Rapport d'enquête aéronautique A17C0132

Perte de maîtrise à l’atterrissage et sortie de piste
Perimeter Aviation LP
Fairchild SA227-AC Metro III, C-FLRY
Thompson (Manitoba)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 2 novembre 2017, un aéronef Fairchild SA227-AC Metro III (numéro de série AC-756B, immatriculé C-FLRY) de Perimeter Aviation LP effectuait le vol 959 (PAG959) à partir de l’aéroport de Gods River (Manitoba) en direction de l’aéroport de Thompson (Manitoba), avec 2 membres d’équipage à bord. Alors que l’aéronef se trouvait à environ 40 milles marins au sud-est de l’aéroport de Thompson, l’équipage a informé le contrôle de la circulation aérienne qu’il avait reçu une indication de faible pression d’huile du moteur gauche et qu’il allait peut-être devoir arrêter ce moteur. L’équipage n’a pas déclaré de situation d’urgence, mais les services de sauvetage et de lutte contre les incendies d’aéronefs ont été mis en état d’alerte. Après le poser des roues sur la piste 24 avec les 2 moteurs en marche, l’aéronef a soudainement viré à droite et a quitté la piste. L’aéronef s’est immobilisé dans la neige au nord de la piste. La commandante et le premier officier sont sortis de l’aéronef par l’issue de secours de l’aile gauche et, ayant subi des blessures mineures, ils ont été transportés à l’hôpital. L’aéronef a subi d’importants dommages. La radiobalise de repérage d’urgence de 406 MHz ne s’est pas déclenchée. L’événement est survenu à la noirceur, à 19 h 20 (heure avancée du Centre).

    Renseignements de base

    Déroulement du vol

    Le 31 octobre 2017, un aéronef Fairchild SA227-AC Metro III (numéro de série AC-756B, immatriculé C-FLRY) de Perimeter Aviation LP a effectué le vol 959 (PAG959) à partir de l'aéroport international James Armstrong Richardson de Winnipeg (CYWG) en direction de l'aéroport de Gods River (CZGI), au Manitoba. Après l'atterrissage à CZGI, lorsque l'équipage a réglé les manettes des gaz sur la position de bas régime pour circuler au sol, le système d'alerte de l'équipage a indiqué un problème lié à la pression d'huile du moteur gauche. L'aéronef a circulé jusqu'à l'aire de trafic, puis les moteurs ont été arrêtés normalement.

    La commandante a vérifié le niveau d'huile du moteur gauche et a constaté qu'il était bas. On a ensuite démarré les moteurs pour déplacer l'aéronef jusqu'à l'aire de ravitaillement. Pendant le démarrage du moteur gauche, la pression d'huile n'a atteint que 35 lb/po². La commandante a donc décidé d'arrêter ce moteur et de n'utiliser que le moteur droit pour circuler jusqu'à l'aire de ravitaillement.

    Après avoir arrêté le moteur à l'aire de ravitaillement, la commandante a communiqué avec le contrôle des opérations de maintenance (COM) de l'entreprise pour signaler le problème de pression d'huile. Une équipe de maintenance a été envoyée à CZGI pour procéder à une inspection et corriger le problème de pression d'huile. Après son arrivée, l'équipe de maintenance a ajouté 3 pintes d'huile dans le moteur gauche et a constaté que de l'huile fuyait de l'amortisseur de l'indicateur de pression d'huile du moteurNote de bas de page 1. L'aéronef a ensuite été garé pour la nuit, et on a pris les dispositions pour obtenir les pièces nécessaires à la réparation.

    Le 1er novembre, une nouvelle équipe de maintenance est arrivée à CZGI avec les pièces requises et a remplacé l'amortisseur de l'indicateur de pression d'huile du moteur gauche. Le moteur gauche a ensuite été soumis à un essai de fonctionnement. L'équipe de maintenance n'a pas constaté de fuite d'huile et a autorisé la remise en service de l'aéronef. Au cours d'une inspection prévol, le technicien d'entretien d'aéronef (TEA) a constaté une fuite de liquide hydraulique. Le TEA a vérifié le réservoir de liquide hydraulique et a constaté que son niveau était bas. Une inspection du circuit hydraulique n'a pas permis de cerner la source de la fuite, et l'aéronef a de nouveau été garé pour la nuit.

    Le 2 novembre, une autre équipe de maintenance et un équipage de conduite ont été dépêchés à CZGI pour éliminer la fuite de liquide hydraulique et ramener l'aéronef à la base. Après une inspection approfondie et un essai de fonctionnement du moteur, l'équipe de maintenance n'a pas pu détecter la source de la fuite de liquide hydraulique. On a établi qu'il serait nécessaire d'obtenir un permis de vol de convoyageNote de bas de page 2 pour piloter l'aéronef jusqu'à la base de l'entreprise à l'aéroport de Thompson (CYTH) (Manitoba) aux fins d'inspection et de réparation. On a ensuite soumis l'aéronef à l'inspection et aux opérations d'entretien nécessaires pour le vol de 50 minutes. On a ajouté du liquide hydraulique dans le réservoir et on a ajouté 1 pinte d'huile dans le moteur gaucheNote de bas de page 3. Le moteur et le compartiment moteur de gauche étaient secs et ne présentaient pas de traces de fuite d'huile. On a ensuite délivré un permis de vol de convoyage indiquant que seuls les membres d'équipage dont la présence était essentielle pouvaient prendre place à bord et que le train d'atterrissage devait rester sorti. L'équipage de conduite a ensuite communiqué avec le chef pilote adjoint aux fins d'un exposé avant vol qui portera sur les facteurs de risque liés au vol de convoyage et discuter des urgences et éventualités possibles, y compris l'escamotage du train d'atterrissage en cas d'urgence.

    À environ 18 h 30Note de bas de page 4 le 2 novembre 2017, l'aéronef a quitté CZGI pour effectuer le vol de convoyage Perimeter 959 (PAG959) à destination de CYTH avec 2 membres d'équipage à son bord seulement. Environ 15 minutes après le départ, l'équipage a constaté une diminution de la pression d'huile du moteur gauche, jusque dans la bande jaune de l'indicateur. L'équipage a communiqué avec le COM en vol, et on a décidé que le moteur devrait être arrêté si la pression d'huile descendait sous la bande jauneNote de bas de page 5 et que la température d'huile dépassait la bande verteNote de bas de page 6.

    L'équipage a commencé à exécuter la liste de vérification d'arrêt moteur prévu figurant dans le manuel de référence rapide (QRH) pour être prêt à arrêter le moteur gauche en cas de changement des indications. L'équipage a escamoté le train d'atterrissage pour réduire la traînée et a obtenu l'indication que le train était escamoté et verrouillé. Comme la température d'huile était toujours dans la bande verte, l'équipage a interrompu la liste de vérification à l'étape où les génératrices doivent être éteintes, et a poursuivi son vol vers CYTH sans arrêter le moteur gauche. Alors que l'aéronef se trouvait à environ 40 milles marins au sud-est de CYTH, l'équipage a informé le contrôle de la circulation aérienne (ATC) qu'il avait reçu une indication de faible pression d'huile du moteur gauche et qu'il allait peut-être devoir couper ce moteur. L'équipage n'a pas déclaré de situation d'urgence, mais les services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs ont été mis en état d'alerte.

    L'équipage a sorti le train d'atterrissage pendant l'approche finale vers la piste 24 à CYTH. À l'approche du seuil de piste, le régime du moteur gauche a diminué à 96 %. Le pilote a ajusté le régime du moteur droit pour éliminer la différence de régime. Même si la pression d'huile du moteur gauche a diminué sous la bande jaune, l'indicateur de la température d'huile n'a pas augmenté et l'équipage a décidé de ne pas arrêter le moteur. Il a été signalé que la pression d'huile du moteur gauche avait diminué à 16 lb/po² et que la température d'huile de ce moteur n'avait jamais dépassé 88 °C.

    Le point de poser initial de l'aéronef sur la piste 24, sur son train principal droit et avec les moteurs en marche, se situait à environ 1200 pieds après le seuil de la piste. La commandante a tiré les manettes des gaz jusqu'à la butée de ralenti de volNote de bas de page 7. Une saute de régime moteur s'est fait entendre, puis l'aéronef a entamé un cabrage et un roulis vers la droite. Le déséquilibre a progressé jusqu'à ce que l'aile droite heurte la piste et que l'aéronef effectue un pivot autour du bout de l'aile droite. Le nez est ensuite tombé au sol, et l'aéronef s'est immobilisé hors de la piste en position verticale et en direction opposée, à environ 1800 pieds du seuil, avec les 2 moteurs toujours en marche. L'équipage a arrêté les moteurs à l'aide des commandes d'arrêt et de mise en drapeau, puis a évacué l'aéronef par l'issue de secours de l'aile gauche. Il n'y a pas eu d'incendie après l'impact. L'événement à l'étude a eu lieu à la noirceur, à 19 h 20.

    Tués et blessés

    Tableau 1. Tués et blessés
      Équipage Passagers Autres Total
    Tués 0 - - 0
    Blessés graves 0 - - 0
    Légèrement blessés ou indemnes 2 - - -
    Total 2 - - 2

    Renseignements sur l'épave et sur l'impact

    Le train d'atterrissage principal de gauche et le train avant ont été arrachés de l'aéronef, et le nez de l'aéronef a subi une importante déformation (figure 1). Le bout de l'aile droite s'est replié vers le haut, et le bord d'attaque, le bout et le volet de l'aile gauche ont subi des dommages. Les pales des 2 hélices se sont rompues à leur emplanture. Les pales de l'hélice de gauche étaient en drapeau, et les pales de l'hélice de droite étaient à la position de petit pas (butée de démarrage).

    Figure 1. L'aéronef en cause à l'endroit où il s'est immobilisé (Source : Thompson Regional Airport Authority)
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    L'aéronef en cause à l'endroit où il s'est immobilisé

    Un morceau d'une pale de l'hélice de gauche a perforé la porte principale de la cabine, située du côté gauche de l'aéronef, de sorte qu'il était impossible d'ouvrir cette porte. On a trouvé l'issue de secours de l'aile gauche en position ouverte.

    L'épave a été placée sur une remorque à plateau, puis transportée vers un hangar situé à proximité à des fins d'inspection plus approfondie. L'enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR) a été récupéré et envoyé au Laboratoire technique du BST à Ottawa (Ontario) aux fins d'analyse.

    Une inspection des 2 moteurs a permis d'établir une continuité entre le moyeu des hélices et la turbine de travail de 3e étage. Le regard du réservoir d'huile du moteur gauche n'indiquait pas de niveau d'huile, et on a constaté que le réservoir était vide. Une inspection du moteur gauche a permis de constater qu'il y avait une accumulation d'huile près de la tuyère et que le compartiment moteur ne présentait pas de traces de fuite d'huile. La purge du système d'huile du moteur a permis de récupérer 0,75 L d'huile, et une inspection du détecteur magnétique de particules n'a révélé aucune contamination.

    Le moteur gauche a été retiré et envoyé aux installations de Honeywell International Inc. à Phoenix (Arizona, États-Unis) aux fins de démontage.

    La radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz ne s'est pas activée, et aucun dommage n'a été constaté aux composants de l'appareil. Les forces de l'impact n'ont pas déclenché l'interrupteur du détecteur d'écrasement de la radiobalise.

    Renseignements sur le personnel

    Généralités

    Les dossiers indiquent que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. L'examen des horaires de travail et de repos de l'équipage de conduite a permis d'écarter la fatigue comme facteur contributif à cet accident.

    Tableau 2. Renseignements sur le personnel
      Commandante de bord Premier officier
    Licence de pilote Licence de pilote professionnel Licence de pilote professionnel
    Date d'expiration du certificat médical 1er février 2018 1er août 2018
    Heures de vol total 1400 950
    Heures de vol sur type 1000 700
    Heures de vol au cours des 7 derniers jours 12,9 12,4
    Heures de vol au cours des 30 derniers jours 58,5 49,5
    Heures de vol au cours des 90 derniers jours 163,1 149,8
    Heures de vol sur type au cours des 90 derniers jours 163,1 149,8
    Heures de service avant l'événement 11 11
    Heures hors service avant la période de travail 108 11

    Commandante

    La commandante était pilote aux commandes et elle occupait le siège de gauche. Elle détenait une licence de pilote professionnel avec annotation de qualification pour les aéronefs SW3 et SW4 de Swearingen. La commandante travaillait pour l'entreprise depuis novembre 2013. Pendant les 26 premiers mois de son emploi, elle avait occupé des postes de préposée à l'entretien d'aéronefs et de magasinière. Elle avait achevé une formation de premier officier en janvier 2016, suivie d'un entraînement en ligne qui s'était terminé le 7 février 2016. La commandante avait entamé la formation de perfectionnement au poste de commandant en juin 2017, puis avait subi une vérification de compétence le 14 juillet 2017. Elle avait effectué 82 heures d'entraînement en ligne au poste de commandant avec succès, puis avait subi une vérification de compétence en ligne par l'entreprise le 25 octobre 2017.

    Premier officier

    Le premier officier était pilote surveillant et il occupait le siège de droite. Il détenait une licence de pilote professionnel avec annotation de qualification pour les aéronefs SW3 et SW4 de Swearingen. Le premier officier travaillait pour l'entreprise depuis novembre 2013. Pendant les 24 premiers mois de son emploi, il avait occupé un poste de préposé d'aire de trafic. La formation initiale du premier officier s'était terminée le 17 août 2016 par une vérification de compétence en ligne par l'entreprise. Il avait réussi sa dernière vérification de compétence le 8 août 2017.

    Renseignements sur l'aéronef

    Généralités

    Tableau 3. Renseignements sur l'aéronef
    Constructeur Fairchild
    Type, modèle et immatriculation SA227-AC Metro III, C-FLRY
    Année de construction 1987
    Numéro de série AC-756B
    Total d'heures de vol cellule 24 672 heures
    Type de moteur (nombre) Honeywell TPE331-11U-612G (2)
    Type d'hélice ou de rotor (nombre) MT-Propeller MTV-27-1 (2)
    Masse maximale autorisée au décollage 16 000 livres
    Type(s) de carburant recommandé(s) Jet A, Jet A-1, Jet B
    Type de carburant utilisé Jet A

    Le Fairchild SA227-AC Metro III est un aéronef bimoteur à turbopropulseurs pressurisé, configuré pour le transport d'un maximum de 19 passagers et doté d'un train d'atterrissage escamotable. L'aéronef est approuvé pour les vols de jour et de nuit selon les règles de vol à vue (VFR) et aux instruments (IFR), et il est certifié pour le vol dans des conditions givrantes connues. Ce type d'aéronef a d'abord été construit par Swearingen Aircraft, puis par Fairchild. À l'heure actuelle, l'entreprise M7 Aerospace détient le certificat de type pour cet aéronef.

    Masse et centrage

    L'aéronef en cause dans l'événement à l'étude avait une masse à vide de 8902 livres et une masse maximale au décollage de 16 000 livres. Au moment de l'événement à l'étude, l'aéronef transportait environ 1500 livres de carburant et avait une masse brute d'environ 11 500 livres. Il a été établi que l'aéronef était exploité conformément à ses limites de charge et de centrage.

    Moteurs

    L'aéronef est motorisé par 2 turbopropulseurs Honeywell TPE331-11U-612G. Chaque moteur comporte un compresseur centrifuge monocorps à 2 étages entraîné par une turbine axiale à 3 étages, une chambre de combustion annulaire à écoulement indirect, et un réducteur intégré qui entraîne l'hélice. Ce moteur a une puissance maximale continue de 1000 hp sur l'arbre.

    Le système de lubrification du moteur est à carter sec avec réservoir d'huile externe. De l'huile est requise pour lubrifier et refroidir les composants rotatifs et acheminer les contaminants vers le filtre à huile, où les impuretés sont retirées avant que l'huile continue de circuler. L'huile moteur est aussi nécessaire au fonctionnement du système de commande des hélices.

    La pression d'huile normale de fonctionnement du moteur en vol se situe entre 70 et 120 lb/po². La pression d'huile minimale de fonctionnement du moteur en vol est de 50 lb/po²Note de bas de page 8. Le manomètre d'huile comporte une ligne rouge indiquant la limite, et le système d'alerte de l'équipage se déclenche à 40 lb/po². Les limites permises de température d'huile pour le fonctionnement du moteur sont de 55 °C à 110 °C.

    Le moteur gauche (numéro de série P-44670) avait cumulé 16 890 heures depuis sa fabrication et 1900 heures depuis sa dernière révision.

    Une inspection du moteur droit (numéro de série 44180) n'a révélé aucune anomalie antérieure à l'impact

    On a envoyé la pompe de récupération arrière et le carter d'huile du moteur gauche au Laboratoire technique du BST aux fins d'analyse. L'inspection de ces composants n'a pas révélé d'anomalies. L'inspection de l'arbre d'entraînement creux, de la conduite d'huile et des canalisations de l'arbre de la turbine n'a révélé aucune obstruction.

    Joints air-huile

    Des joints étanches à l'huile empêchent l'huile moteur de fuir autour des arbres rotatifs et du moteur. Le joint air-huile arrière de la turbine se compose de 2 pièces : un joint fixe (numéro de pièce 896494-3) (figure 2) et un joint rotatif (numéro de pièce 896549-2) (figure 3). Le joint fixe est formé d'un anneau de carbone fixé à un soufflet. Cet assemblage est fixé au support de palier arrière de la turbine. Le joint rotatif est fait d'acier et comporte une surface plate usinée qui tourne avec l'arbre de la turbine. Ces 2 joints se trouvent dans le boîtier de la pompe de récupération d'huile arrière. Lorsque le moteur tourne, le jeu élastique du soufflet et la pression négative à l'intérieur du boîtier de la pompe de récupération maintiennent le joint carbone contre le joint rotatif, ce qui forme un joint étanche à l'huile.

    On avait installé un joint air-huile neuf sur le moteur gauche au moment de la dernière révision; ce joint comptait 1900 heures de service. Le démontage du moteur a révélé la présence d'une quantité excessive de suie et de calamineNote de bas de page 9(figure 2 et figure 3) autour du joint carbone et dans le diamètre intérieur des plis du soufflet. Le dispositif de retenue du joint et le soufflet présentaient aussi une décoloration (figure 2).

    Figure 2. Joint air-huile (fixe) présentant de la décoloration et de la calamine
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    Joint air-huile (fixe) présentant de la décoloration et de la calamine
    Figure 3. Joint air-huile (rotatif) présentant de la calamine (indiquée par les flèches blanches)
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    Joint air-huile (rotatif) présentant de la calamine (indiquée par les flèches blanches)

    Le joint air-huile arrière de la turbine a été retiré et envoyé au Laboratoire technique du BST à des fins d'analyse plus poussée. Outre la calamine, aucune anomalie n'a été constatée sur le joint.

    Refroidissement du moteur

    Avant d'arrêter le turbopropulseur Honeywell TPE331-11U-612G, il faut le refroidir en le faisant tourner au ralenti pendant une certaine période de temps. Si on ne laisse pas le moteur refroidir suffisamment, l'huile qui demeure piégée dans les zones chaudes du moteur peut atteindre la température à laquelle elle se décompose en dépôts de carbone.

    À la section du manuel de vol de l'aéronef en cause portant sur les limites, on indique qu'il faut refroidir le moteur en le faisant tourner à un couple inférieur à 20 % pendant 3 minutes, avant de l'arrêterNote de bas de page 10.

    L'enquête n'a pas permis de déterminer la durée des périodes de refroidissement antérieures pour l'aéronef en cause.

    Après l'événement à l'étude, on a examiné un échantillon aléatoire d'arrêts de moteur à l'aide de l'information du programme de surveillance des données de vol téléchargée d'un aéronef semblable exploité par Perimeter Aviation. Dans la moitié des 20 cas analysés, le moteur a été arrêté avant la fin de la période de refroidissement de 3 minutes.

    Hélices

    En août 2016, on avait modifié l'aéronef en installant 2 hélices MTV-27-1-E-C-F-R (G) de MT-Propeller Entwicklung GmbH à 5 pales (en composite), avec mise en drapeau complète, à commande hydraulique, à vitesse constante, à contrepoids et à pas réversible.

    Pendant le fonctionnement des hélices, des ressorts et des contrepoids poussent toujours les pales vers la position de grand pas (mise en drapeau), et la haute pression de l'huile moteur s'oppose à cette force en poussant les pales vers la position de petit pas ou de ralenti de vol (figure 4).

    Figure 4. Angles de calage des pales d'une hélice aux positions de ralenti de vol, de puissance et de mise en drapeau (Source : Honeywell International Inc.)
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    Angles de calage des pales d'une hélice aux positions de ralenti de vol, de puissance et de mise en drapeau

    À mesure qu'augmente l'angle de calage des pales des hélices, les pales brassent de plus en plus l'air, ce qui réduit le régime moteur jusqu'à la position de mise en drapeau. À la position de mise en drapeau, les pales sont parallèles à l'écoulement d'air et produisent des forces dynamiques très faibles. À l'inverse, lorsque l'angle de calage diminue, les pales brassent de moins en moins l'air, ce qui fait croître le régime moteur.

    Une inspection des 2 hélices n'a révélé aucune anomalie antérieure à l'impact.

    Système de commande des hélices

    La propulsion de l'aéronef est commandée par le pilote à l'aide des manettes des gaz et des manettes de commande des hélices qui se trouvent sur la console centrale du poste de pilotage. La manette des gaz est reliée à la commande de pas d'hélice et au robinet de carburant manuel. La manette de commande des hélices est reliée au régulateur d'hélice et au régulateur de carburant de sous-vitesse.

    Le système de commande des hélices est conçu pour fonctionner soit dans la plage de calage normale ou dans la zone « bêta ». La plage de calage normale est utilisée en vol, et la zone bêta est utilisée pour manœuvrer au sol. Lorsque la manette des gaz est placée au-delà de la butée de ralenti de vol, le moteur tourne dans la plage de calage normale. Lorsque la manette des gaz est placée sous la butée de ralenti de vol, le moteur tourne dans la zone bêta.

    Dans la plage de calage normale, la manette des gaz commande la puissance du moteur en ajustant le débit de carburant fourni par le robinet de carburant manuel. Le régime moteur est choisi avec la manette de commande des hélices, qui modifie l'angle de calage des pales de l'hélice au moyen du régulateur d'hélice. Le régulateur d'hélice fait croître la pression de l'huile moteur et ajuste le débit d'huile acheminée vers le moyeu de l'hélice par l'intermédiaire de la commande de pas d'hélice et de la conduite de la zone bêta, pour faire varier l'angle de calage des pales.

    Dans la zone bêta, la manette des gaz modifie l'angle de calage des pales au moyen de la commande de pas d'hélice. Pour maintenir les réglages de pas d'hélice et de régime moteur, le régulateur de carburant de sous-vitesse fait varier la puissance du moteur en programmant le débit de carburant. Le régulateur de carburant de sous-vitesse contrôle les paramètres du régime moteur entre 65 % et 97 %. Dans la zone bêta, la commande de pas d'hélice régule le débit d'huile acheminée vers le moyeu de l'hélice pour faire varier l'angle de calage des pales.

    Le régulateur d'hélice et la commande de pas d'hélice ont été envoyés au Laboratoire technique du BST aux fins d'analyse. Aucune anomalie n'a été relevée.

    Circuit hydraulique

    Le circuit hydraulique de l'aéronef se compose d'un réservoir de 2,5 gallons américains et 2 pompes hydrauliques actionnées par les moteurs qui mettent un collecteur commun en pression. Le collecteur commun achemine la pression hydraulique vers les systèmes d'orientation des volets, du train d'atterrissage et de direction du train avant. Le tableau de bord de l'aéronef comporte un indicateur de pression hydraulique (utilisé pour surveiller la pression du circuit hydraulique) et des témoins de faible pression pour les pompes hydrauliques de gauche et de droite. Si un seul moteur tourne, une pompe actionnée par le moteur peut fournir la pression hydraulique nécessaire au fonctionnement normal des systèmes, pourvu que le système contienne suffisamment de liquide hydraulique. L'aéronef est aussi doté d'une pompe manuelle qui fournit la pression hydraulique nécessaire au déploiement du train d'atterrissage en cas d'urgence. Sans pression ou liquide hydraulique, les systèmes hydrauliques des volets et de la direction du train avant ne fonctionnent pas.

    Entretien

    Généralités

    L'aéronef était entretenu conformément à l'annexe D de la norme 625 du Règlement de l'aviation canadien (RAC). Les dossiers indiquent que l'aéronef en cause dans l'événement à l'étude était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.

    Indication de faible pression d'huile du 31 octobre

    On a inspecté le moteur gauche après le vol vers CZGI du 31 octobre, pendant lequel il y avait eu des indications de faible pression d'huile. L'inspection a révélé que le niveau d'huile moteur était bas et que de l'huile fuyait de l'amortisseur de l'indicateur de pression d'huile. On a remplacé l'amortisseur de pression et le joint d'étanchéité, puis on a rempli le réservoir d'huile. On a nettoyé le compartiment moteur et un point fixe a été effectué. Une inspection du moteur après le point fixe a révélé que le compartiment moteur ne présentait pas de traces d'huile et qu'il n'y avait plus de fuite d'huile. Le personnel de maintenance a conclu que l'indication de faible pression d'huile avait été corrigée, et l'aéronef a été remis en service.

    Fuite de liquide hydraulique du 1er novembre

    Le jour précédant l'événement à l'étude, on a décelé une fuite de liquide hydraulique, puis on a obtenu un permis de vol de convoyage pour piloter l'aéronef jusqu'à la base de l'entreprise à CYTH. On a rempli le réservoir de liquide hydraulique avant le vol de l'événement à l'étude. Pendant le vol de l'événement à l'étude, il n'y a eu aucune indication de problèmes liés au circuit hydraulique. En raison des dommages considérables que l'aéronef a subis dans l'accident, on n'a pas effectué d'autre inspection ni réparé la fuite de liquide hydraulique.

    Exploitation de l'aéronef

    Phases de vol de l'aéronef

    Croisière

    En croisière, le régime moteur peut être réduit à des fins de réduction du bruit et d'efficacité énergétique. Dans cette situation, on réduit habituellement le régime moteur à 97 %. On obtient le régime moteur de croisière en tirant légèrement sur les manettes des gaz, puis en déplaçant les manettes de commande des hélices de la position de décollage à la position correspondant au régime moteur souhaité.

    Approche

    Pendant l'approche, on place les manettes de commande des hélices à la position de décollage (régime de 100 %), puis on tire les manettes des gaz vers la position de ralenti de vol de manière à maintenir la vitesse d'approche souhaitée.

    Arrondi

    Lorsque l'aéronef approche du seuil de la piste, on place les manettes des gaz à la position de ralenti de vol. Après le poser des roues et pendant le roulement au sol, on tire les manettes des gaz au-delà de la butée de ralenti de vol jusqu'aux positions de ralenti au sol et d'inversion de poussée, ce qui fait diminuer l'angle des pales, éventuellement jusqu'à la position d'inversion de poussée. La résistance à l'air augmentant à mesure que diminue l'angle de calage des pales, le vent relatif et la traînée font croître les charges auxquelles les hélices sont assujetties. Le régime moteur tombe ensuite sous le réglage du régulateur d'hélice, ce qui fait diminuer la demande en carburant. Lorsque le régime moteur est réglé à 97 %, le régulateur de carburant de sous-vitesse assume le contrôle de l'alimentation en carburant et maintient le régime moteur.

    Manuel de vol de l'aéronef

    En vertu des normes de navigabilité définies dans le RAC, un manuel de vol doit être transporté à bord pendant chaque volNote de bas de page 11. Ce manuel de vol contient les renseignements propres à l'aéronef, y compris ses limites, les procédures d'urgence, les procédures anormales, les procédures normales, les données de performance, et les données de masse et de centrage.

    Les procédures d'urgence précisées dans le manuel de vol de l'aéronef Metro III stipulent ce qui suit : [traduction]

    VOYANT ALLUMÉ

    Témoins L OIL PRESS et R OIL PRESS (rouges)

    INDICATION

    Pression d'huile du moteur correspondant inférieure à 40 lb/po². Surveiller les instruments moteursNote de bas de page 12.

    Les procédures anormales du manuel de vol comprennent ce qui suit : [traduction]

    Si la température d'huile dépasse la limite maximale en vol, réduire la puissance du moteur touché. Si la température d'huile demeure à l'extérieur des limites et qu'il y a d'autres indications d'une panne imminente du moteur, arrêter le moteurNote de bas de page 13.

    L'enquête a permis de déterminer que l'équipage n'a pas consulté le manuel de vol de l'aéronef au cours de l'événement à l'étude.

    Manuel de référence rapide

    Le manuel de référence rapide (QRH) contient des procédures (y compris des procédures d'urgence et anormales) que l'on peut consulter rapidement ou fréquemment lorsqu'on exploite l'aéronef. Les procédures peuvent être abrégées pour en faciliter la consultation, mais elles doivent correspondre aux procédures du manuel de vol de l'aéronef. On utilise souvent le terme « QRH » pour parler de la liste de vérifications pour les situations d'urgence et anormales.

    Le QRH peut être rédigé par le fabricant de l'aéronef ou par l'exploitant aérien; ce n'est pas un document approuvé par Transports Canada (TC). Toutefois, TC peut évaluer le QRH dans le cadre de l'évaluation opérationnelleNote de bas de page 14 de l'entreprise.

    Perimeter Aviation avait publié son propre QRH pour le type d'aéronef en cause dans l'événement à l'étude. Ce QRH comprend les mentions ci-dessous concernant les indications de pression d'huile basse et de température d'huile élevée :

    • Si un voyant de faible pression d'huile s'allume, le manomètre d'huile correspondant doit être vérifié. Si la pression d'huile indiquée est inférieure à 40 lb/po² ou anormale, le moteur doit être arrêtéNote de bas de page 15.
    • En cas d'indication de température d'huile élevée, le moteur doit être arrêté si son fonctionnement se détérioreNote de bas de page 16.

    L'enquête a permis de déterminer que l'équipage avait consulté le QRH au cours du vol de l'événement à l'étude, conformément aux procédures de l'entreprise. Toutefois, après avoir consulté le COM et parce que la température d'huile n'augmentait pas, l'équipage a décidé de ne pas arrêter le moteur.

    Renseignements météorologiques

    L'observation météorologique horaire de 19 h (20 minutes avant l'événement à l'étude) pour CYTH faisait état des conditions suivantes :

    • vents : 320° vrai (V) à 5 nœuds;
    • visibilité : 15 milles terrestres dans de la neige faible;
    • nuages fragmentés à 3700 pieds au-dessus du sol;
    • température : -18 °C et point de rosée de -21 °C;
    • calage altimétrique de 30,40 pouces de mercure.

    Les conditions météorologiques ne sont pas considérées comme un facteur dans l'événement à l'étude.

    Renseignements sur l'aérodrome

    CYTH compte 2 pistes : la piste 06/24, qui est asphaltée et mesure 5800 pieds de longueur par 150 pieds de largeur, et la piste 15/33, qui est en gravier et mesure 5079 pieds de longueur par 100 pieds de largeur.

    Pour l'exploitation nocturne, la piste 06/24 est munie des dispositifs d'éclairage suivants :

    • des feux de bord de piste à haute intensité;
    • des feux de seuil et de fin de piste;
    • un indicateur de trajectoire d'approche de précision;
    • un dispositif lumineux d'approche omnidirectionnel.

    Aucune anomalie liée aux systèmes de l'aérodrome n'a été signalée.

    Enregistreurs de bord

    Enregistreur de conversations de poste de pilotage

    L'aéronef était doté d'un CVR situé dans le bâti d'équipement qui se trouve derrière la paroi de la soute arrière. Cet enregistreur pouvait stocker les 30 dernières minutes de sons dans le poste de pilote, de sons captés par les micros-rails des pilotes et de conversations radio. Le CVR n'a pas subi de dommages lors de l'accident et a été envoyé au Laboratoire technique du BST pour l'extraction de ses données.

    Enregistreur de données de vol

    L'aéronef n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol (FDR), et la réglementation n'exigeait pas qu'il le soit.

    Poste de pilotage à écrans cathodiques Garmin 950

    L'aéronef était doté d'un système intégré d'instruments de vol Garmin 950 qui remplaçait les instruments de vol et les instruments de paramètres moteur classiques. Ce système peut enregistrer et stocker des données sur la navigation et le vol, y compris les paramètres de vol et les paramètres moteur, sur des cartes mémoire de type Secure Digital (SD). Le système possédait 2 fentes de carte mémoire SD : 1 pour les données de navigation et 1 pour les données de vol. Le système était doté d'une carte mémoire SD pour les données de navigation, mais non d'une carte mémoire SD pour les données de vol.

    Recommandations du BST concernant les enregistreurs de bord

    De nombreux rapports d'enquête aéronautique du BST ont fait état d'enquêteurs incapables de déterminer les raisons pour lesquelles un accident s'était produit, étant donné l'absence de dispositifs d'enregistrement de bord. Les avantages des données de vol enregistrées dans le cadre d'enquêtes sur les accidents d'aéronefs sont bien connus et documentésNote de bas de page 17.

    Depuis plusieurs décennies, les FDR et les CVR sont conçus, prévus et installés pour enregistrer les données de vol et de poste de pilotage aux fins d'enquête sur les accidents. Les FDR enregistrent de nombreux paramètres d'aéronef, comme l'altitude, la vitesse anémométrique, le cap, etc., plusieurs fois par seconde. Les CVR enregistrent les transmissions radio et les sons ambiants dans le poste de pilotage, y compris les voix des pilotes, les alertes et le bruit des moteurs. Les enregistreurs d'images/vidéo fournissent des vidéos de l'équipage de conduite immédiatement avant, pendant et après un événement.

    À l'heure actuelle, les CVR et FDR constituent la méthode la plus complète de saisie de grandes quantités de données de vol aux fins d'enquêtes sur les accidents, et contribuent considérablement à l'amélioration de la sécurité aérienne.

    Recommandation A13-01 du BST

    Le BST a enquêté sur un incident de perte de maîtrise et désintégration en vol au nord-est de Mayo (Yukon)Note de bas de page 18, survenu en mars 2011. En 2013, le BST a déterminé qu'il existait des arguments convaincants pour l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol (FDR) légers par tous les exploitants commerciaux, et a recommandé que :

    le ministère des Transports, en collaboration avec l'industrie, élimine les obstacles et élabore des pratiques recommandées en ce qui a trait à la mise en œuvre du suivi des données de vol et à l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers par les exploitants commerciaux qui ne sont pas actuellement tenus de munir leurs aéronefs de ces systèmes.
    Recommandation A13-01 du BST

    En février 2018, TC a organisé un groupe de discussion composé d'intervenants du secteur afin d'évaluer les défis et les avantages de l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers à bord d'aéronefs qui ne sont pas actuellement tenus d'en être munis.

    Dans sa réévaluation de la réponse de TC, le Bureau a indiqué que d'ici à ce que ce groupe de discussion formule des conclusions sur les défis et avantages de l'installation de ces systèmes dans les petits aéronefs, et à ce que TC indique au BST le plan d'action découlant de ces conclusions, on ignore quand et comment la lacune de sécurité soulevée par la recommandation A13-01 sera corrigée. Le Bureau juge préoccupant le fait que très peu de mesures concrètes sont prises pour mettre la recommandation A13-01 en pratique. Le Bureau estime que cela causera d'importants retards, comme dans le cas de nombreuses autres recommandations.

    Par conséquent, à l'égard de la réponse à la recommandation A13-01, le Bureau a estimé que son évaluation était impossible. En avril 2018, le BST a fermé le dossier de cette recommandation et l'a remplacée par la recommandation A18-01.

    Recommandation A18-01 du BST

    Le BST a enquêtéNote de bas de page 19 sur un événement survenu en 2016 au cours duquel un Mitsubishi MU-2B-60 a percuté le relief durant l'approche finale à l'aéroport des Îles-de-la-Madeleine (Québec). Les 7 occupants ont été mortellement blessés. Même si la réglementation ne l'exigeait pas, cet aéronef avait à son bord un système d'enregistrement des données de vol léger. Les enquêteurs ont pu récupérer l'enregistreur et en extraire les données pour les analyser, ce qui leur a permis de mieux comprendre le déroulement des événements qui avaient mené à la perte de maîtrise de l'aéronef. Sans système d'enregistrement à bord, les enquêteurs n'auraient pas obtenu ces renseignements essentiels à la compréhension des circonstances et des faits ayant mené à l'événement.

    Dans le cas d'un autre événement survenu en 2016Note de bas de page 20 sur lequel le BST a enquêté, les enquêteurs ne disposaient d'aucun des renseignements que contiennent normalement les systèmes d'enregistrement des données de vol légers. Il n'a donc pas été possible d'établir les causes de la perte de maîtrise de l'aéronef qui a entraîné la collision avec le relief et la mort des 4 occupants.

    Même si la recommandation A13-01 ciblait les exploitants commerciaux, ces 2 événements récents font ressortir la valeur d'un système d'enregistrement des données de vol léger en démontrant à quel point la disponibilité de ces données est importante. Ces systèmes permettent aussi la surveillance des activités de vol normales, ce qui aide les exploitants à accroître leur efficacité opérationnelle et à repérer les problèmes de sécurité avant qu'ils ne causent un accident.

    Le 26 avril 2018, le Bureau a émis la recommandation A18-01 demandant à TC de rendre obligatoire l'installation de systèmes d'enregistrement des données de vol légers chez les exploitants commerciaux et les exploitants privés qui ne sont pas actuellement tenus d'avoir de tels systèmes. Cette nouvelle recommandation a remplacé la recommandation A13-01, dont le dossier a été fermé. Le Bureau a appelé TC à se servir du travail effectué dans le cadre de la recommandation A13-01 pour accélérer l'adoption de mesures de sécurité en réponse à la recommandation A18-01.

    Pour donner suite à la réunion de son groupe de discussion qui s'est tenue avec des représentants du secteur en février 2018 et pour soutenir la recommandation A13-01, TC entreprend une analyse stratégique de la gestion des données de vol. Deux approches ont été élaborées :

    • Installation volontaire des FDR et de systèmes d'enregistrement des données de vol légers (LDR); publication d'une circulaire d'information et de conseils à l'intention des exploitants.
    • Adoption possible de règlements sur l'installation de FDR et de LDR dans les aéronefs nouvellement construits. TC a indiqué qu'il resterait à établir quels secteurs du transport aérien canadien seraient assujettis à cette exigence de certification. Il a également indiqué que toutes les exigences de certification seraient, à tout le moins, entièrement conformes à la norme ED-155, Minimum Operational Performance Specification for Lightweight Flight Recording Systems, de l'Organisation européenne pour l'équipement de l'aviation civile (EUROCAE), qui est citée à l'annexe 6 de l'OACI.

    Dans sa réponse à la recommandation A18-01 en septembre 2018, TC a indiqué qu'il était en partie d'accord avec la recommandation A18-01 et qu'il prendrait les mesures suivantes :

    • TC a indiqué qu'il réexaminerait ces deux approches en évaluant le nombre d'exploitants ayant volontairement adopté les systèmes de suivi des données de vol. Si les résultats de l'approche volontaire s'avéraient insuffisants, d'autres mesures, y compris une solution réglementaire, seraient envisagées.
    • TC a l'intention de continuer de travailler avec le secteur afin d'élaborer des pratiques recommandées et d'établir les principaux obstacles entravant l'adoption et l'installation des systèmes d'enregistrement des données de vol.

    En plus de la réponse de TC, le BST a reçu des renseignements de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA) au sujet des mesures prises après la publication de la recommandation A18-01. Dans sa lettre, l'ACAA a informé le BST qu'elle continuerait de promouvoir l'installation des FDR ainsi que l'analyse des données issues de ces dispositifs dans le cadre de son programme Partners-in-Safety. L'ACAA a également signé une entente avec un fournisseur afin d'offrir à ses membres des services d'analyse des données de vol. Enfin, l'ACAA a informé le BST qu'elle appuierait une approche réglementaire imposant l'installation de FDR dans les aéronefs privés si cette mesure était corroborée par une analyse coûts-avantages. Elle a toutefois fait remarquer que la mise à niveau des aéronefs d'affaires n'était pas toujours possible à cause des coûts et des contraintes techniques.

    Le Bureau constate que TC s'attache à travailler avec le secteur pour promouvoir l'installation volontaire des FDR et des LDR dans les aéronefs canadiens qui ne sont pas assujettis aux exigences actuelles du RAC. Toutefois, aucun échéancier précis n'a été fourni pour les mesures proposées. Bien qu'une fois mises en œuvre, ces mesures puissent atténuer le risque, d'ici à ce que TC transmette au BST un plan d'action plus détaillé, on ignore quand et dans quelle mesure la lacune de sécurité soulevée dans la recommandation A18-01 sera corrigée.

    Par conséquent, le Bureau estime que la réponse à la recommandation dénote une attention en partie satisfaisante.

    Renseignements médicaux et pathologiques

    L'enquête a déterminé que rien ne donnait à croire que des facteurs médicaux ou pathologiques auraient pu avoir une incidence négative sur le rendement de la commandante de bord ou du premier officier.

    Questions relatives à la survie des occupants

    Chaque membre d'équipage portait un harnais à 4 points et a subi des blessures mineures. L'aéronef était doté de 3 issues de secours : 2 sur l'aile droite et 1 sur l'aile gauche. L'équipage n'a pas pu ouvrir la porte principale de la cabine, mais il est arrivé à ouvrir l'issue de secours de l'aile gauche pour évacuer l'aéronef.

    Comme l'équipage avait déjà avisé le contrôle de la circulation aérienne (ATC) de la situation, les services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs étaient en état d'alerte et sont intervenus presque immédiatement. Les véhicules de sauvetage étaient déjà arrivés sur place lorsque les membres d'équipage ont évacué l'aéronef, et ceux-ci ont été transportés à l'hôpital aux fins d'observation.

    L'aéronef était doté d'une radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz, qui ne s'est pas activée car les forces de l'impact n'étaient pas suffisantes pour déclencher l'interrupteur du détecteur d'écrasement.

    Essais et recherche

    Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP001/2018 – Rear Rotor Seal Analysis [analyse du joint rotatif arrière]

    Renseignements sur les organismes et la gestion

    Généralités

    Perimeter Aviation est un exploitant régional qui offre des services de vols réguliers, d'affrètement et d'ambulance aérienne dans de nombreuses localités éloignées du Manitoba et du nord-ouest de l'Ontario, sous le régime des sous-parties 703 (taxi aérien), 704 (service aérien de navette) et 705 (transport aérien) du RAC. Le siège social de Perimeter Aviation est à Winnipeg (Manitoba), et l'entreprise exploite plusieurs bases dans des communautés environnantes plus petites.

    Au moment de l'événement à l'étude, Perimeter Aviation exploitait 8 aéronefs Fairchild SA227 et 14 aéronefs Swearingen SA226 en vertu des sous-parties 703 et 704 du RAC, et 8 aéronefs de Havilland DHC-8 en vertu de la sous-partie 705 du RAC.

    Perimeter Aviation est aussi un organisme de maintenance approuvé par TC, ce qui lui permet d'effectuer l'entretien de ses aéronefs. De plus, l'entreprise est un organisme approuvé de réparation et de révision de turbines à gaz Honeywell TPE331.

    Formation des pilotes

    Dans son manuel de formation des membres d'équipage de conduite, Perimeter Aviation définit les exigences en matière de formation initiale et continue et de formation de perfectionnement, ainsi qu'en ce qui concerne de nombreux autres cours requis par la réglementation et l'entreprise. Perimeter Aviation a un service de formation sur les sous-parties 703 et 704 du RAC, qui offre de la formation aux pilotes de l'aéronef Fairchild SA227-AC Metro III.

    Les pilotes de Perimeter Aviation sont habituellement embauchés et formés en tant que premiers officiers. Leur formation comprend de la formation sur ordinateur, des cours en classe, de la formation et des vérifications des compétences en vol, et un minimum de 20 heures de formation en cours d'emploi (entraînement en ligne).

    Lorsque l'entreprise souhaite pourvoir un poste de commandant, elle offre de la formation de perfectionnement à un premier officier qui a acquis une expérience suffisante. La formation de perfectionnement se compose de formation et de vérifications des compétences en vol, et d'au moins 20 heures supplémentaires d'entraînement en ligne.

    Système de gestion de la sécurité

    TC définit un système de gestion de la sécurité (SGS) comme « [un] processus documenté de gestion des risques qui intègre des systèmes d'exploitation et des systèmes techniques à la gestion des ressources financières et humaines pour assurer la sécurité aérienne ou la sécurité du publicNote de bas de page 21. »

    En vertu de la réglementation actuelle, les exploitants aériens et les organismes de maintenance assujettis à la sous-partie 705 du RAC doivent élaborer et tenir à jour un SGS. Même si la réglementation n'oblige pas les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC à mettre en œuvre un SGS, Perimeter Aviation a mis en œuvre un SGS approuvé par TC pour ses 3 types d'exploitation.

    Gestion des ressources de l'équipage, prise de décision du pilote et gestion des risques opérationnels

    Gestion des ressources de l'équipage

    Le poste de pilotage d'un avion à équipage multiple est un milieu de travail trépidant et exigeant; les membres de l'équipage de conduite sont en interaction constante avec l'avion, l'environnement et leurs collègues. La gestion des ressources de l'équipage (CRM) consiste à faire une utilisation efficace des ressources disponibles – humaines, matérielles et informationnelles – pour gérer les menaces et les difficultés qui peuvent survenir pendant un vol. Selon l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), la formation en CRM vise fondamentalement à « améliorer la sécurité aérienne grâce à une utilisation efficace de stratégies de gestion des erreurs dans les domaines d'influence individuelle aussi bien que systémiqueNote de bas de page 22 », d'où sa proposition d'intégration de la gestion des menaces et des erreurs (TEM) à une formation moderne en CRM.

    La TEM est un cadre conceptuel portant sur les opérations aériennes et les performances humaines, cadre qui peut être utilisé dans divers contextes comme les opérations du poste de pilotage et les enquêtes après accident. Les menaces, les erreurs et les états indésirables de l'aéronef sont trois composantes de base de la TEMNote de bas de page 23. La TEM se fonde sur la prémisse que les dangers opérationnels sont un aspect normal, inhérent et prévisible des activités aériennes, et qu'ils créent des risques pour la sécurité qui doivent être cernés et atténués de manière proactive. Si une erreur se produit, elle est cernée et atténuée adéquatement, et si un état indésirable de l'aéronef se manifeste, il est reconnu et atténué à l'aide de procédures d'urgence.

    Le programme de formation des pilotes assujettis à la sous-partie 705 du RAC de Perimeter Aviation comprenait un cours officiel sur la CRM.

    La formation en vol initiale et continue des pilotes assujettis aux sous-parties 703 et 704 de Perimeter Aviation portait sur certains principes de base de la CRM, mais n'abordait pas la gestion des menaces et des erreurs (TEM). Pendant le vol en cause dans l'événement à l'étude, les membres de l'équipage ont exercé de nombreuses compétences de CRM, utilisant les annonces à haute voix, les listes de vérifications pour les exposés, les listes de vérifications pour les appels, les interrogations et réponses, la résolution de problèmes, le recours à de nouvelles ressources (p. ex., la consultation du COM), la surveillance, les vérifications croisées, le transfert actif des tâches, les procédures d'urgence et les procédures d'évacuation.

    Perimeter Aviation n'avait pas l'obligation de fournir de la formation en CRM à l'équipage pilotant l'aéronef en cause et, au moment de l'événement à l'étude, n'offrait pas de formation distincte en CRM à ses pilotes assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC.

    Depuis le 28 juillet 2017, les exploitants canadiens assujettis aux sous-parties 702, 703 et 704 du RAC avaient 18 mois pour mettre en œuvre une formation en CRM. À partir du 31 janvier 2019, tous les transporteurs aériens commerciaux (c.-à-d. les exploitants assujettis aux sous-parties 702, 703, 704 et 705 du RAC) devront former leur personnel concerné sur la CRM moderne.

    Prise de décision du pilote et gestion des risques opérationnels

    La formation en CRM porte aussi sur des connaissances et des compétences plus traditionnelles liées à la prise de décision du pilote (PDM) et à la gestion des risques opérationnels. La PDM, un aspect primordial de la sécurité des vols, peut être définie comme un processus en boucle à 4 étapes : recueillir l'information, traiter l'information, prendre une décision en fonction des options possibles, puis mettre en œuvre la décision. Pour que la PDM soit efficace, le pilote doit continuellement réévaluer les conditions et déterminer si le plan original est toujours valable, ou s'il doit adopter une autre ligne de conduite. Il est essentiel que le pilote interprète l'information qu'il a à sa disposition de façon précise et en temps opportun pour mener à bien ce processus. Un élément important de la PDM est une bonne conscience situationnelle, qui nécessite que le pilote fasse cadrer la réalité d'une situation avec ses attentes. Elle comporte 3 niveaux : la perception, la compréhension et l'anticipation.

    La gestion des risques opérationnels nécessite le repérage des dangers, l'évaluation active du niveau de risque immédiat, la prise rapide de mesures appropriées pour réduire les risques au plus bas niveau que l'on puisse raisonnablement atteindre, et la surveillance continue de l'évolution de la situation et de la rétroaction du processus. La gestion des risques opérationnels se produit pendant toutes les phases d'un vol, y compris avant le vol, en croisière, dans les situations normales et anormales, et dans les situations d'urgence. Une PDM ou une gestion des risques opérationnels inadéquate ou inefficace peut entraîner l'exploitation d'un aéronef au-delà de ses capacités ou des capacités du pilote.

    Environ 60 milles au sud de CYTH, la pression d'huile du moteur a diminué jusqu'à la bande jaune, et toutes les autres indications étaient normales. L'équipage de conduite a amorcé la procédure d'arrêt prévu du moteur gauche pour être prêt à réagir en cas d'augmentation de la température d'huile. L'équipage de conduite a aussi envisagé la perte possible de pression hydraulique en raison de la fuite préexistante, laquelle aurait pu entraîner une défaillance du système de direction du train avant. Il a finalement été décidé de laisser tourner le moteur gauche pour prévenir toute perte de la maîtrise directionnelle à l'atterrissage qu'aurait pu causer un mouvement de lacet négatif créé par l'utilisation d'un seul moteur.

    Analyse

    Généralités

    Le vol dans l'événement à l'étude était un vol de convoyage dont l'objectif était de déplacer l'aéronef de Gods River (Manitoba) à Thompson (Manitoba) en raison d'une fuite irrésolue de liquide hydraulique faisant que l'aéronef devait voler avec le train d'atterrissage sorti. Pendant le vol, rien n'indiquait qu'il existait des problèmes liés au circuit hydraulique.

    Le manque d'huile dans le moteur gauche et la perte subséquente de pression d'huile ont entraîné la défaillance du système de commande des hélices à l'atterrissage, ce qui a déstabilisé l'aéronef. Rien n'indique que la fatigue ou d'autres facteurs physiologiques auraient contribué à l'accident. Les 2 pilotes étaient qualifiés pour le vol et détenaient la licence appropriée.

    L'analyse portera sur la perte de pression d'huile du moteur, le joint air-huile arrière de la turbine, les procédures de refroidissement des moteurs, les différences entre le manuel de vol de l'aéronef (AFM) et le manuel de référence rapide (QRH), la prise de décision du pilote (PDM), la gestion des risques opérationnels et les enregistreurs de bord.

    Déroulement de l'accident

    Pendant l'approche finale de l'aéronef, le régime du moteur gauche a commencé à baisser et le couple a commencé à augmenter. L'angle de calage des pales de l'hélice a commencé à augmenter en raison de la pression d'huile insuffisante pour contrer la pression exercée par les ressorts de l'hélice et les forces exercées par les contrepoids de l'hélice. La perte continue d'huile et la chute de pression d'huile ont fait augmenter encore l'angle de calage des pales de l'hélice, ce qui a entraîné une plus grande diminution du régime moteur et l'augmentation du couple.

    Lorsque l'aéronef a initialement touché le sol sur son train d'atterrissage principal de droite, les manettes des gaz ont été tirées au-delà de la butée de ralenti de vol jusqu'à la zone bêta. Lorsque le régime du moteur gauche a diminué sous 97 %, le régulateur de carburant de sous-vitesse a augmenté le débit de carburant pour rétablir le régime moteur à 97 %. Cette augmentation de la puissance s'est produite pendant que l'angle de calage des pales de l'hélice de gauche augmentait (c.-à-d. que les pales brassaient de plus en plus l'air), ce qui a causé une augmentation soudaine de la poussée du côté gauche. Cette augmentation de la poussée, qui s'est produite alors que l'aéronef touchait le sol sur son train d'atterrissage principal de droite, a été exacerbée par l'aile droite (c.-à-d. l'aile reculante) et l'hélice de droite en position de disqueNote de bas de page 24, ce qui a fait croître la portance de l'aile gauche. Cette portance accrue a entraîné un mouvement de roulis vers la droite qui a entraîné la perte de la maîtrise de l'aéronef.

    Indications de pression d'huile du moteur gauche

    Il a été déterminé que la fuite d'huile de l'amortisseur de pression a eu un effet négligeable sur les indications de faible pression d'huile survenues pendant le vol précédent à destination de l'aéroport de Gods River (CZGI), et qu'elle n'a pas contribué à l'événement à l'étude. Les indications de faible pression d'huile du moteur gauche survenues pendant le vol de l'événement à l'étude et le vol précédent ont probablement été causées par une fuite d'huile constante au-delà du joint air-huile arrière de la turbine. L'épuisement de la réserve d'huile a causé la cavitation de l'huile dans la pompe à l'huile actionnée par le moteur et une perte de la pression d'huile. La perte de pression d'huile a entraîné la défaillance du système de commande de l'hélice à l'atterrissage et a déstabilisé l'aéronef.

    Joint air-huile et refroidissement du moteur

    De la calamine s'était accumulée à l'intérieur des plis du soufflet avec le temps. Ces dépôts de carbone ont réduit la capacité du soufflet de prendre de l'expansion et de fournir une étanchéité parfaite avec le joint rotatif. Si on ne laisse pas le moteur Honeywell TPE-331 refroidir suffisamment avant de l'arrêter, l'huile qui demeure piégée dans les zones chaudes du moteur peut atteindre la température à laquelle elle se décompose et crée des dépôts de carbone (calamine).

    L'enquête n'a pas permis d'établir la durée des périodes de refroidissement antérieures pour l'aéronef en cause. Toutefois, l'analyse d'un échantillon aléatoire d'arrêts moteurs d'un aéronef semblable de l'entreprise a révélé que dans 50 % des cas, le moteur a été arrêté avant la fin de la période de refroidissement de 3 minutes.

    Dans l'événement à l'étude, l'étanchéité inadéquate entre le joint carbone et le joint rotatif ainsi que la pression négative à l'intérieur de la pompe de récupération ont probablement causé l'aspiration de gaz d'échappement chauds, ce qui a causé la surchauffe et la décoloration du joint air-huile arrière de la turbine. L'huile dans la pompe de récupération a fui par le joint air-huile arrière de la turbine, ce qui a causé encore plus de calaminage sur le joint carbone et une fuite d'huile à l'extérieur du moteur.

    Manuel de vol de l'aéronef et manuel de référence rapide

    Dans le QRH de Perimeter Aviation pour le type d'aéronef en cause dans l'événement à l'étude, on indique qu'il faut arrêter un moteur si la pression d'huile diminue sous 40 lb/po².

    Une pression d'huile moteur adéquate est nécessaire au bon fonctionnement du système de commande des hélices. Comme l'AFM n'indique pas d'arrêter le moteur en cas de faible pression d'huile, le fait de suivre la procédure d'urgence y figurant peut amener à laisser tourner un moteur dont la pression d'huile est basse. Si la pression d'huile descend au point d'atteindre une valeur critique, il y aura une réaction indésirable de l'hélice qui pourrait causer une perte de maîtrise de l'aéronef.

    Si les exploitants de l'aéronef SA227-AC Metro III se fient uniquement aux procédures d'urgence définies dans l'AFM, un moteur dont la pression d'huile est basse peut continuer d'être utilisé, risquant d'entraîner une perte de maîtrise de l'aéronef.

    Gestion des ressources de l'équipage

    L'équipage s'était familiarisé avec certains principes de gestion des ressources de l'équipage (CRM) pendant sa formation en vol. Toutefois, Perimeter Aviation n'offrait pas de formation officielle en CRM à ses pilotes assujettis aux sous-parties 703 et 704 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) au moment de l'événement à l'étude, et la réglementation ne l'exigeait pas. La formation en vol n'abordait pas la gestion des menaces et des erreurs (TEM), un élément de la CRM. Même s'ils ont reçu une formation limitée en CRM, les membres de l'équipage ont exercé de nombreuses compétences de CRM et ont démontré une connaissance des principes de CRM, dont la tenue d'exposés, l'utilisation de listes de vérifications, la résolution de problèmes et l'utilisation des ressources disponibles, y compris le contrôle des opérations de maintenance (COM).

    Même si l'équipage a mis en application de nombreux principes de CRM, si les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC ne leur offrent pas de formation initiale ou continue en CRM, leurs pilotes pourraient ne pas être prêts à éviter, à détecter et à atténuer des erreurs commises pendant les vols. Transports Canada a proposé de nouveaux règlements exigeant que les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du RAC fournissent de la formation en CRM et en PDM, lesquels entreront en vigueur en janvier 2019.

    Prise de décision du pilote et gestion des risques opérationnels

    L'équipage a été affecté à un vol de convoyage entre CZGI et l'aéroport de Thompson (CYTH), au Manitoba, à bord d'un aéronef ayant une fuite de liquide hydraulique connue et ayant fait l'objet de rapports de faible pression d'huile. Il a accepté cette affectation. La seule restriction pour ce vol était de maintenir le train d'atterrissage sorti, sauf en cas d'urgence. Pour gérer la sécurité du vol, le chef pilote adjoint a donné un exposé à l'équipage, de même que des exemples d'urgences et d'éventualités possibles.

    Quinze minutes après le décollage, l'équipage a constaté que la pression d'huile du moteur gauche avait diminué jusqu'à la bande jaune, mais que tous les autres paramètres de fonctionnement du moteur étaient normaux. L'équipage ne savait pas que de l'huile fuyait du moteur gauche et n'avait aucune information à sa disposition lui permettant de détecter cette fuite. Le personnel des opérations aériennes et de la maintenance savait qu'une fuite d'huile se manifeste sur les instruments par une indication de faible pression d'huile et de température d'huile croissante. L'équipage a communiqué avec le COM en vol, et il a été décidé que le moteur devrait être arrêté si la pression d'huile descendait sous la bande jaune et que la température d'huile dépassait la bande verte.

    En raison de la possible nécessité d'arrêter le moteur et de piloter l'aéronef avec un seul moteur, l'équipage de conduite a escamoté le train d'atterrissage pour minimiser la traînée. En outre, la perte possible de pression hydraulique en raison de la fuite préexistante entraînerait l'impossibilité d'utiliser le système de direction du train avant. L'équipage a donc décidé de laisser tourner le moteur gauche pour atténuer le risque de perte de la maîtrise directionnelle à l'atterrissage que pourrait causer un mouvement de lacet négatif en atterrissant avec un seul moteur.

    Après avoir consulté le COM, l'équipage a évalué les risques liés à un atterrissage avec un seul moteur et sans la pression hydraulique nécessaire au fonctionnement du système de direction du train avant, et a décidé de poursuivre le vol en laissant tourner les deux moteurs, même si ce n'était pas conforme aux procédures du QRH liées aux indications de faible pression d'huile.

    Enregistreurs de bord

    L'aéronef était doté d'un enregistreur de conversations de poste de pilotage. Il n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol, qui aurait offert de l'information technique aux enquêteurs, et la réglementation n'exigeait pas qu'il le soit. Si des enregistrements de données de vol, audio et vidéo ne sont pas disponibles dans le cadre d'une enquête, il pourrait être impossible de déterminer et de communiquer d’importantes lacunes de sécurité et ainsi de promouvoir la sécurité des transports.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Les indications de faible pression d'huile du moteur gauche survenues pendant le vol de l'événement à l'étude et le vol précédent ont probablement été causées par une fuite d'huile constante au-delà du joint air-huile arrière de la turbine.
    2. La perte de pression d'huile a entraîné la défaillance du système de commande de l'hélice à l'atterrissage et a déstabilisé l'aéronef.
    3. Après avoir consulté le personnel de maintenance, l'équipage a évalué les risques liés à un atterrissage avec un seul moteur et sans la pression hydraulique nécessaire au fonctionnement du système de direction du train avant, et a décidé de poursuivre le vol en laissant tourner les deux moteurs, même si ce n'était pas conforme aux procédures du manuel de référence rapide (QRH) liées aux indications de faible pression d'huile.
    4. Les dépôts de carbone qui s'étaient accumulés dans les plis du soufflet ont réduit la capacité du soufflet de prendre de l'expansion et de fournir une étanchéité parfaite avec le joint rotatif.

    Faits établis quant aux risques

    1. Si les exploitants assujettis aux sous-parties 703 et 704 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) ne leur offrent pas de formation initiale ou continue en gestion des ressources de l'équipage (CRM), leurs pilotes pourraient ne pas être prêts à éviter, à détecter et à atténuer les erreurs commises pendant les vols.
    2. Si les exploitants de l'aéronef SA227-AC Metro III se fient uniquement aux procédures d'urgence définies dans le manuel de vol de l'aéronef, le fonctionnement continu d'un moteur dont la pression d'huile est basse peut entraîner une perte de maîtrise de l'aéronef.
    3. Si on ne laisse pas un moteur refroidir suffisamment avant de l'arrêter, l'huile qui demeure piégée dans les zones chaudes du moteur peut atteindre la température à laquelle elle se décompose et crée des dépôts de carbone.
    4. Si des enregistrements de données de vol, audio et vidéo ne sont pas disponibles dans le cadre d'une enquête, il pourrait être impossible de déterminer et de communiquer d’importantes lacunes de sécurité et ainsi de promouvoir la sécurité des transports.

    Autres faits établis

    1. L'enquête n'a pas permis d'établir la durée des périodes de refroidissement antérieures pour l'aéronef en cause. Toutefois, l'analyse d'un échantillon aléatoire d'arrêts moteurs d'un aéronef semblable de l'entreprise a révélé que dans 50 % des cas, le moteur a été arrêté avant la fin de la période de refroidissement de 3 minutes.
    2. Même s'ils ont reçu une formation limitée en CRM, les membres de l'équipage ont exercé de nombreuses compétences de CRM et ont démontré une connaissance des principes de CRM.

    Mesures de sécurité

    Mesures de sécurité prises

    Bureau de la sécurité des transports du Canada

    Le 1er juin 2018, le BST a publié l'avis de sécurité aérienne A17C0132-D1-A1 pour inviter Transports Canada (TC) à revoir les procédures d'urgence concernant les indications de faible pression d'huile pour les aéronefs Fairchild SA227-AC Metro III. Au moment de la rédaction du présent rapport, TC n'avait pas répondu à cet avis.

    Perimeter Aviation

    Depuis l'événement à l'étude, Perimeter Aviation a mis en œuvre les mesures de sécurité suivantes :

    • Elle a installé des cartes mémoire de type Secure Digital (SD) pour stocker des données de vol, y compris les paramètres de vol et les paramètres moteur, à bord de tous les aéronefs dotés d'un système intégré d'instruments de vol Garmin 950.
    • Elle a mis en œuvre une formation en gestion des ressources de l'équipage pour tous ses équipages de conduite assujettis aux sous-parties 703 et 704 du Règlement de l'aviation canadien.
    • Elle a donné de la formation de sensibilisation sur les sujets suivants :
      • les effets d'une faible pression d'huile au cours d'opérations aériennes;
      • l'importance d'inspecter et d'examiner de très près la pompe de récupération arrière située dans la zone de la tuyère du moteur;
      • l'importance de laisser les moteurs refroidir pendant au moins 3 minutes avant de les arrêter.

    Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .