Rapport d'enquête aéronautique A04Q0188

Sortie de piste lors de l'atterrissage
du Beech B300 (Super King Air) C-FMHD
exploité par Aviation CMP inc.
à Saint-Georges (Québec)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le Beech B300, immatriculé C-FMHD, numéro de série FL-87, exploité par Aviation CMP inc., effectue un vol aux instruments de Saint-Hubert (Québec) à Saint-Georges (Québec) avec deux pilotes et un passager à son bord. À 11 h 26, heure normale de l'Est, au terme d'une approche aux instruments RNAV (GPS) de la piste 06, l'appareil est trop haut pour effectuer un atterrissage en toute sécurité et l'équipage entreprend une procédure d'approche interrompue. Le centre de Montréal est avisé qu'une approche aux instruments RNAV (GPS) de la piste 24 sera tentée. À 11 h 46, heure normale de l'Est, l'appareil se pose à plus de 2400 pieds au-delà du seuil de la piste 24. Aussitôt au sol, l'avion commence à bifurquer vers la gauche sur la piste enneigée. On tente de reprendre la maîtrise directionnelle en appuyant à fond sur le palonnier droit. Toutefois, l'avion continue sa course à gauche, puis fait une sortie de piste avant de s'immobiliser dans un fossé situé à une cinquantaine de pieds au sud de la piste. L'appareil subit des dommages importants. Aucun des occupants n'est blessé.

    Renseignements de base

    À 10 h 50, heure normale de l'EstNote de bas de page 1, le Beech B300 exploité par Aviation CMP inc. quitte Saint-Hubert (Québec)Note de bas de page 2, pour un vol de 30 minutes à destination de Saint-Georges, avec à son bord deux membres d'équipage et le propriétaire/président de la compagnie. Le copilote est aux commandes. Il s'agit d'un vol assuré sous autorégulation (un vol au cours duquel les pilotes assurent leur propre régulation), et le départ se fait selon les règles de vol aux instruments (IFR).

    Vers 11 h, Saint-GeorgesNote de bas de page 3 est informé que le C-FMHD estime arriver dans 20 minutes. À 11 h 10, Saint-Georges informe l'appareil que le vent souffle de l'est à quatre noeuds et que le calage altimétrique est de 29,65. Au même moment, le déneigement de la piste débute. À 11 h 13, le centre de Montréal fournit les dernières conditions météorologiques de Québec. La visibilité verticale est de 500 pieds, la visibilité horizontale est de ½ mille dans la neige et le calage altimétrique est en chute libre à 29,56. L'appareil est ensuite autorisé à l'extérieur de l'espace aérien non contrôlé pour effectuer une approche, et l'équipage entreprend une approche aux instruments RNAV (GPS) de la piste 06 (voir l'annexe A). L'équipage effectue les vérifications de descente et le breffage pour l'approche, mais ne discute pas de l'éventualité d'une approche interrompue pendant le breffage pour l'approche.

    Vers 11 h 15, Saint-Georges informe C-FMHD que la piste est dégagée sur une largeur de 60 pieds. Cependant, à 11 h 25 min 16 s, il est annoncé sur la fréquence UNICOM de l'aérodrome que la piste est dégagée sur une largeur de 36 pieds. À ce moment, le commandant de bord peut voir le sol. L'appareil se trouve à 1,7 mille marin (nm) du seuil de la piste à 1300 pieds au-dessus du niveau de la merNote de bas de page 4 (asl).

    Quarante secondes plus tard, à environ ¾ nm du seuil, le commandant de bord voit les feux de piste et il avise le copilote de la présence possible d'un chasse-neige sur l'aire d'atterrissage. À 11 h 26 min 17 s, l'appareil se trouve à environ 200 pieds au-dessus de la piste et est trop haut pour atterrir en toute sécurité. Le commandant de bord prend les commandes de l'appareil et effectue une procédure d'approche interrompue.

    L'appareil ne suit pas la trajectoire d'approche interrompue publiéeNote de bas de page 5. L'avion suit plutôt un cap magnétique de 062° puis emprunte une trajectoire qui l'amène, six minutes plus tard, à 18 nm au nord de la piste. Le système de commandes de vol (FCS) est programmé pour une approche RNAV (GPS) de la piste 24. Une fois le FCS programmé, l'appareil fait demi-tour et se rend au point de cheminement intermédiaire RIKAL, puis au point de cheminement d'approche initiale ITRAL, d'où il débute l'approche.

    Le profil de l'approcheNote de bas de page 6 comprend trois paliers : au-dessus de ITRAL, l'appareil peut descendre à 1900 pieds; à 5 nm du seuil de la piste, au-dessus de USDAK, le point de cheminement d'approche finale (FAWP), l'appareil peut poursuivre la descente à 1440 pieds; enfin, à 2 nm du seuil, au point de cheminement de descente (SDWP) VIXIP, il peut descendre jusqu'à l'altitude minimale de descente (MDA), soit 1280 pieds (voir l'annexe B). Le point de cheminement d'approche interrompue (MAWP) est situé à la verticale du seuil de la piste (voir la figure 1).

    Figure 1. Profil de vol estimé de l'approche pour la piste 24
    Image
    Figure of Profil de vol estimé de l'approche pour la piste 24

    Lors de la planification de l'approche, les breffages n'ont pas été faits selon les procédures d'utilisation normalisées (SOP) de la compagnie. L'équipage n'a pas discuté des procédures d'approche ou d'une procédure d'approche interrompue. À environ 3 nm de USDAK et à 1900 pieds asl (environ 1000 pieds au-dessus du sol), le copilote voit le sol. Dès cet instant, il signale la position de l'appareil par rapport au sol et les conditions météorologiques. Quelques secondes plus tard, le commandant de bord rajuste le sélecteur d'altitude à 1100 pieds, 200 pieds au-dessous de la MDA, et règle le radioaltimètre à 380 pieds, la hauteur au-dessus de l'aérodrome (HAA) à la MDA. À un peu plus de 3 nm du seuil, l'appareil se trouve à 200 pieds au-dessus du sol.

    À 11 h 43 min 8 s, les conditions se sont détériorées de façon significative. À 11 h 45 min 18 s, on effectue la vérification avant l'atterrissage, à l'exception de l'amortisseur de lacet qui est laissé à « ON ». À 11 h 45 min 24 s, et à environ 1,5 nm de la piste, on continue la descente. Cinq secondes plus tard, l'avertisseur d'altitude retentit.

    À environ ¼ nm, le copilote voit la piste à gauche. Le commandant de bord, qui ne voit pas la piste, suit les instructions du copilote. L'appareil emprunte une trajectoire en zigzag et survole successivement l'indicateur de trajectoire d'approche de précision (PAPI), l'axe de piste et les feux de piste du côté droit, avant de revenir à gauche. Le commandant de bord voit la piste et atterrit. L'appareil se pose à plus de 2400 pieds au-delà du seuil, et aussitôt au sol, il bifurque vers la gauche. Même une fois le palonnier droit complètement enfoncé, l'appareil continue de se diriger à gauche. La poussée inverse maximale est commandée.

    Le train principal gauche, puis la roulette avant, percutent l'amas de neige laissé sur la piste par le véhicule de déneigement. La jambe du train avant se brise et l'avion tombe sur le nez. L'appareil pivote vers la gauche et continue sa course perpendiculairement à la piste. L'avion quitte la piste et s'immobilise à 3600 pieds du seuil, dans un fossé de drainage, nez vers le bas. L'équipage coupe l'alimentation électrique et le carburant, puis évacue l'avion avec le passager.

    La radiobalise de repérage d'urgence ne s'est pas déclenchée lors de la sortie de piste. Le coordonnateur du transport aérien/répartiteur ne voit pas l'appareil atterrir en raison d'une légère butte située à 2100 pieds du seuil de la piste. Il tente de communiquer avec l'équipage, mais il n'obtient pas de réponse; il envoie donc les véhicules de déneigement sur la piste à la recherche de l'avion et appelle le 911. Huit minutes plus tard, le premier véhicule d'intervention d'urgence arrive sur les lieux de l'accident.

    L'équipage possédait les qualifications nécessaires au vol en vertu de la réglementation en vigueur. Le commandant de bord et le copilote ont été embauchés respectivement en juillet et en octobre 2004. À la suite de leur recrutement, ils ont suivi une formation complète chez CAE Simuflite au Texas, aux États-Unis, sur simulateur de Beech B300. Étant donné que ni le commandant de bord ni le copilote n'a suivi sa formation avec un autre pilote d'Aviation CMP inc., CAE Simuflite s'est servi de ses propres SOP plutôt que de celles de la compagnie.

    Aviation CMP inc. avait demandé à CAE Simuflite de dispenser à ses pilotes des cours complémentaires qui devaient traiter de 10 sujets, dont la gestion des ressources de l'équipage (CRM) et les risques de collision avec le relief sans perte de maîtrise (CFIT). Les dossiers d'Aviation CMP inc. indiquent que les pilotes avaient suivi ces formations, mais selon le registre de formation de CAE Simuflite, aucun des pilotes n'avait suivi une formation au sol CRM ou CFIT. Toutefois, ils ont été jugés compétents lors des exercices sur simulateur qui comprenaient la CRM et les CFIT.

    Avant de se joindre à Aviation CMP inc., le commandant de bord était chef pilote d'une compagnie qui exploitait un Beech King Air. Il avait peu d'expérience de vol en équipage. À ses débuts, la compagnie l'a jumelé avec des pilotes de Beech B300 d'expérience. À partir de la mi-octobre, il a principalement volé avec le copilote. Au moment de l'accident, le commandant de bord totalisait quelque 4500 heures de vol, dont 250 sur Beech B300. C'était son premier vol à Saint-Georges dans des conditions hivernales. Selon les renseignements recueillis, le commandant de bord était un pilote consciencieux qui respectait la réglementation en vigueur et les limites d'atterrissage. Le commandant de bord avait transporté le propriétaire de la compagnie deux fois auparavant. Ces vols se sont effectués dans des conditions de vol à vue (VFR) et ont été qualifiés de routiniers.

    Le copilote a été embauché comme copilote. Il ne satisfaisait pas aux exigences d'expérience de la compagnie pour agir comme commandant de bord. Au moment de l'événement, il totalisait environ 1200 heures de vol, dont 90 sur Beech B300. C'était également son premier vol à Saint-Georges dans des conditions hivernales. Il était considéré comme un pilote sérieux et professionnel.

    La CRM est l'utilisation efficace de toutes les ressources, incluant l'aéronef et ses systèmes, la documentation, les logiciels d'ordinateur et les personnes, pour atteindre le plus haut niveau possible de sécurité. La catégorie « personnes » comprend les pilotes, les agents de bord, les contrôleurs de la circulation aérienne, le personnel de la maintenance, les régulateurs et toute autre personne qui peut avoir des relations avec l'équipage de conduite. La CRM comprend plusieurs éléments, notamment la communication, le travail d'équipe et la prise de conscience de la situation. Ni le commandant de bord ni le copilote n'avait suivi une formation CRM au sol. Rien dans la réglementation n'exige que les pilotes de compagnies privées suivent une formation CRM.

    L'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Il ne présentait aucune anomalie connue avant le vol, et il était exploité conformément à ses limites de masse et de centrage. La largeur de l'empattement du train principal est de 18 pieds, soit la moitié de la largeur de piste déblayée.

    L'appareil est équipé d'un système de commandes de vol Collins APS-65. C'est un système sophistiqué qui rassemble électroniquement l'information fournie par plusieurs instruments, introduit cette information dans un ordinateur et l'expose sur deux affichages visuels. À la suite d'une remise des gaz, le APS-65 affiche la trajectoire d'approche interrompue publiée. Le directeur de vol est généralement couplé au pilote automatique.

    Le FCS comprend un système de sélection d'altitude. Lorsque l'appareil se trouve à 1000 pieds et à 200 pieds de l'altitude affichée sur le panneau de sélection d'altitude, un signal sonore d'avertissement se fait entendre et un voyant annonciateur s'illumine. L'examen de l'appareil après l'accident a révélé que le panneau de sélection d'altitude affichait 1100 pieds, que l'altimètre radar était réglé à 380 pieds et que l'altimètre du commandant de bord ainsi que celui du copilote étaient calés sur 29,55 po Hg (pouces de mercure).

    Selon les SOP de la compagnie, le commandant de bord a la responsabilité d'obtenir les renseignements météorologiques avant le vol. Le pilote a contacté le centre d'information de vol (FIC) de Québec vers 7 h le matin de l'accident et il a consulté le site internet météo de NAV CANADA. Étant donné qu'il n'y a pas de station météorologique du Service de l'environnement atmosphérique à Saint-Georges, l'information obtenue était périphérique. Des conditions IFR à VFR marginales étaient prévues pour le sud du Québec. Il neigeait légèrement à Saint-Georges à 9 h 35 le matin de l'accident, quand l'appareil a décollé de Saint-Hubert; le plafond nuageux allait de 200 à 400 pieds au-dessus du sol. Il s'est mis à neiger abondamment à Saint-Georges après le départ de l'avion. Il pleuvait à Saint-Hubert lorsque l'appareil a atterri à 10 h 12. Rendu à Saint-Hubert, le commandant de bord n'a pas appelé Saint-Georges pour obtenir les renseignements météorologiques ou les conditions de piste.

    Lors de l'approche de la piste 06, l'équipage a établi le contact visuel avec le sol à 1500 pieds asl et a vu les feux de piste à environ ¾ nm du seuil. Plus tard, en finale de la piste 24, les conditions s'étaient aggravées au point qu'il devenait difficile d'atterrir. Selon les observations, le plafond était obscurci et la visibilité était de ¼ à ½ nm dans de fortes averses de neige.

    La municipalité de Saint-Georges est propriétaire de l'aérodrome de Saint-Georges. C'est un aérodrome qui n'est pas certifié par Transports Canada et qui n'est pas contrôlé. Les services d'intervention d'urgence sont assurés par le Service de la sécurité incendie de Saint-Georges. Selon une entente contractuelle, Aviation CMP inc. exploite l'aérodrome. Le gestionnaire de l'exploitation d'Aviation CMP inc. est responsable de la gestion globale de l'aérodrome. Le coordonnateur du transport aérien d'Aviation CMP inc. se charge de la gestion journalière de l'aérodrome; entre autres, il est responsable de coordonner les travaux de déneigement, de balayage et de nettoyage de la piste. De plus, il occupe la fonction de radiotéléphoniste de l'UNICOM de l'aérodrome. N'étant pas un observateur qualifié, le coordonnateur du transport aérien ne peut donner que le calage altimétrique, la direction et la force du vent, ainsi que l'état de la piste. Il aurait pu fournir la hauteur du plafond et la visibilité à titre indicatif seulement, mais il ne l'a pas fait. Aviation CMP inc. n'avait pas élaboré une liste de références extérieures permettant au coordonnateur du transport aérien d'estimer la visibilité et la hauteur du plafond nuageux avec plus de précision, et n'était pas tenue de le faire.

    L'altitude de référence de l'aérodrome est de 893 pieds asl. La piste 06/24 est asphaltée et mesure 5108 pieds de longueur sur 75 pieds de largeur. La trajectoire finale de la piste 24 amène l'appareil à survoler une vallée façonnée par la rivière Chaudière, et la piste se trouve sur le sommet du versant ouest. La ville de Saint-Georges s'étend sur les flancs de la vallée, de part et d'autre de la rivière. La piste 24 est équipée de feux de bord de piste à basse intensité, de feux de seuil et d'extrémité et d'un système de balisage lumineux d'aérodrome télécommandé (ARCAL) de type J. L'ARCAL, qui permet de commander le balisage de l'aérodrome dans un rayon de 15 nm pendant 15 minutes, a été actionné une première fois à 17 nm de la piste et une deuxième fois à environ 10 nm du seuil. La piste était équipée d'un PAPI de catégorie P1 avec une pente de 2,5 degrés que l'on peut habituellement voir à une distance d'au moins 4 nm. Lorsque le PAPI de la piste 24 a été visible, l'appareil se trouvait à moins de ¼ nm du seuil et les quatre feux étaient blancs, indiquant que l'appareil était trop haut par rapport à la pente d'approche nominale.

    Une compagnie spécialisée, engagée à contrat par Aviation CMP inc., effectue les travaux de déneigement de l'aérodrome de Saint-Georges. Normalement, l'opération de déneigement débute immédiatement à la fin de la chute de neige ou sur demande d'un exploitant d'aéronef. Après avoir déneigé la piste le matin de l'accident, le conducteur du véhicule de déneigement a quitté l'aérodrome. Avant son départ, il avait été convenu que la piste devait être de nouveau déneigée avant le retour de C-FMHD prévu vers 11 h.

    Comme, en règle générale, il faut 45 minutes pour déneiger la piste, le coordonnateur du transport aérien s'attendait à ce que l'opération de déneigement débute vers 10 h. Toutefois, le déneigement de la piste a commencé vers 11 h 10, et il s'est poursuivi jusqu'à ce que C-FMHD soit à environ 1 nm du seuil de la piste 06. Le conducteur du véhicule de déneigement n'a pas informé Saint-Georges lorsqu'il a quitté la piste, et l'enquête n'a pu déterminer si la piste était libre de tout trafic au moment où l'appareil a atteint le MAWP.

    L'enquête a établi que le coordonnateur du transport aérien a perdu le contact radio avec le véhicule de déneigement à plusieurs reprises pendant l'opération de déneigement; l'antenne radio des véhicules de déneigement ne permettait pas de maintenir la portée optique nécessaire à une communication continue avec le coordonnateur du transport aérien. Une note de mise en garde au coin supérieur gauche de la carte d'approche rappelle au pilote de s'assurer que la piste est libre d'obstacles.

    Au moment de l'événement, la piste était déblayée au centre sur une largeur de 36 pieds; entre 2 et 3 cm de neige recouvraient cette surface. Un amas de neige d'environ 30 cm de hauteur se trouvait de part et d'autre de la partie déblayée. Il y avait de 7 à 10 cm de neige sur le reste de la piste. L'information transmise à l'équipage par le coordonnateur du transport aérien indiquait uniquement que la piste était dégagée sur une largeur de 60 pieds.

    Étant donné que l'aérodrome de Saint-Georges ne possède pas de dispositif de mesure de la portée visuelle de piste (RVR), aucun règlement n'interdit à l'équipage de tenter une approche. Selon l'article 602.128 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), il est interdit au pilote de poursuivre la descente au-dessous de la MDA s'il n'a pas distingué clairement au moins l'une des références suivantes pendant l'approche de la piste 24 :

    • la piste ou les marques de piste;
    • le seuil de piste ou les marques du seuil;
    • la zone de poser des roues ou les marques de la zone de poser des roues;
    • l'indicateur de pente d'approche;
    • les feux d'identification de piste;
    • les feux de bord de piste de chaque côté de la piste.

    Ces références visuelles doivent permettre au pilote d'estimer la position de l'aéronef et son taux de changement de position par rapport à la trajectoire nominale. La visibilité publiée sur la carte d'approche était de 1¼ nm. Cette visibilité n'est publiée qu'à titre indicatif. Elle indique la visibilité qui devrait permettre au pilote d'établir le contact visuel avec les références nécessaires pendant l'approche et de juger s'il est possible d'effectuer un atterrissage avec succès lorsqu'il compare cette valeur à la visibilité disponible à l'aérodrome.

    Des modifications au règlement ont été proposées et vont constituer une interdiction d'approche qui empêchera l'équipage de conduite d'un avion exploité dans le cadre d'un service aérien commercial de poursuivre l'approche si la visibilité communiquée est inférieure à la valeur limite pendant l'approche.

    Lorsque l'appareil était en courte finale, la visibilité était entre ¼ nm et ½ nm. Étant donné que le PAPI était situé à environ 500 pieds à l'ouest du seuil, le copilote a aperçu le seuil de la piste à une distance de ¼ nm. Par conséquent, à la vitesse d'approche de 120 noeuds, l'appareil a survolé le seuil de la piste environ 6 à 13 secondes après que le pilote l'a aperçu.

    Aviation CMP inc. détient un certificat d'exploitation privé délivré par l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA). L'exploitation était assujettie à la sous-partie 604 du RAC, Transport de passagers par un exploitant privé. La compagnie transporte les dirigeants et les actionnaires des six compagnies actionnaires d'Aviation CMP inc., ainsi que leurs familles. Aviation CMP inc. exerce ses activités à partir de sa base à Saint-Georges.

    Afin de satisfaire aux exigences de l'ACAA, Aviation CMP inc. a élaboré puis mis en place un système de gestion de la sécurité (SGS) qui exige la participation de tout le personnel de la compagnie. L'objectif premier d'Aviation CMP inc. est de tenter de gérer tout risque et toute situation pouvant porter atteinte à la sécurité en agissant proactivement. La compagnie a identifié 16 situations et conditions dont elle a évalué le risque comme étant égal ou supérieur à « moyen-bas ». Les six éléments suivants de la liste des risques publiée dans le manuel relatif au SGS étaient présents lors du vol :

    Risque Évaluation du risque Moyens suggérés dans le SGS pour atténuer les risques
    Aéroport non contrôlé Moyen Communication adéquate des rapports de position
    Vérification des conditions météorologiques par téléphone avec les personnes ressources de l'aéroport
    Collision avec le relief sans perte de maîtrise Moyen Respect des altitudes
    Gestion des vols Moyen-bas Signalement de tout changement d'heure de départ ou d'arrivée
    Entretien des pistes Moyen Le personnel au sol doit prévoir débuter tôt les travaux de déneigement et doit communiquer les conditions de piste au pilote
    Approche GPS Élevé Tous les pilotes doivent connaître les procédures et les SOP relatives aux approches GPS
    Météo Moyen-bas Obtenir par téléphone un exposé météorologique auprès de personnes fiables

    La compagnie avait fourni un téléphone cellulaire à chacun de ses pilotes pour leur permettre de respecter les exigences formulées dans le manuel d'exploitation et le manuel relatif au SGS de la compagnie.

    Aviation CMP inc. a un manuel de SOP pour le Beech B300 qui énonce de façon claire et précise, pour chaque phase du vol et lors de certaines situations spécifiques, les tâches du commandant de bord et du copilote, du pilote aux commandes et du pilote qui n'est pas aux commandes. Le manuel d'exploitation de la compagnie exige que ses pilotes suivent les SOP. En fait, les SOP ainsi que le manuel d'exploitation de la compagnie font partie intégrante du programme de sécurité.

    Entre autres, les procédures concernant les éléments suivants du manuel d'exploitation et des SOP n'ont pas été suivies par l'équipage :

    • exposé météorologique avant le vol;
    • renseignements météorologiques et conditions de piste lors de l'approche;
    • réglage du sélecteur d'altitude à la MDA;
    • poursuite de la descente au-dessous de la MDA sans avoir le contact visuel avec les références réglementaires;
    • breffage d'approche;
    • annonces normalisées lors de l'approche GPS;
    • procédure d'approche interrompue;
    • interdiction d'utiliser une piste recouverte de plus de 2 cm de neige.

    Analyse

    La décision d'effectuer l'approche était conforme à la réglementation en vigueur puisque l'aérodrome de Saint-Georges n'était pas assujetti à une interdiction d'approche. Il convient également de préciser que l'interdiction d'approche proposée n'aurait pas empêché l'équipage d'entreprendre l'approche car, d'une part, cette interdiction ne s'applique pas aux compagnies privées et que, d'autre part, l'aérodrome de Saint-Georges ne satisfait pas aux exigences en matière d'observations météorologiques. Par conséquent, il semble que l'interdiction d'approche proposée n'offre pas le même niveau de protection aux exploitants privés qu'aux exploitants commerciaux.

    La trajectoire de vol n'était pas stabilisée lors de la phase finale de l'approche. Parce que la piste couverte de neige offrait peu de contraste avec le terrain avoisinant, il a été difficile d'aligner l'avion sur l'axe de la piste. À ¾ nm du seuil, l'appareil a amorcé un tracé en S qui l'a amené au sud puis au nord de la piste. Ce n'est que six secondes avant l'atterrissage que la piste a été visible. Par conséquent, compte tenu du peu de temps entre la correction de trajectoire et l'atterrissage, il est raisonnable de conclure que l'avion dérivait vers la gauche au moment du poser des roues. Dans ces conditions, il était difficile de maintenir l'appareil au centre de la piste contaminée et d'éviter les amas de neige laissés par le véhicule de déneigement et situés à peine neuf pieds de chaque côté du train d'atterrissage. La collision du train gauche avec l'amas de neige a entraîné la perte de maîtrise de l'appareil.

    L'approche de la piste 06, la remise des gaz ainsi que l'approche interrompue ont été effectuées de façon dangereuse. L'accident est survenu à la suite d'une approche non stabilisée et dangereuse de la piste 24 suivie d'un atterrissage sur une piste contaminée. À l'encontre des exigences d'exploitation de la compagnie, l'équipage n'a pas suivi les SOP de la compagnie. Notamment, la planification du vol était incomplète, les limites d'atterrissage n'ont pas été respectées, les limites de contamination de piste ont été ignorées, les breffages d'approche n'ont pas été faits en entier et la coordination de l'équipage a été déficiente. Par conséquent, l'analyse se concentrera essentiellement sur les décisions et les mesures prises par l'équipage et le personnel au sol d'Aviation CMP inc.

    En tenant compte des renseignements météorologiques obtenus le matin de l'accident, il aurait été prudent que le commandant de bord, avant de quitter Saint-Hubert, obtienne de Saint-Georges une mise à jour des conditions météorologiques et un compte rendu d'état de piste. Toutefois, pour une raison indéterminéeNote de bas de page 7, le commandant de bord n'a pas communiqué avec Saint-Georges ni à son arrivée à Saint-Hubert, ni avant son départ. En conséquence, l'équipage a décollé sans savoir que les conditions météorologiques s'étaient considérablement détériorées et que la piste ne serait pas déblayée avant son arrivée.

    Si le commandant de bord avait communiqué avec Saint-Georges avant de décoller, il aurait pu s'attendre à effectuer une approche dans une forte averse de neige et avec une visibilité inférieure à la visibilité publiée sur la carte d'approche. Il aurait été en mesure d'anticiper de ne pas voir la piste à l'issue de l'approche et de prévoir soit une attente à Saint-Georges jusqu'à ce que les conditions s'améliorent, soit un déroutement. Dans ce cas, il aurait été raisonnable de retarder le départ afin de faire coïncider l'arrivée avec la fin du déblaiement de la piste.

    Bien qu'en communication radio avec Saint-Georges 10 minutes après le décollage de Saint-Hubert, l'équipage n'a pas actualisé les renseignements qui lui auraient permis d'avoir une meilleure conscience de la situation. Faute de renseignements, les pilotes n'ont pu évaluer l'incidence des conditions météorologiques sur l'état de la piste et sur les chances de réussir une approche. En fait, le commandant de bord et le copilote n'ont jamais discuté entre eux des conditions météorologiques et de l'état de la piste avant l'accident. D'une part, le commandant de bord aurait pu demander au coordonnateur du transport aérien, même si ce dernier n'était pas un observateur qualifié, de lui fournir un compte rendu général des conditions qui régnaient à l'aérodrome. D'autre part, le coordonnateur du transport aérien aurait pu contacter de son propre chef l'équipage et l'informer que les conditions s'étaient considérablement détériorées depuis son départ et que, de plus, elles avaient empiré après l'interruption de la première approche, et ce, d'autant plus qu'un atterrissage dans de telles conditions était inhabituel. Ces renseignements étaient essentiels à la sécurité du vol.

    L'altimètre du commandant de bord et celui du copilote étaient calés sur 29,55 alors que la pression barométrique à Saint-Georges était 29,65. Donc, l'altitude affichée sur les altimètres de l'avion aurait été de 100 pieds inférieure à l'altitude réelle de l'appareil. Pour cette raison, rendu au MAWP de l'approche de la piste 06, l'appareil était 80 pieds plus haut que la MDA et 100 pieds plus haut que le croyait l'équipage. L'appareil s'est présenté trop haut par rapport à l'approche normale et n'a pu descendre assez rapidement pour atterrir en toute sécurité.

    À la suite de la remise des gaz, l'appareil s'est retrouvé hors trajectoire par rapport à la procédure publiée d'approche interrompue. L'avion a emprunté un parcours improvisé jusqu'à ce que l'équipage parvienne à programmer le FCS pour l'approche de la piste 24. En l'absence de breffages d'approche, on peut penser que l'équipage n'a pas suivi la procédure publiée parce qu'il était mal préparé et qu'il n'a pas suivi les instructions affichées sur le FCS. Pourtant, les conditions environnementales existantes dictaient un breffage exhaustif pour chacune des approches.

    Puisque l'utilisation du calage altimétrique de Québec augmentait toutes les altitudes de procédure de 210 pieds, on peut penser que le commandant de bord a calé les altimètres de l'appareil sur ce qu'il croyait être la pression barométrique de Saint-Georges. Selon cette hypothèse, soit que le coordonnateur du transport aérien a incorrectement transmis l'information, soit que le commandant de bord l'a mal entendue. Bien que le calage erroné des altimètres de l'appareil ait augmenté les marges de franchissement d'obstacles, une erreur d'altimètre peut tout aussi bien les réduire et s'avérer catastrophique, en particulier dans des conditions comme celles présentes au moment de l'événement.

    L'erreur de calage est passée inaperçue pendant les 36 minutes qui ont précédé l'accident. L'erreur n'a pas été décelée parce que le calage altimétrique a été transmis par Saint-Georges une seule fois, 10 minutes avant le début de l'approche de la piste 06. Comme l'appareil évoluait dans l'espace aérien contrôlé, le copilote était à l'écoute d'une autre fréquence, celle du centre de Montréal; par conséquent, il n'était pas en mesure de relever une erreur d'affichage. Quoiqu'il en soit, il aurait été raisonnable d'obtenir une mise à jour du calage altimétrique lors de chacune des approches, puisque l'équipage avait été avisé plus tôt que la pression barométrique de Québec était en chute libre.

    À la suite de l'approche interrompue, l'équipage se doutait certainement qu'une approche RNAV de la piste 24 respectant les limitations ne permettrait pas de poser l'appareil dans les conditions météorologiques qui prévalaient. Il est probable que ce raisonnement a incité l'équipage à régler le sélecteur d'altitude à 1100 pieds, 200 pieds au-dessous de la MDA, avant d'arriver au FAWP. Donc, il est raisonnable de conclure que le commandant de bord a décidé de descendre au-dessous de la MDA, même si le contact visuel avec les références requises n'était pas établi, afin d'améliorer les chances de voir la piste.

    Les chances d'effectuer l'approche en toute sécurité diminuaient au fur et à mesure que l'appareil en descente se rapprochait de l'aérodrome sans que l'équipage ait acquis les références au sol nécessaires. En conséquence, l'adoption d'un autre plan d'action s'imposait rapidement. Comme l'équipage ne suivait pas la procédure d'approche publiée et qu'aucun plan n'avait été formulé, aucun point où l'approche devait être interrompue n'avait été établi. Par conséquent, les membres de l'équipage n'avaient pas de plan commun concernant une remontée possible, qui est la phase la plus dangereuse de l'approche. Ces décisions suggèrent qu'avant même d'arriver au FAWP, le commandant de bord s'était résolu à atterrir au terme de l'approche.

    Les deux pilotes ont commis des erreurs de base dans la gestion du vol, dans l'accomplissement de tâches routinièresNote de bas de page 8 et dans l'évaluation des conditions existantes. C'est pourquoi le rendement de l'équipage peut être qualifié de hors norme. Leur prestation n'était pas conforme au niveau de rendement attendu de chacun d'eux ou au fait que tous deux, comme nouveaux employés, venaient d'être formés selon les normes et procédures de la compagnie. En outre, leur prestation n'était pas conforme à l'expérience passée du commandant de bord comme pilote en chef. De plus, leur comportement était incohérent avec leur réputation de pilotes consciencieux et professionnels.

    En dépit d'indices voulant que la météo s'était détériorée, l'équipage n'a jamais discuté de la possibilité d'amorcer une remontée, d'exécuter un circuit d'attente ou de se dérouter vers un aéroport de dégagement. Il semble que l'intention d'atterrir sans délai a distrait les pilotes et, en conséquence, a affecté leur capacité d'évaluer la situation avec justesse et de prendre des décisions appropriées. Le stress relatif à la situation et une gestion déficiente des ressources de l'équipage semblent être à la source du rendement inadéquat de l'équipage.

    Rien n'indique que la compagnie exerçait une pression sur les pilotes pour qu'ils descendent sous les minima. Au contraire, Aviation CMP inc. avait mis en place des moyens reconnus pour améliorer la sécurité en vol, comme l'instauration d'un SGS et l'élaboration de SOP et la signature d'une entente avec CAE Simuflite pour que celui-ci fournisse une formation CRM et CFIT à ses pilotes.

    Le vol ne s'est pas soldé par une CFIT. Par contre, la décision de descendre au-dessous de la MDA par faible visibilité dans une forte averse de neige était propice à un accident CFIT. À 3 nm de la piste, l'appareil était à un peu plus de 200 pieds agl (1200 pieds asl)Note de bas de page 9 et, à 1 nm, il était à 100 pieds au-dessus de l'altitude de la piste (1000 pieds asl). À moins de 100 pieds agl au-dessus du seuil, se fiant aux indications du copilote, le commandant de bord a décidé de poursuivre la descente alors qu'il ne distinguait pas encore la piste.

    Les écarts de procédures et les digressions réglementaires précédemment mentionnés révèlent un manque de coordination et une absence de rigueur de la part de l'équipage. De ces faits, on peut conclure que l'équipage n'a pas suivi les principes de la CRM. Lors de leur formation chez CAE Simuflite, le rendement en CRM de chacun des pilotes a été jugé adéquat alors qu'ils faisaient équipe avec un pilote hors compagnie. Ni le commandant de bord ni le copilote n'ayant suivi une formation théorique en CRM, il est raisonnable de croire qu'ensemble, ils ne possédaient pas les notions théoriques nécessaires pour appliquer les principes de la CRM.

    La présence de 6 des 16 éléments de risques du manuel relatif au SGS de la compagnie (préalablement identifiés) aurait dû sensibiliser les membres de l'équipage aux dangers de la situation et renforcer une attitude prudente. Toutefois, les pilotes ne semblent pas avoir reconnu ces conditions et ils n'ont pas adopté les stratégies préconisées par la compagnie pour réduire le risque. Pour cette raison, les pilotes ont démontré une méconnaissance du programme du SGS.

    Afin de permettre à l'appareil d'atterrir au terme de l'approche de la piste 06, l'opération de déneigement a été interrompue 15 minutes après avoir débuté. Par conséquent, la piste était à demi déneigée sur sa largeur et des amas de neige de 30 cm bordaient la partie déblayée. Toutefois, parce qu'il se fiait sur l'information reçue à 11 h 15, le commandant de bord croyait que la piste était déblayée sur une largeur de 60 pieds. Cette mésentente a perduré parce que l'équipage n'a pas demandé de mise à jour et que le coordonnateur du transport aérien ne lui en a pas fournie. Le fait que le commandant de bord ait demandé au coordonnateur du transport aérien de confirmer que la piste était dégagée après la remise des gaz de la piste 06 indique qu'il avait décidé de tenter un atterrissage sachant que le véhicule de déneigement était peut-être sur la piste. Un atterrissage dans ces conditions était risqué, puisque la visibilité de ¾ nm et les caractéristiques physiques de la piste restreignaient la portée visuelle des pilotes et, ainsi, leur capacité de repérer à temps le véhicule pour l'éviter.

    Le déneigement n'a pas repris parce que l'équipage avait décidé d'effectuer sans délai une deuxième approche. Étant donné que l'équipage n'a pas demandé une mise à jour de l'état de la piste, la décision d'atterrir s'appuyait sur des renseignements inexacts, incomplets et désuets.

    L'enquête a permis d'établir que le personnel au sol se doutait que les conditions étaient hautement défavorables à un atterrissage en toute sécurité. Selon le programme du SGS, le cumul des indices suivants aurait dû inciter les employés au sol à demander à l'équipage de réviser sa décision d'atterrir :

    • faible visibilité;
    • plafond nuageux obscurci;
    • forte averse de neige;
    • piste à demi déneigée;
    • amas de neige sur la piste;
    • accumulation de neige sur la partie déblayée de la piste.

    Le coordonnateur du transport aérien, en tant que responsable de l'exploitation journalière de l'aérodrome de Saint-Georges, aurait pu fermer la piste jusqu'à ce qu'elle soit déblayée. En conséquence, on peut conclure que le personnel au sol d'Aviation CMP inc. n'a pas mis en pratique la philosophie du SGS de la compagnie et a manqué d'assertivité en n'intervenant pas lorsque l'équipage a décidé d'atterrir dans les conditions défavorables qui prévalaient.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. La trajectoire de l'appareil n'ayant pas été stabilisée lors de la phase finale de l'approche, l'appareil dérivait vers la gauche au moment du poser des roues. Le commandant de bord n'a pas été en mesure de maintenir l'appareil au centre de la piste couverte de neige et déblayée sur une largeur de seulement 36 pieds.
    2. Le train principal gauche, puis la roulette avant, ont percuté un amas de neige laissé sur la piste par le véhicule de déneigement, et le commandant de bord n'a pas pu reprendre la maîtrise de l'appareil.

    Faits établis quant aux risques

    1. Les pilotes et le personnel au sol d'Aviation CMP inc. ont démontré une méconnaissance du programme du système de gestion de la sécurité en ne reconnaissant pas les éléments de risque préalablement identifiés par la compagnie.
    2. Ni le commandant de bord ni le copilote n'avait suivi la formation en gestion des ressources de l'équipage (CRM), ce qui pourrait expliquer les écarts de procédures et les digressions réglementaires.
    3. L'équipage a tenté d'atterrir sur la piste 06 en sachant qu'un véhicule de déneigement était probablement sur la piste et, à la suite de la remontée, l'appareil n'a pas suivi la trajectoire d'approche interrompue publiée.
    4. Lors de l'approche de la piste 24, l'équipage est descendu au-dessous de l'altitude minimale de descente (MDA) sans avoir acquis les références nécessaires.
    5. Les altimètres de l'appareil n'étaient pas calés au calage altimétrique de Saint-Georges.

    Autre fait établi

    1. L'interdiction d'approche proposée n'aurait pas empêché l'équipage d'entreprendre l'approche car, d'une part, cette interdiction ne s'applique pas aux compagnies privées et que, d'autre part, l'aérodrome de Saint-Georges ne satisfait aux exigences en matière d'observations météorologiques.

    Mesures de sécurité

    À la suite de l'accident, Aviation CMP inc. a modifié l'organigramme de la compagnie. Un poste de directeur adjoint des opérations a été créé afin d'assurer un leadership à la base principale de la compagnie lors des absences du directeur des opérations. De plus, on a nommé un pilote en chef pour le Lear 60 responsable de la base de Montréal et des pilotes vérificateurs pour le Lear 45, le Lear 35 et le Beech B300.

    Aviation CMP inc. a établi de nouveaux critères d'acceptabilité de piste. Aucune approche n'est permise avant que la piste soit entièrement déblayée et libre de tout trafic. Un rapport de piste à l'aérodrome de Saint-Georges sera fourni à la station d'information de vol et transmis au pilote dans la mesure du possible.

    Aviation CMP inc. a établi des références visuelles pour permettre au personnel de l'UNICOM d'estimer avec le plus de précision possible la visibilité et le plafond nuageux à l'aérodrome de Saint-Georges. Également, afin d'éviter toute confusion quant au besoin de déneiger, une séquence d'appel a été établie afin de rejoindre les employés de déneigement. De plus, l'équipement radio des véhicules de déneigement de Saint-Georges a été modifié afin de leur permettre de communiquer en tout temps avec la base et les aéronefs.

    Aviation CMP inc. fournira sur une base annuelle un programme de sensibilisation aux opérations hivernales destiné à ses pilotes et à son personnel au sol.

    L'Association canadienne de l'aviation d'affaires a modifié son programme d'éducation de symposium afin de promouvoir une meilleure compréhension des facteurs qui incitent les pilotes (et autres) à dévier des procédures établies.

    Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

    Annexes

    Annexe A - Carte d'approche de la piste 06

    Annexe B - Carte d'approche de la piste 24