Mooney M20C
Aéroport de Slave Lake (Alberta), 12 NM N
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Déroulement du vol
Le 31 août 2021, l’aéronef Mooney M20C sous immatriculation privée (immatriculation C-GTIJ, numéro de série 2901) effectuait un vol selon les règles de vol à vue (VFR) entre l’aérodrome de La Crête (CFN5) (Alberta) et l’aéroport international John G. Diefenbaker de Saskatoon (CYXE) (Saskatchewan). Le pilote était seul à bord.
À 8 h 16Note de bas de page 1, le pilote a appelé le Centre d’information de vol d’Edmonton pour déposer un plan de vol VFR. Selon la route prévue, il devait quitter CFN5 pour se rendre à l’aéroport de Slave Lake (CYZH) (Alberta), puis à l’aéroport de Lloydminster (CYLL) (Alberta) et, finalement, à CYXE. L’altitude prévue du vol était de 5500 pieds au‑dessus du niveau de la mer (ASL). Pendant l’appel, le spécialiste de l’information de vol a offert de fournir un exposé météorologique, mais le pilote a décliné l’offre et avisé le spécialiste qu’il avait déjà obtenu les renseignements météorologiques pour les aéroports situés le long de sa route. Le pilote avait conclu que les conditions respectaient les minimums VFR. Toutefois, il s’était rendu compte qu’il ne pourrait peut-être pas atteindre l’altitude prévue en raison de nuages.
Le pilote avait une tablette à bord et disposait d’un abonnement en vigueur pour utiliser un programme de planification des vols offert sur le marché. L’enquête n’a pas permis de confirmer si le pilote avait utilisé ou non le programme en question pour obtenir les renseignements météorologiques. Toutefois, l’enquête a révélé que le pilote avait appelé sa famille avant son départ et indiqué qu’il était au courant des mauvaises conditions météorologiques sur la route prévue, mais qu’il allait les éviter. Il avait emprunté cette route de nombreuses fois.
L’aéronef a décollé à 9 h dans des conditions météorologiques de vol à vue, pour d’abord monter à 3500 pieds ASL en direction sud (figures 1 et 2). En route vers CYZH, l’aéronef a atteint une altitude de 4000 pieds ASL avant de descendre, probablement à cause des plafonds de nuages. Lorsque l’aéronef se trouvait à 14 milles marins (NM) au nord de CYZH, le pilote a modifié sa destination de CYZH à CYLL dans l’appareil GPS (système de positionnement mondial). La trajectoire de l’aéronef a alors viré vers l’est, en direction de CYLL et d’un relief ascendant. À ce moment-là, l’aéronef évoluait à 3000 pieds ASL ou à 500 pieds au-dessus du relief.
À 10 h 11 min 40 s, l’aéronef est monté à 3550 pieds ASL, et sa vitesse sol a diminué pour passer de 125 nœuds à 68 nœuds. L’aéronef a ensuite amorcé une descente à 10 h 11 min 59 s, et il a poursuivi celle-ci jusqu’à peu après 10 h 12 min 9 s, lorsqu’il a percuté le relief dans une zone boisée à environ 3200 pieds ASL (figure 3). Les données GPS extraites du système numérique de surveillance de moteurNote de bas de page 2 ont indiqué que l’angle de descente de l’aéronef était d’environ 15° avant de heurter les arbres. Le taux de descente moyen était de 1680 pi/min jusqu’à quelques secondes avant l’impact, puis il a augmenté à plus de 2000 pi/min. Le pilote a été mortellement blessé. L’aéronef a été détruit. La radiobalise de repérage d’urgence s’est déclenchée.
Compte tenu des conditions météorologiques, les aéronefs de recherche et de sauvetage (SAR), basés à Slave Lake et à Cold Lake (Alberta) ainsi qu’à Comox (Colombie-Britannique), étaient cloués au sol au moment de l’événement et des recherches aériennes de la zone n’étaient pas possibles. Par conséquent, les premiers intervenants n’ont pas pu localiser le lieu de l’accident le jour même de l’événement. Le lieu de l’accident a été localisé le lendemain, et les techniciens SAR ont pu se rendre sur place 2 jours après l’événement.
Pilote
Le pilote était titulaire d’une licence de pilote privé et son certificat médical de catégorie 3 était valide. Il avait obtenu sa qualification de vol aux instruments en 1979. Les dossiers indiquent qu’il n’avait pas eu recours à ses privilèges de vol aux instruments depuis les 5 dernières années, et il ne satisfaisait pas aux exigences de mise à jour des connaissances qui lui permettaient de le faire.
Les dossiers indiquent également que le pilote totalisait environ 2800 heures de vol, dont 1259 à bord de l’aéronef à l’étude ou d’autres aéronefs Mooney M20.
Renseignements sur l’aéronef
L’aéronef d’aviation générale monomoteur à aile basse Mooney M20C comprend 4 sièges ainsi qu’un train d’atterrissage tricycle escamotable. L’aéronef à l’étude a été construit en 1964.
L’enquête n’a relevé aucun problème lié à l’équipement, à la maintenance ou à la certification de l’aéronef ayant pu nuire au fonctionnement normal de ce dernier durant le vol à l’étude.
L’aéronef à l’étude était équipé d’un appareil GPS Garmin GNS430. Outre les données de navigation, cet appareil peut fournir aux pilotes des avis visuels concernant le relief, mais il n’est pas certifié pour servir de système d’avertissement et d’alarme d’impact, conformément à la norme technique canadienne CAN-TSO-C151dNote de bas de page 3. L’enquête n’a pas permis de déterminer si cette fonction était utilisée au moment de l’événement.
L’aéronef n’était pas équipé d’un enregistreur de données de vol ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, et la réglementation ne l’exigeait pas.
Renseignements sur l’épave et sur l’impact
La zone entourant le lieu de l’accident était densément boisée. Les dommages à l’aéronef étaient caractéristiques d’un accident au cours duquel un aéronef heurte des arbres dans une assiette inclinée à droite. Après son impact avec les arbres, l’extrémité de l’aile droite s’est rompue et l’aéronef a poursuivi sa trajectoire vers le sol à un angle de 18°. L’aéronef a percuté le sol à environ 45 pieds du point où il a d’abord heurté les arbres. Cet impact est conforme à une perte de maîtrise de l’aéronef.
Les instruments de l’aéronef se trouvaient dans le tableau de bord ou dans l’épave à proximité du tableau de bord. Le calage altimétrique était réglé à 29,69 pouces de mercure (inHg)Note de bas de page 4. L’enquête a permis de déterminer qu’il n’y avait aucun signe de défaillance mécanique ni de mauvais fonctionnement des systèmes avant l’impact. Les dommages au moteur et à l’hélice indiquent que de la puissance était générée pendant la séquence d’impact. Aucune trace d’incendie n’a été relevée dans l’épave.
Renseignements météorologiques
Aucune observation météorologique n’est effectuée à CFN5. Au moment du décollage de l’aéronef, le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) diffusé à l’aéroport de High Level (CYOJ) (Alberta), c’est‑à‑dire la station d’observation la plus proche (32 NM au nord-ouest de CFN5), indiquait ce qui suit :
- vent soufflant du 360° vrai (V) à 9 nœuds
- visibilité de 15 milles terrestres (SM)
- plafond de nuages fragmentés à 11 000 pieds au-dessus du sol (AGL) et couvert nuageux à 26 000 pieds AGL
- température de 11 °C et point de rosée de 8 °C
- calage altimétrique de 29,86 inHg
La prévision d’aérodrome (TAF) publiée à 6 h 39 indiquait qu’à 9 h, les conditions à CYZH seraient les suivantes :
- vent soufflant du 050°V à 8 nœuds
- visibilité de 6 SM dans une faible pluie et de la brume
- nuages épars à 800 pieds AGL et plafond couvert à 1200 pieds AGL
Temporairement, soit de 9 h à 19 h le jour de l’événement, la TAF indiquait ce qui suit :
- visibilité de 3 SM dans de légères averses de pluie et de la brume
- plafond de nuages fragmentés à 800 pieds AGL et couvert nuageux à 1200 pieds AGL
Durant cette période, il y avait 30 % de probabilité que la visibilité soit de 3 SM dans des orages, de la pluie et de la brume, que le plafond soit couvert à 2000 pieds AGL et que des nuages cumulonimbus y soient encastrés.
Les prévisions pour la route figurant sur la prévision de zone graphique (GFA) (figure 4) indiquaient ce qui suit :
- plafond couvert de 4000 à 6000 pieds ASL avec le sommet des nuages à 20 000 pieds ASL
- nuages altocumulus castellanus fréquents avec des sommets à 24 000 pieds ASL
- visibilité de 3 SM à plus de 6 SM dans des averses de pluie ou de légères averses de pluie avec de la brume
La GFA indiquait également des nuages cumulonimbus isolés avec des sommets à 34 000 pieds ASL, entraînant une visibilité de 1 SM dans des orages, de la pluie et de la brume. Durant ces périodes, un plafond de bancs de nuages était prévu entre 600 et 1200 pieds AGL.
Au moment de l’événement, le système automatisé d’observations météorologiques (AWOS) de CYZH (12 NM au sud-ouest du lieu de l’accident) signalait ce qui suit :
- vent soufflant du 270°V à 6 nœuds
- visibilité de 9 SM
- plafond couvert à 1500 pieds AGL
- température de 13 °C et point de rosée de 12 °C
- calage altimétrique de 29,68 inHg
Règles de vol à vue dans des conditions météorologiques qui se dégradent
Les dangers associés à la poursuite d’un vol VFR dans des conditions météorologiques de vol aux instruments sont bien connus. Selon les données recueillies par le BST de 2000 à 2019, les accidents survenant lors de vols commençant dans des conditions météorologiques de vol à vue et se poursuivant jusqu’à ce que les pilotes perdent le contact visuel avec le sol ont un taux de mortalité élevé. Au cours de cette période de 20 ans, les accidents de ce type ont provoqué 115 morts.
Rapports de laboratoire du BST
Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :
- LP108-2021 – NVM Recovery – iPad [Récupération de la mémoire non volatile – iPad]
- LP113-2021 – Log book Restoration [Remise en état du carnet de vol]
- LP116-2021 – NVM Recovery – Digital Engine Monitor [Récupération de la mémoire non volatile – système numérique de surveillance de moteur]
- LP146-2021 – Instruments Analysis [Analyse des instruments]
Message de sécurité
On rappelle aux pilotes qu’il est difficile d’effectuer un vol VFR dans des conditions météorologiques marginales, comme un plafond bas, surtout si le vol se déroule au-dessus d’un relief ascendant. Les pilotes doivent bien planifier le vol et envisager des stratégies pour éviter de mauvaises conditions météorologiques, ainsi que prévoir des plans de rechange si ces conditions se présentent. Les vols VFR qui se poursuivent dans des conditions météorologiques de vol aux instruments aboutissent souvent à une collision mortelle avec le relief ou à une perte de maîtrise à cause d’une perte des repères visuels.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .