Rapport d'enquête ferroviaire R14C0114

Déraillement en voie principale
Chemin de fer Canadien Pacifique
Train de marchandises 374-230
Point milliaire 23,40, subdivision de Crowsnest
Pearce (Alberta)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 6 novembre 2014, à environ 1 h 15, heure normale des Rocheuses, 17 wagons-trémies couverts vides du train de marchandises 374-230 du Chemin de fer Canadien Pacifique circulant vers l’est ont déraillé au point milliaire 23,40 de la subdivision de Crowsnest, près de Pearce (Alberta). Un tronçon d’environ 1000 pieds de voie principale a subi des dommages. De plus, la voie principale et une voie de garage adjacente ont été détruites sur environ 600 pieds. Les wagons qui ont déraillé ont heurté 2 wagons-tombereaux vides remisés sur la voie de garage, lesquels ont déraillé à leur tour. Il n’y a eu aucun blessé.

    Renseignements de base

    L'accident

    Le 6 novembre 2014, à environ 1 h 15Note de bas de page 1, le train de marchandises 374-230 du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) (le train) circulait vers l'est à 40 mi/h quand ses 17 derniers wagons ont déraillé au point milliaire 23,40 de la subdivision de Crowsnest, près de Pearce (Alberta) (figure 1).

    Figure 1. Carte du lieu du déraillement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
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    Carte du lieu du déraillement

    Ce train ordinaireNote de bas de page 2 était composé de 2 locomotives de tête General Electric à 6 essieux de 4300 hp et de 81 wagons-trémies couverts vides. Il mesurait 4922 pieds et pesait 2528 tonnes. Après avoir quitté son point d'origine d'Eastport (Idaho), il était entré au Canada à Kingsgate (Colombie-Britannique); il devait se rendre à Glenwood (Minnesota) en traversant à nouveau la frontière américaine à North Portal (Saskatchewan).

    Juste avant le déraillement, un freinage d'urgence provenant de la conduite générale a été déclenché. Après avoir transmis les messages d'urgence nécessaires et avoir avisé le contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) à Calgary, le chef de train a inspecté le train et a constaté que les 17 derniers wagons avaient déraillé, en 2 groupes. Les 10 derniers wagons avaient déraillé à l'aiguillage ouest de la voie de garage de Pearce (figure 2). Certains d'entre eux ont heurté 2 wagons-tombereaux vides qui étaient remisés sur la voie de garage adjacente à la voie principale (photo 2). Les 7 autres wagons qui ont déraillé ont été traînés vers l'est sur environ 1000 pieds et sont restés debout.

    Figure 2. Diagramme du lieu du déraillement
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    Diagramme du lieu du déraillement

    La voie principale et la voie de garage étaient détruites sur environ 600 pieds près du groupe des 10 wagons déraillés. De plus, un tronçon d'environ 1000 pieds de voie principale entre les 2 groupes de wagons déraillés avait subi des dommages (aux traverses, aux anticheminants et aux crampons).

    On a déterminé que le point du déraillement était un rail rompu près d'un joint du rail sud, environ 180 pieds à l'est du passage à niveau du chemin de canton 100A (point milliaire 23,47) (figure 2).

    L'équipe du train se composait d'un mécanicien de locomotive et d'un chef de train. Les deux étaient qualifiés pour leurs postes respectifs, répondaient aux normes d'aptitude au travail et de repos et connaissaient bien la subdivision.

    Il n'y a eu aucun blessé.

    Au moment de l'événement, le ciel était dégagé, les vents étaient calmes et la température était de 8 °C.

    Photo 1. Wagons déraillés sur la voie principale; la voie de garage se trouve à gauche (vue en direction ouest)
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    Wagons déraillés sur la voie principale; la voie de garage se trouve à gauche
    Photo 2. Wagons de charbon détruits sur la voie de garage (vue en direction nord-est)
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    Wagons de charbon détruits sur la voie de garage

    Subdivision de Crowsnest

    La subdivision de Crowsnest fait partie de la ligne sud du CP entre Medicine Hat (Alberta) et Fort Steele (Colombie-Britannique), laquelle est principalement utilisée par des trains de charbon. Les mouvements de train sont régis par le système de régulation de l'occupation de la voie (ROV), tel qu'il est autorisé par le Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada, et sont supervisés par un CCF en poste à Calgary (Alberta). À proximité du lieu du déraillement, la vitesse maximale autorisée pour les trains de marchandises était de 45 mi/h. À cet endroit, la voie appartient à la catégorie 4, selon le Règlement sur la sécurité de la voie (RSV) approuvé par Transports Canada.

    Le trafic ferroviaire dans la subdivision de Crowsnest est principalement composé de trains de céréales et de charbon. Il s'élevait à environ 26 millions de tonnes-milles brutes (MTMB) en 2014 (figure 3).

    Figure 3. Trafic dans la subdivision de Crowsnest, 2010 à 2014
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    Trafic dans la subdivision de Crowsnest

    La subdivision de Crowsnest est régie par le système de ROV; elle n'a aucun système de signalisation. Même s'ils ne sont pas spécialement conçus à cette fin, les systèmes de signalisation offrent une certaine protection contre les ruptures de rail : lorsque la continuité d'un circuit de voie est interrompue, tous les signaux de canton présentent alors l'indication la plus restrictive. Une voie non signalisée n'offre pas ce genre de protection.

    Renseignements consignés

    On a passé en revue les données provenant du consignateur d'événements de la locomotive menée. Le mouvement final a commencé environ 45 minutes avant le déraillement, quand le train est passé de 0 à 10 mi/h en environ 30 secondes. Le manipulateur a été utilisé avec modération (du ralenti au cran 4). Lorsque le train a atteint 10 mi/h, le manipulateur a été déplacé progressivement jusqu'au cran 8 (en environ 90 secondes) pour faire accélérer le train jusqu'à 40 mi/h. Le train a été conduit au cours des 40 minutes suivantes en modulant le manipulateur. Pendant cette période, la vitesse du train a varié entre environ 15 mi/h et 45 mi/h. Lorsque le freinage d'urgence provenant de la conduite générale a été déclenché, à 1 h 9, le train roulait à 44 mi/h et le manipulateur était au cran 2.

    Détails de la voie

    Dans les environs du déraillement, la voie est en alignement et comporte une pente ascendante de 0,2 % en direction est. La structure de la voie était principalement composée de longs rails soudés (LRS) de 115 livres fabriqués en 1967 par Algoma, reposant sur des selles à double épaulement et fixés aux traverses au moyen de 3 crampons par selle. Ces rails étaient encadrés d'anticheminants sur toutes les traverses. Dans les environs du point de déraillement (PDD), les traverses étaient conformes aux normes de Transports Canada sur l'état des traverses; elles étaient toutefois en mauvais état, et un bon nombre d'entre elles étaient entaillées par les selles et/ou fendues. La largeur de l'épaulement de la voie variait de 18 po à 24 po, et les cases entre traverses étaient remplies de ballast. Le ballast était dans un état passable.

    Avant le déraillement, en 2013 et 2014, le CP avait effectué 6 contrôles de la géométrie de la voie dans la zone du déraillement à l'aide d'une voiture d'évaluation de la voie. Au PDD ou à proximité de celui-ci, la majorité des défauts détectés pendant ces contrôles nécessitaient une intervention prioritaireNote de bas de page 3 : défauts de surécartement, de surface, de tracé et de ruissellement de surface. Le contrôle de l'état géométrique de la voie du 15 mai 2014 a révélé 15 défauts nécessitant une intervention prioritaire et 2 défauts nécessitant une intervention quasi urgente. Ces défauts ont été corrigés avant le contrôle suivant (25 juillet 2014).

    Dans les environs du lieu de l'événement à l'étude, on avait effectué un certain nombre d'inspections consignées dans un bloc-notes numérique (Digital Track Notebook, DTN)Note de bas de page 4 en octobre 2014, et constaté plusieurs défauts de voie (DV) concernant les joints des rails (tableau 1).

    Tableau 1. Défauts de voie notés en octobre 2014 (Source : Chemin de fer Canadien Pacifique)

    Subdivision de Crowsnest – Défauts de voie notés dans le DTN en octobre 2014
    Date Emplacement Défaut de voie
    3 octobre 2014 PM 34,8 Aucun défaut de voie noté dans le DTN
    6 octobre 2014 PM 34,8 Aucun défaut de voie noté dans le DTN
    7 octobre 2014 PM 21,1 DV 5.3*
    10 octobre 2014 PM 34,8 DV 5.7**
    10 octobre 2014 PM 50,02 DV 5.7
    13 octobre 2014 PM 25,7 Aucun défaut de voie noté dans le DTN
    14 octobre 2014 PM 25,7 DV 5.7
    14 octobre 2014 PM 26,02 DV 5.7
    16 octobre 2014 PM 28,13 Aucun défaut de voie noté dans le DTN
    17 octobre 2014 PM 28,13 DV 5.3
    21 octobre 2014 PM 16,1 DV 5.3
    27 octobre 2014 PM 12,2 Aucun défaut de voie noté dans le DTN
    31 octobre 2014 PM 12,2 DV 5.5***
    *   DV 5.3 – Éclisse fissurée ou rompue
    **   DV 5.7 – Moins de 2 boulons par rail aux joints (LRS)
    ***   DV 5.5 – Moins de 2 boulons par rail aux joints (voie éclissée ordinaire), voie de catégorie 2 à 5

    La plus récente inspection périodique de la voie remontait au 4 novembre 2014. Aucun défaut n'avait été relevé dans les environs du lieu de déraillement.

    De nombreuses courbes de la subdivision de Crowsnest comportaient des LRS, mais la plupart des sections en alignement comportaient des rails éclissés (fabriqués par Algoma dans les années 1960). On avait remplacé les rails éclissés par des LRS entre les points milliaires 42,1 et 70,7. On prévoyait installer 3,46 milles supplémentaires de LRS pour éliminer des joints entre le PDD (point milliaire 23,4) et le point milliaire 42,1 en 2016.

    Meulage des rails

    Le meulage des rails est une méthode d'entretien qui permet de parer aux dommages à la surface du rail, notamment l'usure ondulatoire, l'écaillage, les criques et l'exfoliationNote de bas de page 5. Le meulage des rails sert également à rétablir la géométrie du contact roue-rail en donnant au champignon le profil approprié. Ce faisant, la position de contact roue-rail peut être déplacée sur le champignon à un endroit qui réduit au minimum les contraintes de contact. En réglant la géométrie de contact, on peut prévenir l'apparition d'écailles profondes comme les fissures de fatigueNote de bas de page 6 au congé de roulement supérieur. Le meulage des rails peut aussi ralentir l'apparition et la croissance de petites écailles profondes, ce qui peut prolonger la durée de vie utile des rails.

    On considère que le meulage des rails est le principal moyen de défense contre l'apparition et la propagation de défauts internes; il est essentiel pour maintenir la surface des rails en bon état, ce qui facilite la détection des défauts. Habituellement, les besoins et le calendrier de meulage des rails sont établis en fonction du trafic ferroviaire (c.-à-d. le nombre de millions de tonnes brutes transportées dans le territoire), du taux de croissance des défauts, de l'état de la surface des rails et de la nécessité de maintenir un profil optimal des rails.

    Un soutien inadéquat des rails accélère la croissance des défauts de rail et la détérioration générale de la structure de la voie, ce qui réduit l'efficacité des programmes de meulage des rails.

    Avant l'événement à l'étude, on avait meulé les rails dans les environs du lieu du déraillement le 9 avril et le 26 septembre 2014.

    Auscultation des rails

    L'auscultation par ultrasons est la méthode privilégiée pour détecter les défauts de rail internes et gérer proactivement les risques de rupture de rail. Au cours des dernières années, cette technologie d'inspection a évolué, notamment par l'ajout de transducteurs supplémentaires à différents angles, l'amélioration du logiciel de reconnaissance des défauts et l'optimisation de l'interface opérateur-système. L'auscultation par ultrasons peut constituer une méthode fiable et économique pour la détection des défauts de rail. Toutefois, sa capacité de détection dépend de la taille des défauts et de l'orientation de leur partie transversale.

    La contamination, l'exfoliation et l'écaillage de la surface du rail, ainsi que les criques du champignon, peuvent avoir des répercussions sur les résultats de l'auscultation par ultrasons. De telles conditions peuvent empêcher la transmission des signaux ultrasoniques dans le champignon du rail, masquant ainsi les défauts internes. Depuis 2005, le Bureau de la sécurité des transports du Canada a mené des enquêtes sur 7 autres déraillements causés par des ruptures de rail dues à des défauts de rail non détectés (annexe A). Les rails avaient été auscultés peu de temps avant certains de ces événements, mais le mauvais état de la surface des rails avait nui à l'efficacité des auscultations : la taille initiale trop petite des défauts ou leur orientation en avait empêché la détection.

    L'auscultation des rails dans la subdivision de Crowsnest était effectuée par l'entreprise HerzogNote de bas de page 7. Ses véhicules d'auscultation des rails sont équipés d'une plateforme d'auscultation sur châssis comprenant 2 roues remplies de liquides montées sur des unités de recherche à rouleaux et dotées chacune de 7 transducteurs (pour un total de 14 transducteurs par rail). Les transducteurs envoient de l'énergie ultrasonique dans les rails à différents angles pour détecter les défauts verticaux et transversaux. Un liquide de couplage facilite la transmission de cette énergie entre les transducteurs et le rail.

    Avant le déraillement, on avait ausculté les rails de la subdivision de Crowsnest en février, mars, mai, juillet et septembre 2014. Des auscultations par ultrasons étaient aussi prévues en novembre et décembre 2014. En vertu du Règlement sur la sécurité de la voie (RSV), les voies de catégorie 4 accueillant un trafic de 15 à 35 MTMB doivent être auscultées au moins 3 fois par année.

    Dans les environs du lieu du déraillement, la dernière auscultation (remontant au 19 septembre) avait révélé 2 défauts de rail (tableau 2).

    Tableau 2. Défauts de rail détectés pendant l'auscultation par ultrasons en septembre 2014
    Point milliaire Défaut Rail
    23,4 Fissuration horizontale du champignon Sydney (1971)
    26,8 Fissuration horizontale du champignon Algoma (1974)

    Peu de temps après l'événement à l'étude, soit le 9 novembre 2014, un deuxième déraillement est survenu dans la subdivision de Crowsnest, cette fois au point milliaire 70,7Note de bas de page 8. Le CP a effectué d'urgence une auscultation de la subdivision et a détecté 22 défauts de rail (tableau 3). Le CP a pris des mesures correctives pour éliminer les défauts détectés pendant cette auscultation d'urgence.

    Tableau 3. Défauts de rail détectés pendant l'auscultation par ultrasons en novembre 2014
    Point milliaire Défaut Rail
    10,3 Fissuration horizontale du champignon Cœur de croisement
    12,3 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1974)
    16,1 Fissure transversale Algoma (1977)
    16,7 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1977)
    16,8 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1977)
    17,7 Soudure de chantier défectueuse Algoma (1975)
    19,9 Exfoliation, écaillage, usure ondulatoire Algoma (1976)
    28,2 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1968)
    28,4 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1968)
    30,8 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1963)
    42,3 Défaut transversal Algoma (1976)
    52,9 Soudure faite en usine défectueuse Nippon (2012)
    69,6 Exfoliation, écaillage, usure ondulatoire Algoma (1982)
    71,5 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1971)
    74,5 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1969)
    77,5 Trou d'éclissage d'un joint Algoma (1970)
    77,8 Trou d'éclissage d'un joint Algoma (1970)
    80,5 Soudure faite en usine défectueuse Algoma (1971)
    89,2 Champignon écrasé (> ¼ po) Algoma (1981)
    99,4 Défaut transversal Algoma (1981)
    99,4 Champignon écrasé (> ¼ po) Algoma (1981)
    99,6 Champignon écrasé Algoma (1981)

    Fréquence et analyse des auscultations effectuées par le CP

    Le CP examinait les défauts détectés et en service pour en établir la cause fondamentale. L'analyse des tendances était exécutée en permanence. Lorsqu'il y avait des défauts – et particulièrement lorsqu'il y avait une augmentation de la fréquence des défauts ou si une tendance apparaissait –, on examinait les incidents. Dans de nombreux cas, on a effectué des tests en laboratoire et évalué les mesures correctives requises.

    Le CP utilisait divers paramètres pour fixer la fréquence des auscultations, dont le tonnage, les défaillances en service et la taille des défauts (croissance d'une auscultation à l'autre). Le CP tenait également compte d'autres facteurs de risque, comme l'absence de signalisation dans une zone. Les cycles d'auscultation étaient dynamiques, et on les ajustait en fonction des changements d'un ou de plusieurs de ces facteurs.

    Le CP soumettait tout l'équipement d'auscultation utilisé sur son réseau à des vérifications hebdomadaires. Dans le cadre de ces vérifications, le CP contrôlait la conformité de l'équipement aux spécifications. Si une auscultation révélait un grand nombre de défauts, on comparait les données aux auscultations précédentes.

    Le CP effectuait aussi des enquêtes sur les ruptures de rail en service qui survenaient dans les 30 jours suivant l'auscultation des rails ou qui avaient été causées par des défauts considérés comme étant « détectables ». On utilisait ces renseignements pour établir des tendances chez un fournisseur ou un opérateur d'équipement d'auscultation.

    Défauts de fatigue transversaux dans le rail

    Une fissure de fatigue est classée dans le groupe des défauts de fatigue transversaux (DFT). Ce type de défaut est caractérisé par une fissure progressive du rail. La fissure s'amorce à partir soit d'une séparation longitudinale proche de la surface de roulement, soit d'un écaillage commençant habituellement au congé de roulement intérieur et s'étendant transversalement à travers le champignon, à la perpendiculaire de la surface de roulement du rail.

    L'écaillage est un défaut de fatigue causé par les contraintes générées lors du passage des roues. Une fois amorcées, les écailles continuent de s'agrandir le long du rail. À partir d'une écaille longitudinale, des fissures transversales peuvent se séparer ou se ramifier et croître verticalement pour former des fissures de fatigue. Toutefois, la plupart des écailles ne se transforment pas en fissures de fatigue. Le mécanisme par lequel ces défauts se ramifient et s'étendent dans une direction transversale demeure inconnu.

    Comme la fissure n'est pas souvent à découvert, il est parfois difficile de reconnaître les DFT. Les fissures par DFT présentent en général des anneaux ou des stries de croissance qui indiquent l'évolution progressive de la fissure de fatigue avec chaque cycle de fatigue. Bien qu'une auscultation par ultrasons puisse repérer un DFT avant la rupture, la technologie a ses limites. Par exemple, comme la séparation ou la fente longitudinale de la fissure est rarement à découvert, il n'est habituellement pas possible de reconnaître formellement un DFT tant que le rail ne s'est pas rompu. Une défaillance se produit fréquemment avant que le défaut devienne visible, et elle se traduit généralement par une rupture du rail.

    La taille d'une fissure de fatigue est habituellement exprimée en pourcentage de la surface transversale du champignon du rail. L'augmentation de la taille de la fissure de fatigue réduit la surface du champignon pouvant supporter la charge. Une fois que le défaut atteint une taille critique, la surface restante du champignon n'y suffit plus; il se produit alors une rupture soudaine et complète du rail. Cette situation survient d'autant plus vite lorsque la surface du champignon du rail est d'avance réduite par l'usure.

    La géométrie non conforme du contact roue-rail (contact ponctuel ou linéaire du boudin de la roue avec le champignon du rail) et un frottement de glissement provoquent des contraintes qui peuvent causer un écoulement plastique (fluage) à la surface du rail. L'écoulement plastique peut entraîner un écrasement du congé de roulement, spécialement en présence d'écailles profondes. L'écoulement plastique peut aussi amener des inclusions internes à agir comme catalyseurs de croissance des défauts, y compris des défauts transversaux comme des fissures de fatigue.

    Le taux de croissance d'un DFT peut être hautement irrégulier et imprévisible. Par exemple, la croissance peut être lente jusqu'à ce que la taille du défaut atteigne de 10 à 20 %. Ensuite, elle peut s'accélérer jusqu'à la rupture soudaine de l'âme et du patin du rail. Une défaillance soudaine et complète peut également se produire dans des défauts de toute tailleNote de bas de page 9. Une recherche a démontré que le taux moyen de croissance d'un défaut par fissure de fatigue peut dépasser 5 % de la section transversale du champignon du rail pour chaque million de tonnes brutes de trafic ferroviaireNote de bas de page 10.

    Les DFT se forment généralement dans les rails qui ont atteint ou presque leur limite de fatigue. La durée de vie en fatigue du railNote de bas de page 11 dépend d'un certain nombre de facteurs, notamment : le tonnage accumulé; l'emplacement (c.-à-d. une courbe ou une voie en alignement); la propreté et la nuance de l'acier; l'état du dispositif de soutien du rail; les contraintes résiduellesNote de bas de page 12 dans le rail. Le maintien d'un profil de rail adéquat par le meulage et la gestion adéquate de la friction (graissage) contribuent aussi directement à la durée de vie du rail. La durée de vie d'un rail en fatigue est difficile à prévoir; toutefois, grâce à un nombre accru d'auscultations, d'inspections et de programmes de remplacement de rails, les rails fatigués sont normalement reconnus et enlevés avant d'atteindre la fin de leur durée de vie en fatigue.

    On considère que les défauts de fatigue, tels les DFT, sont plus graves que les défauts causés par l'usure du rail, comme l'écrasement de l'about du rail et l'usure latérale. On peut déterminer la durée de vie du rail en fonction des limites d'usure ou de fatigue, selon la première de ces limites qui est atteinte. Ensuite, on met habituellement en œuvre des programmes de remplacement des rails dont la durée de vie en usure et en fatigue arrive à terme, selon le type et la fréquence des défauts.

    Trains précédents ayant franchi la zone du déraillement

    Les 3 trains (les trains 469-04, 462-04 et 463-04) qui avaient circulé dans le secteur du point de déraillement immédiatement avant l'événement pesaient chacun au moins 6900 tonnes. De fait, le dernier train qui a parcouru la zone du déraillement avant le train en cause, le train 463-04 circulant vers l'ouest, pesait 8753 tonnes. Aucun des 3 trains n'avait causé d'impacts de roue supérieurs à la normale.

    Analyse en laboratoire du rail rompu

    On a récupéré 2 morceaux du rail rompu (photo 3) sur le lieu du déraillement, puis on les a envoyés au laboratoire d'ingénierie du BST à des fins d'examen approfondi.

    Photo 3. Morceaux de rail récupérés
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    Morceaux de rail récupérés

    Le morceau de rail no 1 présentait une rupture transversale du côté ouest et une coupure faite en usine du côté est. Les 3 trous percés dans l'âme du rail indiquent qu'il s'agissait du côté ouest d'un joint. L'extrémité est du morceau de rail no 2 et l'extrémité ouest du morceau de rail no 1 présentaient des surfaces de rupture correspondantes.

    L'examen a aussi permis de faire les constatations suivantes :

    • La rupture avait commencé dans le champignon du rail, à environ 2 po de l'extrémité du joint.
    • Les extrémités des éclisses avaient grandement déformé le raccord âme-champignon du morceau de rail no 1 (photos 4 et 5).
    Photo 4. Déformation du raccord âme-champignon du côté intérieur du morceau de rail no 1 causée par le contact avec l'éclisse (flèche)
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    Déformation du raccord âme-champignon du côté intérieur du morceau de rail no 1 causée par le contact avec l'éclisse
    Photo 5. Déformation du raccord âme-champignon du côté extérieur du morceau de rail no 1 causée par le contact avec l'éclisse (flèche)
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     Déformation du raccord âme-champignon du côté extérieur du morceau de rail no 1 causée par le contact avec l'éclisse
    • Les 2 morceaux de rail présentaient une usure verticale du champignon de 7/16 po. Les côtés intérieur et extérieur du rail présentaient une usure de +1/16 po et +3/16 po, respectivement. Dans le cas des 2 morceaux de rail, cet écart était causé par la formation d'un fluage du métal du côté intérieur et par la déformation du côté extérieur (figure 4). À mesure que le rail s'usait, il s'élargissait vers l'intérieur et l'extérieur.
    Figure 4. Profil du champignon du rail de l'événement à l'étude par rapport au profil d'un rail de 115 lb RE neuf
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    Dessin  du profil du champignon du rail de l'événement à l'étude par rapport au profil d'un rail de 115 lb RE neuf
    • Tel qu'il est indiqué dans l'annexe 6 du Livre rouge des exigences relatives à la voie et aux ouvrages du CP, la limite d'usure verticale du champignon d'un rail de 115 lb RE (sans usure latérale) est de 11/16 po. Ces rails n'avaient pas atteint la limite d'usure exigeant un remplacement.
    • Les surfaces des 2 morceaux de rail présentaient des dommages par impact de roue, mais ils étaient plus graves sur le morceau de rail no 1. Cela indique que la rupture du rail s'est produite avant l'événement à l'étude et que les roues la martelaient dans les 2 directions.
    • On a constaté des criques du champignon et de l'écaillage sur le congé de roulement intérieur des 2 morceaux de rail (photos 6 et 7).
    Photo 6. Criques du champignon et écaillage du morceau de rail no 1
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    Criques du champignon et écaillage du morceau de rail no 1
    Photo 7. Criques du champignon et écaillage du morceau de rail no 2
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    Criques du champignon et écaillage du morceau de rail no 2
    •  Près de l'extrémité coupée en usine (about est) du morceau de rail no 1, il y avait des marques distinctes de frottement ou d'usure de contact à la base du rail (photo 8) et sur le raccord âme-champignon du rail, du côté intérieur (photo 9). Ces marques de frottement indiquent que l'extrémité ouest de l'éclisse intérieure était rompue; elles ont probablement été faites par les morceaux supérieur et inférieur de l'extrémité est de cette éclisse. Le champignon et la base de l'about est du morceau de rail no 1 étaient aussi polis, ce qui indique que ce rail frottait contre le rail adjacent (photo 10).
    Photo 8. Marques de frottement ou d'usure de contact à la base du rail
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    Marques de frottement ou d'usure de contact à la base du rail
    Photo 9. Marques de frottement ou d'usure de contact du raccord âme-champignon du rail
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    Marques de frottement ou d'usure de contact du raccord âme-champignon du rail
    Photo 10. Polissage ou frottement du champignon et de la base du morceau de rail no 1 (extrémité est)
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    Polissage ou frottement du champignon et de la base du morceau de rail no 1 (extrémité est)
    Photo 11. Défaut transversal du morceau de rail no 2
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    Défaut transversal du morceau de rail no 2

    Comme les dommages d'impact après la séparation ont anéanti les caractéristiques de rupture du champignon du rail, des auscultations par ultrasons supplémentaires ont été nécessaires pour déterminer si les rails présentaient des défauts transversaux. Ces auscultations ont permis de faire les constatations suivantes :

    • Il y avait des traces de fissure à environ 5 ¼ po de l'extrémité coupée du morceau de rail no 2. On a coupé ce morceau de rail pour ouvrir cette fissure grâce à une contrainte excessive produite en laboratoire. La photo 11 montre le défaut transversal.
    • Une crique du côté intérieur du champignon avait amorcé la fissure, et l'état de fatigue de celle-ci avait augmenté.
    • Après s'être propagée vers l'intérieur du champignon, la fissure transversale avait grandi jusqu'à occuper environ 17 % de la surface actuelle du champignon.

    L'examen et l'analyse en laboratoire ont aussi permis de faire les constatations suivantes :

    • Le rail s'est rompu par contrainte transversale à environ 2 po de l'extrémité d'une éclisse.
    • Les dommages d'impact constatés à l'emplacement de la rupture indiquent que le rail était probablement déjà rompu depuis un certain temps au moment de l'événement à l'étude.
    • Le côté intérieur du champignon du rail présentait des criques du champignon et de l'écaillage, anomalies dont on sait qu'elles mènent à la formation de défauts transversaux. Il n'a pas été possible de déterminer si la rupture du rail a été causée par un défaut transversal, car la surface de rupture du champignon du rail a subi d'importants dommages d'impact.
    • Les marques de frottement indiquaient que le joint avait un jeu considérable et que l'éclisse intérieure était peut-être rompue depuis un certain temps. Toutefois, il a été impossible de déterminer si cela a contribué à la rupture du rail.
    • Les côtés intérieur et extérieur du champignon du rail étaient déformés vers l'extérieur, probablement en raison des charges compressives exercées par le passage des véhicules ferroviaires.
    • On a constaté des ruptures par cisaillement des 2 côtés de la rupture transversale. La couleur foncée et le brunissage de ces ruptures par cisaillement indiquaient que celles-ci s'étaient produites il y a un certain temps.
    • Le matériau et la dureté du rail étaient normaux pour un rail de cet âge.

    Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a complété le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP 259/2014 – Examination of Broken Rail [examen du rail brisé]

    Analyse

    Rien n'indique que la conduite du train ou l'état mécanique des wagons ont contribué au déraillement à l'étude. L'analyse se concentrera sur la voie et l'état des rails, sur la capacité de repérer rapidement des défauts de rail et sur la durée de vie des rails.

    L'accident

    Le train a déraillé en raison de la rupture d'un rail à proximité d'un joint. L'écrasement de la surface de rupture ouest du morceau de rail no 2 indiquait qu'un train précédent, circulant vers l'ouest (probablement le train 463-03), avait rompu une partie du champignon du rail. Les roues du train 374-230 circulant vers l'est, composé de wagons de céréales vides, ont heurté la rupture du rail et ont d'abord martelé et écrasé la surface de rupture est du morceau de rail no 1. Les roues de 2 locomotives (12 roues) et de 64 wagons (256 roues) ont lourdement martelé la face est de la rupture de rail jusqu'à ce que l'éclisse intérieure se rompe. Les abouts du rail se sont alors séparés, et les 17 derniers wagons du train ont déraillé.

    Les éclisses sont conçues pour assurer solidité et rigidité, et pour maintenir l'alignement vertical et horizontal des abouts des rails. Le bout est du morceau de rail no 1 a d'abord résisté aux dommages causés par l'important martèlement sans se briser davantage, car les wagons étaient vides et les éclisses renforçaient la section du rail rompu.

    Même si les dommages d'impact après la séparation ont anéanti les caractéristiques de rupture du champignon du rail, un défaut de fatigue transversal, repéré près de la fissure du rail, a grandi jusqu'à occuper environ 17 % de la surface actuelle du champignon. Les criques du champignon et l'écaillage du côté intérieur du champignon sont à l'origine de ce défaut transversal. Ainsi, le rail a probablement été rompu, en raison d'un défaut de fatigue transversal, par le train précédent, circulant vers l'ouest. Ce défaut transversal a atteint sa taille critique lorsque la surface restante du champignon du rail, qui approchait de sa limite d'usure, ne pouvait plus supporter la charge, ce qui a occasionné la rupture soudaine du rail.

    Condition de la surface du rail

    Les traverses dans la zone du déraillement étaient en mauvais état. Un soutien inadéquat des rails accélère la croissance des défauts de rail et la détérioration générale de la structure de la voie, ce qui réduit l'efficacité des programmes de meulage des rails. Même si les rails dans les environs du point de déraillement (PDD) avaient été meulés 2 fois avant le déraillement, en 2014, la surface des rails était gravement endommagée, et il était impossible d'éliminer ces dommages sans retirer une trop grande partie du champignon des rails. L'auscultation par ultrasons des rails n'est pas toujours fiable lorsque la surface du rail est en mauvais état ou contaminée. Même si on a jugé que les auscultations précédentes étaient valables, il est notoire qu'une surface de rail en mauvais état (comme dans les photos 6 et 7) peut dévier les ultrasons. Un défaut de fatigue transversal (DFT) grandissant peut être passé inaperçu en raison de sa trop petite taille, ou il peut être apparu subitement et avoir atteint son point de rupture entre la dernière auscultation (19 septembre) et la date du déraillement (6 novembre). Si les programmes de meulage périodique des rails ne permettent pas d'éliminer des défauts de surface des rails, il se peut que les ultrasons ne pénètrent pas suffisamment la surface des rails pour détecter l'apparition ou la progression de défauts de rail internes, ce qui accroît les risques de déraillements causés par la rupture d'un rail.

    Durée de vie des rails et fréquence des auscultations

    La subdivision de Crowsnest était composée d'un mélange de longs rails soudés (LRS) relativement neufs dans les courbes et de rails éclissés Algoma plus âgés et en service depuis de nombreuses années. On peut déterminer la durée de vie du rail en fonction des limites d'usure ou de fatigue, selon la première de ces limites qui est atteinte. Même si l'usure réelle des rails au PDD était inférieure à la limite d'usure pour des rails de 115 lb, ils étaient en service depuis près de 50 ans.

    Le programme de détection des défauts de rail et l'analyse du nombre et des types de défauts de rail sont les principaux moyens qu'utilise le Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) pour évaluer l'état des rails. En dépit de ces mesures d'atténuation des risques, lesquelles ont permis au CP de repérer des tronçons de rails dont la durée de vie arrivait à terme et qui devaient être remplacés, 2 déraillements causés par des défauts liés à la fatigue des rails sont survenus dans la subdivision de Crowsnest en novembre 2014.

    Le CP utilisait divers paramètres pour fixer la fréquence des auscultations, dont le tonnage, les défaillances en service et la taille des défauts (croissance d'une auscultation à l'autre). Le CP tenait également compte d'autres facteurs de risque, comme l'absence de signalisation dans une zone. Les cycles d'auscultation étaient dynamiques, et on les ajustait en fonction des changements d'un ou plusieurs de ces facteurs.

    Dans le cas de l'événement à l'étude, le trafic ferroviaire dans la subdivision de Crowsnest avait augmenté au cours de 2 années précédentes; il était passé d'environ 22 millions de tonnes-milles brutes (MTMB) en 2012 à environ 26 MTMB en 2014. Au cours des 10 mois précédant le déraillement, on avait ausculté les rails de la subdivision de Crowsnest 5 fois. En vertu du Règlement sur la sécurité de la voie (RSV), les voies de catégorie 4 accueillant un trafic de 15 à 35 MTMB doivent être auscultées au moins 3 fois par année. Même si le programme du CP dépassait l'exigence réglementaire en matière de fréquence des auscultations, il n'a pas permis de détecter le défaut de rail à temps. Si des rails présentant des défauts de fatigue demeurent en service, les risques de défaillance en service et de déraillement augmentent, et ce, même si les rails n'ont pas encore atteint leurs limites d'usure.

    Manque de protection contre les ruptures de rail en territoire non signalisé

    Lorsqu'un rail se rompt sous un train en territoire non signalisé régi par le système de régulation de l'occupation de la voie (ROV), les trains suivants n'obtiennent aucun avertissement. Même s'ils ne sont pas spécialement conçus à cette fin, les systèmes de signalisation offrent une certaine protection contre les ruptures de rail lorsque la continuité d'un circuit de voie est interrompue. Toutefois, les tronçons non signalisés, comme la subdivision de Crowsnest, ne comportent aucun dispositif de détection automatique des ruptures de rail.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Le train a déraillé en raison de la rupture d'un rail à proximité d'un joint.
    2. Le rail a probablement été rompu, en raison d'un défaut de fatigue transversal, par le train précédent, circulant vers l'ouest.
    3. Les auscultations par ultrasons n'avaient pas permis la détection du défaut de fatigue transversal, probablement en raison du mauvais état de la surface du rail qui aurait masqué le défaut, un défaut dont la taille était initialement trop petite pour être détectée par les auscultations par ultrasons. Il est également possible que ce défaut soit apparu subitement et ait atteint son point de défaillance entre la dernière auscultation par ultrasons et la date du déraillement.
    4. Le défaut de fatigue transversal a atteint sa taille critique lorsque la surface restante du champignon du rail, qui approchait de sa limite d'usure, ne pouvait plus supporter la charge, ce qui a occasionné la défaillance soudaine et complète du rail.
    5. Les criques du champignon et l'écaillage du côté intérieur du champignon étaient à l'origine du défaut de fatigue transversal.

    Faits établis quant aux risques

    1. Si les programmes de meulage périodique des rails ne permettent pas d'éliminer des défauts de surface des rails, il se peut que les ultrasons ne pénètrent pas suffisamment la surface des rails pour détecter l'apparition ou la progression de défauts de rail internes, ce qui accroît les risques de déraillements causés par la rupture d'un rail.
    2. Si des rails présentant des défauts de fatigue demeurent en service, les risques de défaillance en service et de déraillement augmentent, et ce, même si les rails n'ont pas encore atteint leurs limites d'usure.

    Autres faits établis

    1. Le bout est du rail rompu a pu résister aux dommages causés par l'important martèlement sans se briser davantage, car les wagons étaient vides et les éclisses renforçaient la section du rail rompu.
    2. Les tronçons non signalisés, comme la subdivision de Crowsnest, ne comportent aucun dispositif de détection automatique des ruptures de rail.

    Mesures de sécurité

    Le Bureau n'a connaissance d'aucune mesure prise jusqu'à présent par des personnes directement concernées ou par d'autres parties par suite de l'événement à l'étude.

    Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le Le rapport a été officiellement publié le

    Annexes

    Annexe A – Autres incidents similaires

    Depuis 2005, le BST a enquêté sur 7 autres événements similaires où des ruptures de rail ont constitué la cause première ou un facteur contributif d'un déraillement. Dans ces événements, la rupture de rail s'est produite lorsqu'un défaut de rail préexistant que les auscultations par ultrasons n'avait pas détecté s'est aggravé jusqu'au point de rupture.

    R14W0256 – Le 7 octobre 2014, le train de marchandises A40541-05 des Chemins de fer nationaux du Canada (CN) roulait vers l'ouest dans la subdivision de Margo du CN lorsque 26 de ses wagons ont déraillé, dont 6 wagons-citernes chargés de marchandises dangereuses, au point milliaire 74,58, près de Clair (Saskatchewan). Deux des wagons-citernes, qui étaient chargés de distillats du pétrole (UN 1268), ont déversé leur produit, lequel a ensuite pris feu. Par mesure de précaution, on a évacué 100 résidents dans un rayon de 2 milles et on a fermé la route provinciale 5.

    R13E0142 – Le 19 octobre 2013, le train de marchandises M30351-18 du CN, au départ d'Edmonton (Alberta) et à destination de Vancouver (Colombie-Britannique), roulait vers l'ouest lorsque 13 wagons, soit 4 wagons-citernes contenant du pétrole brut et 9 wagons-citernes chargés de gaz de pétrole liquéfié (GPL), ont déraillé au point milliaire 57,25 de la subdivision de Edson, près de Gainford (Alberta). Deux des wagons-citernes de GPL déraillés ont subi des brèches et se sont enflammés. Un 3e wagon-citerne de GPL a pris feu quand du produit s'est échappé par sa soupape de sécurité. Le déraillement a détruit quelque 600 pieds de voie. Il n'y a eu aucun blessé. On a dû évacuer les résidents de 106 maisons situées dans les environs du déraillement.

    R11C0118 – Le 21 octobre 2011, le train de marchandises Q11531-18 du CN, au départ de Mirror (Alberta) et à destination de Calgary (Alberta), roulait vers le sud dans la subdivision de Three Hills lorsque 13 wagons ont déraillé au point milliaire 13,2, près d'Alix Junction (Alberta). Les wagons déraillés transportaient des conteneurs, dont certains étaient chargés de marchandises dangereuses. Quelque 900 litres d'acide phosphorique se sont déversés et 400 pieds de voie ont été détruits.

    R10C0086 – Le 3 août 2010, le train de marchandises 2-269-02 du CP, au départ de Red Deer (Alberta) et à destination de Calgary (Alberta), roulait en direction sud dans la subdivision de Red Deer lorsque 32 wagons ont déraillé au point milliaire 21,4, près de Airdrie (Alberta). Parmi les wagons qui ont déraillé, 12 étaient des wagons‑citernes sous pression transportant de l'ammoniac anhydre (UN 1005). Il n'y a eu aucun déversement de produit ni aucune blessure.

    R09Q0047 – Le 21 novembre 2009, 10 wagons (5 wagons chargés et 5 wagons vides) du train de marchandises M-36521-21 du CN ont déraillé sur le pont ferroviaire enjambant la rivière des Envies, au point milliaire 6,53 de la subdivision Lac-Saint-Jean, près de Saint-Tite (Québec). Quelque 200 pieds de voie ont été endommagés et 1 travée de pont a été détruite. Il n'y a eu aucun déversement de produits dangereux ni aucune blessure.

    R08C0164 – Le 30 novembre 2008, le train de marchandises 356-196 du CP roulait en direction est entre Lethbridge et Bellcott (Alberta), lorsque 18 wagons-trémies couverts vides ont déraillé au point milliaire 45,62 de la subdivision de Taber, près de Burdett (Alberta). Il n'y a eu aucun déversement de produit ni aucune blessure.

    R05E0059 – Le 3 août 2005, le train de marchandises M30351-03 du CN, au départ d'Edmonton (Alberta) et à destination de Vancouver (Colombie-Britannique), roulait en direction ouest lorsque 43 wagons, dont 25 wagons chargés de mazout C (mazout lourd), 1 wagon chargé d'huile servant au traitement de poteaux et 1 wagon chargé de toluène (UN 1294), ont déraillé au point milliaire 49,4 de la subdivision d'Edson, près de Wabamun (Alberta). Il y a eu déversement d'environ 700 000 litres de mazout C et de 88 000 litres d'huile servant au traitement de poteaux.