Rapport d'enquête ferroviaire R96D0018

Collision
Canadien National
Point milliaire 62,3, subdivision Joliette
Charette (Quèbec)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Vers 15 h 23, heure normale de l'Est (HNE), le train no M-369-21-30 (train 369) du Canadien National (CN) est entré en collision avec le train no A-421-21-31 (train 421) au point milliaire 62,3 de la subdivision Joliette du CN, à Charette (Québec). Personne n'a été blessé.

    This report is also available in English.

    Renseignements de base

    Le train 369 roule vers le sud à destination de Montréal (Québec). Vers 15 h 18 HNE, aux environs du point milliaire 55,0, l'équipe reçoit la feuille de libération no 1129, qui l'autorise à circuler de l'aiguillage sud de Charette (point milliaire 62,32) à Saint-Cuthbert (point milliaire 88,2) avec les restrictions suivantes : ne pas quitter Charette avant l'arrivée du train 421 à Charette; se protéger contre le contremaître d'entretien de la voie entre Charette et le point milliaire 66; à Charette, l'aiguillage sud est peut-être dans sa position renversée. Après avoir reçu la feuille de libération no 1129, le chef de train appelle le contremaître d'entretien de la voie pour lui demander s'il peut avancer jusqu'au point milliaire 66,0. Le contremaître indique que la voie est libre jusqu'au point milliaire 66,0.

    À l'approche de l'aiguillage nord de la voie d'évitement de Charette situé au point milliaire 61,0, le mécanicien serre le frein indépendant pour réduire la vitesse du train. Après avoir franchi l'aiguillage nord de la voie d'évitement et en franchissant le passage à niveau public situé au point milliaire 61,99, l'équipe voit les phares avant du train 421 qui s'engage en sens opposé sur la voie d'évitement par l'aiguillage sud, à quelque 2 000 pieds devant elle. Le mécanicien serre les freins de service à fond, puis les freins d'urgence, mais ne réussit pas à arrêter le train avant qu'il ne heurte le 21e wagon du train 421 à environ 9 mi/h. La locomotive de tête du train 369, ainsi qu'un wagon plat et deux wagons couverts du train 421, ont subi des dommages considérables, tandis que deux autres wagons couverts ont été mis à la ferraille. Les deux trains comprenaient des wagons de résidus de marchandises dangereuses, mais ces derniers n'étaient pas directement en cause dans la collision.

    Le train 369 se composait de 2 locomotives, de 60 wagons chargés et de 6 wagons de résidus. Il mesurait environ 3 980 pieds de long et pesait quelque 6 770 tonnes.

    Le train 421, qui roulait vers le nord, se composait de 2 locomotives, de 8 wagons chargés, de 28 wagons vides et de 3 wagons de résidus. Il mesurait environ 2 200 pieds de long et pesait environ 1 830 tonnes. Il s'engageait sur la voie d'évitement sous le régime de la feuille de libération no 1114 transmise à 14 h 39 HNE.

    Dans le secteur de la collision, la subdivision est une voie principale simple où la déclivité est faible ou nulle. La voie d'évitement de Charette s'étend entre les points milliaires 61,0 et 62,32. La vitesse maximale autorisée tombe de 50 mi/h à 35 mi/h au point milliaire 62,0. Dans ce secteur, le mouvement des trains est régi par le système de régulation de l'occupation de la voie (ROV), est autorisé par le Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF), et est surveillé par un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) posté à Montréal.

    L'équipe du train 369 se composait d'un mécanicien et d'un chef de train. Le train 421 était aussi exploité par une équipe de deux employés : un mécanicien et un chef de train. Les membres des deux équipes connaissaient bien la subdivision; ils répondaient aux exigences en matière de repos et de condition physique et répondaient aux exigences de leurs postes respectifs.

    Les données du consignateur d'événements du train 369 confirment la chaîne des événements décrite par l'équipe. D'après les calculs, le frein indépendant a été serré juste au sud du point milliaire 61,0 (aiguillage nord de la voie d'évitement de Charette) pendant que le train roulait à 41 mi/h. Les freins automatiques de service ont été serrés à fond 1 minute et 39 secondes plus tard, tandis que le train roulait à un peu plus de 21 mi/h, et les freins d'urgence ont été serrés 32 secondes plus tard. La vitesse du train était tombée à 9 mi/h au moment de l'impact.

    L'utilisation du frein indépendant à des vitesses supérieures à 25 mi/h ou sur des distances de plus d'un demi-mille peut endommager les locomotives et causer un déraillement avec mise en portefeuille. Le mécanicien a serré le frein indépendant parce qu'il y avait un détecteur de boîtes chaudes et de pièces traînantes au point milliaire 60,0 et qu'il savait par expérience qu'un tel freinage était approprié et suffisant pour immobiliser le train avant le point milliaire 62,32.

    La température était de moins 12 degrés Celsius. Le ciel était clair et les vents étaient calmes.

    Analyse

    Le train 421 s'est engagé en direction nord sur la voie d'évitement de Charette conformément à sa feuille de libération. La méthode d'exploitation de ce train n'a joué aucun rôle dans l'accident.

    La décision prise par l'équipe du train 369 de serrer le frein indépendant au moment où le train approchait de l'aiguillage sud de la voie d'évitement était incorrecte. L'effort de freinage n'a pas été suffisant pour immobiliser le train, et les freins du train n'étaient pas réglés et armés lorsqu'il est devenu évident qu'il fallait augmenter l'effort de freinage.

    Il convient de signaler que le détecteur de boîtes chaudes et de pièces traînantes se trouve au point milliaire 60,0 et que les membres de l'équipe s'inquiétaient que l'alarme se déclenche s'ils utilisaient les freins automatiques à cet endroit. Les détecteurs de boîtes chaudes et de pièces traînantes sont conçus pour qu'une différence de température entre les fusées de chaque essieu déclenche l'alarme, mais le fait de freiner à l'emplacement d'un détecteur de boîtes chaudes et de pièces traînantes peut déclencher l'alarme, et le fait effectivement, ce qui oblige l'équipe du train à arrêter et à inspecter son train. Étant donné qu'il y a un point de rencontre pour les trains à cet endroit et qu'une limitation de vitesse au point milliaire 62,0 oblige les trains en direction sud à serrer les freins, il aurait peut-être été plus approprié de placer le détecteur de boîtes chaudes et de pièces traînantes à un endroit où l'alarme ne se déclencherait pas si le train est exploité normalement.

    Il n'y a pas de raison de croire que l'équipe du train 369 a oublié momentanément qu'elle allait devoir arrêter au point milliaire 62,32. Si elle avait eu l'intention de traverser le secteur à la vitesse maximale prescrite de 35 mi/h (au sud du point milliaire 62), elle n'aurait pas eu de raison de ralentir à un peu plus de 21 mi/h aux environs du point milliaire 61,99.

    Conclusions

    1. Le train 421 était exploité conformément à la feuille de libération.
    2. Le mécanicien du train 369 a cru à tort qu'il pouvait arrêter avant le point milliaire 62,32 grâce au frein indépendant seulement.
    3. Les freins du train n'étaient pas réglés et armés à l'approche du point de rencontre, ce qui réduisait l'efficacité de freinage.
    4. Le fait qu'il soit possible qu'un freinage normal puisse déclencher l'alarme du détecteur de boîtes chaudes et de pièces traînantes situé au point milliaire 60,0 a peut-être une influence néfaste sur les décisions des équipes des trains qui roulent en direction sud.