Déraillement dans un triage
de la manoeuvre YATS-02-17 du triage Symington
exploitée par le Canadien National
au point milliaire 145,20 de la subdivision Sprague
à Winnipeg (Manitoba)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 17 février 2004, la manoeuvre YATS-02-17 du Canadien National effectuait des manoeuvres de triage au triage Symington, à Winnipeg (Manitoba). Vers 11 h 50, heure normale du Centre, 17 plates-formes intermodales porte-conteneurs ont déraillé à l'aiguillage W4RE, à l'extrémité est des voies de réception ouest (point milliaire 145,20 de la subdivision Sprague). La voie ferrée a été endommagée sur une distance de quelque 1600 pieds. Personne n'a été blessé, et aucune marchandise dangereuse n'a été en cause.
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Renseignements de base
L'accident
Le 17 février 2004, la manoeuvre YATS-02-17 (le train) du Canadien National (CN) effectue des manoeuvres de triage au triage Symington, à Winnipeg (Manitoba). Ce triage est l'un des trois faisceaux majeurs de classement que le CN exploite actuellement au Canada. Entre 11 h et 12 h, heure normale du CentreNote de bas de page 1, une équipe de triage composée de deux chefs de train est affectée à la formation d'un train et se sert de la loco-commande BeltpackNote de bas de page 2 pour s'acquitter de cette tâche. Un chef de train est posté dans la locomotive de tête pour assurer la protection du mouvement roulant vers l'est. Le second chef de train (l'opérateur de la loco-commande) dirige le mouvement à l'aide de la loco-commande et effectue d'autres travaux d'aiguillage.
La compagnie a mis un véhicule et un conducteur (chauffeur) à la disposition de l'équipe de triage afin de faciliter le triage. Au triage Symington, le CN met couramment des véhicules à la disposition des équipes pendant les manoeuvres de triage lorsqu'il faut déplacer le matériel roulant sur de grandes distances. Il n'est pas inhabituel que l'opérateur de la loco-commande dirige le mouvement à partir du siège avant d'un véhicule. Lors de l'événement, le chef de train se déplaçait à bord d'un véhicule conduit par un chauffeur, et il dirigeait le mouvement à l'aide de la loco-commande à partir du siège du passager avant de ce véhicule.
L'équipe se fait remettre par le poste de commande le contrôle local des aiguillages à commande électriqueNote de bas de page 3. Ces aiguillages sont ceux qui contrôlent l'extrémité est du faisceau de voies de réception ouest (WR). La locomotive s'attelle aux wagons placés sur la voie WR04 et les tire en direction est vers la voie de manoeuvre. Le véhicule suit le mouvement pendant qu'il sort de la voie WR04 et, à ce moment, l'opérateur de la loco-commande constate que la voie adjacente (WI03) est libre. Il fait faire un arrêt contrôlé au mouvement sur la voie de tiroir, un peu à l'est de l'aiguillage à commande électrique WR4E (voir la photo 1).
Le mouvement étant arrêté, le véhicule roule en direction est le long de la route d'accès nord, puis tourne vers l'ouest avant de s'arrêter le long de l'aiguillage WR4E. L'opérateur de la loco-commande descend du véhicule et passe devant celui-ci pour se rendre à l'aiguillage WR4E. Il appuie sur le bouton placé sur le côté de l'appareil de manoeuvre de l'aiguillage à commande électrique, afin d'orienter l'aiguillage pour la voie WI03. L'opérateur de la loco-commande observe les aiguilles pendant qu'elles s'orientent vers la voie à suivre et croit voir un voyant vert sur la cible d'aiguillage. L'opérateur de la loco-commande revient au véhicule, attend un peu, puis se fait conduire en direction ouest le long de la voie WI03, précédant le mouvement d'environ 400 pieds (voir la figure 1).
L'opérateur de la loco-commande active la marche arrière de la loco-commande, commence à faire rouler le mouvement en direction ouest et l'engage sur la voie WI03. Le bogie avant du wagon de tête, WC 36137, en l'occurrence un wagon intermodal chargé formé de plates-formes articulées à fond plat, passe sans encombre l'aiguillage à commande électrique WR4E et s'engage sur l'itinéraire souhaité. Toutefois, le bogie arrière du même wagon et les wagons suivants s'engagent sur l'itinéraire dévié, soit la voie WR04, et commencent à dérailler. L'opérateur de la loco-commande, se trouvant à une bonne distance à l'avant du mouvement, dans le véhicule conduit par le chauffeur, et tournant le dos au mouvement, ne s'aperçoit pas que les wagons sont en train de dérailler. Le mouvement continue d'accélérer jusqu'à atteindre une vitesse maximale de 8 mi/h. Un employé du CN constate alors le déraillement et en avise le poste de commande. Le poste de commande ordonne à l'opérateur de la loco-commande d'immobiliser le mouvement, et celui-ci commande un arrêt contrôlé du train. Neuf wagons intermodaux, soit un total de 17 plates-formes articulées, ont déraillé. Personne n'est blessé, et aucune marchandise dangereuse n'est en cause.
Renseignements consignés
La chronologie ci-après a été reconstituée à partir des registres de l'aiguillage WR4E, des données téléchargées du consignateur d'événements de la loco-commande et des observations visuelles sur les lieux. Les heures sont approximatives et sont arrondies à la minute la plus près.
- 11 h 21 - L'aiguilleur place l'extrémité est des voies de réception ouest en mode de commande locale. L'aiguillage WR4E est en position normale, orienté pour la voie WI03. Le voyant vert de la cible d'aiguillage est allumé, indiquant que l'aiguillage est en correspondance et est verrouillé pour cet itinéraire.
- 11 h 24 - On active à la main l'aiguillage WR4E en utilisant le bouton-poussoir pour l'orienter en position renversée, pour la voie WR04. Le voyant jaune de la cible d'aiguillage est allumé, indiquant que l'aiguillage est en correspondance et est verrouillé pour cet itinéraire.
- 11 h 41 - Un mouvement part de la voie WR04 et roule en direction est. Il atteint une vitesse maximale de 15 mi/h.
- 11 h 46 - Le mouvement s'arrête un peu à l'est de l'aiguillage WR4E.
- 11 h 48 - On actionne à la main l'aiguillage WR4E en utilisant le bouton-poussoir pour l'orienter pour la voie WI03 (voir la photo 2). Les voyants de la cible d'aiguillage ne s'allument pas, ce qui indique que l'aiguillage ne s'est pas verrouillé et qu'il est à mi-chemin entre deux positions.
- 11 h 49 - Le mouvement commence à pousser les wagons en direction ouest en passant sur l'aiguillage WR4E.
- 11 h 50 - Après que le bogie avant du wagon de tête a dépassé les aiguilles, l'aiguillage WR4E revient en position renversée et s'oriente et se verrouille pour la voie WR04. Le voyant jaune de la cible d'aiguillage s'allume, indiquant que l'aiguillage est en correspondance et est verrouillé pour cet itinéraire.
- 11 h 54 - On immobilise le mouvement de façon contrôlée après que celui-ci a atteint une vitesse maximale de 8 mi/h et a parcouru environ 1600 pieds.
Examen sur place
Le rail nord de la voie WR04 s'était renversé. Le rail sud de la voie WR04 était incliné à un angle d'environ 45 degrés. Les dommages subis par les deux rails de la voie allaient de l'endroit où le bogie arrière du wagon de tête s'est arrêté, jusqu'au coeur de croisement de l'aiguillage WR4E. La voie WR04 a été endommagée sur une distance de quelque 1600 pieds. On n'a pas observé de dommages sur la voie WI03. Il n'y avait pas sur la voie de dommages antérieurs au déraillement qui auraient pu contribuer à l'accident.
Le bogie avant du wagon de tête, WC 36137, un wagon intermodal isolé, avait roulé sur la voie WI03. Le bogie arrière s'est engagé sur la voie WR04, ce qui fait que le wagon WC 36137 chevauchait les deux voies à un angle d'environ 45 degrés. Les 16 wagons intermodaux à plates-formes articulées qui suivaient le wagon WC 36137 ont déraillé sur la voie WR04. Les caisses de tous les wagons sont restées à la verticale et sont restées attelées ensemble. Les roues qui avaient déraillé du côté nord reposaient sur les traverses ou sur l'âme du rail renversé. Les roues sud des wagons reposaient en majorité sur l'âme du rail sud incliné. L'inspection des wagons déraillés a permis de déterminer qu'ils n'étaient affectés d'aucun défaut mécanique préexistant qui aurait pu contribuer à l'accident.
Renseignements sur la manoeuvre, sur l'équipe et sur les conditions météorologiques
La manoeuvre était composée de 2 locomotives et de 29 plates-formes, elle mesurait environ 1800 pieds et pesait quelque 1400 tonnes. La vitesse maximale autorisée sur les voies de triage est de 15 mi/h.
Les membres de l'équipe de triage étaient deux chefs de train qui avaient suivi la formation sur l'emploi de la loco-commande. Ils répondaient aux exigences de leurs postes, connaissaient les opérations de triage et satisfaisaient aux exigences en matière de repos et de condition physique. L'opérateur de la loco-commande avait suivi la formation sur l'emploi de la loco-commande en septembre 1995, et il s'en était servi continuellement depuis lors. L'opérateur n'avait suivi aucune formation officielle subséquente sur l'emploi de la loco-commande, et il n'était d'ailleurs pas tenu d'en suivre une en vertu de la réglementation en vigueur. Toutefois, le CN fait un contrôle périodique du rendement des employés qui se servent de la loco-commande.
Au moment du déraillement, il faisait -8 °C, une légère brise soufflait et le ciel était couvert.
Particularités de la voie
Dans le secteur du déraillement, la structure de la voie était faite de rails éclissés de 100 livres qui ont été fabriqués entre 1953 et 1979. Les rails ont été posés en sections de 30 à 39 pieds sur des selles de rail de 11 pouces, et ils étaient fixés à chaque traverse par trois crampons. Les traverses étaient des traverses de bois mou no 1 et no 2, espacées d'environ 21 pouces les unes des autres. Le ballast était fait de pierre concassée. Un branchement à gauche no 10, muni d'aiguilles Sampson, permettait d'accéder à la voie WR04. Le branchement et la voie avaient été inspectés conformément aux exigences de la compagnie et à celles de la réglementation. Il a été déterminé que tous les éléments de la voie étaient en bon état.
Aiguillage à commande électrique WR4E
L'aiguillage à commande électrique WR4E actionnait les aiguilles du branchement de la voie WR04. L'aiguillage était un appareil de commande électrique d'aiguillage Alstom GRS de modèle 6, qui était muni d'une tringle de manoeuvre externe mais qui n'avait pas de dispositif de remise à l'état initial à mi-course. La cible de l'appareil de manoeuvre d'aiguillage était munie de voyants bleu, jaune et vert qui indiquent la position de l'aiguillage aux trains qui approchent et qui contrôlent l'accès à la voie WR04. Il n'y avait pas de chauffage dans le boîtier mécanique qui renfermait le moteur et les circuits électriques nécessaires au fonctionnement de l'aiguillage. L'aiguillage était bien entretenu et semblait être en bon état. La vérification des contacts et des connexions du circuit d'amortissement n'a révélé aucune anomalie.
L'appareil de commande d'aiguillage renferme un dispositif électrique d'amortissement dynamique qui ralentit le déplacement de l'aiguille. Quand le dispositif est actionné, le moteur électrique génère un courant à la fin de chaque course, de façon à ralentir et arrêter la rotation de l'armature. Si ce n'était de ce dispositif, l'aiguille se déplacerait si rapidement qu'elle risquerait de rebondir sur la contre-aiguille et de ne pas se verrouiller à la position voulue, la pointe se retrouvant ainsi à mi-course. Périodiquement, ces appareils de commande d'aiguillage ont été affectés par une perte d'amortissement dynamique due à une résistance électrique causée par la condensation, le givre ou l'accumulation de carbone sur les contacts des circuits.
Essais des aiguillages à commande électrique
Après le déraillement, et une autre fois le 16 avril 2004, le personnel du service de la signalisation et des communications du CN a soumis l'aiguillage à commande électrique WR4E à des essais consistant à simuler une perte d'amortissement dynamique. Au cours de la simulation, on a ouvert le boîtier mécanique et on a placé un bout de papier entre les contacts des circuits. Puis, on a actionné l'aiguillage de façon à l'orienter pour la voie WI03. On a vu les aiguilles se déplacer rapidement, entrer en contact avec la contre-aiguille comme prévu, puis rebondir et revenir en arrière, restant à mi-course. Quand cela s'est produit, aucun des voyants de la cible d'aiguillage ne s'est allumé.
À l'aide d'une pince à riper, on a déplacé à la main les aiguilles pour les orienter en position renversée et les verrouiller à cette position. Une fois l'aiguillage en correspondance et verrouillé pour la voie WR04, le voyant jaune de la cible d'aiguillage s'est allumé.
Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada
Tous les mouvements contrôlés au moyen de la loco-commande doivent se faire conformément au Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF), aux Instructions générales d'exploitation (IGE) et aux bulletins d'exploitation de la compagnie.
La règle 104 du REF régit l'emploi des aiguillages à manoeuvre manuelle. Cette règle s'applique aussi quand on manoeuvre à la main un aiguillage à manoeuvre électrique ou un aiguillage de commande locale. Le paragraphe f) de la règle 104 se lit comme il suit : « Après avoir manoeuvré un aiguillage, il faut en examiner les aiguilles et observer la cible, le réflecteur ou le feu, s'il y en a un, pour s'assurer que l'aiguillage est bien orienté. » L'alinéa k) (iii) de la règle 104 du REF dit que « Un mouvement peut obstruer une voie à laquelle on a accès par un aiguillage à manoeuvre manuelle pourvu que l'aiguillage soit correctement orienté avant que le mouvement le franchisse. » Dans le manuel d'exploitation du CN concernant le terminus de Winnipeg, daté du 1er décembre 2000, on lit à la section 6.1.4 que, quand un aiguillage est muni de voyants lumineux dont aucun ne s'allume quand l'aiguillage est en mode de commande locale, on doit considérer que l'aiguillage en question est défectueux et s'abstenir de faire passer des mouvements par cet aiguillage.
Dans le triage Symington, tous les mouvements de trains et de locomotives sont régis par la règle 105 du REF. Cette règle précise que : « Sous réserve de l'indication des signaux, les trains ou les locomotives qui utilisent une voie autre que la voie principale doivent circuler à vitesse réduite, prêts à s'arrêter avant le drapeau ou le feu rouges prescrits à la règle 40.1. » L'article a) de la règle 105 indique que les employés doivent faire preuve de discernement pour pouvoir arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité d'un véhicule d'entretien.
La règle 115 du REF concerne la pousse d'un matériel roulant. Le paragraphe a) de la règle 115 dit que : « Lorsqu'un matériel roulant est poussé par une locomotive, un membre de l'équipe doit être posté sur le véhicule de tête ou au sol, de façon à pouvoir observer la voie à utiliser et donner les signaux ou les instructions nécessaires pour diriger le mouvement. » Une exception visant le paragraphe a) se lit comme il suit : « Un membre de l'équipe n'a pas besoin de se poster de la sorte lorsqu'il est constaté ou confirmé que la portion de voie à utiliser est libre. » Le CN ajoute à la règle 115 une instruction spéciale [paragraphe c)], dans laquelle il précise l'application pratique de cette exception :
Constaté ou confirmé que la voie est libre - L'expression « lorsqu'il est constaté ou confirmé » désigne le fait d'observer la portion de voie à utiliser et de s'assurer qu'elle est (et restera) libre de matériel et qu'elle offre assez de place pour accueillir le matériel qu'on s'apprête à y pousser. Cette observation de la voie doit être faite par un membre de l'équipe, le superviseur du triage ou une autre personne qualifiée disposant d'un contact radio avec la personne chargée de diriger le mouvement. S'il a été constaté que la voie est libre et qu'aucun autre mouvement ne peut accéder à la voie en question, il est alors « confirmé » que la portion de voie à utiliser est libre. NOTA : Quand il peut être déterminé qu'aucun autre mouvement n'est prévu ou n'est en cours de réalisation sur la ou les voie(s) à utiliser, alors les prescriptions de la règle sont respectées (et il est donc « confirmé » que la voie est libre continuellement).
Protection des mouvements
Aux États-Unis, la Federal Railroad Administration (FRA) a déterminé que l'incapacité des équipes d'assurer une protection adéquate des mouvements était un facteur contributif courant lors d'accidents ferroviairesNote de bas de page 4. Les statistiques du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) révèlent une tendance similaire au Canada. Il a été déterminé que 36 % des 896 déraillements et collisions survenus dans un triage qui ont été signalés de 1999 à 2003 avaient trait à un défaut d'assurer la protection du mouvement.
On a considéré qu'une protection inadéquate du mouvement, résultant de l'application de l'exception à la règle 115 du REF, avait été un facteur contributif des accidents récents suivants :
- Le 9 décembre 2003, le train C-56-09 du Chemin de fer Canadien Pacifique procédait à des manoeuvres de triage à Carseland (Alberta). Pendant un mouvement en marche arrière, le train est entré en collision avec un locotracteur et un wagon-citerne chargé d'ammoniac anhydre (code universel des marchandises dangereuses UN 1005).
- Le 5 avril 2004, pendant qu'il faisait marche arrière pour entrer dans un embranchement, à Emerson (Manitoba) afin de laisser passer un train qui approchait, le train L-533-41-05 du CN a poussé les wagons de queue sur le dérailleur de l'embranchement, causant le déraillement de cinq wagons.
- Le 22 mai 2004, la manoeuvre de triage 0800 du CN, dirigée à distance par une personne munie d'une loco-commande, faisait marche arrière dans le triage de Sarnia (Ontario). Les deux wagons de tête du mouvement sont entrés en collision avec le wagon-citerne PPRX 34051, lequel était chargé de gaz de pétrole liquéfié (UN 1075) et obstruait la voie.
- Le 19 juin 2004, la manoeuvre de triage 1400 du CN, dirigée à distance par une personne munie d'une loco-commande, sortait de la voie CO-35 pour aller prendre des wagons sur la voie CO-33 dans le triage Symington, à Winnipeg (Manitoba). Ce faisant, le mouvement est entré en collision avec le wagon-trémie couvert CN 379013, qui obstruait la voie de raccordement.
Manoeuvres dirigées à l'aide de la loco-commande
La loco-commande est un appareil permettant de commander les locomotives à distance. Elle a été approuvée par Transports Canada pour les manoeuvres de triage et de triage à butte et a été introduite au Canada à la fin des années 1980. Depuis son introduction, elle est devenue le moyen dont on se sert le plus souvent pour contrôler des locomotives et des trains pendant le triage. Au triage Symington, on utilise la loco-commande pour diriger environ 80 % des mouvements de triage. Chaque jour, on utilise la loco-commande pour faire le triage à butte de 1500 à 1800 wagons en moyenne, et pour former de 20 à 22 trains en moyenne.
Au Canada, l'emploi de la loco-commande est confié aux chefs de train. En 1991, le Bureau d'arbitrage et de médiation des chemins de fer du Canada a déterminé que les chefs de train devaient être les opérateurs désignés des loco-commandes. Les manoeuvres de triage dirigées à l'aide de la loco-commande font normalement appel à deux chefs de train, dont chacun est posté à chaque bout du mouvement. Quand on « lance et attrape » les wagons, la commande du mouvement peut être transférée d'un opérateur de loco-commande à l'autre. D'autres fois, comme lors de cet événement, un opérateur de loco-commande s'occupe de la manoeuvre tandis que le second chef de train assure la protection du mouvement. De plus, dans les aires de triage désignées comme étant des secteurs nécessitant la protection des mouvements, et si le REF et les IGE de la compagnie le permettent, un seul opérateur de loco-commande peut se charger du passage sur la butte et des manoeuvres de triage.
Pendant les opérations dirigées au moyen de la loco-commande, l'opérateur se sert d'une unité de commande, en l'occurrence une petite boîte de trois à cinq livres retenue à sa veste par une pince. L'unité de commande permet à l'opérateur d'actionner à distance un certain nombre de commandes de la locomotive. L'unité de commande transmet les ordres de l'opérateur à la locomotive. Ces ordres sont reçus par un équipement radio spécial qui est installé dans la locomotive. Les ordres sont ensuite traités par l'ordinateur de bord, lequel amorce la réaction voulue de la locomotive.
Opérations avec loco-commande et véhicule d'assistance
Dans plusieurs triages de l'est du Canada, le CN autorise les opérateurs de loco-commandes à diriger les manoeuvres à partir d'un véhicule conduit par un chauffeur. Cet écart par rapport aux opérations conventionnelles à l'aide de la loco-commande, pendant lesquelles l'opérateur de la loco-commande est posté à l'avant du mouvement, est en application depuis plusieurs années. La mise en oeuvre de cette façon de procéder n'a été précédée d'aucune évaluation formelle des risques. À l'heure actuelle, ni le CN ni Transports Canada n'ont rédigé des lignes directrices ou des procédures quant à l'utilisation d'un véhicule pour faciliter les mouvements dirigés à l'aide de la loco-commande.
Exigences relatives à la formation des équipes de conduite
Le règlement CTC-1987-3 Rail, en vigueur le 12 mars 1987, expose les normes de qualification des employés itinérants (Qualification Standards for Operating Crews [QSOC]). Ce règlement précise que les compagnies ferroviaires doivent mettre sur pied et fournir des programmes de formation afin de se conformer à la réglementation. Transports Canada est l'organisme de réglementation qui veille à ce que le matériel didactique de la compagnie réponde à toutes les exigences concernant la formation de base. Après un examen initial de la documentation, l'organisme de réglementation n'est pas tenu de poursuivre l'examen. De plus, aucun mécanisme n'est en place pour permettre des changements aux critères de formation des mécaniciens et des chefs de train.
Aux termes du règlement, les mécaniciens doivent obtenir les qualifications voulues dans six matières de base et dans deux éléments additionnels concernant la conduite des locomotives et des trains. Les chefs de train doivent se qualifier dans les six mêmes matières de base et dans un élément additionnel portant sur l'évacuation des voyageurs. Les chefs de train ne sont pas tenus de se qualifier dans les domaines de la conduite des locomotives et des trains. Les compagnies ferroviaires doivent veiller à renouveler la qualification de leurs mécaniciens et de leurs chefs de train tous les trois ans.
En plus de la formation obligatoire en vertu des QSOC, le CN offre 10 jours de formation initiale sur l'emploi de la loco-commande à l'intention des chefs de train affectés au service de triage. Bien que le CN fasse un contrôle périodique du rendement, il n'offre aucun cours régulier de perfectionnement sur l'emploi de la loco-commande, et la réglementation existante ne l'oblige pas à en offrir une. De plus, la réglementation sur la formation aux fins de la requalification dans le cadre des QSOC n'exige pas que l'utilisation de la loco-commande fasse partie de la formation.
Transports Canada est d'avis que le règlement CTC 1987-3 Rail est dépassé et devrait être révisé. Transports Canada envisage la création d'un groupe de travail qui se chargera de cette révision.
Gestion de la sécurité et objectifs de rendement au triage Symington
Au CN, la sécurité est une valeur fondamentale que la compagnie a intégrée à sa ligne de conduite sur la gestion des risques. Nombre de tâches courantes font l'objet de marches à suivre établies dont l'exécution est contrôlée régulièrement dans le cadre d'un programme de surveillance du rendement. Par exemple, les superviseurs doivent tenir chaque mois 10 séances de contrôle du rendement du personnel de l'exploitation. Les séances en question contribuent à la gestion de la sécurité puisqu'elles permettent de contrôler le respect des règles et des modalités. La direction de la compagnie fait le suivi et la surveillance des résultats. De plus, le CN a mis sur pied un comité de santé et sécurité au travail ainsi qu'un processus de comptes rendus sur la sécurité.
Le CN a fixé des objectifs et des normes de rendement et les a communiqués aux employés d'exploitation du triage Symington. L'avis PRN 4029/02 de la Division constitue un bon exemple d'objectif de rendement. Cet avis énonce des lignes directrices visant la maximisation de la productivité au cours des activités de triage à butte. On y précise que la vitesse doit être de 15 mi/h quand on remorque des wagons pour les faire sortir de certaines voies, et de 10 mi/h quand on pousse des wagons pour leur faire passer la crête de la butte. De même, l'avis PRN 4058/3 de la Division énonce les normes relatives aux mouvements entrants et sortants, et précise notamment que les manoeuvres devraient se faire à une vitesse de 15 mi/h dans toute la mesure du possible.
Le CN reconnaît qu'à certaines occasions il est impossible de maintenir cette vitesse et que les employés doivent alors faire preuve de discernement pour pouvoir arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité d'un véhicule d'entretien, conformément à la règle 105 a) du REF. Toutefois, des employés sentent qu'on les pousse à atteindre les objectifs de production et estiment que ces contraintes de temps pourraient avoir des incidences sur leur sécurité. Des employés ont aussi fait savoir qu'on leur avait régulièrement demandé des explications lorsque la vitesse des mouvements de triage était inférieure à la vitesse en voie.
Analyse
On n'a pas relevé de défauts du matériel roulant ou de la voie qui auraient pu contribuer à cet événement. L'analyse s'intéressera surtout au fonctionnement de l'aiguillage à commande électrique, à l'utilisation de la loco-commande avec l'assistance d'un véhicule, à l'exception visant l'application de la règle 115 du REF, à la surveillance réglementaire concernant l'utilisation de la loco-commande et à la performance humaine.
L'accident
Quand l'opérateur de la loco-commande a activé l'aiguillage à commande électrique, il a observé que les aiguilles s'orientaient pour l'itinéraire prévu, soit vers la voie WI03. L'opérateur s'est alors retourné sans regarder le voyant de la cible d'aiguillage et est revenu au véhicule. Ce faisant, l'opérateur ne s'est pas conformé entièrement à la règle 104 du REF et aux dispositions du manuel d'exploitation du CN concernant le terminus de Winnipeg. L'opérateur croyait avoir bien vu le voyant de la cible, mais les renseignements consignés ont confirmé que le voyant de la cible ne s'était pas allumé, ce qui indiquait que l'aiguillage avait mal fonctionné et ne s'était pas verrouillé sur l'itinéraire prévu.
L'orientation d'un aiguillage à commande électrique à commande locale est un processus en deux étapes qui ne peuvent être dissociées l'une de l'autre. Le mouvement des aiguilles et l'observation du voyant de la cible permettent de confirmer l'état de l'aiguillage. Dans un triage, il est courant que les équipes manoeuvrent des aiguillages à commande électrique un grand nombre de fois par jour. La plupart du temps, l'aiguillage fonctionne sans incident et s'oriente pour la voie prévue. Dans ce cas, toutefois, l'opérateur de la loco-commande n'a pas vérifié l'état du voyant de la cible d'aiguillage. Comme il avait vu les aiguilles se déplacer et s'orienter pour l'itinéraire prévu, comme elles l'avaient fait habituellement par le passé, l'opérateur a supposé que l'aiguillage était orienté et verrouillé. Bien que des erreurs dues à des omissions soient courantes dans l'exécution de tâches spécialisées répétitives, comme l'orientation d'un aiguillage, il est souvent facile de repérer et de corriger ces erreurs sans qu'il y ait de conséquences graves.
Le mauvais fonctionnement de l'aiguillage était typique des pannes causées par une perte d'amortissement dynamique due à une résistance électrique attribuable à la condensation, au givre ou à l'accumulation de carbone sur les contacts des circuits. Étant donné que le boîtier contenant les circuits n'était pas chauffé et qu'il faisait -8 °C au moment du déraillement, il est vraisemblable que la condensation ou le givre présents sur les contacts ont causé le mauvais fonctionnement de l'aiguillage. Si l'opérateur s'était aperçu que les voyants de la cible d'aiguillage ne s'allumaient pas, le fait de réactiver l'aiguillage aurait peut-être corrigé le problème.
Le bogie avant du wagon de tête a franchi l'aiguillage WR4E et s'est engagé sur l'itinéraire prévu, en l'occurrence sur la voie WI03. Comme l'ont confirmé les registres de l'aiguillage, l'aiguille s'est ensuite réorientée en position renversée et s'est verrouillée pour la voie WR04. Il est vraisemblable que le mouvement du wagon a causé le déplacement et la réorientation de l'aiguillage non assujetti, si bien que le bogie arrière et les wagons qui suivaient se sont engagés sur la voie WR04. Comme le train était poussé simultanément sur les voies WI03 et WR04, l'orientation du wagon de tête a fait en sorte que des efforts latéraux s'exercent sur son bogie arrière. Cet effort s'est alors transmis au rail nord de la voie WR04, lequel s'est renversé au fur et à mesure que le train avançait; les wagons qui suivaient ont déraillé à la suite. Comme l'opérateur de la loco-commande prenait place dans un véhicule qui devançait considérablement le mouvement et comme il était dos au mouvement, comme l'exception à la règle 115 du REF le permettait, le mouvement ne faisait l'objet d'aucune surveillance, de sorte que la gravité du déraillement s'est accrue.
Conception de la cible d'aiguillage et position du véhicule
Les voyants des cibles sont conçus de façon à être vus de l'avant d'un train qui approche. À cet égard, chaque voyant est couvert d'un pare-soleil et placé sous le niveau de l'oeil d'un opérateur d'aiguillage qui se tient debout. Cette conception fait en sorte qu'un opérateur placé debout à côté de l'appareil de manoeuvre d'aiguillage est moins à même d'observer le voyant de la cible s'il ne se place pas devant la boîte d'interruption.
La position du véhicule conduit par le chauffeur a aussi contribué au fait que l'opérateur ne détecte pas l'erreur. Bien que l'utilisation d'un véhicule conduit par un chauffeur puisse atténuer les risques auxquels l'opérateur s'expose quand il roule à l'avant d'un mouvement dont il a les commandes, elle peut aussi occasionner des risques additionnels. Par exemple, comme le véhicule s'était immobilisé à côté de l'aiguillage, l'opérateur ne pouvait pas voir clairement le voyant de la cible d'aiguillage quand il prenait place sur le siège du véhicule. Bien que le voyant de la cible soit visible du véhicule à certaines positions, ni le règlement ni la compagnie n'imposent des exigences quant à la position optimale d'un véhicule d'assistance pendant les manoeuvres de triage. La façon dont les voyants de cibles d'aiguillage sont conçus, combinée à la position du véhicule le long de l'aiguillage, a fait en sorte de réduire le nombre d'occasions où il aurait été possible d'apercevoir le voyant de la cible d'aiguillage et de corriger l'erreur avant que le mouvement reparte.
Utilisation d'un véhicule avec chauffeur pour accélérer le triage
Au triage Symington, l'utilisation d'un véhicule conduit par un chauffeur est essentiellement un moyen qui permet d'accélérer le triage, mais cela ne dispense pas les employés de l'exploitation de la responsabilité de se conformer aux règles ou aux instructions. Au triage Symington, il est devenu courant que des opérateurs de loco-commandes se fassent conduire dans un véhicule pendant qu'ils dirigent des mouvements de trains. Bien que le REF et les IGE du CN énoncent des consignes explicites au sujet d'un certain nombre de procédures d'exploitation et de triage, ils ne renferment aucune ligne directrice quant à l'utilisation de véhicules pendant les manoeuvres dirigées au moyen de la loco-commande.
L'utilisation d'un véhicule pour accélérer le triage n'est pas dangereuse en soi. Toutefois, cet événement démontre que des changements au processus de travail, s'ils ne s'accompagnent pas d'une évaluation adéquate des risques, peuvent réduire l'efficacité des moyens de défense existants du fait qu'ils ne sont pas encadrés par le processus existant. Dès lors que l'erreur due à la non-vérification du voyant de la cible d'aiguillage a été commise, la position du véhicule, à côté de l'aiguillage plutôt qu'à l'avant du mouvement, a éliminé une autre occasion d'observer le voyant de la cible d'aiguillage. En outre, le fait que le véhicule ait précédé le train et soit allé se placer beaucoup plus en avant que celui-ci, bien que cela soit conforme à la règle 115 du REF, a fait en sorte que le mouvement soit virtuellement laissé sans surveillance, ce qui a aggravé les conséquences du déraillement.
Des lignes directrices portant sur la position des véhicules utilisés pour faciliter les manoeuvres de triage auraient pu atténuer ces problèmes et faire en sorte que les défenses existantes soient maintenues et peut-être même améliorées. L'absence de lignes directrices imposées par le règlement ou par la compagnie au sujet de l'utilisation d'un véhicule d'assistance pendant des manoeuvres exécutées grâce à la loco-commande a pour effet d'accroître les risques d'erreurs et d'accidents.
Exception à la règle 115 du REF
La FRA a établi le manque de protection des mouvements comme étant une des principales causes d'accidents pendant le triage. Les statistiques du BST révèlent une tendance similaire au Canada. Il a été déterminé que 36 % des déraillements et collisions survenus dans un triage qui ont été signalés de 1999 à 2003 avaient trait à un défaut d'assurer la protection du mouvement.
La règle 115 dit que, lorsqu'un matériel roulant est poussé par une locomotive, un membre de l'équipe doit être posté sur le véhicule de tête ou au sol, de façon à pouvoir observer la voie à utiliser et donner les signaux ou les instructions nécessaires pour diriger le mouvement. Une exception permet de déroger à cette règle lorsqu'il est constaté ou confirmé que la portion de voie à utiliser est libre. Comme l'opérateur de la loco-commande avait observé l'itinéraire souhaité (la voie WI03 adjacente) précédemment au cours de la manoeuvre, les conditions d'application de l'exception étaient rassemblées. L'opérateur était donc exempté de l'obligation de rouler à l'avant du mouvement et pouvait télécommander le train à partir du siège avant d'un véhicule qui précédait le mouvement, tout en se conformant à la règle.
Lors de cet événement, si le mouvement avait fait l'objet d'une protection conventionnelle ou si des lignes directrices avaient été en place concernant la position des véhicules utilisés pour faciliter les manoeuvres de triage, l'opérateur aurait eu davantage d'occasions de se rendre compte qu'il avait omis de vérifier le signal et il aurait peut-être été possible d'éviter le déraillement ou, du moins d'atténuer la gravité du déraillement grâce à une surveillance plus étroite du train. L'interprétation large et la nature permissive de l'exception de la règle 115 du REF ont été des facteurs contributifs lors de cet événement et lors d'autres déraillements et collisions signalés. En raison du recours à l'exception de la règle 115, il y a un risque que la progression et l'itinéraire d'un train ne fassent pas l'objet d'une surveillance et d'une protection adéquates.
Surveillance réglementaire de la formation des opérateurs de loco-commandes
Le règlement CTC-1987-3 Rail expose les normes minimales de qualification des employés itinérants (QSOC). Ce règlement a été introduit à une époque où l'équipe conventionnelle de conduite des trains se composait d'un mécanicien, responsable de la conduite du train, et d'un chef de train, responsable du train et de son contenu. L'utilisation des loco-commandes dans les triages est apparue après l'entrée en vigueur du règlement. Depuis sa formation initiale, le chef de train qui commandait le mouvement n'avait pas reçu de formation subséquente, et la réglementation en vigueur ne l'obligeait pas à renouveler ses qualifications quant à l'utilisation de la loco-commande.
Transports Canada surveille l'application du règlement et veille à ce que les matières de base soient représentées dans le matériel didactique. La formation dispensée actuellement par le CN dans le cadre des QSOC est conforme aux exigences de la réglementation. Le règlement exige que les chefs de train renouvellent tous les trois ans leurs qualifications concernant les matières de base, mais il ne renferme aucun élément de base quant à l'utilisation des loco-commandes. De plus, le règlement n'oblige pas les chefs de train ayant une formation sur l'emploi de la loco-commande à suivre quelque formation de base que ce soit sur la conduite des locomotives ou des trains, alors que les chefs de train peuvent être appelés à former des trains considérables et à les faire rouler à des vitesses atteignant 15 mi/h dans les limites d'un triage. Tel qu'il est rédigé, le règlement n'oblige pas Transports Canada à réaliser à intervalles réguliers des examens du matériel didactique relatif à la formation des équipes. En outre, le règlement ne prévoit pas un mécanisme qui rend obligatoire une modification des critères de formation au fur et à mesure de l'évolution de l'industrie. La surveillance réglementaire de la formation et du renouvellement des qualifications des opérateurs de loco-commandes n'a pas suivi le rythme de l'amélioration de la technologie et des perfectionnements de l'exploitation.
Conciliation de la sécurité et de la production
Toutes les organisations s'efforcent constamment de concilier les impératifs de rentabilité et un niveau de risque acceptable. Une gestion efficace de la sécurité suppose la capacité d'apporter des améliorations progressives. Dans le cas du triage Symington, on a mis en place des structures organisationnelles qui permettent de surveiller les questions de sécurité et d'améliorer continuellement la sécurité. En dépit de la présence de ces structures, il semble que les mesures que le CN a prises pour accroître la productivité au triage Symington aient pu avoir une incidence négative sur la sécurité des manoeuvres de triage.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- Bien que le chef de train ait actionné l'aiguillage et observé le déplacement des aiguilles, il n'a pas observé le voyant de la cible d'aiguillage pour avoir la confirmation que l'aiguillage était verrouillé à la bonne position.
- Quand on l'a actionné, l'aiguillage s'est orienté de façon à faire entrer le mouvement sur la voie WI03, mais il ne s'est pas verrouillé de façon appropriée. Il est vraisemblable que la formation de givre sur les contacts de l'aiguillage a entraîné une perte d'amortissement dynamique et a causé le mauvais fonctionnement de l'aiguillage.
- La façon dont les voyants de cibles d'aiguillage sont conçus, combinée à la position du véhicule le long de l'aiguillage, a fait en sorte de réduire le nombre d'occasions où il aurait été possible d'apercevoir le voyant de la cible d'aiguillage et de corriger l'erreur avant que le mouvement reparte.
- Pendant le passage du train, l'aiguillage non verrouillé est revenu à la position renversée et s'est verrouillé à cette position pendant le passage du wagon de tête. Par conséquent, la partie arrière du train s'est engagée sur la voie WR04 adjacente, entraînant le renversement du rail nord et causant le déraillement.
- Comme l'opérateur de la loco-commande prenait place dans un véhicule qui devançait considérablement le mouvement et comme il était dos au mouvement, comme l'exception à la règle 115 du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF) le permettait, le mouvement ne faisait l'objet d'aucune surveillance, de sorte que la gravité du déraillement s'est accrue.
Faits établis quant aux risques
- L'absence de lignes directrices imposées par le règlement ou par la compagnie au sujet de l'utilisation d'un véhicule d'assistance pendant des manoeuvres exécutées grâce à la loco-commande a pour effet d'accroître les risques d'erreurs et d'accidents.
- En raison du recours à l'exception de la règle 115 du REF, il y a un risque que la progression et l'itinéraire d'un train ne fassent pas l'objet d'une surveillance et d'une protection adéquates.
Autre fait établi
- La surveillance réglementaire de la formation et du renouvellement des qualifications des opérateurs de loco-commandes n'a pas suivi le rythme de l'amélioration de la technologie et des perfectionnements de l'exploitation.
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .