Envahissement et naufrage avec une perte de vie
d'un bateau de pêche commerciale sans nom
au large du port de Hnausa (Manitoba)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Vers 18 h 15, heure avancée du Centre, un bateau de pêche (barque) commerciale, qui pêchait au filet maillant alors que le vent soufflait de plus en plus fort, a été envahi par une grosse vague déferlante. Le bateau a perdu sa réserve de flottabilité et a coulé rapidement par l'arrière. Les deux hommes à bord ne portaient pas de gilet de sauvetage ni de vêtement de flottaison individuel, et il n'y en avait pas à bord. Un des deux hommes s'est noyé.
This report is also available in English.
Renseignements de base
Nom | Bateau sans nom (barque) |
---|---|
Numéro officiel | Sans permis ni immatriculation |
Port d'immatriculation | Aucun |
Nationalité | Canada |
Type | barque du lac Winnipeg |
Jauge bruteNote de bas de page 1 | environ 1,5 |
Longueur | 6,7 m |
Tirant d'eau | Avant : 8 cm Arrière : 16 cm |
Construction | Vers 1982 (approximation) |
Groupe propulseur | moteur hors-bord à essence Mercury de 100 hp (157 kg) |
Équipage | 2 personnes |
Passagers | aucun |
Propriétaire | Brad Benson, Winnipeg Beach (Manitoba) |
Description du navire
Le bateau avait été construit d'après un plan approuvé par Transports Canada. Plusieurs fabricants de la région ont utilisé ce plan. C'est la Gimli Boat Works de Gimli au ManitobaNote de bas de page 2 qui avait construit le bateau en aluminium. Cette entreprise estime que ses installations ont construit de 300 à 400 bateaux du même modèle. Le bateau avait une coque à bouchain vif et une élévation dans le bordé de côté ainsi qu'un évasement prononcé en direction de la partie avant. À l'avant, il était muni d'une plaque portant un tuyau vertical de 0,2 m appelé « corne », qui faisait saillie. Pour la pêche au filet maillant, on fait passer le filet maillant autour de la corne, on ramasse le poisson qui est pris dans le filet et on remet le filet à l'eau.
Un poste de commande se trouvait à environ 2,5 m de la partie arrière. Dans le puits arrière, près du moteur, se trouvait une longue tige munie d'une poignée (qui était brisée) qui était reliée à un robinet situé en contrebas, au niveau du pont. Sur le robinet, il y avait une seconde poignée pour fermer ou ouvrir le robinet. Quand le bateau circule, on peut ouvrir le robinet pour évacuer l'eau du bateau. Si le robinet reste ouvert quand le bateau ne se déplace pas, l'eau envahit la coque. Au début de l'enquête, on a signalé que le robinet était resté fermé du matin de l'accident jusqu'au moment de l'accident, mais des renseignements recueillis plus tard indiquent que le robinet a été ouvert pendant que le bateau se déplaçait entre les filets.
Le bateau accidenté n'était pas équipé de feux de navigation. Le Règlement sur les abordages exige que les bâtiments de cette taille et de ce type soient munis de ces feux quand ils naviguent la nuit (du coucher au lever du soleil) ou par visibilité réduite. Il n'y avait ni équipement de navigation ni équipement de radio à bord; cet équipement n'était pas obligatoire. Il n'y avait pas de radiobalise de localisation des sinistres à bord; cet équipement n'était pas obligatoire pour les embarcations de ce type.
Le bateau accidenté était une « barque du lac Winnipeg » dont la coque était d'un modèle ancien et qui n'avait pas été équipé, ni à l'origine ni en rattrapage, des réservoirs de flottaison optionnels ou des échantillonnages renforcés de franc-bord qui existent maintenant. L'industrie a perfectionné ce modèle de coque et propose maintenant deux modifications additionnelles destinées à atténuer la tendance du bateau à embarquer des paquets de mer; c'est pourquoi on a relevé l'hiloire entourant le puits placé devant le tableau arrière et on a accentué la tonture à l'avant à partir du milieu du bateau.
Déroulement du voyage
Le 23 octobre 1999, vers 6 h 45Note de bas de page 3, trois « barques du lac Winnipeg » partent du port de Hnausa (Manitoba) pour se rendre dans un lieu de pêche situé à environ 6,9 milles à l'est-nord-est du port. Les pêcheurs commencent à pêcher le brochet, le doré noir et la laquaiche au filet maillant. Au début de l'après-midi, un des bateaux de pêche rentre au port de Hnausa.
L'équipage du bateau en cause dans l'accident est constitué de deux pêcheurs non titulaires de licences. Le patron n'a pas beaucoup d'expérience et son assistant est un jeune novice. Le propriétaire des deux bateaux est titulaire d'une licence; il prend place avec son assistant à bord d'un autre bateau qui va accompagner le premier bateau. Avant le départ, le propriétaire a obtenu les prévisions météorologiques de la journée auprès d'un réseau d'information météo (dont le numéro de téléphone est fourni par les bureaux d'Environnement Canada à Winnipeg).
La pêche se déroule sans incident jusque vers la fin de l'après-midi. Les vagues deviennent alors plus grosses et le vent souffle plus fort, soit à plus de 20 noeuds en moyenne. À 18 h, les vagues atteignent de 1,3 à 1,6 m de hauteur. Des vagues déferlantes plus grosses frappent le bateau à l'occasion, mais cela n'empêche pas les deux hommes du bateau en cause dans l'accident de pêcher et ne les incite pas à craindre pour leur sécurité. Des caisses à poisson sont empilées au fond du bateau et il est difficile de voir la quantité d'eau qui s'accumule à l'arrière. Les pêcheurs travaillent à l'avant et profitent de chaque mouvement descendant du bateau sur l'eau pour rentrer le filet en le faisant glisser sur la corne. À cause du poids du filet, l'avant du bateau ne se relève pas comme il devrait chaque fois qu'une vague déferle. Vers 18 h 9, les pêcheurs pêchent toujours, même si le bateau embarque de plus en plus d'eau. Vers 18 h 15, une grosse vague s'abat sur l'avant du bateau, puis l'eau qui envahit l'arrière du bateau chaque fois que le bateau plonge entre les vagues fait que le bateau se remplit d'eau à l'arrière, presque jusqu'aux plats-bords. À ce moment-là, il y a de 12 à 14 caisses de poisson pleines à bord, soit la moitié de la charge permise, mais le patron est réticent à jeter une partie du chargement par-dessus bord pour alléger le bateau.
Le patron indique à son assistant de rester à l'avant, puis il se dirige vers l'arrière en enjambant les caisses à poisson, dans l'intention d'écoper. Après une trentaine de secondes, le patron demande à son assistant de tirer les caisses vers l'avant, mais celui-ci n'y arrive pas. Une autre vague déferlante s'abat sur la partie avant. La partie arrière du bateau est rapidement submergée, si bien que la partie avant se relève, et le bateau coule par l'arrière à peu près par 51° 55′ N, 96° 48′ W. Les deux pêcheurs passent par-dessus bord. La température de l'eau est de six degrés Celsius. Chaque homme s'accroche à un bidon d'essence de cinq gallons qui n'est pas plein.
Le propriétaire et son assistant se trouvent dans l'autre bateau, face au vent, à une distance de 250 à 300 m, et ils n'entendent pas les appels à l'aide des deux hommes qui sont tombés à l'eau.
Le patron et l'assistant du bateau naufragé portent un T-shirt et plusieurs pulls d'entraînement sous leurs cirés. Ils sont tous deux submergés par des vagues déferlantes successives et, chaque fois, la faible flottabilité des bidons d'essence les ramène lentement à la surface, juste assez longtemps pour qu'ils puissent prendre une respiration. Bien qu'il soit bon nageur, l'assistant disparaît au bout de cinq minutes. Le patron s'agrippe d'une main à la poignée du bidon d'essence et tous ses muscles se raidissent.
Environ 15 minutes plus tard, les occupants du second bateau constatent que le premier bateau a disparu; ils s'approchent de l'endroit où le bateau a été vu pour la dernière fois et ils repèrent le patron dans l'eau; il souffre d'hypothermie. Avec beaucoup de difficulté, ils hissent le patron à bord de leur bateau et le ramènent vers la rive à toute vitesse; le patron perd conscience.
Le bateau n'a pas d'équipement radio pour aviser les services d'urgence de leur arrivée prochaine à Hnausa. À leur arrivée, ils signalent l'accident à la Garde côtière canadienne (GCC), et l'homme souffrant d'hypothermie est conduit à l'hôpital de Gimli où il reçoit des soins.
Équipement de sauvetage à bord du bateau
Le propriétaire des bateaux croyait que le seul équipement de sauvetage qu'il était tenu d'avoir à bord était une écope, un couteau et une ancre. Certains des pêcheurs saisonniers interrogés dans le cadre de l'enquête ont indiqué qu'ils croyaient cela également. Ils ne connaissaient pas non plus les exigences minimales en matière d'équipement de sauvetage, ni les risques auxquels ils étaient exposés du fait de ne pas transporter d'équipement de sauvetage convenable. En vertu du Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche, ces bateaux doivent transporter un gilet de sauvetage approuvé pour chaque personne à bord, une bouée de sauvetage approuvée munie d'une amarre de 27 m, une boîte métallique étanche à l'eau contenant six feux rouges approuvés à allumage automatique ainsi qu'un seau d'incendie.
Bon nombre des « barques du lac Winnipeg » utilisées comme bateau de pêche que nous avons observées au cours de l'enquête ne transportaient pas l'équipement obligatoire de sauvetage et de sécurité.
Le Règlement sur les abordages exige que chaque navire de moins de 12 m de longueur dispose d'un appareil permettant de faire un signal sonore efficace. Un dispositif de signalisation sonore aurait pu être utilisé pour signaler la situation de détresse, mais il n'y en avait pas à bord du bateau qui a coulé.
Recherche et sauvetage
Aucun des bateaux ne possédait d'équipement radio (ce n'était pas obligatoire) pour communiquer avec la base de recherche et sauvetage de la GCC de Gimli (Manitoba). Un des deux bateaux aurait pu se servir d'une radio maritime pour lancer un Mayday et signaler la situation de détresse.
Un bateau plus petit à l'usage de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est en attente sur une remorque au détachement de Gimli, et est disponible pour différentes missions de la police. Toutefois, le personnel local de la GRC ne possède pas de formation officielle sur les techniques de recherche et sauvetage, sur la manoeuvre des bateaux par gros temps et sur la navigation à l'aide d'instruments éélectroniques. Il n'était pas non plus équipé pour mener des opérations de recherche et sauvetage. Ces opérations relèvent de la GCC.
La GCC et la GRC ont mené des recherches systématiques pendant les jours qui ont suivi l'accident dans l'espoir de retrouver le corps de la victime ainsi que le bateau qui a coulé, mais les recherches ont été infructueuses. La visibilité sous l'eau était inférieure à 0,3 m, et la présence de filets de pêche abandonnés rendait les conditions très dangereuses pour les plongeurs. Le corps de la victime a été retrouvé le 13 juillet 2000. La profondeur de l'eau dans les parages du lieu de l'accident est d'environ 15 m.
Expérience du personnel
Le patron avait conduit des petites embarcations motorisées pendant de nombreuses années avant de travailler dans l'industrie de la pêche. Il possédait un an et demi d'expérience dans le domaine de la pêche au filet maillant. Il comptait obtenir un permis de pêche auprès du ministère des Ressources naturelles du Manitoba, après avoir travaillé deux ans à titre d'assistant, conformément aux exigences. Il avait pris beaucoup de repos depuis quelques jours, en attendant l'amélioration des conditions météo, et il travaillait depuis environ 11 heures au moment de l'accident.
L'assistant était âgé de 17 ans. Il voulait tout apprendre de la pêche et profitait de chaque occasion pour visiter les ports de la région inférieure du lac Winnipeg. C'était sa première sortie de pêche. Même s'il souffrait d'asthme, il était très bon nageur et avait remporté des prix de natation. Il était frais et dispos au moment du départ et il travaillait depuis environ 11 heures au moment de l'accident.
Pêche au filet maillant
Chaque filet mesure quelque 100 m de longueur. On pose les filets en rangées de 6 à 8 filets, appelées « jeu de filets ». Les poissons qu'on récolte, habituellement du brochet ou de la laquaiche, sont placés dans des caisses qui pèsent de 37,3 à 48,5 kg quand elles sont pleines. On place les caisses en pile de trois que l'on dépose sur un espace plat aménagé au fond du bateau. On place les caisses à plat pour qu'elles s'emboîtent les unes dans les autres d'un plat-bord à l'autre et pour qu'elles restent en place quand le bateau navigue.
Pour la pêche au filet maillant, les bateaux sortent souvent deux par deux et chaque bateau garde le contact visuel avec l'autre. Cette façon de procéder est appelée « système de surveillance mutuelle ». Les pêcheurs qui utilisent le « système de surveillance mutuelle » se surveillent l'un l'autre régulièrement, selon les conditions météo.
Conditions météorologiques et état des eaux
Les prévisions émises à 3 h pour le jour de l'accident faisaient état d'un ciel couvert et de vents légers du sud-est, tournant au nord-ouest. Le vent n'a pas tourné au nord-ouest, il a continué de souffler du sud-sud-est, augmentant à 20 noeuds. Au moment de l'accident, le vent soufflait plus fort et par rafales; il atteignait en fait des vitesses de 25 à 30 noeuds. Comme le bassin du lac Winnipeg est relativement peu profond, les vagues se creusent rapidement, de façon directement proportionnelle à la force du vent. L'information recueillie par le BST sur la hauteur des vagues lors de l'accident fait état de creux variant entre 2 m et 2,5 m, avec des creux occasionnels de 3 m.
Aperçu de la réglementation
Transports Canada est chargé d'administrer l'application de la Loi sur la marine marchande du Canada et de ses règlements, dont le Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche. Transports Canada n'assure pas une présence locale suffisante pour avoir un impact chez les pêcheurs, et bon nombre de pêcheurs semblent ignorer les exigences du règlement relatif à l'équipement de sauvetage et de sécurité pour les bateaux.
Ce n'est pas facile d'obtenir des exemplaires du règlement sur place, mais les pêcheurs peuvent en obtenir en s'adressant au bureau de Transports Canada à Winnipeg ou en visitant le site Web de Transports Canada.
Le Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche exige que les bateaux dont la longueur est inférieure à 12,2 m et dont la jauge brute est de moins de 15 tonneaux et qui sont engagés dans des activités de pêche commerciale, aient à leur bord certains équipements de sauvetage et de lutte contre l'incendie, en fonction de la taille du bateau. Le règlement porte sur la plupart des bateaux affectés à la pêche commerciale sur le lac Winnipeg. Toutefois, la partie de la Loi sur la marine marchande du Canada qui s'applique aux petits bateaux de pêche dont la jauge brute est inférieure à 15 tonneaux exempte ces bateaux de l'obligation de passer une inspection annuelle.
Dans le passé, la GRC n'a pas été appelée à prendre des mesures d'application de la loi relativement aux exigences sur l'équipement de sauvetage et de sécurité de ces petits bateaux de pêche commerciale; elle n'a d'ailleurs pas sur place de personnel formé à cette fin. Toutefois, dès qu'elle en a l'occasion, la GRC encourage les exploitants et les propriétaires de petits bateaux de pêche commerciale à munir leurs bateaux de l'équipement de sauvetage et de sécurité approprié.
Le ministère des Ressources naturelles du Manitoba a délivré quelque 900 permis de pêche dont chacun est assorti d'un quota de pêche. Ces quotas sont répartis entre quelque 2 000 pêcheurs à temps plein et à temps partiel. Les agents d'application de la loi du ministère des Ressources naturelles du Manitoba n'ont pas le mandat de vérifier si les bateaux de pêche transportent l'équipement de sauvetage et de sécurité obligatoire quand ils mènent les inspections relatives aux quotas, mais ils ont le pouvoir de procéder à des contrôles de conformité aux termes du Règlement sur les petits bâtiments, dans les parcs provinciaux du Manitoba.
En avril 1999, les autorités régionales du Conseil consultatif maritime canadien ont tenu une réunion à Winnipeg. La réunion visait à promouvoir la sécurité auprès des personnes de l'industrie de la pêche commerciale de la région. Des représentants de Transports Canada et de la GCC ont assisté à la réunion, mais une seule personne de l'industrie de la pêche commerciale de la région s'est présentée.
Analyse
Équipement de sauvetage et questions relatives à la survie
Le bateau ne transportait aucun des équipements de sauvetage obligatoire.
Quand le patron et son assistant sont tombés à l'eau, ils n'ont pu compter que sur les bidons d'essence du bateau pour se maintenir à flot. Le patron a eu de la chance car son bidon d'essence assurait une flottabilité suffisante pour le maintenir à flot, surtout qu'il a été établi qu'il souffrait d'hypothermie quand il a été repêché.
Si le patron ou son assistant avait eu accès à un gilet de sauvetage approuvé, non seulement le gilet de sauvetage aurait assuré une flottabilité suffisante, mais la personne portant le gilet de sauvetage aurait pu se servir du sifflet attaché au gilet de sauvetage pour attirer l'attention des occupants du bateau qui les accompagnait. Les naufragés auraient également pu se servir d'une fusée lumineuse ou d'une radio portative pour attirer l'attention s'ils avaient eu cet équipement à leur disposition.
Système de surveillance mutuelle
Quand des pêcheurs utilisent le système de surveillance mutuelle, ce système peut être des plus utile si la surveillance est faite à des intervalles adaptés aux conditions du moment. Dans le cas qui nous occupe, il semble que l'autre bateau ne soit pas intervenu assez rapidement pour secourir les deux pêcheurs en difficulté et permettre de sauver l'un d'entre eux. Les pêcheurs n'avaient pas établi de marche à suivre pour le système de surveillance mutuelle. Le fait de travailler deux par deux et de garder le contact visuel présente des avantages évidents du point de vue de la sécurité, et il est fort probable que le système de surveillance mutuelle a déjà permis de sauver des vies. Selon toute vraisemblance, si le patron et son assistant avaient pêché seuls, le patron aurait succombé à l'hypothermie ou se serait noyé lui aussi. Le système de surveillance mutuelle assure fort probablement un plus grand niveau de sécurité.
Conscience de la situation
Au début de l'enquête, on a indiqué que le robinet était fermé, mais des informations recueillies par la suite révèlent que le robinet a été ouvert pendant que le bateau circulait, pour que l'effet venturi aide à drainer l'eau accumulée dans les fonds du bateau. Le robinet n'a pas été refermé pendant la rentrée des filets, c'est pourquoi l'arrière du bateau s'est rempli d'eau graduellement. Vu que les deux membres de l'équipage travaillaient à l'avant, ils n'ont pas pu voir l'eau qui montait à l'arrière à cause des caisses à poisson et, à plus forte raison, à cause des mouvements du bateau sur l'eau. En outre, le patron du bateau naufragé n'avait apparemment pas assez de connaissances techniques pour reconnaître les dangers liés au fait de continuer de pêcher pendant que le bateau embarquait de l'eau. L'équipage n'a pas vidé de caisses de poisson par-dessus bord pour alléger le bateau, alors que le bateau perdait sa réserve de flottabilité.
Vu que les conditions météo se détérioraient et que le propriétaire des bateaux (la seule personne expérimentée) se trouvait dans les parages, la prudence aurait voulu que ce dernier suspende les activités de pêche et fasse rentrer les deux bateaux au port. De 15 à 20 minutes se sont écoulées avant que le propriétaire et son assistant, qui pêchaient dans le deuxième bateau, se rendent compte que le premier bateau avait disparu. Ce manque de conscience de la situation a fait que les mesures de précaution rendues nécessaires à cause de la météo et des conditions de pêche n'ont pas été prises.
Auto-discipline __ Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche
La présence de Transports Canada n'était pas suffisante pour avoir un impact auprès des pêcheurs de la région, particulièrement en ce qui concerne la sensibilisation des personnes concernées à la nécessité d'équiper les bateaux de pêche de l'équipement de sauvetage et de sécurité obligatoire. Étant donné la représentation de Transports Canada dans la région, il ressort que l'application de la réglementation dépend essentiellement de l'auto-discipline des personnes concernées. Cependant, ce n'est pas facile de se procurer sur place des exemplaires du règlement, que ce soit auprès de Transports Canada ou par l'intermédiaire d'organisations locales de pêcheurs. De plus, il semble qu'il n'y ait pas à Transports Canada un mécanisme adéquat de contrôle de la conformité. Il s'ensuit que de nombreux propriétaires de bateaux ne sont pas au courant des exigences minimales relatives à l'équipement de sécurité.
La GRC peut veiller à l'application des règlements pris aux termes de la Loi sur la marine marchande du Canada, mais il faut au préalable que le ministre des Transports invite la GRC à s'en charger. La Sécurité maritime de Transports Canada n'avait pas entrepris de démarches officielles auprès du détachement de Gimli de la GRC pour lui demander d'appliquer les articles de la loi qui touchent les bateaux de pêche commerciale.
Chargement du bateau et envahissement
Les pêcheurs en cause dans le présent accident n'avaient pas les connaissances ni l'expérience nécessaires pour mener l'opération en toute sécurité et ils ont continué de charger le bateau alors que la météo se détériorait, jusqu'à ce que le bateau soit envahi par l'eau.
Perte de flottabilité
À cause des caisses de poisson qui les empêchaient de voir vers l'arrière, les membres de l'équipage qui travaillaient à l'avant près de la corne n'ont pas remarqué la quantité d'eau qui s'était accumulée à l'arrière parce le robinet était resté ouvert et que le bateau embarquait des paquets de mer. Quand la deuxième grosse vague s'est abattue sur la partie arrière, l'eau s'est écoulée vers l'arrière du bateau et son poids a accentué l'assiette positive du bateau, ce qui a réduit considérablement la réserve de flottabilité, au point que le bateau s'est rempli d'eau et a rapidement coulé par l'arrière.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- De l'eau s'est infiltrée dans le bateau par le robinet ouvert, et le bateau a pris une assiette positive; il a ensuite été envahi par deux grosses vagues déferlantes et a coulé rapidement par l'arrière.
- Les deux pêcheurs travaillaient à l'avant, et les caisses de poisson entre eux et l'arrière du bateau les empêchaient de voir la quantité d'eau qui s'accumulait à l'arrière.
- Les deux pêcheurs ne portaient pas de gilet de sauvetage et il n'y avait pas d'équipement de sauvetage à bord.
- Après être tombés à l'eau, les pêcheurs en détresse n'avaient aucun moyen (radio, appareils mécanique ou pyrotechnique) pour demander de l'aide, et leurs appels à l'aide n'ont pas été entendus par les occupants du bateau qui les accompagnait.
- L'assistant ne portait pas de gilet de sauvetage et il s'est noyé.
Faits établis quant aux risques
- Bien que plusieurs centaines de petits bateaux de pêche commerciale soient exploités sur le lac Winnipeg et, en dépit des patrouilles conjointes de sécurité nautique de la Gendarmerie royale du Canada et de la Garde côtière canadienne, peu de choses ont été faites ces dernières années pour appliquer les dispositions du Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche qui portent sur l'équipement de sauvetage.
- Les pêcheurs et les propriétaires de bateaux de la région sont généralement peu sensibilisés aux questions de sécurité, et peu d'entre eux se sont adressés à Transports Canada, que ce soit pour obtenir de l'information ou pour faire faire une inspection ou une vérification de l'équipement de sécurité.
- La diffusion et la disponibilité de l'information, que ce soit sous la forme de documentation ou de dépliants sur les exigences relatives à l'équipement de sauvetage, sont très restreintes dans la région du lac Winnipeg. Il n'y a pas de critère ni de documentation sur les méthodes sûres de chargement à la disposition des gens.
Autres faits établis
- Le patron du bateau s'est agrippé à un bidon d'essence qui n'était pas plein et il a eu la vie sauve.
Mesures de sécurité
Mesures prises par Transports Canada
On a réorganisé le service de la Sécurité maritime de Transports Canada, région des Prairies et du Nord, ce qui a entraîné une augmentation du nombre d'employés. Vu l'étendue de la région et le petit nombre d'inspecteurs, on a décidé de regrouper les activités liées aux petits bateaux de pêche (jaugeant moins de 15 tonneaux) avec les activités liées aux autres petits bateaux de pêche commerciale dont la taille est inférieure à celle des bateaux qui doivent être inspectés annuellement. Les inspecteurs visiteront les communautés qui exploitent de petits bateaux de pêche commerciale, ils informeront les exploitants des exigences de la réglementation et ils leur fourniront de l'information sur la sécurité. La région sera davantage en mesure de mettre en oeuvre des programmes de surveillance et d'inspection et pourra mettre en oeuvre un programme intégré, comprenant une stratégie de communication, qui visera à transmettre le message voulu aux exploitants de petits bateaux de pêche commerciale dans la région.
Mesures prises par le propriétaire
L'information recueillie indique que les bateaux du propriétaire transportent maintenant de l'équipement de sécurité, notamment des pompes d'assèchement, une radio maritime et des gilets de flottaison gonflables.
Mesures prises par la province du Manitoba
La section des pêches du ministère de la Conservation du Manitoba collabore avec la Sécurité maritime de Transports Canada en donnant accès à l'information contenue dans ses dossiers, pour permettre à Transports Canada de rejoindre plus facilement les pêcheurs de la région et d'assister et de participer aux réunions sur les pêches qui sont organisées par la province. On envisage aussi d'autres initiatives destinées à réduire le nombre d'accidents de bateau de pêche et à en atténuer les conséquences.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .
Annexes