Rapport d'enquête aéronautique A06O0186

Collision avec le relief
du Cessna 180H N720CS
au lac Cordingley (Ontario)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le Cessna 180H monté sur flotteurs (immatriculation N720CS, numéro de série 18052165) décolle du lac Cordingley (Ontario) à 9 h 5, heure avancée de l'Est, pour effectuer un vol local avec à son bord un pilote et deux passagers. Le propriétaire de l'avion, pilote titulaire d'une licence, occupe le siège arrière droit tandis qu'un deuxième passager, aussi pilote titulaire d'une licence, occupe le siège avant droit. Une fois les vérifications du point fixe effectuées, la course au décollage est amorcée sans que l'avion remonte le plan d'eau. Après l'envol, l'avion monte à la hauteur de la cime des arbres, mais il ne peut continuer sa montée ni accélérer. Au moment où l'avion passe la rive du lac et touche la cime des arbres une première fois, les pleins volets sont sortis pour que le nez de l'avion se relève de façon à ce que les flotteurs absorbent l'impact. Les flotteurs heurtent les arbres; l'avion part en piqué et percute le sol quasiment à la verticale. Les trois occupants subissent des blessures légères. Après l'impact, un petit incendie alimenté par le carburant éclate à l'avant de la cloison pare-feu, mais l'incendie ne se propage pas au-delà de ce point.

    Autres renseignements de base

    Déroulement du vol

    Les conditions météorologiques signalées localement étaient les suivantes : vent du sud de 10 à 12 nœuds, ciel plutôt dégagé et température d'environ 20 °C. Le lac, qui est passablement abrité par les arbres qui l'entourent, était calme.

    Les flotteurs de l'avion ont été vidés de leur eau dans le cadre des vérifications avant vol. L'avion a circulé vers l'extrémité nord du lac, et il s'est placé face au vent pour effectuer les vérifications point fixe relatives au fonctionnement des magnétos et de l'hélice. L'avion a parcouru environ 1000 pieds pendant ces dernières vérifications. À 9 h 5, heure avancée de l'Est (HAE)Footnote 1, il a entrepris sa course au décollage alors qu'il lui restait environ 4000 pieds avant d'atteindre la rive (voir l'Annexe A - Trajectoire de décollage de l'avion). Les volets étaient sortis à 20°. L'avion est passé sur le redan normalement. Le flotteur droit s'est soulevé de la surface de l'eau, mais il y est retombé. Le flotteur droit s'est encore soulevé de la surface de l'eau, et l'avion a pris son envol à une vitesse d'environ 60 milles à l'heure (mi/h). La distance réelle de la course sur le plan d'eau a été d'environ 2000 pieds.

    Après son envol, l'avion a accéléré pour atteindre 65 mi/h, et il a monté jusqu'à la hauteur de la cime des arbres, où il n'a plus accéléré ni monté. Sa vitesse a diminué à 60 mi/h. L'aéronef a viré de 20° à 30° vers la gauche pour tirer avantage du relief qui est moins élevé dans cette direction. La distance restante avant d'atteindre la rive a été jugée trop courte pour que l'avion atterrisse droit devant en toute sécurité. Au moment où l'avion passait la rive et touchait la cime des arbres une première fois, les pleins volets ont été abaissés (40°) et le manche a été ramené vers l'arrière, dans une tentative visant à ralentir l'avion et à amortir l'impact puisque, de cette façon, la partie inférieure des flotteurs toucherait d'abord les arbres. Le moteur a continué à fournir à plein régime.

    Avion accidenté

    Le Cessna 180H N720CS était équipé de flotteurs de la série 3000D fabriqués par Canadian Aircraft Products (CAP). L'avion était propulsé par un moteur à piston atmosphérique O-470-R, construit par Teledyne Continental, et il était équipé d'une hélice tripale Hartzell de 78 pouces. Les flotteurs de la série 3000D de CAP étaient approuvés en vertu du certificat de type supplémentaire (STC) SA1749WE, tandis que l'hélice tripale était approuvée en vertu du STC SA00852AT.

    L'avion était également équipé de portes à fenêtre concave (STC SA00897CH) et d'un dispositif de décollage et d'atterrissage courts (STC SA967CE). Pendant l'enquête, il a été établi que ces deux STC avaient eu très peu d'incidence sur les performances de l'avion.

    Tous les STC visant N720CS comprenaient les limites et les conditions conformes suivantes :

    [Traduction]

    L'approbation de la modification apportée à la définition de type s'applique fondamentalement aux modèles d'aéronef figurant sur la liste maîtresse pertinente des aéronefs admissibles de la FAA, laquelle a été approuvée, et l'approbation ne devrait pas viser d'autres modèles de ces aéronefs auxquels des modifications antérieurement approuvées ont été intégrées, à moins qu'il soit déterminé que leurs relations ne compromettront nullement la navigabilité de l'aéronef.

    Pour le vol en question, le calcul de la masse au décollage de l'avion a donné 2935 livres, et celui du centrage, 42,1 pouces derrière le point de référence. Les dossiers indiquent que l'avion était entretenu selon les consignes en vigueur. On n'avait signalé aucune anomalie de l'avion avant ou pendant le vol. Aucune anomalie n'a été relevée en ce qui concerne le système de commandes de vol, et rien n'indiquait que le moteur ne fonctionnait pas normalement.

    Le propriétaire a déclaré que la performance de l'avion était satisfaisante après l'installation de l'hélice tripale, alors que l'avion était monté sur roues. Par contre, une fois les flotteurs installés, une perte de performances a été remarquée et subjectivement caractérisée comme équivalant au transport d'une charge excédentaire de 300 livres.

    Les deux sièges avant de l'avion en question étaient équipés de ceintures-baudriers, tandis que les deux sièges arrière étaient munis de ceintures de sécurité. Le pilote et le passager assis en place avant portaient leur ceinture-baudrier. Ils ont tous les deux subi des blessures superficielles au genou qui se trouvait près du pylône, mais ils n'ont pas été blessés au visage ni à la tête. Le propriétaire, qui était assis en place arrière, portait sa ceinture de sécurité, et il a été légèrement blessé au visage. Les occupants ont pu marcher jusqu'à la rive où une personne qui avait été témoin de l'accident leur a porté secours.

    Certification de l'avion

    Le United States Civil Aeronautics Board avait délivré le certificat de type numéro 5A6 pour le Cessna 180H, conformément à la Partie 3 du Civil Air Regulation. La FAA est autorisée à délivrer des STC en vertu des dispositions de la Partie 21 du Federal Aviation Regulation. Quiconque modifie un produit en apportant des changements majeurs à une définition de type, qui ne sont toutefois pas assez importants pour nécessiter une nouvelle demande de certificat de type en vertu de l'article 21.19, devra demander un certificat de type supplémentaire (STC) à l'administrateur. Cependant, le titulaire du certificat de type visant un produit peut faire une demande de modification du certificat de type original.

    La fiche de données du certificat de type du Cessna 180H indique que le moteur Continental O-470-R est l'un des deux modèles de moteur approuvés pour le 180H. La fiche de données du certificat de type précise également dix modèles différents d'hélice bipale dont les diamètres varient de 82 à 88 pouces; six d'entre eux ne sont visés par aucune restriction et quatre peuvent seulement être utilisés avec un moteur O-470-R. Deux autres hélices sont mentionnées pour des avions qui ont été modifiés au moyen de trousses de service propres à Cessna, mais l'avion en question n'a pas fait l'objet de telles modifications. La fiche du données du certificat de type du modèle 180H comprend un avion terrestre, deux hydravions à flotteurs et un avion amphibie monté sur flotteurs.

    Les critères de certification ne prévoyaient aucune exigence à l'égard du manuel de vol de l'aéronef. Cessna offre un manuel du propriétaire pour le modèle 180H, mais celui-ci traite seulement de l'avion terrestre monté sur roues. Le manuel du propriétaire ne traite pas des avions montés sur flotteurs ou sur skis, mais il indique que des suppléments portant sur le fonctionnement d'autres équipements facultatifs sont offerts. Le manuel du propriétaire comprend une section sur les données opérationnelles avec des tableaux de performances concernant l'avion terrestre, mais on ne précise pas que les données de performance s'appliquent à un modèle donné de moteur ou d'hélice.

    Dans la couverture intérieure du manuel du propriétaire se trouve un tableau intitulé : spécifications - performances. Ce tableau précise que le moteur est un Continental O-470-R et que l'hélice à vitesse constante a un diamètre de 82 pouces. Le manuel du propriétaire ne traite nulle part ailleurs des combinaisons de moteurs et d'hélices. Plus particulièrement, la section portant sur les restrictions opérationnelles ne signale aucune interdiction relativement aux combinaisons de moteur et d'hélice.

    Dans la fiche de données du certificat de type, il n'y a aucune restriction concernant le type d'hélice à poser sur les différentes versions de l'avion. Cessna offre un supplément du manuel du propriétaireFootnote 2 pour le modèle 180 monté sur flotteurs, amphibie ou monté sur skis. Ce supplément s'applique aux flotteurs indiqués dans la fiche de données du certificat de type; un de ces flotteurs est le modèle 249A-2870 fabriqué par Edo. Dans ce supplément, la section traitant des données opérationnelles comprend des tableaux de performances pour le modèle 180 monté sur flotteurs.

    Cessna pose uniquement l'hélice à deux pales de 88 pouces sur les avions montés sur flotteurs sortant de ses ateliers. L'on traite seulement du moteur ou de l'hélice dans le tableau spécifications - performances figurant dans la couverture intérieure du manuel du propriétaire, et il indique un moteur Continental O-470-R et une hélice à vitesse constante de 88 pouces de diamètre. Le supplément du manuel du propriétaire traitant de l'avion monté sur flotteurs ne mentionne nulle part ailleurs les combinaisons de moteur et d'hélice. La section traitant des restrictions opérationnelles ne mentionne aucune interdiction relativement aux combinaisons de moteur et d'hélice.

    Selon les tableaux de performances compris dans le supplément du manuel du propriétaire qui est publié par Cessna et compte tenu de la masse brute de l'avion, de l'élévation du lac et des conditions météorologiques au moment de l'accident, la course au décollage à effectuer sur le plan d'eau était de 1050 pieds, et la distance totale nécessaire pour franchir un obstacle s'élevant à 50 pieds était de 1800 pieds.

    Intégration du STC et incidence sur la performance

    STC visant les flotteurs de la série 3000D fabriqués par CAP

    Les flotteurs de la série 3000D fabriqués par CAP ont été posés en vertu d'un STC. Ils ne sont donc pas mentionnés dans le supplément du manuel du propriétaire de Cessna traitant des hydravions à flotteurs. Le supplément approuvé du manuel de vol de l'aéronef pour les flotteurs de la série 3000D (CAP) indique que leurs performances sont égales ou supérieures à celles des flotteurs Edo, modèle 249A-2870, qui sont semblables aux flotteurs modèle 249A-2870 indiqués dans le supplément du manuel du propriétaire pour les hydravions à flotteurs Cessna.

    Selon ce qui a été initialement formulé et approuvé en 1968 dans le STC visant les flotteurs de la série 3000D (CAP), la masse brute maximale est de 2820 livres pour le modèle d'hydravion 180H de Cessna, soit la même masse brute maximale que celle indiquée dans le supplément du manuel du propriétaire publié par Cessna traitant de l'avion monté sur des flotteurs Edo, modèle 249A-2870. Le STC visant les flotteurs de la série 3000D (CAP) a par la suite été modifié pour afficher une masse brute maximale de 2950 livres et un centrage compris entre 38,8 et 43,9 pouces derrière le point de référence. Le STC visant les flotteurs de la série 3000D (CAP) indiquait que les performances de l'avion monté sur ces flotteurs étaient égales ou supérieures à celles obtenues après la pose de flotteurs Edo, modèle 249A-2870. Le supplément du manuel du propriétaire du Cessna 180 traitant des hydravions à flotteurs présente des tableaux de performances jusqu'à une masse brute maximale de 2950 livres, mais il précise également que la masse brute maximale pour un avion monté sur des flotteurs Edo, modèle 249A-2870, est de 2820 livres. L'enquête n'a pas permis de déterminer quels essais de performances ou analyses techniques avaient été effectués pour justifier l'augmentation de la masse brute pour un avion monté sur des flotteurs de la série 3000D (CAP).

    STC visant l'hélice tripale

    L'hélice tripale a été posée en vertu d'un STC accordé à l'ancienne Bonaire Aviation Company. Hartzell Propeller Inc. est maintenant titulaire du STC. Le STC ne prévoit pas de restrictions pour ce qui est de l'utilisation de l'hélice sur des hydravions à flotteurs. Les instructions d'installation connexes traitent des avions terrestres et des hydravions pour ce qui est de la modification de l'affichage du tachymètre. Le supplément du manuel de vol de l'aéronef connexe précise que les affichettes originales de l'avion s'appliquent à des renseignements dont il n'est pas question dans le supplément. Pour ce qui est des restrictions opérationnelles, le supplément du manuel de vol de l'aéronef présente le même affichage du tachymètre que celui qui est indiqué dans les instructions d'installation, et l'on désigne les appareils comme des avions terrestres et amphibies au lieu d'avions terrestres et d'hydravions.

    Dans la section des données opérationnelles, le supplément du manuel de vol de l'aéronef indique que les performances sont égales ou supérieures aux performances du moteur ou de l'hélice d'origine. Des documents à l'appui de l'approbation du STC indiquent que l'affirmation précédente était fondée sur la comparaison du rendement de l'hélice tripale de 78 pouces avec diverses hélices bipales de 82 pouces qui avaient été approuvées pour le Cessna 180. L'hélice tripale de 78 pouces n'a jamais été comparée aux hélices bipales de 88 pouces. Hartzell Propeller Inc. a fait une analyse comparative entre l'hélice tripale de 78 pouces et une hélice bipale de 88 pouces, et l'entreprise a prévu une baisse de poussée d'environ 3 % au décollage. Dans le cadre de son analyse, la FAA a obtenu les résultats suivants pour ce qui est des incidences sur les performances :

    • la vitesse ascensionnelle de la montée initiale a été réduite de 50 pieds par minute;
    • la course au décollage sur le plan d'eau a augmenté de 50 pieds;
    • la distance dans les airs, entre le déjaugeage et une altitude de 50 pieds, a augmenté d'environ 150 pieds;
    • la distance totale au décollage pour franchir un obstacle s'élevant à 50 pieds a augmenté d'environ 200 pieds ou 10 %.

    L'hélice tripale de 78 pouces ne pourrait donc pas offrir des performances égales à celles d'une hélice bipale de 88 pouces, laquelle était la pièce d'origine pour l'hydravion à flotteurs en question. Par conséquent, un hydravion à flotteurs équipé d'une hélice tripale de 78 pouces ne pourrait pas respecter les spécifications de performances précisées dans le supplément traitant de l'hydravion à flotteurs Cessna.

    Selon le STC visant l'hélice tripale, l'analyse technique fondée sur des essais à des vitesses représentatives avait démontré que l'hélice tripale offrait des performances qui étaient égales ou supérieures aux tableaux des performances figurant dans le manuel du propriétaire du Cessna 180Footnote 3. Les tableaux des performances présentent de nombreuses combinaisons de moteurs et d'hélices, dont la pose dans le Cessna 180 est approuvée par la FAA. Dans le cadre de l'enquête, on a communiqué avec les fabricants des hélices, et ces derniers ont signalé que certaines combinaisons comprenant les hélices bipales au diamètre plus grand offraient probablement de bien meilleures performances que celles indiquées dans les tableaux.

    Procédure de décollage

    Selon le supplément traitant de l'hydravion à flotteurs Cessna, la procédure de décollage recommandée consiste à régler les volets à 20°, à accélérer pour décoller entre 50 et 60 mi/h, à effectuer une montée à 65 mi/h pour franchir des obstacles et à rentrer les volets lentement une fois rendu à une altitude et à une vitesse sécuritaires. Si le décollage est difficile en raison de la haute élévation d'un lac ou d'un plan d'eau miroitant, le supplément recommande de déjauger un seul flotteur à la fois.

    Comme le propriétaire avait acquis de l'expérience relativement à N720CS monté sur flotteurs et équipé d'une hélice tripale, sa technique de décollage consistait habituellement à déjauger un flotteur à 55 mi/h, à régler les volets à 10° dès l'envol, à maintenir le nez en piqué et à accélérer à 80 mi/h avant d'entreprendre la montée.

    Expérience du pilote

    Le pilote possédait une licence de pilote privé en règle pour le pilotage des avions terrestres et des hydravions monomoteurs. Il avait environ 500 heures de vol à son actif, cumulé pour la plupart sur un Cessna 185 monté sur flotteurs qui lui appartenait. Il totalisait trois heures de vol sur le Cessna 180, notamment dans le cadre d'un vol de contrôle effectué la veille de l'accident en compagnie du propriétaire du N720CS. Le vol de contrôle s'était déroulé sur un autre Cessna 180 qui appartenait également au propriétaire de N720CS. L'avion utilisé lors du vol de contrôle était différent de l'avion accidenté, car il était équipé d'une hélice bipale McCauley de 88 pouces et de flotteurs Edo, modèle 2960, ainsi que de fenêtres ordinaires. Ce dernier appareil n'était pas muni d'un dispositif de décollage et d'atterrissage courts.

    Pour le vol de contrôle effectué la veille de l'accident, la masse au décollage de l'avion était moins élevée, et il y avait seulement deux personnes à bord. La masse du carburant était semblable, et il y avait moins de bagages. Au moment du décollage, les volets étaient réglés à 20°, conformément au supplément du manuel de vol de l'aéronef traitant des flotteurs. L'avion a décollé sans avoir à déjauger un flotteur à la fois et a accéléré à 80 mi/h avant de monter. Les volets ont été rentrés alors que l'avion passait 200 pieds en montée. Cette procédure de décollage est semblable à celle utilisée par le pilote pour son propre Cessna 185, sauf qu'il règle habituellement les volets du Cessna 185 à seulement 10° pendant la course au décollage sur le plan d'eau. Le pilote n'a pas été avisé qu'il fallait (pour l'avion en question dans cet accident) régler les volets à 10° pour accélérer et effectuer une montée.

    Analyse

    Rien n'indique que des conditions environnementales ou une défaillance mécanique aient été des facteurs dans l'accident. Si l'on tient compte de la distance parcourue pour effectuer les vérifications avant le décollage, la distance restante pour franchir les arbres était considérablement supérieure à celle prévue pour le décollage et le franchissement d'obstacles dans le supplément traitant de l'hydravion à flotteurs. Par conséquent, l'enquête a été axée sur les performances de l'avion et la technique de pilotage du pilote.

    Lorsque l'hélice et les flotteurs ont été posés, ni l'un ni l'autre des certificats de type supplémentaires (STC) ne contenait de renseignements sur les pénalités touchant les performances. Chacun des certificats comprenait l'énoncé courant stipulant que l'installateur devait s'assurer que les relations entre le travail devant être effectué et les modifications déjà incorporées ne compromettraient nullement la navigabilité de l'aéronef. Il n'y avait pas d'incompatibilité matérielle entre les STC, et ni l'un ni l'autre ne prévoyait de restrictions à l'égard des opérations ou des performances. L'enquête a permis de conclure que la combinaison des deux STC n'a pas été un facteur important dans l'accident en question. En fait, l'absence de renseignements relativement à la dégradation des performances de décollage pour l'hydravion à flotteurs, modèle 180H, équipé d'une hélice tripale en vertu du STC SA00852AT, a plutôt fait que l'installateur respectant le STC et le propriétaire de l'avion n'étaient pas au courant que l'installation de l'hélice tripale entraînerait une réduction des performances au décollage.

    Le propriétaire avait remarqué de moins bonnes performances depuis l'installation de l'hélice tripale et le changement de configuration de l'avion (d'avion terrestre à hydravion à flotteurs). La seule hélice approuvée par Cessna pour l'hydravion à flotteurs en question est une hélice bipale de 88 pouces, ce qui n'est pas vraiment évident puisque l'hélice de 88 pouces est seulement mentionnée dans le tableau des spécifications de performances figurant dans la couverture intérieure du supplément traitant de l'hydravion à flotteurs. En outre, le supplément traitant de l'hydravion à flotteurs n'indique aucune restriction en ce qui concerne le diamètre minimal de l'hélice, et la fiche de données du certificat de type ne fait pas de distinction entre les hélices approuvées pour les avions terrestres et celles approuvées pour les avions montés sur flotteurs.

    L'approbation du STC reposait sur l'équivalence entre l'hélice tripale de 78 pouces et l'hélice bipale de 82 pouces, sur laquelle était fondée la certification de l'avion terrestre 180H. L'hélice tripale de 78 pouces n'a pas donné les mêmes performances que l'hélice bipale de 88 pouces, sur laquelle était fondée la certification de l'hydravion à flotteurs. Par conséquent, un hydravion à flotteurs équipé d'une hélice tripale de 78 pouces ne pouvait pas respecter les spécifications de performances énoncées dans le supplément traitant de l'hydravion à flotteurs Cessna. Ni la Federal Aviation Administration (FAA) ni Bonaire Aviation Company, le demandeur initial de la STC, n'ont évalué cette question. En conséquence, le STC a été approuvé pour le Cessna 180, l'avion terrestre comme l'hydravion à flotteurs, sans qu'on signale les pénalités touchant les performances associées à l'hydravion à flotteurs.

    L'enquête a également permis de constater que, dans son énoncé relatif aux performances du Cessna 180, le STC des flotteurs de la série 3000D fabriqués par Canadian Aircraft Products (CAP) indiquait comme référence l'utilisation d'un modèle légèrement différent du flotteur Edo sur lequel étaient fondés les tableaux de performances dans le supplément du manuel du propriétaire traitant de l'hydravion à flotteurs Cessna. Le STC prévoyait également une masse brute supérieure au décollage de l'appareil par rapport à celle indiquée dans les tableaux de performances de Cessna pour des flotteurs équivalents. Il n'a pas été possible de retracer les documents à l'appui de l'approbation de cet STC. Par conséquent, il n'a pas été possible de déterminer quels essais de performances avaient réellement été effectués relativement aux flotteurs de la série 3000D (CAP), à une masse brute plus élevée. Le STC ne donne pas de tableaux de performances pour l'exploitation de l'appareil à une masse brute plus élevée autre que ceux publiés pour les flotteurs qu'ils remplacent.

    Le propriétaire a trouvé une solution à la dégradation des performances. Il a mentalement calculé des pénalités de masse équivalentes, et il a adopté une procédure spéciale qui consistait à régler les volets à 10° dès le décollage pour faciliter l'accélération et la montée. Cette information n'a pas été communiquée au pilote avant l'accident en question.

    Le pilote, qui ne connaissait pas les particularités du N720CS, s'est fié à son expérience antérieure et à son vol de contrôle de la veille pour juger de la situation pendant le décollage qui a mené à l'accident en question. Le propriétaire, qui était assis en place arrière, ne pouvait pas superviser le décollage adéquatement et donner de bons conseils au pilote. Avant qu'on ne se rende compte de la gravité de la situation, l'avion était déjà trop près de la rive, et une collision avec les arbres ne pouvait plus être évitée.

    Comme facteur contributif de l'accident, signalons que le pilote n'a pas effectué sa course au décollage sur toute la longueur du lac. Selon des expériences antérieures, un décollage peut être effectué en toute sécurité sur la longueur disponible du lac. Lorsque les performances prévues n'ont pas été atteintes, la longueur réduite de la course n'a pas laissé suffisamment de temps pour évaluer la situation et prendre les mesures nécessaires.

    En vue de réduire la force d'impact, le pilote a décidé de sortir complètement les volets tout en maintenant la pleine puissance du moteur après avoir touché une première fois la cime des arbres. Toutefois, la vitesse de décrochage à pleins volets n'est pas tellement plus réduite qu'à volets sortis à 20°;. Au décrochage, les pleins volets abaissent le nez et changent l'assiette en piqué, ce qui a peut-être eu un effet contraire à celui souhaité par le pilote. En outre, l'augmentation de la traînée provoquée par les pleins volets accroît la dégradation des performances et élimine toute possibilité de redressement. La pleine puissance du moteur au moment où l'appareil a touché les arbres a accru les risques de dommages et d'incendie après l'impact.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. En approuvant un certificat de type supplémentaire pour une hélice tripale, la Federal Aviation Administration n'a pas reconnu que les analyses de performances présentées par le demandeur n'étaient pas valables pour le modèle d'hydravion à flotteurs ni que des performances moins bonnes y seraient associées.
    2. À cause de la réduction des performances, l'avion ne pouvait pas respecter les spécifications de performances publiées pour le décollage et la montée, ce qui a contribué à son incapacité de franchir les obstacles à l'extrémité du lac.
    3. Le pilote n'était pas familier avec la procédure de décollage que le propriétaire avait adoptée pour cet avion en compensation de la dégradation des performances.
    4. Pendant le décollage, le propriétaire était assis en place arrière, et il n'a pas pu surveiller adéquatement le décollage et donner de bons conseils au pilote.
    5. Le pilote n'a pas utilisé toute la longueur du lac pour décoller, ce qui a laissé moins de temps pour évaluer les performances de l'avion et a limité les options possibles lorsque les performances prévues n'ont pas été obtenues.

    Faits établis quant aux risques

    1. Une fois que l'avion s'est engagé dans une descente vers les arbres, le maintien de la pleine puissance du moteur a augmenté les risques de dommages et d'incendie après l'impact.
    2. La fiche de donnée du certificat de type du Cessna 180 indique que diverses hélices peuvent être installées sur le Cessna 180. Par contre, elle ne précise pas lesquelles sont approuvées seulement pour les avions terrestres, donc celles qui ne conviennent pas aux hydravions. En conséquence, les organisations de maintenance et les propriétaires d'avion peuvent, sans le savoir, installer des hélices qui ne satisfont pas aux normes de navigabilité de l'avion.
    3. Le supplément du manuel du propriétaire (1969) traitant de l'avion terrestre, de l'avion amphibie et de l'hydravion à flotteurs Cessna 180 n'indique pas, dans la section portant sur les restrictions comme dans la section portant sur les équipements, que les normes de navigabilité de l'avion commandent l'installation d'une hélice de 88 pouces. Par conséquent, des pilotes et des exploitants ne seront pas conscients que des hélices de moindre diamètre ne sont pas approuvées pour l'hydravion à flotteurs de ce modèle d'avion.
    4. Le certificat de type supplémentaire SA1749WE visant l'installation de flotteurs de la série 3000D, fabriqués par Canadian Aircraft Products, signale que l'avion monté sur flotteurs peut avoir une masse brute au décollage plus élevée que l'appareil monté sur les flotteurs qu'ils remplacent. Par contre, le certificat ne précise pas les données opérationnelles de performances obtenues à une masse brute plus élevée.

    Mesures de sécurité prises

    Hartzell Propeller Inc. étudie actuellement les effets sur les performances de l'avion des hélices figurant dans les fiches de données du certificat de type du Cessna 180. Si des essais en vol sont nécessaires, l'entreprise présentera leurs résultats à la Federal Aviation Administration (FAA). Elle informera également le Bureau de la sécurité des transports du déroulement des essais et des discussions avec la FAA.

    Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

    Annexes

    Annexe A - Trajectoire de décollage de l'avion