonctionner. Étant donné que la panne électrique est survenue de nuit, la situation d'urgence était plus complexe qu'une panne similaire de jour. Le pilote, seul à bord, devait maîtriser son appareil, naviguer, observer les instruments disponibles, puis consulter à l'aide d'une lampe de poche le manuel de vol, les cartes de navigation et les listes de vérifications pertinentes. La charge de travail du pilote et son niveau de stress devaient être élevés et ont dû influencer ses décisions.
Le pilote devait posséder une bonne connaissance des systèmes de l'appareil et des procédures suivantes pour poursuivre le vol en toute sécurité : système électrique de l'appareil, procédures d'urgence pertinentes publiées dans le manuel de vol, système ATS, manœuvres pour alerter les stations radar, procédures de panne totale de communications, procédures d'arrivée pour les aéronefs NORDO, procédures d'atterrissage pour les aéronefs NORDO, et la signification des signaux optiques autorisés utilisés par la tour. Bien que la compréhension de ces systèmes et procédures soit obligatoire pour l'obtention de la licence de pilote privé, il est probable qu'à cause de son manque d'expérience, le pilote n'a pas réalisé l'imminence de la panne électrique et qu'il a surestimé la contribution des services de la circulation aérienne.
Étant donné que le Cessna 172 a atterri à mi-piste, presque deux minutes ont dû s'écouler entre la dernière position enregistrée de l'avion, 2 nm en finale, et l'atterrissage. Il est permis de conclure que la piste 24L était libre lorsque le Cessna 172 était en finale et que le Cessna 172 a atterri peu de temps après le moment où le pilote du Katana s'est engagé sur la piste et a amorcé sa course au décollage. Puisque la collision s'est produite à moins de 1 000 pieds du seuil de la piste 06R, et 42 secondes après que le pilote du Katana a accusé réception de l'autorisation de décoller, il est probable que, compte tenu de la trajectoire de collision frontale, le pilote du Cessna 172 avait peu de temps pour apercevoir l'autre avion, de réaliser l'imminence du danger, puis de tenter une manœuvre d'évitement.
Si le pilote avait suivi les procédures d'arrivée pour les aéronefs NORDO, il aurait été en mesure d'apercevoir le trafic et d'identifier la piste en service. Il est également probable que le contrôleur aurait remarqué l'appareil sur le radar, signalé sa présence aux autres pilotes, puis autorisé l'atterrissage à l'aide de signaux optiques.
Faits établis
- Le Cessna 172 a subi une panne électrique totale de nuit dans l'espace aérien de classe E.
- La panne est attribuable à la défaillance du câble de la borne positive de l'alternateur.
- L'installation du câble n'était pas conforme à la norme recommandée et a provoqué des charges de fatigue par flexion inversée qui ont entraîné sa dégradation.
- L'exploitant n'a pas décelé l'usure du câble et sa mauvaise installation lors de la dernière inspection périodique, six heures avant le vol.
- Le pilote du Cessna 172 avait observé une indication de sous-tension avant la panne.
- Le pilote du Cessna 172 ne connaissait pas bien les conséquences d'une sous-tension.
- Le pilote du Cessna 172 n'a pas suivi la procédure recommandée par l'avionneur en cas de sous-tension.
- Le contrôleur terminal de Montréal et le contrôleur d'aéroport de Saint-Hubert ne savaient pas que le Cessna 172 avait subi une panne électrique totale et que le pilote se poserait sur la piste 24L.
- Le contrôleur terminal aurait dû informer la tour de Saint-Hubert de la présence du Cessna 172 qui se trouvait à 4 nm de la zone de contrôle de Saint-Hubert après qu'il a tenté en vain de communiquer avec l'appareil dans l'espace aérien de classe D.
- Le contrôleur d'aéroport a accompli ses tâches conformément aux procédures établies et selon les responsabilités qui lui étaient assignées.
- Le contraste entre le Cessna 172, tous feux éteints, et l'arrière-plan de nuit ne permettait pas au contrôleur d'aéroport et à l'équipage du Katana de voir le Cessna 172 en approche et sur la piste.
- Le pilote du Cessna 172 n'a pas suivi les procédures d'arrivée pour les aéronefs NORDO à l'aéroport de Saint-Hubert.
Causes et facteurs contributifs
Le pilote du Cessna 172 n'a pas suivi les procédures d'arrivée pour les aéronefs NORDO et n'a pas effectué une recherche visuelle adéquate avant d'atterrir dans le sens inverse de la piste 06R, au moment où le Katana a été autorisé à décoller de la piste 06R. Les facteurs suivants ont contribué à l'accident : l'installation du câble de la borne positive de l'alternateur n'était pas conforme à la norme recommandée; l'exploitant n'a pas décelé l'usure du câble et sa mauvaise installation; le pilote du Cessna 172 ne connaissait pas bien les conséquences d'une indication de sous-tension; ainsi que le manque de vigilance du contrôleur terminal.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .