Rapport d'enquête aéronautique A10C0104

Quantité de carburant insuffisante
du deHavilland DHC-8-102 C-GWPS
exploité par Perimeter Aviation
à Winnipeg (Manitoba)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le deHavilland DHC-8-102 (immatriculé C-GWPS et portant le numéro de série 120) exploité sous l'indicatif PAG107 décolle de l'aéroport international James A. Richardson de Winnipeg selon les règles de vol aux instruments pour effectuer un vol régulier jusqu'à Island Lake (Manitoba). L'appareil transporte 2 pilotes, 1 agent de bord et 22 passagers. Le vol PAG107 est exploité conformément à la sous-partie 705 – Exploitation d'une entreprise de transport aérien, du Règlement canadien de l'aviation. Vers 12 h 50, heure avancée du Centre, durant les vérifications en montée, l'équipage découvre que la quantité de carburant est insuffisante pour effectuer le vol prévu. L'avion retourne à Winnipeg et y atterrit à 13 h 6 sans autre incident.

    Renseignements de base

    Déroulement du vol

    En rapprochement de Winnipeg durant l'étape précédant le vol en question, l'équipage a calculé la quantité de carburant nécessaire pour la prochaine étape vers Island Lake. Les calculs indiquaient que 4070 livres de carburant étaient nécessaires pour effectuer le vol aller-retour entre Island Lake et Winnipeg selon les règles de vol aux instruments (IFR). Ce chiffre a été arrondi à 4200 livres pour tenir compte de la circulation au sol à Winnipeg et pour faciliter le ravitaillement.

    Vers 11 h 25Footnote 1, l'équipage a communiqué avec un représentant du service à la clientèle (RSC) d'un exploitant de services aéronautiques d'aéroport (FBO)Footnote 2 à Winnipeg et lui a indiqué l'heure d'arrivée prévue et la quantité de carburant voulue. L'équipage a demandé que le véhicule de ravitaillement le rencontre sur l'aire de trafic de Perimeter Aviation (ci-après appelé Perimeter) pour raccourcir le temps d'escale.

    Le RSC a pris en note la quantité de carburant dans un calepin. Normalement, ce renseignement aurait dû être communiqué à l'agent d'avitaillement du FBO, mais l'attention du RSC a été détournée par d'autres tâches, le renseignement n'a pas été communiqué et la tâche a été oubliée. Le RSC a vu la note plus tard, mais il a présumé que le renseignement avait été communiqué et il n'a pris aucune mesure. Le renseignement n'a pas été transcrit sur la feuille de contrôle sur le comptoir du RSC.

    Le vol est arrivé à 11 h 38. Il restait 1540 livres de carburant à l'arrêt des moteurs. L'équipage a vérifié que les moteurs étaient bien coupés, contre-vérifié les instruments et passé partiellement en revue la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE (avant démarrage – escale) jusqu'à la ligne étoilée (voir l'annexe A – BEFORE START – ENROUTE). Les vérifications « fuel quantity » (quantité carburant) et « fuel on caution light » (voyant d'avertissement de ravitaillement en cours) ont été remises à plus tard puisque l'avion n'avait pas encore été ravitaillé.

    L'équipage a placé la fiche de transfert carburantFootnote 3 (voir la photo 1) sur l'auvent du tableau de bord comme rappel des deux vérifications reportées sur la liste qu'il allait devoir effectuer avant de faire démarrer les moteurs. Par la suite, il a ouvert la trappe d'évacuation du poste de pilotage en position d'aération et la fiche de transfert carburant a également servi de rappel pour fermer la trappe.

    Photo 1. Fiche de transfert de carburant
    Image
    Photo of Fiche de transfert de carburant

    Le véhicule de ravitaillement a rencontré l'appareil sur l'aire de trafic de Perimeter au moment où les moteurs étaient coupés. Tandis que les passagers descendaient de l'avion, l'opérateur du véhicule de ravitaillement a placé le véhicule en position et a raccordé le tuyau souple de carburant à l'avion. L'opérateur n'avait pas reçu d'instructions sur la quantité de carburant voulue et il s'attendait à ce que l'équipage de conduite lui donne ce renseignement avant de commencer le ravitaillement. Il n'a pas immédiatement demandé ce renseignement aux pilotes.

    Le commandant de bord a quitté l'appareil pour aller dans le hangar de Perimeter. Le copilote a effectué une inspection après vol de l'extérieur de l'appareil avant de se diriger lui aussi vers le hangar. Les deux pilotes ont vu le véhicule de ravitaillement et ont présumé que l'opérateur connaissait la quantité de carburant voulue. Par conséquent, ils n'ont pas communiqué leur besoin en carburant.

    Après plusieurs minutes, un autre aéronef de Perimeter nécessitant du carburant est arrivé sur l'aire de trafic. L'opérateur du véhicule de ravitaillement a essayé, mais en vain, de trouver les pilotes de PAG107 dans le hangar. Il a expliqué la situation par radio à l'agent d'avitaillement. Ce dernier lui a indiqué de retirer le tuyau de C-GWPS et d'aller ravitailler l'autre aéronef. L'opérateur a suivi les instructions, puis il est retourné à C-GWPS et a raccordé le tuyau souple à l'appareil en attendant que l'équipage de conduite lui indique la quantité de carburant voulue.

    L'opérateur du véhicule de ravitaillement a tenté une nouvelle fois de trouver l'équipage de PAG107 sans y parvenir. Il a communiqué à nouveau par radio avec l'agent d'avitaillement, qui lui a indiqué de retourner sur l'aire de trafic du FBO où d'autres aéronefs attendaient d'être ravitaillés, ce que l'opérateur a fait. Perimeter n'a pas été avisé que l'avion n'avait pas été ravitaillé.

    À l'intérieur du hangar, les pilotes de PAG107 effectuaient des tâches de régulation liées au prochain vol pendant le déchargement et le chargement du fret et des bagages de l'avion. À leur retour, le véhicule de ravitaillement et l'opérateur n'étaient plus là, et ils ont donc présumé que l'avion avait été ravitaillé.

    Une fois tous les passagers à bord, l'équipage a calculé la masse et le centrage pour vérifier qu'ils étaient dans les limites prescrites. Les calculs ont été faits en tenant compte de la masse de la quantité de carburant demandée. Ils ont alors demandé à l'agent de bord de fermer la porte de la cabine. Le commandant de bord a ensuite fermé la trappe d'évacuation et il a enlevé la fiche de transfert carburant de l'auvent du tableau de bord.

    Les deux pilotes ont oublié qu'ils avaient reporté les vérifications « fuel quantity » et « fuel on caution light ». Ni l'un ni l'autre n'a vérifié la quantité de carburant. Ils ont effectué les vérifications de la liste « BEFORE START – ENROUTE » se trouvant sous la ligne étoilée, avant de démarrer les moteurs et de rouler pour le départ. À 12 h 38, PAG107 a décollé de la piste 18.

    Alors qu'il effectuait la vérification en montée à 10 000 pieds, l'équipage a remarqué que la quantité de carburant indiquée se situait entre 1000 et 1200 livres, soit moins que prévu. L'équipage a d'abord pensé à la possibilité d'une défaillance du système d'indication de la quantité de carburant, puis il a communiqué avec le FBO par radio pour vérifier si l'avion avait été ravitaillé. Le FBO leur a répondu que l'avion n'avait pas été ravitaillé.

    L'équipage a déterminé qu'il n'avait pas assez de carburant pour poursuivre le vol en toute sécurité, et il a donc décidé de retourner à Winnipeg. L'avion a consommé 640 livres de carburant durant le vol; il en restait 900 livres après l'arrêt des moteurs.

    Renseignements sur l'équipage

    L'équipage de conduite était certifié et qualifié pour effectuer le vol conformément à la réglementation en vigueur. Le commandant de bord avait accumulé environ 4500 heures de vol, dont environ 2500 sur le DHC-8 en tant que commandant de bord. Le copilote avait à son actif environ 5000 heures de vol, dont environ 1000 sur le DHC-8 en tant que copilote.

    L'équipage n'avait pas travaillé la veille de l'événement. Son horaire de travail et ses périodes de repos ne constituent pas un facteur dans le présent événement.

    Renseignements sur l'aéronef

    Les dossiers indiquent que l'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'avion ne présentait aucune défectuosité en attente de réparation au moment de l'événement.

    Enregistreurs

    L'avion était équipé d'un enregistreur numérique de données de vol qui a été envoyé au laboratoire du BST à des fins d'analyse. Aucune donnée liée à la quantité ou à la consommation de carburant n'y était enregistrée.

    L'avion était également équipé d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage d'une capacité d'enregistrement de 30 minutes. Aucun renseignement n'a été récupéré, puisque l'avion a continué à être utilisé après le vol en question et que les données ont été oblitérées durant les vols subséquents.

    Conditions météorologiques

    Les conditions météorologiques n'ont pas été un facteur dans le présent événement.

    Communications et documentation liées au carburant

    En rapprochement de Winnipeg, les pilotes de Perimeter avaient l'habitude de communiquer par radio avec le RSC du FBO et de préciser leurs besoins en carburant. Le RSC consignait alors la demande de carburant dans un calepin avant de la relayer à l'agent d'avitaillement par système d'intercommunication ou par radio. Il transcrivait ensuite le renseignement sur une feuille de contrôle et barrait la note dans le calepin. De son côté, l'agent d'avitaillement relayait le renseignement par radio aux opérateurs de véhicule de ravitaillement. À l'occasion, le RSC communiquait directement par radio aux opérateurs de véhicule de ravitaillement. Les radios des véhicules ravitailleurs ne peuvent pas communiquer avec les aéronefs.

    La politique du FBO exigeait que les opérateurs de véhicule de ravitaillement vérifient la quantité de carburant voulue avec les pilotes avant de commencer le ravitaillement. Parfois, des vols étaient retardés ou annulés sans que les opérateurs en soient avisés. Dans de tels cas, ces derniers allaient fournir des services à d'autres aéronefs ayant besoin de carburant sans aviser le personnel d'exploitation de Perimeter qu'il n'y avait pas eu de ravitaillement. Les politiques du FBO n'étant pas documentées, elles étaient communiquées de façon informelle au personnel.

    Jusqu'à 18 mois avant l'événement, les opérateurs de véhicule de ravitaillement devaient faire signer aux pilotes des reçus de carburant. Le pilote recevait alors la copie de Perimeter ou celle-ci était laissée dans le poste de pilotage. Cependant, les opérateurs ne pouvaient pas toujours trouver les pilotes pour qu'ils signent le reçu. De plus, certains reçus étaient perdus ou ne parvenaient pas au service de comptabilité de Perimeter. Par conséquent, ce processus a été changé pour que ce soit le FBO qui envoie les reçus de carburant directement au service de comptabilité de Perimeter quotidiennement, éliminant du même coup les signatures des pilotes et les copies.

    Formation des adaptations

    Les règles ou les instructions sont rarement respectées à la lettre; les gens adaptent ces exigences pour des raisons et selon des manières qui leur semblent logiques selon leurs connaissances, leurs buts, et selon les circonstancesFootnote 4.

    Les politiques et les procédures d'utilisation normalisées (SOP) servent à fixer des limites qui rendent les opérations sécuritaires, mais des personnes peuvent jouer avec ces limites afin d'être plus productives ou d'obtenir d'autres avantages. Il en résulte des versions adaptées des procédures et un écart par rapport aux limites fixées par les SOP qui créent des façons de faire dangereusesFootnote 5. Si rien n'est fait pour y remédier, les membres d'équipage se communiquent entre eux les versions adaptées qui fonctionnent bien et celles-ci se répandent dans toute l'entreprise.

    Conception des listes de vérifications

    Un des principes de conception des listes de vérification tient à la logique des opérationsFootnote 6. Certaines tâches d'une liste de vérifications dépendent de personnes qui ne sont pas dans le poste de pilotage, notamment les opérateurs de véhicules de ravitaillement. Il faut prendre en compte ces facteurs au moment de la conception de la séquence des étapes de la liste de vérifications, de façon que les tâches de la liste de vérifications soient menées en parallèle avec les activités externes.

    Politiques, procédures et pratiques d'exploitation

    Perimeter utilise un système de contrôle opérationnel de type C en vertu duquel la régulation des vols est gérée par le pilote. De par ce système, toute responsabilité liée à l'exploitation du vol est déléguée au commandant de bord. Ces systèmes sont largement utilisés par les exploitants aériens commerciaux au Canada.

    Avant que le commandant de bord autorise le vol, la rubrique 6.6.2 du manuel d'exploitation de la compagnie (MEC) de Perimeter exige que les membres de l'équipage de conduite calculent la quantité de carburant nécessaire et vérifient que le carburant a été chargé. Les outils à la disposition des pilotes qui ont cette responsabilité sont le plan de vol opérationnel, pour calculer la quantité de carburant nécessaire, et la liste de vérifications BEFORE START, pour vérifier la quantité de carburant de l'avion.

    La rubrique 8.7 du MEC indique les procédures de sécurité liées au ravitaillement et exige que l'équipage de conduite supervise les opérations de ravitaillement de l'aéronef. Le MEC n'indique pas de lieux ni de situations où cette supervision n'est pas exigée. Dans la pratique, les pilotes ne supervisaient pas les opérations de ravitaillement à la base de l'entreprise de Winnipeg, où le personnel du FBO qui connaissait bien les aéronefs de l'entreprise s'en chargeait. Les pilotes supervisaient les opérations de ravitaillement aux endroits où le personnel de ravitaillement ne connaissait pas les aéronefs de l'entreprise. Aux bases secondaires, ce sont les pilotes qui ravitaillaient les aéronefs à partir des installations de l'entreprise.

    La rubrique 4.6.3 du MEC indique qu'il est possible d'exécuter la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE jusqu'à la ligne étoilée, les cinq dernières vérifications devant être effectuées tout juste avant le démarrage. Les SOP de l'entreprise n'indiquent pas que le report des tâches sur la liste de vérifications est permis et ne contiennent pas de méthodes pour que les pilotes s'assurent que les tâches reportées d'une liste de vérifications ont bien été effectuées.

    Durant les vols aller-retour, comme le vol en question, les équipages de DHC-8 de Perimeter effectuaient la vérification SHUTDOWN – ENROUTE (arrêt moteur – escale). Afin d'accélérer le prochain départ, ils effectuaient une contre-vérification des instruments et passaient en revue la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE jusqu'à la ligne étoilée. Ces vérifications étaient souvent effectuées alors que l'avion était déchargé et avant qu'il soit ravitaillé. Les membres d'équipage vaquaient ensuite à d'autres occupations au sol, à l'extérieur du poste de pilotage. Plus tard, lorsqu'ils étaient prêts à démarrer les moteurs, les équipages terminaient la liste de vérifications en effectuant les vérifications sous la ligne étoilée. Cette façon de procéder était employée par les pilotes et les pilotes superviseurs.

    Lorsque l'avion avait besoin de carburant, cette habitude faisait en sorte que la vérification de quantité carburant était reportée. Les pilotes de DHC-8 de Perimeter utilisaient diverses pratiques personnelles non documentées pour se souvenir d'effectuer cette vérification après le ravitaillement de l'avion. Certains pilotes plaçaient la fiche de transfert carburant sur l'auvent du tableau de bord, d'autres la plaçaient sur les manettes de poussée. Au moins un pilote effectuait une inspection finale de l'extérieur de l'avion immédiatement avant l'embarquement et le départ. Durant cette inspection, le pilote ouvrait le panneau carburant extérieur pour vérifier la quantité de carburant et s'assurer que les commutateurs étaient dans la bonne position avant de fermer et de verrouiller le panneau.

    La trappe d'évacuation du poste de pilotage peut être ouverte en position d'aération pour changer l'air du poste de pilotage pendant que l'aéronef est stationné. Afin d'assurer que la trappe est bien fermée avant le démarrage des moteurs, la première tâche sur la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE est celle libellée « escape hatch – closed » (trappe d'évacuation – fermée). Certains pilotes de DHC-8 de Perimeter ouvraient parfois la trappe avant ou après avoir passé en revue la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE jusqu'à la ligne étoilée. Dans de telles situations, ils utilisaient couramment la fiche de transfert carburant pour se souvenir que la trappe devait être fermée avant d'effectuer les vérifications sous la ligne étoilée.

    L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

    LP 090/2010 – FDR Download (téléchargement de l'enregistreur de données de vol)

    Analyse

    Effet des adaptations

    La liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE concordait avec la véritable séquence d'événements qui se produisent lorsque l'avion est entre deux vols, suivant ainsi le principe de logique des opérations. Cependant, reporter la vérification de la quantité de carburant permettait aux pilotes de passer la liste en revue jusqu'à la ligne étoilée et de réduire un peu le temps d'exécution de la liste lorsque l'avion était prêt pour le démarrage des moteurs. Cette adaptation est devenue une façon de faire acceptée dans l'entreprise, et les pilotes utilisaient diverses méthodes pour se souvenir de vérifier la quantité de carburant. Cette habitude a fait en sorte que l'utilisation de la liste de vérifications ne respectait plus le principe de logique des opérations.

    C'est cette version adaptée qu'ont utilisée les pilotes de PAG107 lorsqu'ils ont passé en revue la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE jusqu'à la ligne étoilée immédiatement après avoir terminé la liste de vérifications d'arrêt des moteurs. Les pilotes ont ensuite utilisé une autre adaptation en utilisant la fiche de transfert carburant pour leur rappeler que la vérification de quantité de carburant avait été reportée.

    La supervision du ravitaillement par les pilotes est censée faire en sorte que les procédures de sécurité liées à cette opération soient suivies. Elle donne également aux pilotes l'occasion de vérifier la quantité de carburant, comme l'exige la rubrique 6.6.2 du MEC. Toutefois, dans la pratique, les pilotes de Perimeter considéraient que les opérateurs de véhicule de ravitaillement du FBO à Winnipeg connaissaient les avions et le processus de ravitaillement. Ainsi, les pilotes ne supervisaient pas les opérations de ravitaillement à Winnipeg. Bien que cette adaptation leur donnait le temps d'effectuer d'autres tâches, ils n'avaient plus l'occasion de vérifier la quantité de carburant. De plus, les membres d'équipage ont vu le véhicule de ravitaillement raccordé à l'avion, et ils ont présumé que l'opérateur connaissait la quantité de carburant voulue. À leur retour à l'avion, l'absence du véhicule de ravitaillement leur a fait croire que le carburant avait été livré.

    Le FBO communiquait à ses opérateurs les quantités de carburant demandées à l'aide de processus non documentés et informels. Les politiques informelles du FBO prévoyaient un moyen de protection, puisque l'opérateur de véhicule de ravitaillement devait confirmer le chargement du carburant avec un pilote. Dans le présent événement, l'opérateur du véhicule de ravitaillement qui est arrivé à l'avion ne connaissait pas la quantité de carburant demandée et il n'a pas effectué le ravitaillement. L'équipage a présumé que ses besoins en carburant avaient été communiqués à l'opérateur de véhicule de ravitaillement et il n'a pas discuté de la quantité de carburant voulue avec l'opérateur. Lorsque l'opérateur a commencé à chercher activement le renseignement, les deux pilotes étaient dans le hangar et ont été impossibles à trouver.

    Après avoir débranché le tuyau de son véhicule, être allé ravitailler un autre aéronef et avoir de nouveau raccordé le tuyau à C-GWPS, l'opérateur du véhicule de ravitaillement en est finalement venu à la conclusion que le vol avait été retardé ou annulé, donc il a suivi les instructions de l'agent d'avitaillement et il est parti ravitailler d'autres aéronefs. Perimeter n'a pas été avisé que l'avion n'avait pas été ravitaillé, ce qui était normal selon les pratiques courantes. De plus, la distribution de reçus de carburant n'était plus en vigueur. Le fait de ne plus exiger un reçu de chargement a privé l'équipage d'une autre occasion de vérifier que le chargement du carburant avait bien eu lieu.

    Étant donné le fait que les pilotes pensaient que l'avion avait été ravitaillé, l'absence de documentation ou de communication sur le chargement de carburant et le report de la vérification de la quantité de carburant, la dernière chance d'assurer que la quantité de carburant avait été vérifiée reposait sur la fiche de transfert de carburant que l'équipage avait placé sur l'auvent du tableau de bord comme rappel. Cependant, la fiche de transfert de carburant devait également lui rappeler de fermer la trappe d'évacuation. Lorsque les pilotes sont retournés dans le poste de pilotage, la fiche leur a rappelé de fermer la trappe, mais ils ont oublié de vérifier la quantité de carburant. À ce moment-là, la façon habituelle d'utiliser la liste de vérifications ne prévoyait pas d'autre vérification des indicateurs de quantité carburant.

    Importance du manque de carburant

    Dans le cas présent, il n'y avait pas assez de carburant pour respecter les exigences en matière de réserves d'un vol IFR. La découverte du manque de carburant par l'équipage durant la vérification en montée à 10 000 pieds et le retour à Winnipeg ont éliminé le risque de panne sèche et les conséquences connexes qui auraient pu en découler.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Les besoins en carburant n'ont pas été communiqués à l'agent d'avitaillement ou à l'opérateur de véhicule de ravitaillement. Par conséquent, l'avion n'a pas été ravitaillé.
    2. Les pilotes de DHC-8 de Perimeter avaient recours à une procédure adaptée qui consistait à reporter la vérification de la quantité de carburant, et ils utilisaient divers moyens pour se souvenir d'effectuer cette vérification avant de démarrer les moteurs.
    3. Les pilotes de PAG107 ont utilisé cette version adaptée, qui était devenue une façon de faire acceptée, et passé en revue la liste de vérifications BEFORE START – ENROUTE jusqu'à la ligne étoilée, puis ils ont placé la fiche de transfert de carburant sur l'auvent du tableau de bord pour se rappeler que la vérification de la quantité de carburant avait été reportée.
    4. Les pilotes de PAG107 ont ensuite ouvert la trappe d'évacuation du poste de pilotage pour aérer, et ils ont utilisé la fiche de transfert de carburant pour leur rappeler de fermer la trappe avant de démarrer les moteurs. Ainsi, la fiche a servi de rappel pour deux tâches n'ayant aucun lien entre elles, la vérification de la quantité de carburant et la trappe ouverte.
    5. Les pilotes de DHC-8 de Perimeter ne supervisaient pas le ravitaillement à Winnipeg, malgré une politique qui l'exigeait dans le manuel d'exploitation de la compagnie. Les deux pilotes ont vu l'opérateur et le tuyau souple raccordé à l'avion et ils ont présumé que l'avion avait été ravitaillé.
    6. L'équipage a par la suite fermé la trappe d'évacuation du poste de pilotage et enlevé la fiche de transfert de carburant qui était sur l'auvent du tableau de bord. Les deux pilotes ont oublié que la fiche de transfert de carburant devait leur rappeler que la vérification de la quantité de carburant avait été reportée. La quantité de carburant n'a pas été vérifiée et l'avion a décollé avec une quantité insuffisante de carburant.

    Mesures de sécurité

    Perimeter a mené une enquête sur l'événement conformément à son système de gestion de la sécurité (SGS). L'analyse de l'enquête du SGS a déterminé que la gravité de l'événement était critique, mais que celui-ci était improbable, d'où un risque inhérent à l'événement jugé faible. L'entreprise a élaboré un plan de mesures correctives pour réduire la possibilité qu'un tel événement se reproduise.

    Une mesure corrective à court terme a été mise en œuvre immédiatement après l'événement. Le 29 juin 2010, le chef pilote a publié la note de service no 05-10, relative aux opérations du DHC-8 de Perimeter à l'intention des pilotes de DHC-8 de l'entreprise. Cette note indiquait que [Traduction] « passer en revue la "liste de vérifications avant démarrage" pendant que les passagers descendaient de l'appareil, et ensuite quitter l'avion » avait créé une irrégularité d'exploitation aérienne. La note demandait à tous les pilotes de mettre un terme à cette façon de faire et indiquait que [Traduction] « dès maintenant, la "liste de vérifications avant démarrage" sera passée en revue lorsque le commandant de bord et le copilote seront dans leurs sièges et prêts pour le démarrage des moteurs ».

    Avant l'événement, Perimeter avait trouvé un autre fournisseur de carburant. Perimeter s'attendait à mieux contrôler les opérations du nouveau fournisseur puisqu'il s'agissait d'une filiale de la société mère de Perimeter. Les opérations avec le nouveau fournisseur de carburant ont débuté le 5 juillet 2010.

    Le plan de mesures correctives à long terme du SGS consiste à utiliser l'événement comme étude de cas dans le programme de formation en gestion des ressources de l'équipage (CRM). L'étude de cas a été présentée lors du dernier cours de CRM de l'entreprise, lequel a été suivi par tous les pilotes de DHC-8 et la plupart des pilotes de Metro de l'entreprise. Ce cours a été surveillé par Transports Canada.

    Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

    Annexes

    Annexe A – Liste de vérifications « BEFORE START – ENROUTE »

    Document disponible en anglais seulement.