Sorties en bout de piste
Les sorties en bout de piste figurent sur la Liste de surveillance depuis 2010 et continuent de poser des risques pour les personnes, les biens et l’environnement. Bien que certains exploitants d’aéroports et Transports Canada (TC) aient pris certaines mesures, des sorties en bout de piste continuent de se produire.
Contexte
Chaque année, des millions de vols ont lieu sans incident au Canada. Pourtant, des sorties en bout de piste pendant l’atterrissage ou lors d’un décollage interrompu se produisent toujours. Ces sorties en bout de piste peuvent causer des dommages aux aéronefs et à l’environnement, des blessures et même des pertes de vie, surtout lorsqu’il n’y a pas d’aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) convenable ou de dispositif d’arrêt approprié.
Nombre d’événements
Du 1er janvier 2005 au 30 juin 2025, il y a eu en moyenne neuf sorties en bout de piste par année aux aérodromes canadiens (Figure 1), dont sept se sont produites à l’atterrissage. Alors que les chiffres varient d’une année à l’autre, il n’y a aucune tendance statistiquement significative. Le BST a enquêté sur 32 des 189 événements survenus au cours de cette période et a formulé six recommandations à l’intention des autorités canadiennes. Cinq recommandations sont toujours activesRecommandations A20-02, A20-01, A07-06, A07-05, et A07-01 du BST. et une est ferméeRecommandation A07-03 du BST.. Depuis le 1er avril 2022, 30 sorties en bout de piste ont été signalées au BST, dont huit ont donné lieu à des enquêtes comportant des faits établis ou des messages de sécurité.
Mesures prises
Les enjeux de la Liste de surveillance sont complexes et exigent la participation coordonnée des exploitants, des organismes de réglementation et d’autres intervenants. Même si des progrès ont été réalisés, il reste encore beaucoup à faire. À ce jour, les mesures suivantes ont été prises.
Mesures réglementaires
En janvier 2022, en réponse à la recommandation A07-06 du BST, TC a publié des dispositions qui :
- exige qu’une aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) de 150 m soit établie aux aéroports dont le nombre de passagers commerciaux s’élève à plus de 325 000 annuellement;
- exige la mise en place d’un système d’arrêt d’aéronef sur les pistes où une RESA de 150 m ne peut pas être établie.
Cependant, la réglementation n’est pas conforme aux normes de l’OACI, qui exigent un RESA de 150 m pour toutes les pistes de 1200 m ou plus, et recommandent un RESA de 300 m.
TC estime que la réglementation rehaussera la protection des passagers protection qui passera de 75 % (2017) à 95 % (2038). Pourtant, la réglementation ne concerne pas les petits aéroports, le trafic sans passagers et les dangers liés au relief au-delà des extrémités de piste. Cependant, certains aéroports se conforment volontairement aux normes et aux recommandations de l’OACI.
Sur les 16 sorties en bout de piste sur lesquelles le BST a enquêté entre 2013 et 2024, 10 se sont produites dans des aéroports de moins de 325 000 passagers.
Lorsque des contraintes géographiques limitent la conception et la construction de RESA adéquats, les dispositifs d’arrêt à matériau absorbant (EMAS) peuvent atténuer le risque. En mars 2025, 122 EMAS avaient été installés dans 70 aéroports aux États-UnisFederal Aviation Administration, “Two EMAS Systems Successfully Stop Aircraft in Separate Incidents” à l’adresse https://www.faa.gov/newsroom/two-emas-systems-successfully-stop-aircraft-separate-incidents (dernière consultation le 29 septembre 2025)., et à ce jour, aucun n’a été installé au Canada.
Initiatives de prévention
Depuis que l’enjeu des sorties en bout de piste est apparu sur la Liste de surveillance, plusieurs initiatives visant à réduire les risques ont été mises en œuvre. À la suite de plusieurs enquêtes, le BST a formulé les recommandations suivantes :
- Exigences relatives aux RESA (A07-06)
- Approches dans du temps convectif (A07-01)
- Considérations entourant les distances d’atterrissage (A07-05)
- Minimums d’atterrissage au Canada (A20-01 and A20-02)
En 2021, TC a instauré l’obligation d’utiliser le Global Reporting Format (GRF)Le format de compte rendu mondial de TC permet de déclarer deux contaminants de surface plutôt que l’unique contaminant permis par l’OACI (Source : Transports Canada, circulaire d’information (CI) No 700-057, à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/aviation/centre-reference/circulaires-information/circulaire-information-ci-no-700-057 [dernière consultation le 8 octobre 2025]). Cette différence permettra aux rapports canadiens d’être mieux harmonisés avec la Takeoff and Landing Performance Assessment (évaluation de la performance au décollage et à l’atterrissage) de la Federal Aviation Administration des États-Unis, qui permet aussi de déclarer deux contaminants., le document d’évaluation et de communication de l’état de la surface des pistes harmonisé à l’échelle mondiale mis au point par l’OACI. Le GRF fournit aux équipages de conduite de meilleurs renseignements sur le freinage prévu lorsqu’ils déterminent la performance à l’atterrissage.
À l’échelle mondiale, l’industrie aéronautique aborde l’enjeu des sorties en bout de piste à l’aide de solutions technologiques intégrées au poste de pilotage. Les systèmes embarqués de dépassement de piste et d’alerte (ROAAS)Avant que l’avion ne touche le sol, le ROAAS surveille de nombreux paramètres en vol et transmet des alertes aux pilotes si un atterrissage ne peut pas être effectué sur la distance d’atterrissage disponible d’une piste. Après le poser des roues, le ROAAS surveille l’efficacité du freinage et transmet des alertes aux pilotes si l’avion ne peut pas s’immobiliser dans la distance de piste restante. sont déjà utilisés dans de nombreuses flottes d’Airbus et de Boeing et peuvent être intégrés à d’autres types d’avions. L’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne s’apprête également à exigerAgence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne, Certification Specifications and Acceptable Means of Compliance for Large Aeroplanes (CS-25), modification 27 (24 novembre 2021), à l’adresse https://www.easa.europa.eu/downloads/136622/en (dernière consultation le 29 septembre 2025). l’installation de ROAAS sur les gros avions nouvellement conçus conformément à la partie 25, et exploités dans le transport aérien commercial; cependant, à l’heure actuelle, il n’y a aucune exigence réglementaire pour ces types de système d’avertissement et d’alerte au Canada.
Les exploitants aériens canadiens reconnaissent l’enjeu. Un sondage du BST effectué auprès des intervenants de l’industrie a révélé que la majorité des répondants avaient des processus de gestion de la sécurité qui avaient signalé l’enjeu des sorties en bout de piste, et avaient pris ou prenaient des mesures pour corriger la situation. Les mesures proactives comprennent l’application de critères d’approche stabilisée pour s’assurer que les aéronefs sont correctement configurés et qu’ils descendent en toute sécurité avant le toucher des roues, et le renforcement de la formation des pilotes pour améliorer la préparation aux conditions de piste difficiles et à la prise de décisions essentielles en vol.
Mesures à prendre
Les sorties en bout de piste au Canada constituent un sujet de préoccupation pour le BST depuis plus de deux décennies, ce qui souligne la nécessité d’avoir une stratégie de sécurité coordonnée et durable. Bien que l’élimination complète des manquements à la sécurité puisse être irréaliste, des améliorations significatives, en particulier en ce qui concerne les lacunes dans la réglementation, les infrastructures médiocres et les technologies obsolètes, sont essentielles.
Il est essentiel d’avoir des données relatives à la surface précises et en temps réel, surtout par mauvais temps, pour avoir des atterrissages en toute sécurité et prévenir les sorties en bout de piste. Le présent enjeu demeurera sur la Liste de surveillance du BST jusqu’à ce que :
- TC mette en œuvre et applique des restrictions d’atterrissage liées aux conditions météorologiques, dont les interdictions d’approche;
- les technologies d’alerte de sortie de piste soient largement adoptées par les exploitants assujettis à la sous-partie 705 du RAC;
- les comptes rendus de l’état des pistes et l’infrastructure soient améliorés aux aérodromes déficients dans ces domaines;
- les normes de l’OACI relatives aux RESA soient plus largement adoptées par les exploitants aéroportuaires.