Rapport d'enquête maritime M11W0199

Heurt d'un poste à quai
Traversier roulier Queen of Coquitlam
Baie Departure, Nanaimo (Colombie-Britannique)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 18 novembre 2011, vers 14 h 12, heure normale du Pacifique, le Queen of Coquitlam s'approchait du poste à quai nº 2 dans la baie Departure (Colombie-Britannique) avec 1 de ses 2 moteurs principaux en marche et l'hélice avant non en prise. Le navire a dévié de cap et a heurté la défense du côté bâbord située à l'entrée du poste à quai. Il n'y a eu aucune victime ni pollution, mais l'avant bâbord du traversier et le tampon articulé de la défense a été endommagé.

    This report is also available in English.

    Renseignements de base

    Fiche technique du navire

    Nom du navire Queen of Coquitlam
    Numéro officiel 370060
    Port d’immatriculation Victoria (Colombie-Britannique)
    Pavillon Canada
    Type Traversier roulier amphidrome
    Jauge brute 13 646
    LongueurNote de bas de page 1 133 m
    Tirant d’eau Avant : 5,34 m
    Arrière : 5,4 m
    Construction 1976
    Propulsion 2 moteurs diesel MaK développant au total 8848 BHP (puissance au frein) et entraînant 2 hélices à pas variable (1 à chaque extrémité du navire)
    Passagers et véhicules 607 passagers et 229 véhicules
    Membres d’équipage 29
    Propriétaire enregistré et gestionnaire British Columbia Ferry Services Inc. (Colombie-Britannique)

    Renseignements sur le navire

    Photo 1. Queen of Coquitlam
    Image
    Queen of Coquitlam

    Le Queen of Coquitlam est un navire amphidrome doté d’une timonerie, d’une hélice à pas variable et d’un gouvernail à chaque extrémité du navire. La salle des machines est située au milieu du navire (annexe C). Les 2 extrémités du navire sont presque identiques et sont numérotées, aux fins d’identification, respectivement nº 1 et nº 2. L’emplacement de l’étrave du navire détermine les côtés bâbord et tribord et la numérotation des machines dans la salle des machines. Dans le présent cas, le personnel de quart de la passerelle était de faction à l’extrémité nº 1.

    Le navire est doté d’une ancre (avec guindeau, bloc d’alimentation et commandes) située dans un compartiment distinct dans la partie avant tribord du pont-garage principal à l’extrémité nº 1.

    Les timoneries nº 1 et nº 2 sont dotées d’un poste de manœuvre situé à l’avant du pupitre de barre, offrant à l’opérateur une vue dégagée vers l’avant. On y trouve des transmetteurs d’ordres et des leviers de commande de propulsion, ainsi que des commutateurs pneumatiques pour transférer les commandes d’une timonerie à l’autre et pour sélectionner le mode de propulsion du navire.

    La salle des machines contient 2 moteurs principaux, 3 moteurs auxiliaires servant à la production d’électricité, ainsi que leur équipement connexe. Deux arbres porte-hélice et des arbres intermédiaires relient les moteurs principaux aux hélices au moyen d’engrenages réducteurs.

    La salle de commande des machines est située dans la salle des machines. Elle contient le tableau de distribution électrique principal et des dispositifs permettant de commander à distance le démarrage ou l’arrêt des moteurs principaux et de leur équipement connexe et de les surveiller. Le côté intérieur de la salle de commande des machines est vitré, et les 2 moteurs principaux sont en partie visibles.

    Le poste de manœuvre de la salle des machines est situé dans la salle de commande des machines. On y trouve des transmetteurs d’ordres et des leviers de commande de propulsion, ainsi que des commandes pneumatiques pour engager ou désengager les embrayages, arrêter les moteurs principaux et faire le transfert des commandes de la salle des machines à la timonerie. On y trouve également des instruments de surveillance des moteurs principaux et de l’équipement auxiliaire, ainsi que des panneaux d’alarme.

    Modes de propulsion

    Il y a 2 moteurs principaux, chacun doté de 2 embrayages pneumatiques. Cet aménagement procure 2 façons d’actionner les hélices, désignées comme le mode 1 et le mode 2. Dans les 2 modes, les 2 moteurs principaux sont couplés mécaniquement et fonctionnent comme un seul moteur. Dans des conditions de fonctionnement normal, les 2 moteurs fournissent la puissance. Un moteur ou 2 moteurs principaux peuvent toutefois être utilisés dans les 2 modes de propulsion.

    La vitesse du navire est réglée par un combinateur pneumatique relié au levier de commande de propulsion, qui permet de modifier automatiquement le pas de l’hélice et la vitesse de rotation du moteur (tours/minute).

    Mode 1

    Ce mode est utilisé principalement lorsque le navire a terminé ses manœuvres et qu’il est en route pour la traversée Note de bas de page 2. Dans le mode 1, seule l’hélice arrière est utilisée. Selon la direction que prend le navire et le nombre de moteurs utilisé, l’hélice arrière peut être mise en prise en combinant les embrayages 1A et 2B ou les embrayages 1B et 2A (Figure 1). L’hélice avant est mise en drapeau afin de réduire la résistance à l’eau.

    Figure 1. Mode de propulsion 1
    Image
    Mode de propulsion 1

    Mode 2

    Ce mode est utilisé principalement pour les manœuvres d’accostage et d’appareillage. Dans ce mode, lorsque les 2 moteurs sont utilisés, les 4 embrayages sont tous engagés, entraînant les 2 hélices (Figure 2). Passer en mode 2 prend environ 90 secondes, soit le temps que prend l’hélice avant pour passer de la position en drapeau à un pas qui permet aux embrayages d’être mis en prise.

    Figure 2. Mode de propulsion 2
    Image
    Mode de propulsion 2

    Déroulement du voyage

    Au moment de l’événement, le Queen of Coquitlam était rattaché à Nanaimo (Colombie-Britannique) et naviguait entre la baie Departure et la baie HorseshoeNote de bas de page 3. La traversée est d’une longueur de 30 milles marins (nm) et prend environ 95 minutes.

    À 12 h 35Note de bas de page 4, le navire a quitté la gare maritime de la baie Horseshoe à destination de la baie Departure en mode de propulsion 2, avec 607 passagers, 229 véhicules et 29 membres d’équipage à bord. À 12 h 38, le navire est passé en mode de propulsion 1 avec les 2 moteurs en marche. Le premier lieutenant était de quart, et le navire progressait à 19,8 nœuds.

    À 13 h 31, une fuite de carburant de l’injecteur du cylindre B3 du moteur principal nº 1 a été observée. La fuite a été signalée au chef mécanicien (C/M) dans la salle de commande des machines. On a demandé à la passerelle de baisser le régime du moteur principal nº 1 afin de vérifier si cela pouvait réduire la fuite de carburant de l’injecteur. La fuite s’est poursuivie. Le personnel de la salle des machines a ensuite tenté de serrer les raccords des conduites de carburant de l’injecteur. Une fois les raccords serrés, on a demandé à la passerelle d’augmenter la vitesse pour vérifier si le serrage des raccords avait permis d’arrêter la fuite. L’injecteur continuait de laisser échapper du carburant. On a demandé à la passerelle d’arrêter le moteur principal nº 1 afin de le mettre hors service et de remplacer l’injecteur. Le capitaine a été informé que le moteur principal nº 1 serait mis hors service.

    À 13 h 41, le personnel de la salle des machines a amorcé la mise hors service du moteur principal nº 1. Il a également mis hors service les embrayages 1A et 1B, ce qui a isolé encore davantage le moteur de l’engrenage réducteur pendant que les mécaniciens travaillaient sur le moteur principal nº 1, conformément à la procédure dans le manuel propre au navire. Le C/M a décidé également de mettre hors service l’embrayage 2B qui relie le moteur principal nº 2 à l’hélice avant.

    À 14 h, le capitaine est arrivé sur la passerelle et a remplacé le premier lieutenant. À ce moment, le navire progressait à 16,8 nœuds par le travers de l’île Snake. À 14 h 7, le premier lieutenant a commencé à parcourir la liste de vérification avant l’accostage. Dans le cadre de cette procédure, le capitaine a tenté de passer en mode de propulsion 2 (mettant ainsi en prise l’hélice avant). À 14 h 8, on a demandé à la salle des machines de confirmer l’état du moteur principal nº 1 et de voir s’il pouvait être utilisé pour accoster. La salle des machines a confirmé que le moteur principal nº 1 était hors service et qu’il ne pourrait pas être utilisé pour le reste de la traversée. À 14 h 9, le navire est entré dans la baie Departure et le premier lieutenant a constaté que le navire n’était pas passé en mode 2. Le capitaine a appelé la salle des machines pour vérifier l’état du mode 2 et on l’a informé que le mode 2 n’était pas disponible. Le capitaine s’est préparé à accoster en utilisant le mode 1 (seulement l’hélice arrière) avec un seul moteur en marcheNote de bas de page 5.

    À 14 h 10, le capitaine a continué de tourner vers le port afin d’aligner le navire pour l’approche au poste à quai nº 2. Le navire progressait à 12 nœuds, et se trouvait à environ 5 encablures du poste à quai. À 14 h 11, le capitaine a mis le moteur en marche arrière afin de réduire la vitesse. À 14 h 12, l’étrave du navire a dévié de sa trajectoire à bâbord pour se diriger sur la défense la plus à l’extérieur du côté bâbord. Le capitaine a mis la barre à droite toute. Peu après, le capitaine a ordonné au premier lieutenant de donner des coups de sifflet d’avertissement et d’annoncer aux passagers la possibilité d’un accostage dur.

    À 14 h 12 min 30 s, le navire a heurté, avec le liston du côté bâbord, la défense et le tampon articulé du côté bâbord à une vitesse de 4,3 nœuds. À la suite de ce heurt, l’équipage a procédé à une évaluation initiale afin de vérifier s’il était sécuritaire de poursuivre l’accostage. Lorsque cette évaluation initiale a confirmé que cela était sécuritaire, le navire a repris l’accostage à 14 h 14 min 40 s.

    Certification

    Navire

    Le navire possédait les certificats, l’équipage et l’équipement exigés par la réglementation en cours. Il possédait en outre un certificat de gestion de la sécurité comme il est énoncé dans le Code international de gestion pour la sécurité de l’exploitation des navires et la prévention de la pollution (Code ISM).

    Personnel

    Le capitaine, les officiers et les membres de l’équipage étaient titulaires de certificats de compétences appropriés pour le voyage prévu et le type de navire auquel ils étaient affectés.

    Conditions environnementales

    À 14 h, la station météorologique régionale d’Environnement Canada à Nanaimo faisait état de vents de 15 km/h soufflant du nord-nord-ouest. On signalait pour la région un temps plutôt nuageux et la température était de 3,2 ºC.

    Le niveau de l’eau à marée haute à Nanaimo était de 4,4 m à 11 h 36 et de 2,7 m à marée basse à 18 h 13. À 14 h, la hauteur de la marée au port de Nanaimo était de 3,8 m au-dessus du zéro des cartes.

    Avaries au navire

    Les avaries au navire étaient confinées au liston avant du côté bâbord à l’extrémité nº 1 (Photo 2). Les couples 90 à 96 ont été endommagés sur une longueur d’environ 7 m et à une profondeur maximale de 1 m. Cela a provoqué une brèche dans la coque au compartiment du gouvernail à l’extrémité nº 1. Le placage de la superstructure attenante à cet endroit a également été déformé.

    Il y avait un renfoncement important dans le liston sur le côté bâbord de l’axe longitudinal du navire où le contact initial s’est produit. Ce renfoncement s’étendait sur une largeur d’environ 0,6 m et présentait une profondeur maximale de 0,1 m (Photo 3).

    Dommages au poste à quai

    Les dommages au poste à quai nº 2 (annexe B) étaient restreints aux défenses du côté bâbord. Cela comprend les dommages à la défense du côté bâbord la plus éloignée et à son tampon articulé. À cause de cette collision, le tampon articulé s’est complètement détaché de la défense et a coulé au fond de la mer. Les points de fixation entre la défense et le tampon articulé ont été arrachés (Photo 4).

    Photo 2. Dommage au liston du côté bâbord
    Image
    Dommage au liston du côté bâbord
    Photo 3. Dommage au liston près de l'axe longitudinal
    Image
    Dommage au liston près de l'axe longitudinal
    Photo 4. Défense du côté bâbord avec point de contact et tampon manquant
    Image
    Défense du côté bâbord avec point de contact et tampon manquant
    Photo 5. Défense et tampon articulé non endommagés du côté tribord
    Image
    Défense et tampon articulé non endommagés du côté tribord

    La défense et le tampon articulé sont conçus de manière à amortir les accostages normaux (Photo 5).

    Procédure d’accostage

    La section 7.1.16 du manuel propre au navire du Queen of Coquitlam, qui traite des procédures opérationnelles sur la passerelle pour les systèmes de commande, décrit l’utilisation des manettes en T et en L. Les manettes en T et en L commandent le pas et la vitesse de rotation des hélices arrière et avant respectivement.

    Avant l’arrivée au port, le capitaine donne le signal de se tenir prêt et ralentit le navire en utilisant la manette en T en mode de propulsion 1. À l’endroit indiqué dans le manuel propre au navire, le capitaine passe en mode de propulsion 2. L’hélice avant est maintenant engagée, et le capitaine utilise la manette en L pour varier la vitesse de rotation et le pas en vue de ralentir la progression du navire vers l’avant. L’hélice avant propulse alors le navire dans la direction opposée à l’hélice arrière. Au cours de cette manœuvre, les hélices avant et arrière propulsent le navire dans leur direction respective « vers l’avant ».

    Pendant les manœuvres d’accostage, les gouvernails arrière et avant sont commandés par leurs leviers de direction respectifs. La force des remous produits par les 2 hélices agit sur les gouvernails respectifs, amenant l’avant ou l’arrière du navire à prendre la direction voulue. Cela permet de mieux maîtriser le mouvement à chaque extrémité du navire, ce qui est très important pour effectuer des manœuvres sécuritaires, surtout dans des conditions météorologiques défavorables. Une fois le navire à quai, le système de propulsion demeure en mode 2, l’hélice avant est réglée à un pas arrière lent, et l’hélice arrière, à un pas avant lent.

    Hélices à pas variable

    Les hélices à pas variable diffèrent des hélices de type classique du fait que leurs pales tournent autour de leur axe et que leur pas est modifié selon que le navire avance ou recule. Dans le cas du Queen of Coquitlam, lorsqu’on les regarde respectivement de l’arrière, les pales d’hélice tournent dans le sens des aiguilles d’une montre à l’extrémité nº 1 et dans le sens contraire des aiguilles d’une montre à l’extrémité nº 2.

    Poussée transversale

    La poussée transversale est la tendance qu’a une hélice en rotation à pas avant ou arrière de déplacer l’arrière du navire vers le côté tribord ou bâbord. Elle est causée par une interaction entre la coque, l’hélice et le gouvernail. Sur un navire doté d’une hélice à pas variable tournant dans le sens contraire des aiguilles d’une montre et réglée à pas arrière, la poussée transversale a tendance à amener l’étrave vers le côté tribord et l’arrière vers le côté bâbord. La poussée transversale est plus prononcée lorsque les hélices sont réglées à pas arrière.

    Effet de berge

    L’effet de berge se produit lorsqu’un navire approche une berge sous-marine abrupte. Dans le cas présent, l’approche se faisait selon un angle oblique. Lorsqu’un navire avance, le déplacement de l’eau crée un effet d’amortissement à l’étrave avant que le vide qui se crée à l’arrière du navire se remplisse. La poussée arrière provoquée par cette accumulation d’eau exerce à son tour une pression sur l’étrave, de sorte que le navire fait une embardée qui l’éloigne de la berge. L’ampleur de cet effet varie en fonction de divers facteurs, notamment la distance du navire de la berge, la vitesse du navire, le dégagement sous quille et le profil du chenalNote de bas de page 6. Comme le Queen of Coquitlam est entré dans le poste à quai avec une berge montante du côté tribord, l’effet de berge se serait fait sentir à bâbord.

    Communications

    Au cours des nombreuses tentatives pour régler les problèmes du moteur principal nº 1, le personnel de la passerelle et celui de la salle des machines ont communiqué à plusieurs reprises afin d’en cerner la cause. De plus, le C/M et le capitaine ont discuté des réparations requises à l’injecteur. Le C/M a informé le capitaine qu’afin de procéder aux réparations nécessaires, le moteur principal nº 1 serait mis hors service pour le reste du voyage vers Nanaimo. La configuration des embrayages et la disponibilité du mode 2 n’ont pas été abordées au cours de ces conversations.

    Lorsque le navire est entré dans la baie Departure, le personnel de la passerelle a appelé la salle des machines pour vérifier l’état du moteur principal nº 1. Le C/M a informé la passerelle que le moteur principal nº 1 n’était pas disponible pour l’accostage. Lorsqu’il était impossible de passer en mode de propulsion 2, le capitaine a appelé la salle des machines pour savoir pourquoi. Le C/M l’a alors informé que ce mode de propulsion n’était pas disponible.

    Procédures opérationnelles à bord

    Le manuel propre au navire du Queen of Coquitlam comprend des procédures opérationnelles normalisées pour tous les aspects du fonctionnement du navire, y compris les procédures à suivre et la liste de vérification avant l’accostage, de l’information sur les systèmes de commande de la salle des machines, les procédures de mise hors service des moteurs principaux et les procédures pour naviguer avec un seul moteur.

    Procédures sur la passerelle

    La section 1.1.12 du manuel propre au navire du Queen of Coquitlam, qui traite des procédures opérationnelles sur la passerelle, indique que lorsque le navire progresse vers l’ouest en direction de la baie Departure, le mode 2 devrait être activé quand la bouée de Horswell, qui se trouve à 1,5 nm du poste à quai, est par le travers du navire.

    Procédures de la salle des machines

    La section 8.2.4 du manuel propre au navire du Queen of Coquitlam, qui traite des procédures d’urgence pour les systèmes essentiels, indique qu’il faut suivre 7 étapes pour arrêter un moteur principal en mode de propulsion 1.

    À l’étape 5 de cette procédure, on indique que la salle des machines devrait mettre hors service les embrayages appropriés, sans préciser toutefois quels embrayages parmi les 4 sont les embrayages appropriés. À l’étape 7, on indique que la passerelle doit être informée de l’état des machines.

    Analyse

    Événements ayant mené à la collision

    Lorsque le Queen of Coquitlam s’approche de la baie Departure, le manuel propre au navire exige que le navire passe du mode de propulsion 1 au mode de propulsion 2 pour l’arrivée et l’accostage. La procédure décrivant les vérifications à faire avant l’accostage Note de bas de page 7 précise que le navire doit passer en mode 2 lorsque la bouée de Horswell est par le travers du navire. Le capitaine n’a pas tenté de passer en mode 2 avant que l’île Jesse, qui se trouve à 0,5 nm à l’ouest de la bouée de Horswell et plus près du quai, soit par le travers du navire. En outre, le personnel de la passerelle n’a pas vu que le navire n’était pas passé en mode 2 avant que celui-ci soit dans la baie Departure, à 0,9 nm à l’ouest de la bouée de Horswell. En ne tentant pas de passer en mode 2 à l’endroit indiqué dans le manuel propre au navire, le capitaine disposait de peu de temps pour évaluer la situation et prendre des mesures correctives.

    À la suite de la tentative du capitaine de passer en mode 2, le premier lieutenant a constaté que le navire n’était pas passé dans ce mode Note de bas de page 8. Le capitaine a alors appelé la salle des machines pour savoir pourquoi le navire n’était pas passé en mode 2. Le C/M a informé le capitaine que le mode 2 n’était pas disponible. Si le mode 2 avait alors été activé, l’hélice aurait été mise en drapeau à droite et l’embrayage aurait été engagé en 90 secondes environ. Sans demander au C/M pourquoi le mode 2 n’était pas disponible, le capitaine a décidé d’accoster le navire en utilisant le mode de propulsion 1. Le capitaine avait déjà effectué ce type d’accostage. Le navire disposait de moins de puissance pour réduire la vitesse et ne disposait que de l’hélice arrière pour manœuvrer.

    La vitesse du navire à 0,25 nm du poste à quai était de 10 nœuds. À 14 h 11 min 18 s, lorsque le navire se trouvait à seulement 0,2 nm du poste à quai et voyageait à une vitesse de 8 nœuds, le capitaine a inversé le pas de l’hélice afin de réduire la vitesse. En raison de l’effet de berge et de la vitesse du navire, l’étrave s’est déplacée rapidement du côté bâbord, et le navire a heurté la défense.

    Procédures de mise hors service des embrayages

    Lorsqu’un problème s’est déclaré dans un des injecteurs du moteur principal nº 1, le personnel de la salle des machines a tenté de le résoudre. Les premières tentatives n’ont rien donné, et le C/M a décidé de mettre hors service le moteur principal nº 1 afin de procéder aux réparations. En consultant la liste de vérification du manuel propre au navire de l’entreprise, le C/M a préparé la salle des machines en vue de remplacer l’injecteur présentant une fuite. Dans le cadre de cette procédure, on a mis hors service les embrayages (1A et 1B) qui couplent le moteur principal nº 1 aux 2 arbres. Au cours de cette procédure, l’embrayage 2B a aussi été mis hors service, ce qui a empêché la passerelle d’utiliser le mode 2 alors que le navire s’approchait du poste à quai.

    Le manuel propre au navire du Queen of Coquitlam établit une procédure en 7 étapes pour arrêter un moteur principal lorsque le navire est en mode de propulsion 1. À l’étape 5, on indique que la salle des machines doit mettre hors service les embrayages appropriés, sans préciser toutefois quels embrayages parmi les 4 doivent être mis hors service lorsqu’on coupe un moteur.

    Il n’était pas clairement indiqué quels embrayages devaient être mis hors service dans diverses situations opérationnelles, et la manœuvrabilité du navire a donc été réduite lorsque l’embrayage 2B a été mis hors service. Sans information précise sur le fonctionnement de l’équipement essentiel d’un navire, les mécaniciens peuvent mettre inutilement hors service des embrayages qui sont disponibles pour assurer la bonne manœuvrabilité du navire.

    Communications à bord

    À la suite de la découverte d’une fuite d’un injecteur du moteur principal nº 1, il y a de nombreux échanges entre la salle des machines et la passerelle. Ces échanges initiaux visaient à trouver la cause fondamentale de la fuite de l’injecteur. Lorsqu’on a établi que l’injecteur défectueux devait être remplacé, la salle des machines a informé la passerelle que le moteur principal nº 1 serait mis hors service.

    Le manuel propre au navire du Queen of Coquitlam comprend une procédure en 7 étapes pour assurer l’exploitation du navire lorsqu’on ne dispose que du mode de propulsion 1. À l’étape 7, on indique que la passerelle doit être informée de l’état final des machines. Le C/M savait que la configuration finale des embrayages (où l’embrayage 2B est mis hors service) signifie que le mode 2 n’était pas disponible pour la procédure d’accostage, mais n’a pas transmis cette information au capitaine. Comme le mode 2 peut être utilisé avec 1 seul moteur en marche, le capitaine s’attendait à ce que ce mode soit toujours disponible pour l’accostage.

    Les échanges entre la salle des machines et la passerelle ont porté sur l’état du moteur principal, sans qu’on ait indiqué quels embrayages étaient mis hors service, ni que le mode 2 n’était pas disponible.

    Quand le navire est entré dans la baie Departure, le personnel de la passerelle s’est rendu compte que le navire n’était pas en mode de propulsion 2. Lorsque le capitaine a appelé la salle des machines pour savoir pourquoi le navire n’était pas passé dans ce mode, le C/M l’a informé que ce mode n’était pas disponible.

    Une communication défaillante entre le capitaine et le C/M est à l’origine du malentendu concernant l’état du mode 2 et sa disponibilité pour l’accostage, ce qui a compromis l’accostage sécuritaire du navire.

    Déplacement du navire du côté bâbord

    À l’approche du poste à quai nº 2 dans la baie Departure, le navire s’est approché du rivage près du côté tribord suivant un angle oblique. Le rivage comporte une berge sous-marine abrupte. Le navire en approche a forcé l’eau à s’acheminer dans l’espace de plus en plus étroit entre l’étrave du côté tribord et le rivage. Cette eau poussée vers l’avant de l’étrave a créé une pression sur le côté du navire donnant sur le rivage. Cette pression d’eau s’est exercée sur le côté tribord de l’étrave, de sorte que le navire a fait une embardée à bâbord et s’est éloigné de la berge.

    Le capitaine a mis la barre à droite et a réglé brièvement l’hélice à un pas avant afin de produire un remous au-dessus du gouvernail, et ce, dans le but de contrer le déplacement du navire vers le côté bâbord. Lorsqu’il a réglé de nouveau l’hélice à pas variable à un pas arrière afin de réduire la vitesse du navire, cela a réduit la quantité d’eau passant au-dessus de l’hélice de l’extrémité nº 2, ainsi que l’erre pour gouverner. L’effet de berge a provoqué le déplacement du navire à bâbord en direction de la défense du côté bâbord.

    Le capitaine n’a pas été en mesure de contrer ces forces, qui s’étaient accrues en raison de la vitesse du navire au moment où celui-ci s’approchait du poste à quai. Par conséquent, le Queen of Coquitlam a heurté la défense du côté bâbord. Dans des conditions de fonctionnement normales, avec les 2 moteurs et les 2 hélices fonctionnels, le capitaine aurait disposé de suffisamment de puissance pour compenser l’effet de ces forces.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. L’hélice avant n’était pas disponible, car l’embrayage pour l’engager avait été mis hors service dans la salle des machines.
    2. En ne tentant pas de passer en mode 2 à la distance du poste à quai indiquée dans le manuel propre au navire, le capitaine disposait de peu de temps pour évaluer la situation et prendre des mesures correctives.
    3. Une communication défaillante entre le capitaine et le chef mécanicien est à l’origine du malentendu concernant l’état du mode 2 et sa disponibilité pour l’accostage, ce qui a compromis l’accostage sécuritaire du navire.
    4. Le capitaine n’a pas été en mesure de contrer l’effet de berge, qui était accru en raison de la vitesse du navire au moment où celui-ci s’approchait du poste à quai. Par conséquent, le navire a heurté la défense du côté bâbord.

    Mesures de sécurité

    Mesures de sécurité prises

    Le 11 avril 2012, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a émis la lettre d’information sur la sécurité maritime no 04/12 afin d’aviser British Columbia Ferry Services (BCFS) des problèmes de sécurité relevés dans les enquêtes sur les collisions avec des postes à quai du Coastal InspirationNote de bas de page 9 et du Queen of Coquitlam. Une copie de la lettre a également été transmise à Transports Canada. La lettre résume le contexte des événements et indique que la non-disponibilité du mode de propulsion 2 et la vitesse de progression vers le poste à quai constituaient des problèmes de sécurité importants. On convient aussi dans cette lettre que BCFS tentait de façon proactive de régler ces problèmes de sécurité en examinant tous les plans de traversée selon une approche fondée sur les risques.

    Le 23 mai 2012, BCFS a donné suite à la lettre d’information sur la sécurité maritime no 04/12 en indiquant que de nouvelles procédures opérationnelles normalisées avaient été mises en place pour réduire la vitesse. Maintenant, entre autres, des contrôles normalisés pour chaque itinéraire ont été établis et permettront de procéder à des vérifications de sécurité lorsque le navire approche du terme de son voyage. Pour atténuer davantage les risques à l’étape de l’accostage, BCFS a également établi des plans et des exercices d’urgence. Bien que BCFS n’ait pas fourni de détails sur ces plans d’urgence, on a expliqué que les exercices comprenaient la répétition de plusieurs interventions clés conçues pour arrêter ou ralentir le navire lorsqu’une perte de puissance compromettait la capacité de réduire la vitesse à l’approche du poste à quai.

    Le présent rapport met un terme à l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le 31 octobre 2012. Il est paru officiellement le .

    Annexes

    Annexe A – Carte du lieu de l'événement

    Annexe A. Carte du lieu de l'événement
    Image
    Carte du lieu de l'événement

    Annexe B – Gare maritime de British Columbia Ferry Services dans la baie Departure

    Annexe B. Gare maritime de British Columbia Ferry Services dans la baie Departure
    Image
    Gare maritime de British Columbia Ferry Services dans la baie Departure

    Annexe C – Plan général du navire

    Annexe C. Plan général du navire
    Image
    Plan général du navire

    Appendix B — British Columbia Ferry Services Departure Bay terminal

    Appendix C — General arrangement of vessel