Rapport d'enquête ferroviaire R16W0004

Déraillement en voie principale
Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada
Train de marchandises M31331-07
Point milliaire 13,45, subdivision de Redditt
Webster (Ontario)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 9 janvier 2016 à 8 h 2, heure normale du Centre, le train de marchandises M31331 07 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada circulait vers l'ouest dans la subdivision de Redditt à environ 46 mi/h lorsqu'un freinage d'urgence s'est déclenché au point milliaire 21,74, près de Webster (Ontario). Une inspection subséquente a permis de déterminer que 26 wagons (29 plateformes) avaient déraillé. Parmi les wagons qui ont déraillé se trouvaient 6 wagons-citernes de catégorie 111 contenant des résidus de carburant diesel (UN 1202). Personne n'a été blessé et aucun produit ne s'est déversé.

    Renseignements de base

    Le 9 janvier 2016, le train de marchandises M31331‑07 (le train) de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) a quitté Sioux Lookout (Ontario) à destination de Winnipeg (Manitoba). Le train de marchandises générales se composait de 3 locomotives en tête de train, de 22 wagons chargés, de 6 wagons vides et de 24 wagons-citernes de résidus. Il pesait 4143 tonnes et mesurait 3713 pieds de long. L'équipe était formée d'un mécanicien de locomotive et d'un chef de train. Les 2 membres de l'équipe répondaient aux exigences de leurs postes respectifs, connaissaient bien le territoire et se conformaient aux normes de repos et de condition physique.

    L'accident

    À 8 h 2 Note de bas de page 1, le train circulait en direction ouest à environ 46 mi/h dans la subdivision de Redditt du CN lorsqu'un freinage d'urgence s'est déclenché au point milliaire 21,74, près de Webster (Ontario) (figure 1).

    Figure 1. Emplacement du déraillement (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
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    Figure 1. Emplacement du déraillement (Source : Association des chemins de fer du Canada,  <em>Atlas des chemins de fer canadiens</em>, avec annotations du BST)

    L'inspection des lieux a permis de constater que les wagons 1 à 26 à partir des locomotives en tête de train (total de 29 plateformes) avaient déraillé. Parmi les wagons qui ont déraillé se trouvaient 6 wagons-citernes de catégorie 111 contenant des résidus de carburant diesel (UN 1202). Aucun produit ne s'est déversé et personne n'a été blessé.

    Au moment de l'événement, il y avait de faibles averses de neige, et la température était de −18 °C.

    Examen des lieux

    Le déraillement s'est produit sur une section de voie en alignement droit. Les wagons qui ont déraillé se sont immobilisés dans différentes positions le long de l'emprise. Le 1er wagon derrière les locomotives était un wagon plat intermodal à 5 plateformes (DTTX 760234) qui s'est immobilisé près du point milliaire 21,86. La 1re plateforme de ce 1er wagon derrière les locomotives n'a pas déraillé, mais les 4 plateformes menées ont dévalé le remblai du côté nord de la voie.

    Le 2e wagon à partir de la tête était un wagon plat intermodal chargé (DTTX 469967). Un essieu monté comprenant une roue de 33 pouces rompue a été repéré du côté nord de la voie, à côté du wagon renversé (photo 1). La roue rompue provenait de la position L1 du bogie menant (bout B) du wagon DTTX 469967.

    Avant le déraillement, la roue roulait sur le rail nord. Bien qu'il s'agissait de la 5e plateforme déraillée, c'était le premier wagon à quitter les rails. Le wagon DTTX 469967 s'est renversé et a dévalé le remblai du côté nord de la voie. Il a entraîné avec lui les 4 plateformes menées du 1er wagon à partir de la tête (DTTX 760234).

    Photo 1. Deux premiers wagons qui ont déraillé et essieu monté rompu (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 1. Deux premiers wagons qui ont déraillé et essieu monté rompu (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)

    Roue rompue

    La Griffin Wheel Company de Kansas City (Missouri) a fabriqué la roue L1 de 33 pouces en février 2012. Il s'agissait d'une roue monobloc à usinage unique et traitée thermiquement de catégorie C. L'entreprise Progress Rail a assemblé cet essieu monté à Mojave (Californie) en mars 2012, et l'essieu monté a été mis en service sur le wagon DTTX 469967 en avril 2012.

    Le 7 janvier 2016, 2 jours avant l'incident, 5 détecteurs de défauts de roues (DDR) du CN ont mesuré des charges d'impact de la roue L1 alors que le wagon circulait à la vitesse en voie ou à une vitesse proche de celle-ci. Aucune de ces charges d'impact n'excédait 70 kips Note de bas de page 2.

    À 7 h 48, environ 14 minutes avant l'événement, le train a franchi le DDR du CN à Hudson (Ontario), point milliaire 10,80, à une vitesse de 47 mi/h; ce détecteur a enregistré un impact réel de 99,3 kips pour la roue L1 du wagon DTTX 469967.

    Un examen initial de la roue L1 et de l'essieu monté no 1 a permis de constater que

    • plusieurs séparations de la table de roulement se sont produites;
    • le moyeu de la roue rompue était toujours fixé à l'essieu, mais avait glissé vers l'intérieur par rapport à la portée de calage (photo 2);
    • la table de roulement de la roue opposée présentait des dommages mécaniques correspondant à un contact prolongé avec le sol (photo 3).
    Photo 2. Essieu monté avec roue L1 rompue (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 2. Essieu monté avec roue L1 rompue (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Photo 3. Table de roulement de la roue R1 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 3. Table de roulement de la roue R1 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)

    Entre les points milliaires 13,35 et 21,00, 6 morceaux qui s'étaient séparés de la roue L1 de 33 pouces ont été récupérés, dont

    • 3 petits morceaux de la jante extérieure au point milliaire 13,35 (photo 4);
    • une 1re section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue au point milliaire 13,45 (photo 5);
    • une 2e section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue au point milliaire 20,55 (photo 6);
    • une 3e section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue au point milliaire 21,00 (photo 7).
    Photo 4. Morceaux de la jante extérieure retrouvés au point milliaire 13,35 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 4. Morceaux de la jante extérieure retrouvés au point milliaire 13,35 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Photo 5. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 13,45 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 5. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 13,45 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Photo 6. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 20,55 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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    Photo 6. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 20,55 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Photo 7. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 21,00 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
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     Photo 7. Section de la table de roulement avec une partie de la toile de roue retrouvée au point milliaire 21,00 (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)

    À partir du point milliaire 13,45, où la première section de la table de roulement s'est rompue de la toile de roue, la roue qui a déraillé a laissé des marques d'impact sur l'infrastructure en direction ouest. Le train a poursuivi sa route jusqu'à ce que l'essieu monté no 1 déraillé entre en contact avec les ouvrages de l'aiguillage est de la voie d'évitement de Webster, au point milliaire 20,40.

    La figure 2 identifie l'emplacement du DDR du CN à Hudson, les divers endroits où des morceaux de la roue L1 ont été récupérés, et l'endroit où le train s'est arrêté.

    Figure 2. Diagramme des lieux entre le détecteur de défauts de roues de Hudson (point milliaire 10,80) et l'endroit où le train s'est arrêté (point milliaire 21,86) (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
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    Figure 2. Diagramme des lieux entre le détecteur de défauts de roues de Hudson (point milliaire 10,80) et l'endroit où le train s'est arrêté (point milliaire 21,86) (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

    L'essieu monté no 1 et les morceaux récupérés de la roue L1 ont été envoyés au Laboratoire d'ingénierie du BST afin qu'ils soient examinés plus en détails.

    Wagon plat intermodal DTTX 469967

    Le wagon DTTX 469967 était un wagon à évidement central intermodal construit en juillet 1974. Il mesurait 76 pieds 10 pouces de long et avait un poids brut sur rail maximal de 220 000 livres. Son poids à vide était de 58 100 livres et sa limite de charge était de 161 900 livres. Au moment de l'événement, le wagon chargé pesait 201 842 livres.

    Renseignements sur la subdivision

    La subdivision de Redditt du CN s'étend vers l'ouest de Sioux Lookout (point milliaire 0,0) à Winnipeg (point milliaire 252,1). Les mouvements de train dans cette subdivision sont régis par le système de commande centralisée de la circulation autorisé en vertu du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada et supervisés par un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) en poste à Toronto (Ontario). La vitesse permise pour les trains de marchandises circulant en direction ouest dans le secteur du déraillement était de 45 mi/h. Au moment de l'événement, aucune limitation de vitesse n'était en vigueur.

    La voie était classée comme une voie de catégorie 4 selon le Règlement concernant la sécurité de la voie (aussi appelé Règlement sur la sécurité de la voie) approuvé par Transports Canada (TC). En 2015, 16 trains de marchandises en moyenne par jour passaient par la subdivision de Redditt et le trafic ferroviaire cumulatif pour l'année était de 42,48 millions de tonnes-milles brutes par mille.

    Renseignements sur la voie

    Au point milliaire 13,45, la voie était en alignement et présentait une rampe de 0,1 % dans le sens de la marche du train (vers l'ouest). La voie se composait de longs rails soudés de 136 lb posés sur des selles à double épaulement de 14 pouces et fixés à l'aide d'attaches Pandrol. La voie comptait environ 2640 traverses de béton par mille posées sur du ballast, conformément aux normes du CN.

    Le plus récent contrôle de l'état géométrique de la voie avant l'accident avait été effectué le 31 octobre 2015 à l'aide de la voiture d'auscultation 1057 du CN. Cette inspection n'avait révélé aucun défaut nécessitant une intervention urgente ou quasi urgente dans les environs du point milliaire 13,45. Le 1er janvier 2016, la Sperry Rail Service avait soumis la voie à une auscultation par ultrasons à l'aide de la voiture d'auscultation 760. Aucun défaut de rail n'avait été détecté dans les environs du déraillement. Le 8 janvier 2016, le superviseur de la voie avait effectué une inspection visuelle dans les environs du point milliaire 13,45 et n'avait rien remarqué d'anormal.

    Détecteurs de défauts de roues

    La mise au point et la mise en œuvre de la technologie des DDR découlent d'une initiative de l'industrie afin d'améliorer la sécurité ferroviaire en identifiant de façon proactive les défauts de table de roulement des roues pouvant produire des charges d'impact élevées. Les roues peuvent ainsi être retirées du service avant qu'elles n'endommagent le matériel roulant ou l'infrastructure de la voie ou qu'elles subissent une rupture alors qu'elles sont en service.

    Les DDR sont généralement installés sur une voie en alignement droit dont la vitesse est de 50 mi/h dans le but d'enregistrer les charges d'impact de roues à la vitesse permise sur la voie. La charge d'impact mesurée est directement liée à la vitesse : plus le train circule rapidement, plus les charges d'impact de roues mesurées seront élevées en présence d'un défaut de la table de roulement. De même, plus le train circule lentement à la hauteur d'un DDR, plus les charges d'impact de roues seront réduites.

    La charge d'impact d'une roue sur le rail est mesurée à l'aide d'un système extensométrique ou d'un système fondé sur un accéléromètre. Le système extensométrique estime la charge exercée sur le rail en établissant une relation mathématique entre la charge appliquée et le fléchissement au patin du rail. Les jauges extensométriques sont placées sur l'âme du rail, à environ mi-hauteur du sommet du champignon. L'effort dans le rail est utilisé comme une mesure directe de la charge exercée sur le champignon du rail.

    Le Règlement concernant l'inspection et la sécurité des wagons de marchandises approuvé par TC ne renferme aucune disposition sur le retrait des roues en service en raison de charges d'impact élevées. Il n'y a en ce moment aucune exigence réglementaire ni aucune ligne directrice sur les seuils des DDR au Canada et aux États-Unis.

    En réponse à l'avis de sécurité ferroviaire 11/11 du BST au sujet de roues rompues dont les lectures antérieures de DDR atteignent les seuils critiques de l'AAR, TC a indiqué

    • qu'il créerait un forum conjointement avec l'industrie visant à examiner en profondeur les critères des systèmes d'inspection en bordure de voie et des DDR;
    • qu'il pourrait, à partir de cet examen, créer des lignes directrices, normes ou règles sur l'utilisation des systèmes d'inspection en bordure de voie, y compris les DDR.

    En octobre 2016, aucun progrès n'avait été noté de la part de TC au sujet de lignes directrices, normes ou règles sur l'utilisation de la technologie des DDR.

    Seuils de retrait des roues de l'Association of American Railroads dictés par les détecteurs de défauts de roues

    La règle 41 du Field Manual of the AAR Interchange Rules de 2016 de l'Association of American Railroads (AAR) stipule en partie ce qui suit :

    [Traduction]

    Règle 41

    DÉFAUTS DES ROUES EN ACIER – RESPONSABILITÉ DU PROPRIÉTAIRE

    A.1. Valeur critique en tout temps

    […]

    r. Excentration des roues ou impact de 90 000 livres (90 kips) ou plus

    (1) Détection par un DDR ayant mesuré un impact de 90 000 livres (90 kips) ou plus pour une seule roue. Le détecteur utilisé doit être conforme aux exigences d'étalonnage et de validation de la norme S-1601 de la section F du Manual of Standards and Recommended Practices (MSRP). Il doit mesurer fidèlement les charges d'impact maximales et fournir un relevé imprimable des mesures. Il faut conserver des registres d'étalonnage du dispositif. Les roues dont la table de roulement présente des méplats critiques sont la responsabilité du réseau acheminant et ne doivent pas être facturées autrement.

    […]

    A.2. Valeur critique lorsqu'un wagon se trouve dans un atelier ou sur une voie de réparation pour une raison quelconque

    […]

    e. Détection par un DDR mesurant un impact maximal entre 80 kips et moins de 90 kips sur une seule roue. Le détecteur utilisé doit avoir été étalonné selon la norme S-1601 de la section F du MSRP. Il doit mesurer fidèlement les charges d'impact maximales et fournir un relevé imprimable des mesures. Il faut conserver des registres d'étalonnage du dispositif. Les roues dont la table de roulement présente des méplats critiques sont la responsabilité du réseau acheminant et ne doivent pas être facturées autrement. Il s'agit alors d'une réparation opportune pour la partie qui exécute les travaux. Conformément à la règle 41.E.8.c, il ne faut pas peindre au pochoir la mention « SCRAP » sur les roues retirées pour cette raison.

    Le comité de l'AAR responsable des roues, des essieux, des roulements et des lubrifiants a été chargé de l'élaboration et de la mise en œuvre de la règle 41. Sa décision de fixer la limite de réforme à 90 kips était fondée sur un certain nombre d'études techniques menées au début des années 1990 Note de bas de page 3. Les analyses techniques de ces études établissent que la valeur de 90 kips est un seuil raisonnable pour le retrait des roues, qui permettrait de limiter les dommages causés au matériel roulant et à l'infrastructure de la voie.

    Seuils des détecteurs de défauts de roues

    En plus des limites de réforme des roues selon les charges d'impact établies par l'AAR, les compagnies ferroviaires ont fixé leurs propres seuils pour leur retrait. Habituellement, ces seuils ne sont pas fondés sur une analyse technique, mais sur les pratiques et conditions d'exploitation de chaque compagnie ferroviaire, ainsi que sur leur capacité à gérer la quantité de roues retirées en raison des charges d'impact mesurées par des DDR. Les seuils des DDR pour le retrait des roues varient d'une compagnie ferroviaire à l'autre et ont évolué avec les années.

    Les seuils des DDR des chemins de fer tiennent compte de la charge d'impact mesurée et de la charge d'impact calculée pour une roue donnée. La charge d'impact mesurée est la charge d'impact réelle de la roue enregistrée à la vitesse permise sur la voie, qui est généralement de 50 mi/h. Les compagnies ferroviaires canadiennes de catégorie I rajustent aussi généralement la charge d'impact mesurée à l'aide d'un algorithme pondéré en fonction de la vitesse pour obtenir la charge d'impact calculée. L'utilisation de cet algorithme est une mesure proactive qui enregistre la charge d'impact réelle à une basse vitesse et qui, par régression linéaire, transpose la charge d'impact à une vitesse de 50 mi/h. Ce calcul permet à un chemin de fer d'évaluer toutes les charges d'impact à une vitesse normalisée de 50 mi/h.

    Toutefois, l'algorithme peut différer d'un chemin de fer à l'autre et tient compte du type de défaut de roue, de la conversion à basse vitesse et d'une linéarité théorique. C'est pourquoi la valeur d'impact calculée n'est pas considérée comme aussi précise que la valeur d'impact mesurée. De plus, l'AAR n'a pas défini de seuils de retrait des roues fondés sur des valeurs calculées.

    Seuils des détecteurs de défauts de roues des compagnies ferroviaires canadiennes

    Lignes directrices de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada sur les alertes et alarmes des détecteurs de défauts de roues des wagons de marchandises

    Le CN a établi les seuils d'alarme suivants pour les charges d'impact mesurées (maximales) de 140 kips ou plus enregistrées par ses DDR :

    • Pour les wagons ayant obtenu une seule lecture de charge d'impact de plus de 160 kips, ou une seule lecture de charge d'impact calculée de 200 kips, le CCF doit immédiatement réduire la vitesse du train à 25 mi/h. Si la charge d'impact est mesurée sur un train entrant, le wagon doit être laissé au terminal. Si la charge d'impact est mesurée sur un train sortant, le wagon doit être laissé à la première voie d'évitement désignée. Le wagon sera déclaré avarié Note de bas de page 4 par le contrôleur de la circulation ferroviaire – Mécanique (CCFM) qui y apposera une étiquette affichant le code WI et se chargera d'informer le personnel responsable des réparations.
    • Dans le cas des wagons ayant obtenu une seule lecture de charge d'impact entre 150 kips et 159 kips, le CCF doit immédiatement limiter la vitesse du train de 10 mi/h sous la vitesse enregistrée au DDR. Le CCF décidera alors si le wagon devrait être laissé au terminal d'arrivée (si le wagon est entrant) ou au premier emplacement de garage désigné (si le wagon est sortant). Si aucun des emplacements ne convient, le wagon peut être laissé à un autre endroit pratique, mais ne devrait jamais être déplacé au-delà du prochain emplacement, où une inspection autorisée de wagons sera effectuée. Le wagon sera déclaré avarié par le CCFM qui y apposera une étiquette affichant le code WI et se chargera d'informer le personnel responsable des réparations.
    • Dans le cas des wagons ayant obtenu une seule lecture de charge d'impact entre 140 kips et 149 kips, le CCF doit immédiatement limiter la vitesse du train de 5 mi/h sous la vitesse enregistrée au DDR. Si la température au DDR est de −25 °C (−13 °F) ou plus froide, le train doit rouler à une vitesse de 10 mi/h sous celle enregistrée au DDR. Le CCF décidera alors si le wagon doit être laissé au terminal d'arrivée (si le wagon est entrant) ou au premier emplacement de garage désigné (si le wagon est sortant). Si aucun des emplacements ne convient, le wagon peut être laissé à un autre endroit pratique, mais ne devrait jamais être déplacé au-delà du prochain emplacement, où une inspection autorisée de wagons sera effectuée. Le wagon sera déclaré avarié par le CCFM qui y apposera une étiquette affichant le code WI et se chargera d'informer le personnel responsable des réparations.

    Dans chacun des cas ci-dessus, la roue en cause doit être remplacée avant que le wagon ne soit remis en service.

    En plus des seuils des DDR pour les charges d'impact mesurées (maximales) supérieures à 140 kips, le CN a établi des lignes directrices en matière d'entretien pour les wagons dont les charges d'impact mesurées (maximales) sont de 80 kips à 139 kips. Les lignes directrices précisent ce qui suit :

    • Les wagons qui arrivent d'un échange au CN et qui ont des charges d'impact sont automatiquement identifiés.
    • Dans le cas de charges d'impact entre 80 et 89 kips, les essieux montés doivent être réparés lorsque les wagons sont laissés dans un atelier ou sur une voie de réparation, conformément à la règle 41 de l'AAR; il s'agit alors de réparations opportunes.
    • Même si la règle 41 de l'AAR stipule que les essieux montés générant des charges d'impact mesurées entre 90 et 139 kips doivent être retirés dans tous les cas, le CN les traite comme des réparations opportunes et les essieux montés sont retirés lorsque le wagon est vide ou chargé au prochain emplacement où une inspection autorisée de wagons sera effectuée.

    Lignes directrices du Chemin de fer Canadien Pacifique sur les seuils des détecteurs de défauts de roues

    Le Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) a élaboré et mis en œuvre les lignes directrices suivantes sur les seuils d'alarme des DDR :

    • Dans le nord de l'Ontario, le CP exige que tout wagon générant des charges d'impact de roues mesurées de 130 kips ou plus ou des charges d'impact de roues calculées de 150 kips ou plus Note de bas de page 5 soit immédiatement déclaré avarié.
    • Dans le reste du réseau du CP, les lignes directrices sur les DDR exigent qu'un wagon soit immédiatement déclaré avarié quand les charges d'impact de roues mesurées sont de 140 kips ou plus et les charges d'impact calculées sont de 170 kips ou plus. Lorsqu'un wagon est déclaré avarié, la vitesse du train est réduite, et le wagon est laissé au prochain emplacement de réparation indiqué.
    • Lorsque les charges d'impact calculées sont de 100 kips ou plus, le CP exige que le wagon soit déclaré avarié une fois vide. Grâce à cette exigence, le wagon peut se rendre jusqu'à sa destination, sans restrictions, et être réparé une fois qu'il est vide.
    • Dans le cas des charges d'impact calculées entre 90 et 110 kips, le CP a défini un certain nombre de seuils opportuns (OP1 à OP4). Le CP signale alors le wagon dans son système de gestion informatisé des wagons, sans le désigner comme étant avarié. Le wagon peut circuler jusqu'à sa destination, sans restrictions, et être réparé au moment où les activités d'exploitation le permettent. Toutefois, le wagon peut aussi être remis en service sans le remplacement préalable de l'essieu monté en cause.

    Examen du Laboratoire d'ingénierie du BST

    Le Laboratoire d'ingénierie du BST a procédé à un examen détaillé de la roue L1 rompue du wagon DTTX 469967 et a fait les constatations suivantes :

    • La roue de 33 pouces respectait les limites de l'AAR sur la largeur et la hauteur du boudin et sur l'épaisseur de la jante.
    • La dureté et la composition chimique de la roue de 33 pouces respectaient les spécifications de l'AAR sur les roues de catégorie C.
    • Un contrôle magnétoscopique par voie humide des morceaux de la roue n'a pas permis de constater de fissures sur la surface extérieure de la toile de roue.
    • Une fissure verticale de la jante, qui s'est formée sous la surface de la table de roulement, a causé la rupture de la roue. La fissure verticale de la jante s'étendait sur environ 43 ¾ pouces dans la circonférence de la roue (figure 3).
    Figure 3. Morceaux récupérés de la roue de 33 pouces (Remarque : Les directions de la propagation observées sur les surfaces de rupture de la toile de roue [flèches rouges] et de la fissure verticale de la jante [flèches jaunes] sont indiquées. Le point d'origine de la fissure verticale de la jante est encerclé en jaune. Les flèches bleues sur le morceau P1 indiquent la partie de la fissure de la table de roulement causée par une contrainte excessive.)
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    Figure 3. Morceaux récupérés de la roue de 33 pouces (Remarque : Les directions de la propagation observées sur les surfaces de rupture de la toile de roue [flèches rouges] et de la fissure verticale de la jante [flèches jaunes] sont indiquées. Le point d'origine de la fissure verticale de la jante est encerclé en jaune. Les flèches bleues sur le morceau P1 indiquent la partie de la fissure de la table de roulement causée par une contrainte excessive.)
    • À un certain moment avant l'événement, une fissure verticale de la jante s'est formée à environ ½ pouce sous la surface de roulement. Il n'a pas été possible d'identifier le point d'origine de la fissure en raison des dommages considérables consécutifs à la rupture.
    • La fissure verticale de la jante s'est ensuite propagée dans la jante, vers la toile de roue.
    • Un morceau de la table de roulement correspondant à la fissure verticale initiale de la jante s'est probablement séparé de la roue avant le point milliaire 13,35, mais il n'a pas été récupéré.
    • La fissure verticale de la jante s'est propagée dans la circonférence de la roue à partir de la fissure initiale, de manière progressive d'un côté et par contrainte excessive de l'autre côté, ce qui a causé la séparation de la jante en 3 morceaux au point milliaire 13,35.
    • Lorsque les morceaux de la jante se sont séparés de la roue, la charge d'impact de la roue a considérablement augmenté, ce qui a probablement causé la rupture par contrainte excessive de la toile de roue et la séparation du morceau P1 (figure 3) au point milliaire 13,45.
    • La rupture par contrainte excessive s'est propagée à l'alésage du moyeu, ce qui a causé la défaillance du joint à ajustement serré entre le moyeu de la roue et l'essieu et entraîné le déplacement de la roue vers l'intérieur. De plus, la roue opposée s'est probablement déplacée vers l'intérieur environ au même moment.
    • Le train a traîné la partie restante de la roue L1 sur les traverses et le ballast, ce qui a causé l'usure constatée sur la table de roulement des morceaux P2 et P3 (figure 3). Ces morceaux se sont finalement séparés, et ont été récupérés aux points milliaires 20,55 et 21,00, respectivement, près de l'endroit où les wagons qui ont déraillé se sont immobilisés (au point milliaire 21,86).

    Ruptures causées par une fissure verticale de la jante

    Les ruptures de roue causées par une fissure verticale de la jante sont un phénomène qui continue d'être étudié par l'industrie ferroviaire et qui n'est pas encore complètement compris. Ce type de rupture de roue, qui peut être initiée par des défauts de la table de roulement (y compris les criques, les écailles Note de bas de page 6 et les éclats Note de bas de page 7), a tendance à se former au bas d'un défaut de table de roulement.

    Selon des recherches sur les réseaux de contraintes résiduelles des roues et les fissures verticales de la jante, les roues de catégorie C, usées et en service, présentent des contraintes de compression résiduelles de la table de roulement qui sont équilibrées par les contraintes de traction axiales présentes plus profondément dans la jante Note de bas de page 8. Lorsque des fissures de la table de roulement se propagent dans cette zone de contraintes de traction axiales sous la surface, des charges en service supplémentaires peuvent causer une fissure verticale de la jante. La table de roulement des roues susceptibles de faire l'objet de fissures verticales de la jante ou générant des charges d'impact mesurées élevées ne présente pas toujours de dommages considérables. Dans de tels cas, la détérioration de la table de roulement peut se produire rapidement, et les DDR peuvent ne pas la détecter.

    Le Transportation Technology Center, Inc. (TTCI) a effectué une étude Note de bas de page 9 dans le cadre de laquelle il a examiné 24 roues rompues. Il a constaté qu'une fissure verticale de la jante était à l'origine de la rupture de 17 (71 %) de ces roues. Des données historiques de DDR étaient disponibles pour 12 des roues rompues examinées. De ces 12 roues, 6 ont généré des charges d'impact supérieures à 90 kips avant leur rupture.

    Déraillements précédents attribuables à des charges d'impact de roues

    L'acier des rails est reconnu pour sa robustesse et sa ductilité réduites à basse température, surtout si un défaut du rail agit comme concentrateur de contraintes. L'industrie reconnaît aussi que les roues qui produisent des charges d'impact élevées peuvent endommager le matériel (roues, essieux, roulements et fusées) et l'infrastructure de la voie, provoquant principalement des ruptures de roue ou de rail.

    Le BST a effectué un suivi détaillé de 7 événements (y compris le présent déraillement) causés par des ruptures de roue ou de rail résultant de charges d'impact de roues (annexe A). Dans les 7 événements, un DDR du chemin de fer avait détecté des wagons dont les charges d'impact enregistrées étaient supérieures au seuil de retrait des roues établi par l'AAR (90 kips), mais inférieures au seuil du DDR ou de retrait des essieux montés du chemin de fer. Les roues présentaient une fissure verticale de la jante dans 5 de ces événements. Comme il n'existe pas de règlements, de règles ou de lignes directrices sur le retrait des roues qui génèrent d'importantes charges d'impact enregistrées, les essieux montés sont demeurés en service et ont causé un déraillement.

    Rapport du laboratoire du BST

    Le BST a complété le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP 023/2016 – Examination of Wheelset (examen de l'essieu monté)

    Analyse

    Le train circulait conformément aux règlements et aux instructions de la compagnie. Dans les environs du secteur de l'événement, aucun défaut de voie n'a été constaté comme pouvant être une cause ou un facteur contributif. L'analyse portera principalement sur la roue L1 rompue du wagon intermodal DTTX 469967, sur la détection des fissures verticales de la jante pouvant causer des ruptures de roue, et sur la surveillance réglementaire des seuils des détecteurs de défauts de roues (DDR).

    L'accident

    L'accident s'est produit lorsque la roue L1 du 2e wagon à partir de la tête (DTTX 469967) s'est progressivement rompue en raison d'une fissure verticale de la jante qui existait depuis un certain temps. La fissure verticale de la jante s'est propagée dans la circonférence de la roue sur 43 ¾ pouces depuis son point d'origine, ce qui a causé la séparation de 3 morceaux de la jante au point milliaire 13,35.

    L'écart dans la table de roulement de la roue a engendré d'importantes charges d'impact cycliques, ce qui a favorisé la propagation d'une rupture fragile par contrainte excessive et la séparation d'une partie plus grande de la table de roulement/toile de roue. La rupture par contrainte excessive s'est ensuite propagée à l'alésage du moyeu, ce qui a causé la défaillance du joint à ajustement serré de la roue L1 sur la portée de calage de l'essieu et entraîné le déplacement de la roue vers l'intérieur. La roue est ensuite tombée entre les rails au point milliaire 13,45 (le point initial du déraillement).

    Le train a traîné la partie restante de la roue L1 sur les traverses et le ballast, jusqu'à ce que l'essieu monté no 1 entre en contact avec les ouvrages de l'aiguillage est de la voie d'évitement de Webster, au point milliaire 20,40. Étant donné que 2 gros morceaux de la table de roulement/toile de roue se sont séparés aux points milliaires 20,55 et 21,00, un freinage d'urgence s'est déclenché au point milliaire 21,74, et la tête du train s'est immobilisée au point milliaire 21,86 après le déraillement des 26 premiers wagons (29 plateformes).

    Roue L1 rompue du wagon DTTX 469967

    Les attributs dimensionnels de la roue L1 du wagon DTTX 469967 respectaient les limites d'usure de l'Association of American Railroads (AAR). Les propriétés mécaniques et la composition chimique de la roue respectaient les spécifications de l'AAR sur les roues de catégorie C.

    Même si la roue L1 présentait une fissure verticale de la jante depuis un certain temps au moment de sa rupture, cette fissure s'était formée sous la surface de la table de roulement, ce qui rendait sa détection improbable. Par conséquent, aucun DDR n'a enregistré de charge d'impact critique pour la roue L1 avant le 9 janvier 2016. Toutefois, à 7 h 48, environ 14 minutes avant l'accident, le DDR du CN à Hudson (point milliaire 10,80) a enregistré une charge d'impact réelle de 99,3 kips générée par la roue L1. Même si la charge d'impact enregistrée dépassait le seuil critique des DDR de la règle 41 de l'AAR (90 kips), elle n'excédait pas le seuil de 160 kips établi par le CN pour les DDR. En vertu des lignes directrices du CN sur les DDR, la roue ne devait pas faire l'objet de mesures immédiates.

    Comme il n'y a aucune exigence réglementaire ou directive sur les seuils des DDR, les lignes directrices du chemin de fer sur les DDR ont été suivies, et le wagon a poursuivi sa route vers sa destination. Même si le DDR du CN à Hudson (point milliaire 10,80) a enregistré une charge d'impact critique de la roue L1 en vertu de la règle 41 de l'AAR, les lignes directrices du CN sur les DDR permettaient à la roue L1 du wagon DTTX 469967 de demeurer en service. La roue s'est rompue peu de temps après, à environ 2,5 milles à l'ouest du DDR.

    Ruptures causées par une fissure verticale de la jante

    Le BST a effectué un suivi détaillé de 7 événements (y compris le présent déraillement) causés par des ruptures de roue ou de rail résultant de charges d'impact de roues (annexe A). Dans les 7 événements, un DDR du chemin de fer avait détecté des wagons dont les charges d'impact enregistrées étaient supérieures au seuil de retrait des roues établi par l'AAR (90 kips), mais inférieures au seuil du DDR ou de retrait des essieux montés du chemin de fer. Dans 5 de ces événements, les roues se sont par la suite rompues en raison d'une fissure verticale de la jante. Comme il n'existe pas de règlements, de règles ou de lignes directrices sur le retrait des roues qui génèrent d'importantes charges d'impact enregistrées, les wagons et les essieux montés sont demeurés en service et ont causé un déraillement.

    Le Transportation Technology Centre Inc. (TTCI) a mené une étude dans le cadre de laquelle 24 roues rompues ont été examinées et qui a permis d'établir qu'une fissure verticale de la jante était à l'origine de la rupture de 17 (71 %) de ces roues. De plus, les données de DDR disponibles ont été examinées pour 12 des roues rompues et il a été établi que 6 (50 %) de ces roues avaient généré des charges d'impact enregistrées de plus de 90 kips avant leur rupture.

    Un certain nombre d'enquêtes du BST, des suivis détaillés du BST sur plusieurs événements mettant en cause la rupture d'une roue et l'étude du TTCI indiquent qu'une rupture de roue causée par une fissure verticale de la jante a causé au moins 11 déraillements confirmés, après qu'une roue a généré des charges d'impact supérieures à 90 kips (c.-à-d. le seuil critique de la règle 41 de l'AAR). Dans chacun de ces 11 événements, les lignes directrices du chemin de fer sur les DDR permettaient que la roue demeure en service sans qu'il soit nécessaire de prendre de mesures immédiates.

    Même si les ruptures de roue causées par une fissure verticale de la jante sont un phénomène qui continue d'être étudié et qui n'est pas encore complètement compris, on a relevé 11 cas de charges d'impact supérieures à 90 kips mesurées par DDR qui ont provoqué la rupture subséquente d'une roue en raison d'une fissure verticale de la jante.

    Seuils des détecteurs de défauts de roues de l'Association of American Railroads et de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    L'élaboration et l'installation de DDR constituent une initiative principalement mise en œuvre par l'industrie. Ces systèmes offrent un niveau de sécurité supplémentaire et s'ajoutent aux inspections visuelles des trains effectuées par le personnel des chemins de fer. En tant qu'outils de prévention, les DDR identifient les roues produisant des charges d'impact élevées pour qu'elles soient remplacées avant qu'elles ne causent des dommages à l'infrastructure de la voie ou au matériel roulant.

    Conformément à la règle 41 de l'AAR, toute roue générant des charges d'impact mesurées (réelles) de 90 kips (ou plus) doit être retirée dans tous les cas. Cela signifie que le chemin de fer peut arrêter le train, laisser le wagon, retirer et remplacer la roue et facturer les coûts de remplacement de la roue au propriétaire du wagon. De même, une roue qui produit une charge d'impact mesurée entre 80 kips et moins de 90 kips se situe à un seuil critique lorsque le wagon se trouve dans un atelier ou sur une voie de réparation pour une raison quelconque.

    Par comparaison, le CN reçoit automatiquement une alerte pour tout wagon produisant des charges d'impact mesurées entre 90 et 139 kips et le déclare avarié dans son système. Toutefois, l'alerte ou l'état avarié du wagon sont inactifs ou ne sont pas identifiés jusqu'à ce que le wagon atteigne son lieu d'inspection autorisée, ce qui peut être la destination finale du wagon dans certains cas. Le wagon n'est normalement assujetti à aucune restriction pendant son voyage vers sa destination.

    Comme des enquêtes du BST et une étude du TTCI l'ont démontré, les roues qui génèrent des charges d'impact supérieures au seuil critique de 90 kips de l'AAR, mais qui sont autorisées à demeurer en service en vertu des lignes directrices des chemins de fer, peuvent se rompre en raison d'une fissure verticale de la jante non décelée.

    Si les lignes directrices d'un chemin de fer sur les DDR ne fournissent pas de directives adéquates sur le traitement des charges d'impact critiques en vertu de la règle 41 de l'AAR, il y a un risque accru que des roues présentant des défauts naissants, comme une fissure verticale de la jante, ne soient pas détectées et retirées du service avant qu'elles ne se rompent.

    Surveillance réglementaire

    Le CN possède l'un des réseaux de DDR les plus complets en Amérique du Nord. Leur utilisation accrue a renforcé la sécurité ferroviaire, comme le démontre la grande quantité d'essieux montés retirés par le CN en vertu de ses propres seuils critiques et des seuils de la règle 41 de l'AAR. En dépit de ces améliorations, des ruptures de roue en service se produisent toujours et entraînent parfois des déraillements.

    Même si des liens de causalité sont depuis longtemps établis entre les charges d'impact de roues élevées et les ruptures de rail, les discussions sur la technologie des DDR portent principalement sur les seuils critiques. Selon la règle 41 de l'AAR, une roue produisant une charge d'impact mesurée (réelle) de 90 kips (ou plus) doit être retirée en tout temps, et une roue produisant une charge d'impact mesurée de 80 kips à moins de 90 kips se situe à un seuil critique lorsque le wagon se trouve dans un atelier ou sur une voie de réparation pour une raison quelconque. Ces seuils prescrits par l'AAR sont fondés sur des analyses techniques qui ont établi leur pertinence pour aider à limiter les dommages causés au matériel roulant et à l'infrastructure de la voie.

    Par contre, les seuils des DDR et les protocoles de retrait des roues varient d'un chemin de fer à l'autre. Le CN exige une intervention immédiate pour les wagons dont une roue génère une seule charge d'impact mesurée de plus de 160 kips ou calculée de 200 kips. Le Chemin de fer Canadien Pacifique (CP) exige que tout wagon soit immédiatement déclaré avarié lorsqu'il génère des charges d'impact de roues mesurées de 130 kips ou plus ou des charges d'impact de roues calculées de 150 kips ou plus lorsqu'il circule dans le nord de l'Ontario ou lorsqu'il génère des charges d'impact mesurées de 140 kips ou plus ou des charges d'impact calculées de 170 kips ou plus partout ailleurs au Canada.

    Les seuils des DDR des chemins de fer peuvent être jusqu'à 75 % plus élevés que le seuil critique de 90 kips de la règle 41 de l'AAR. Les chemins de fer ont établi les seuils des DDR selon les pratiques de l'industrie et non selon une analyse technique afin de faciliter la gestion des roues retirées en raison de charges d'impact mesurées par les DDR. Les seuils de retrait des roues des DDR varient d'un chemin de fer à l'autre.

    Le Règlement sur l'inspection et la sécurité des wagons approuvé par Transports Canada (TC) ne renferme aucune disposition sur le retrait des roues en raison de charges d'impact élevées. De plus, ni le Canada ni les États-Unis n'ont à l'heure actuelle d'exigences réglementaires ou de lignes directrices sur l'utilisation des systèmes d'inspection en bordure de voie, y compris les DDR. Par conséquent, l'emplacement des DDR, la distance entre ceux-ci et les seuils exigeant une intervention diffèrent d'un chemin de fer à l'autre. Les chemins de fer peuvent aussi modifier les seuils des DDR à leur gré afin de répondre aux besoins d'exploitation.

    Même si TC a indiqué qu'il créerait un forum mixte pour étudier en détails les critères des systèmes d'inspection en bordure de voie et des DDR, en date d'octobre 2016, aucun progrès n'avait été noté de la part de TC au sujet des lignes directrices, des normes ou des règles d'utilisation des DDR.

    En l'absence de seuils critiques des DDR dans le Règlement sur l'inspection et la sécurité des wagons approuvé par TC ou d'autres directives de TC, les lignes directrices des chemins de fer sur les DDR risquent d'être insuffisantes pour assurer une protection systématique contre les ruptures de roue.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. L'accident s'est produit lorsque la roue L1 du 2e wagon à partir de la tête (DTTX 469967) s'est progressivement rompue en raison d'une fissure verticale de la jante qui existait depuis un certain temps.
    2. La fissure verticale de la jante s'est propagée dans la circonférence de la roue sur 43 ¾ pouces depuis son point d'origine, ce qui a causé la séparation de 3 morceaux de la jante au point milliaire 13,35.
    3. L'écart dans la table de roulement de la roue a engendré d'importantes charges d'impact cycliques, ce qui a favorisé la propagation d'une rupture fragile par contrainte excessive et la séparation d'une partie plus grande de la table de roulement/toile de roue.
    4. La rupture par contrainte excessive s'est ensuite propagée à l'alésage du moyeu, ce qui a causé la défaillance du joint à ajustement serré de la roue L1 sur la portée de calage de l'essieu et entraîné le déplacement de la roue vers l'intérieur. La roue est ensuite tombée entre les rails au point milliaire 13,45 (le point initial du déraillement).
    5. Le train a traîné la partie restante de la roue L1 sur les traverses et le ballast, jusqu'à ce que l'essieu monté no 1 entre en contact avec les ouvrages de l'aiguillage est de la voie d'évitement de Webster, au point milliaire 20,40.
    6. Étant donné que 2 gros morceaux de la table de roulement/toile de roue se sont séparés aux points milliaires 20,55 et 21,00, un freinage d'urgence s'est déclenché au point milliaire 21,74, et la tête du train s'est immobilisée au point milliaire 21,86 après le déraillement des 26 premiers wagons (29 plateformes).
    7. Même si la roue L1 présentait une fissure verticale de la jante depuis un certain temps au moment de sa rupture, cette fissure s'était formée sous la surface de la table de roulement, ce qui rendait sa détection improbable.
    8. Même si le détecteur de défauts de roues (DDR) de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada à Hudson (point milliaire 10,80) a enregistré une charge d'impact critique en vertu de la règle 41 de l'Association of American Railroads, les lignes directrices de la compagnie sur les DDR permettaient à la roue L1 du wagon DTTX 469967 de demeurer en service, et la roue s'est rompue peu de temps après, à environ 2,5 milles à l'ouest du DDR.

    Faits établis quant aux risques

    1. Si les lignes directrices d'un chemin de fer sur les détecteurs de défauts de roues ne fournissent pas de directives adéquates sur le traitement des charges d'impact critiques en vertu de la règle 41 de l'Association of American Railroads, il y a un risque accru que des roues présentant des défauts naissants, comme une fissure verticale de la jante, ne soient pas détectées et retirées du service avant qu'elles ne se rompent.

    Autres faits établis

    1. Les attributs dimensionnels de la roue L1 du wagon DTTX 469967 respectaient les limites d'usure de l'Association of American Railroads.
    2. Les propriétés mécaniques et la composition chimique de la roue respectaient les spécifications de l'Association of American Railroads sur les roues de catégorie C.
    3. On a relevé 11 cas de charges d'impact supérieures à 90 kips mesurées par détecteur de défauts de roues qui ont provoqué la rupture subséquente d'une roue en raison d'une fissure verticale de la jante.
    4. En l'absence de seuils critiques des détecteurs de défauts de roues (DDR) dans le Règlement sur l'inspection et la sécurité des wagons approuvé par Transports Canada ou d'autres directives de Transports Canada, les lignes directrices des chemins de sur les DDR risquent d'être insuffisantes pour assurer une protection systématique contre les ruptures de roue.

    Mesures de sécurité

    Mesures prises

    Le Bureau n'est pas au courant si des mesures de sécurité ont été prises par suite du présent événement.

    Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

    Annexes

    Annexe A – Autres déraillements associés aux charges d'impact de roues

    Rapport d'enquête R99H0010 du BST : Le 30 décembre 1999, le train de marchandises U‑783-21-30 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) circulait en direction ouest sur la voie nord de la subdivision de Saint-Hyacinthe. Au point milliaire 50,84, près de Mont-Saint-Hilaire (Québec), des wagons du train ont déraillé et obstrué la voie principale sud adjacente. À peu près au même moment, le train de marchandises M-306-31-30 du CN circulait vers l'est sur la voie sud et est entré en collision avec les wagons du train U-783-21-30 qui venaient de dérailler. Deux membres de l'équipe du train M-306-31-30 ont été mortellement blessés.

    L'enquête a permis de déterminer qu'une préfissure existante du rail sud de la voie nord avait suffi à entraîner la rupture du rail sous l'effet des contraintes occasionnées sur le rail par les basses températures ambiantes et des charges d'impact de roues entre 103 et 112 kips,  charges qui étaient supérieures aux limites critiques de l'Association of American Railroads (AAR), mais inférieures aux seuils des détecteurs de défauts de roues (DDR) établis par le CN.

    Événement R03T0030 du BST Note de bas de page 10 : Le 23 janvier 2003, 29 wagons du train de marchandises 213-22 du Chemin de fer Canadien Pacifique (CP), composé de 23 wagons chargés et 69 wagons vides, ont déraillé au point milliaire 78,2 de la subdivision de White River, en Ontario, alors que le train roulait à 34 mi/h. La température au moment de l'événement était de −20 °C.

    Le déraillement s'est produit lorsque la roue R2 du 10e wagon à partir de la tête s'est rompue en raison d'une fissure verticale de la jante. Les charges d'impact engendrées par la roue rompue ont causé la rupture du rail sud, puis le déraillement. Deux jours avant, on avait enregistré des charges d'impact mesurées pour cette même roue de 99 kips à une vitesse de 30 mi/h, soit l'équivalent de charges d'impact calculées de 136,5 kips. Même si les charges d'impact mesurées étaient supérieures à la limite critique établie par la règle 41 de l'AAR (90 kips), les charges d'impact mesurées et calculées étaient inférieures aux seuils critiques établis par le CP pour ses DDR. Par conséquent, aucun entretien n'a été effectué sur l'essieu monté après l'enregistrement des charges d'impact.

    Rapport d'enquête R03T0064 du BST : Le 2 février 2003, pendant qu'il roulait à environ 37 mi/h, le train de marchandises 938-12 du CP a été inspecté à un emplacement de DDR situé près de Raith (Ontario), soit à quelque 59 milles (95 km) à l'ouest de Thunder Bay (Ontario). Bien qu'on n'ait pas relevé de charges d'impact supérieures à 140 kips, 4 des charges d'impact enregistrées avaient une valeur située entre 90 kips et 116 kips, ce qui équivalait à des charges d'impact calculées entre 109 kips et 144 kips. Même si les charges d'impact mesurées étaient supérieures à la limite critique de la règle 41 de l'AAR (90 kips), les charges d'impact mesurées et calculées étaient inférieures aux seuils critiques établis par le CP pour ses DDR. Aucun entretien n'a été effectué ou n'était requis.

    Le 13 février 2003, 21 wagons du même train, qui roulait en direction sud à une vitesse d'environ 42 mi/h, ont déraillé au point milliaire 39,5 de la subdivision de Parry Sound, près de Nobel (Ontario). L'enquête a établi que les charges d'impact de roues ont vraisemblablement occasionné une rupture fragile qui a pris naissance à la racine de la préfissure et est descendue jusqu'au patin du rail, entraînant la rupture catastrophique finale du rail.

    Rapport d'enquête R11V0039 du BST : Le 12 février 2011, le train-bloc de charbon C‑751‑51‑11 du CN roulait vers l'ouest sur la subdivision de Nechako à environ 45 mi/h lorsqu'un freinage d'urgence intempestif provenant de la conduite générale a été déclenché au point milliaire 93,45, près de Fort Fraser (Colombie-Britannique). Il a été déterminé que 36 wagons avaient déraillé.

    Le déraillement est survenu lorsque la roue L2 wagon BCNE 900534 s'est rompue de façon catastrophique en raison d'une fissure verticale de la jante Note de bas de page 11. Le point d'origine de la rupture se trouvait à la racine d'une écaille causée par la fatigue de contact de roulement et qui s'étendait sur la partie non supportée de la table de roulement sur le quart de la circonférence de la roue.

    Moins de 3 heures avant le déraillement, un DDR se trouvant à environ 78 milles avant le point de déraillement avait enregistré une charge d'impact de 94,4 kips pour cette roue. La même roue avait produit des charges d'impact supérieures à 80 kips à 3 autres occasions au cours des quelque 6 semaines précédentes. L'enquête a établi qu'il se peut que les politiques de la compagnie concernant les DDR ne fournissent pas l'orientation nécessaire pour déceler les défauts de roues naissants lorsque les charges d'impact sont supérieures aux limites critiques de la règle 41 de l'AAR, mais inférieures aux seuils fixés par la compagnie Note de bas de page 12.

    Événement R11T0072 du BST : Le 27 mars 2011, le train de marchandises M30511-26 du CN, transportant 97 wagons chargés et 19 wagons vides, circulait vers l'ouest à une vitesse d'environ 50 mi/h sur la subdivision de Kingston lorsqu'un freinage d'urgence provenant de la conduite générale a été déclenché; 25 wagons ont déraillé près de Port Hope, en Ontario (point milliaire 268,50). Le déraillement s'est produit lorsque la roue R4 du wagon-citerne PROX 43452 s'est rompue de façon catastrophique en raison d'une fissure verticale de la jante. Le point d'origine de la rupture était à la racine d'une écaille, à environ ¼ de pouce sous la table de roulement. La rupture a été causée par la fatigue de contact de roulement et s'est prolongée dans la partie non supportée de la table de roulement sur le quart de la circonférence de la roue Note de bas de page 13.

    Entre le 29 décembre 2010 et le 27 mars 2011, des DDR avaient enregistré des charges d'impact supérieures aux limites critiques de la règle 41 de l'AAR (90 kips) à 5 reprises pour la roue R4 du wagon PROX 43452. Une de ces charges d'impact était de 94,2 kips le jour du déraillement. Malgré les nombreuses charges d'impact supérieures aux seuils critiques de l'AAR et les multiples occasions de procéder à une inspection ciblée ou au retrait de la roue au cours des 3 mois qui ont précédé l'accident, la roue est demeurée en service jusqu'à ce qu'elle se rompe Note de bas de page 14.

    Rapport d'enquête R13T0060 du BST : Le 3 avril 2013, vers 7 h 50, heure avancée de l'Est, le train de marchandises 420-02 du CP circulait vers l'est à une vitesse d'environ 35 mi/h sur la subdivision de Heron Bay lorsqu'un freinage d'urgence intempestif s'est déclenché au point milliaire 9,16, près de White River (Ontario). L'inspection subséquente a permis de constater que 22 wagons (19 chargés et 3 vides) avaient déraillé et que 7 d'entre eux étaient des wagons-citernes de marchandises dangereuses transportant du pétrole brut (UN 1267). Au cours du déraillement, certains wagons ont roulé en bas d'un remblai. Deux des wagons-citernes de marchandises dangereuses ont déversé environ 101 700 litres de produit et 1 wagon-citerne de marchandises non dangereuses a laissé échapper quelque 18 000 litres de produit. Personne n'a été blessé.

    Le déraillement s'est produit après qu'un impact de la roue rompue R1 du 34e wagon (DBUX 302383) a rompu le rail sud (rail de la file basse) dans la courbe au point milliaire 9,41 sur la subdivision de Heron Bay. La roue R1 s'est rompue en raison d'une fissure verticale de la jante dont le point d'origine se trouvait à ½ pouce sous la surface de la table de roulement, à la racine d'une écaille, qui a entraîné la séparation de la jante de roue extérieure sur environ 80 pouces. À 6 reprises, des DDR avaient enregistré des charges d'impact de la roue R1 égaux aux limites critiques de la règle 41 de l'AAR ou dépassant ces limites. Toutefois, comme ces charges d'impact ne dépassaient pas les seuils critiques du CP, la roue est demeurée en service et s'est finalement rompue.