Collision en voie non principale
entre la manoeuvre de triage 602-23-17 et un groupe de wagons immobilisés
exploités par le Chemin de fer Canadien National
sur la voie VC-64 du triage Scotford
subdivision Vegreville, Fort Saskatchewan (Alberta)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 18 août 2010, vers 3 h 30 (heure avancée des Rocheuses), la manœuvre de triage L602–23–17 du CN poussait 50 wagons chargés et 5 wagons vides vers l'est sur la voie VC-64, dans le triage Scotford, lorsque le mouvement est entré en collision avec un groupe de 46 wagons vides qui se trouvaient sur la voie. La collision a entraîné le déraillement de 43 wagons, dont 21 wagons contenant des marchandises dangereuses ou des résidus. Il n'y a eu aucun déversement de produits ni aucune blessure. Les wagons étaient destinés à la voie VC-63.
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Autres renseignements de base
Tôt le matin du 18 août 2010, la manœuvre de triage L602–23–17 (manœuvre 602) du Canadien National (CN) effectue des manœuvres de routine sur la voie d'accès ouest du triage Scotford, à l'est de Fort Saskatchewan (Alberta) (voir la figure 1). Le système de commande de locomotivesNote de bas de page 1 n'est pas utilisé dans ce triage.
Les membres de la manœuvre 602 travaillent à la formation du train 314. Le mouvement est tracté par 3 locomotives, pèse environ 6613 tonnes et mesure 3 498 pieds. L'équipe doit tirer 55 wagons (50 chargés et 5 vides) des voies VC-70 et VC-68 et les placer sur la voie VC-63 (voir la photo 1) pour une inspection mécanique et la mise à l'essai des freins à air.
L'équipe est composée d'un mécanicien de locomotive, d'un contremaîtreNote de bas de page 2, d'un aide et d'un apprenti. Elle commence son quart de travail à 18 h le 17 août 2010. L'apprenti réalise différentes tâches liées aux manœuvres sous la direction du contremaître. Après avoir effectué 8 heures de travail, l'apprenti est autorisé à quitter les lieux. Il n'est pas présent au moment de l'accident.
Vers 3 h 15Note de bas de page 3, la manœuvre 602 procède à un mouvement de tire vers l'ouest sur la voie d'accès ouest. L'aide est à l'avant de la locomotive pour orienter les aiguillages au fur et à mesure que le mouvement progresse. L'équipe sait que la voie VC-63 est libre puisqu'elle a précédemment circulé sur celle-ci avec la locomotive sans wagons. Le contremaître, qui se trouve sur un des wagons, compte les aiguillages alors que le train avance vers l'ouest. Il a prévu descendre à l'aiguillage VC-63, mais il descend à l'aiguillage VC-64 par erreur. Le numéro de voie est indiqué sur la cible de l'aiguillage. Le contremaître arrête le mouvement après qu'il a franchi l'aiguillage VC-64. Il oriente l'aiguillage, et vérifie les aiguilles et la cible de l'aiguillage. Regardant vers l'est sur la voie, il demande, par radio, au mécanicien de locomotive d'amorcer le mouvement de pousse. Les 55 wagons sont poussés sur la voie VC-64 plutôt que sur la voie VC-63 comme prévu (voir la figure 2). Au cours de ce mouvement, personne ne se tient en tête du mouvement et personne ne se trouve sur le sol pour observer la progression du mouvement. Aucun employé du triage ne surveille le mouvement à partir d'un point éloigné, ni par observation sur place ni par caméra.
La manœuvre 602 parcourt environ 12 longueurs de wagon sur la voie VC-64, à une vitesse de 9 mi/h, lorsque le mouvement entre en collision avec un groupe de 46 wagons vides immobilisés (freins à air serrés) qui a été placé sur la voie environ 2 ½ heures plus tôt. La collision entraîne le déraillement de 43 wagons, 17 chargés et 26 vides. Parmi les wagons déraillés se trouvent 8 wagons de la manœuvre 602, 8 wagons immobilisés sur la voie VC-64, 8 wagons immobilisés sur la voie VC-62, 9 wagons immobilisés sur la voie VC-65, 5 wagons immobilisés sur la voie VC-66 et 5 wagons immobilisés sur la voie VC-67 (voir les photos 2 et 3). Onze wagons ont été détruits. Voici une liste des wagons en transport de marchandises dangereuses qui font partie de l'accident :
- 1 chargé de propane, numéro ONU 1075;
- 4 chargés de propylène, numéro ONU 1077;
- 9 chargés de carburant diesel, numéro ONU 1202;
- 1 contenant des résidus de propane, numéro ONU 1075;
- 2 contenant des résidus de liquides inflammables, numéro ONU 1993;
- 1 contenant des résidus de dioxyde de carbone, numéro ONU 2187;
- 1 contenant des résidus de liquide corrosif, numéro ONU 3267;
- 2 contenant des résidus d'acide sulfurique, numéro ONU 1830.
Il n'y a eu aucun déversement de matière dangereuse ni aucun blessé. Plus de 400 pieds de rails ont été renversés sur la voie VC-62 et approximativement 2000 pieds de voies ont été endommagés sur les voies adjacentes.
Le temps était beau et la température était de 10°C.
Intervention à la suite de l'incident
Les premiers avis d'accident obligatoires ont été donnés par le chef du triage et le Centre d'exploitation du réseau du CN. Les employés des services Exploitation, Mécanique et Ingénierie du CN ainsi que les services de police du CN sont intervenus après l'événement. Les services de police et d'incendie municipaux ont aussi répondu à l'appel. Les interventions ont été coordonnées par le CN et le service d'incendie de la municipalité.
Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada, règle 115, Pousse du matériel roulant.
La règle 115 du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF), Pousse du matériel roulant, indique ce qui suit (en partie) :
(a) Lorsqu'un matériel roulant est poussé par une locomotive ou qu'il est précédé d'une locomotive télécommandée sans personnel en cabine, un membre de l'équipe doit être posté sur le véhicule de tête ou au sol, de façon à pouvoir observer la voie à utiliser et donner les signaux ou les instructions nécessaires pour diriger le mouvement.
EXCEPTION: Un membre de l'équipe n'a pas besoin de se poster de la sorte lorsqu'il est confirmé que la portion de voie à utiliser est libre. […]
(b) L'expression « lorsqu'il est confirmé que la voie est libre »
désigne le fait d'observer la portion de voie à utiliser et de s'assurer qu'elle est, et restera, libre de matériel roulant et qu'elle offre assez de place pour accueillir le matériel roulant qu'on s'apprête à y pousser. Cette constatation doit être faite par un employé qualifié observant la voie et disposant d'un contact radio avec la personne chargée de diriger le mouvement. S'il a été constaté que la voie est libre et qu'aucun autre mouvement ne peut accéder à la voie en question, il est alors « confirmé »
que la portion de voie à utiliser est libre.
Nota : Quand il peut être déterminé qu'aucun autre mouvement n'est en service ou que des travaux ne seront pas effectués sur la voie à utiliser, alors les prescriptions de la règle sont respectées, et il est donc « confirmé »
que la voie est libre continuellement.
Le CN a publié des instructions spéciales régionales sur la règle 115 du REF qui sont entrées en vigueur le 1er août 2009 et qui ont aboli la partie « lorsqu'il est confirmé que la voie est libre » afin de garantir une surveillance visuelle continue du véhicule de tête. L'exception à la règle 115 (a) a ainsi été révisée :
[Traduction] Si un membre de l'équipe n'est pas posté sur le véhicule de tête ou au sol, de façon à pouvoir observer la voie à utiliser et donner les signaux ou les instructions nécessaires pour diriger le mouvement, les tâches du membre de l'équipe précisées dans la règle 115 (a) du REF visant à « confirmer que la voie est libre »
peuvent être confiées à :
- une autre personne qualifiée du point de vue des règles du REF qui ne fait pas partie de l'équipe immédiate (p. ex. un chef de triage);
- une autre personne qualifiée, qui ne fait pas partie de l'équipe, au moyen d'une caméra. La personne qualifiée qui utilise la caméra doit observer la voie à utiliser de façon continue et doit être en mesure de donner les instructions nécessaires pour diriger le mouvement.
Le contremaître était au courant des exigences modifiées de la règle 115 du REF.
Expérience, formation et horaire travail/repos de l'équipe
Le contremaître de la manœuvre 602 est entré en service en octobre 2009 et a obtenu la qualification de contremaître en mars 2010. Il devait occuper le poste d'aide au sein de la manœuvre 602 pour le quart de travail en cause, mais le contremaître régulier avait pris congé et il a dû le remplacer. Il s'agissait de son premier quart de travail en tant que contremaître indépendant au triage Scotford. Il avait travaillé les 45 quarts de travail requis pour obtenir la qualification de contremaître et avait effectué 82 de ses 90 quarts de travail probatoires. Avant l'accident, le contremaître avait effectué 7 quarts de travail au triage Scotford, 4 à titre d'apprenti et 3 en tant qu'aide. Il s'était occupé de superviser un apprenti durant 12 de ses 82 quarts de travail probatoires.
Le contremaître avait eu une nuit de sommeil complète la veille et plusieurs heures de sommeil dans l'après-midi précédant son arrivée au travail à 18 h. Il avait été en congé depuis le 15 août 2010 (7 h) après avoir travaillé comme aide à la manœuvre 602.
L'aide du train en cause dans l'accident était qualifié à titre de contremaître depuis mars 2007. Même s'il comptait plus d'expérience que le contremaître, il était assigné au poste d'aide au sein de l'équipe en raison de dispositions de la convention collective.
Le mécanicien de locomotive est entré en service en juillet 1983. Il travaillait au triage Scotford depuis décembre 1995 lorsqu'il a obtenu la qualification de contremaître.
Cycle sommeil/éveil
Le cycle sommeil/éveil est fondé sur une période de 24 h dont approximativement le tiers est consacré au sommeil. Même si le cycle varie d'une personne à l'autre, tous les humains ont 2 ensembles de niveaux de vigilanceNote de bas de page 4 comprenant des pointes et des creux. Le creux le plus important, ou le niveau le plus faible de vigilance, se produit la nuit dans les heures qui précèdent l'aube, soit entre 3 h et 5 h du matin.
Horaire de travail irrégulier
Le rythme circadien (horloge biologique) est parfaitement synchronisé et programmé pour que nous dormions la nuit et restions éveillés le jour. Des horaires de travail irréguliers, par exemple le travail de nuit, désynchronisent cependant le rythme circadien. Le corps peut s'adapter lentement à des quarts de travail de nuit successifs et aux périodes de sommeil le jour, à raison d'une ou de deux heures par jour. Il a toutefois besoin de plusieurs jours pour s'adapter totalement à ce nouvel horaire de travail. Durant les 2 premiers quarts de nuit, la vigilance chute au cours des premières heures du jour. Après quelques jours, la vigilance est plus sentie la nuit et le sommeil de jour s'améliore. Toutefois, lorsqu'une période de quarts de travail de nuit a été complétée, ou à la suite de quelques jours de congé, l'horloge biologique est « remise à zéro »
.
Vigilance et performance
Un niveau de vigilance plus faible a des effets négatifs sur le rendement au travail puisque l'attention aux détails diminue et que le processus cognitif est entravé. La prise de raccourcis, la mauvaise interprétation ou la non-reconnaissance de signes, ainsi que des communications moins claires, sont des exemples de réduction de la performance liée à la diminution du niveau de vigilance.
Triage Scotford
Le triage Scotford a été construit au début des années 1980. Il a été agrandi dans la foulée de la forte croissance de l'industrie pétrochimique dans la région de Scotford. Dans ce triage, on traite de nombreuses marchandises, notamment des engrais, la roche phosphatée, le gaz de pétrole liquéfié, l'acide sulfurique, le dioxyde de soufre et d'autres produits dangereux.
L'accident s'est produit près du centre du triage. Au moment de l'accident, les voies d'accès au triage étaient éclairées, mais pas le centre du triage. Un chef de triage surveille les extrémités est et ouest du triage avec des caméras vidéo montées sur des poteaux. Le centre du triage n'est l'objet d'aucune surveillance par caméra. Les voies VC-63 à VC-75 vont d'est en ouest en configuration de « cuvette » et l'utilisation des freins à main n'est pas requise. Le jour, une personne debout à côté des voies VC-63 et VC-64 peut voir si les extrémités est des 2 voies sont libres (environ 4000 pieds plus loin). Au moment de l'accident, à partir de ces mêmes positions, les employés pouvaient ainsi voir l'éclairage le long de la voie est lorsque les voies étaient libres.
Avant 2009, tous les wagons qui quittaient le terminal du Grand Edmonton (GET), où y arrivaient, devaient passer par le faisceau du triage Walker. La fermeture du triage à butte Walker en février 2009 a entraîné une réduction des manœuvres de ligne en direction et en provenance des régions périphériques et une augmentation des manœuvres en palier dans les triages en périphérie du terminal du Grand Edmonton, notamment au triage Scotford. Environ 500 wagons par jour sont l'objet de manœuvres en palier au triage Scotford. Avant 2009, on y traitait quelque 300 wagons par jour. Approximativement 80% des manœuvres sont effectuées à l'extrémité ouest du triage. La vitesse maximale dans le triage est de 15 mi/h.
Manœuvres et supervision au triage Scotford
Au moment de l'événement, le CN comptait 2 manœuvres de triage qui travaillaient exclusivement au triage Scotford. La manœuvre 601 commençait à 6 h chaque jour et la manœuvre 602 à 18 h chaque soir. Les 2 manœuvres de triage faisaient des quarts de travail de 10 à 12 heures chaque jour, 7 jours par semaine pour former des trains.
Au moins 1 chef de triage est en tout temps présent au triage Scotford. Les chefs de triage sont des employés du service Exploitation qualifiés du point de vue des règles qui affectent des tâches de manœuvre à des équipes de triage et qui coordonnent les activités dans le triage, y compris l'utilisation des voies. Ils peuvent aussi assurer la protection du véhicule de tête par caméra en vertu des instructions spéciales régionales du CN à la règle 115 (a) du REF.
Information sur les voies
Les voies, les voies d'accès et les branchements au triage Scotford sont construits avec des rails de 115 lb. Les voies de garage de ce triage sont constituées de rails de 100 lb. Les branchements sont pourvus de cœurs en manganèse à flancs surélevés (autoprotégés). Plus de 50% des branchements sont pourvus d'aiguilles Samson sur l'itinéraire dévié. Les traverses sur les voies d'accès est et ouest ainsi que sur les branchements sont en bois dur. Les traverses sont fixées par des crampons et des garde–aiguillesNote de bas de page 5 sont installés sur tous les branchements de la voie d'accès ouest. Au moment de l'événement, le CN avait un programme d'installation de garde–aiguilles sur les branchements de la voie d'accès est.
Les aiguillages des voies d'accès sont commandés au moyen d'appareils de manœuvre d'aiguillage semi–automatiques 17B sur de hauts mâts, qui sont mis à l'essai sous pression tous les ans. Ces aiguillages peuvent être pris en talon sans endommager la bielle, mais cette pratique est interdite dans le triage. Les appareils de manœuvre d'aiguillage sur mât haut courants sont l'objet d'un programme de remplacement par des leviers de manœuvre bas ergonomiques 36E. Il n'y a aucun aiguillage automatique dans le triage; tous les aiguillages du triage sont orientés de façon manuelle.
Les voies d'accès est et ouest, ainsi que les branchements, sont l'objet d'essais par ultrasons une fois par année. Le plus récent a été fait en mai 2010. Au cours de l'essai, 2 défauts ont été détectés sur chacune des voies d'accès. Ils ont été réparés. La géométrie de la voie est généralement évaluée une fois par année au moyen du véhicule rail–route de contrôle de la voie du CN. Toutefois, aucune évaluation de la géométrie de la voie n'avait été menée au triage Scotford en 2010 avant l'accident.
Analyse
Aucun défaut de matériel ou de voie ne peut être considéré comme un facteur ayant causé cet événement. L'analyse portera donc sur le respect de la règle 115 du REF, la vigilance des employés et les gestes posés par le contremaître.
L'accident
La manœuvre 602 avait pour objectif de pousser 55 wagons sur la voie VC-63 et les membres de l'équipe savaient que la voie était libre. Cependant, le contremaître s'est par erreur positionné à l'aiguillage VC-64. Il a omis de confirmer sa position en lisant le numéro sur la cible de l'aiguillage avant de demander aux membres de son équipe d'amorcer le mouvement de pousse vers l'est. En outre, en regardant vers l'est sur la voie VC-64, si la voie avait été libre, il aurait vu de la lumière sur la voie d'accès est. L'absence d'éclairage visible à l'extrémité éloignée (est) de la voie était une indication visuelle que la voie était occupée. Le contremaître n'a soit pas perçu cette indication ou l'a mal interprétée. La collision et le déraillement se sont produits lorsque 55 wagons ont été poussés, sans protection, sur la voie VC-64 où ils ont heurté un groupe de wagons immobilisés.
Le contremaître savait que le paragraphe traitant de l'exception sur la « confirmation que la voie est libre » à la règle 115 du REF avait été retirée afin de garantir que le véhicule de tête d'un mouvement soit l'objet d'une protection visuelle continue. Il a cependant jugé que sa connaissance de l'état de la voie VC-63 et de l'emplacement des autres mouvements dans le triage était une confirmation suffisante que la voie était libre. Malgré les exigences qui demandent que le mouvement soit l'objet d'une protection visuelle continue, aucune protection visuelle du véhicule de tête n'était assurée au cours du mouvement.
Vigilance des employés
Les membres de l'équipe avaient commencé leur quart de travail à 18 h le jour précédent et l'accident s'est produit à 3 h 15 le matin suivant. Ils travaillaient donc depuis environ 9 1⁄2 heures.
Vers la fin du quart de travail et dans les premières heures du jour, le rythme circadien entraîne une baisse du niveau de vigilance qui peut avoir des effets négatifs sur le rendement des travailleurs. Par exemple, un niveau de vigilance inférieur peut être la source d'une baisse de motivation non intentionnelle à bien accomplir les tâches. Cela peut se traduire par la prise de plus grands risques et un laxisme dans les mesures de sécurité, laxisme qui n'existe pas lorsque le niveau de vigilance est élevé.
Dans le cas présent, le contremaître travaillait de nuit et il s'agissait de son premier quart de travail après 2 jours de congé. Son rythme circadien n'était pas prêt pour un quart de travail de nuit. Même s'il avait bien dormi la nuit du lundi et fait une sieste le mardi après-midi avant de se présenter au travail, ce type de dérèglement circadien peut désynchroniser l'horloge biologique et entraîner une chute de la vigilance, en particulier aux premières heures du jour. Cette baisse du niveau de vigilance a probablement joué un rôle dans les décisions du contremaître, y compris celle de contourner l'exigence sur la protection visuelle du véhicule de tête du mouvement, ainsi que dans les actions qui ont mené à l'erreur d'acheminement du train de la manœuvre 602 sur la VC-64.
Expérience de travail de l'équipe
Pour un contremaître récemment promu, l'amélioration des compétences et des connaissances professionnelles passe par le travail sur le terrain. De plus, un employé récemment promu devrait continuer d'être encadré par des employés d'expérience. Fait à souligner, les deux autres membres de la manœuvre 602 avaient plus d'expérience en exploitation que le contremaître. Cependant, occupés à leurs tâches respectives au cours du mouvement, les autres membres de l'équipe n'ont pas pu corriger l'itinéraire erroné du mouvement. Même si le contremaître était formé et qualifié pour ce poste, il avait une expérience limitée à titre de contremaître et ne connaissait pas très bien les méthodes d'exploitation au triage Scotford.
Éclairage au triage Scotford
Au cours de la journée, toute la longueur d'une voie libre est visible à partir des deux extrémités du triage Scotford. Puisque la majorité des tâches sont effectuées aux aiguillages sur les voies d'accès, des appareils d'éclairage étaient installés le long des voies d'accès aux deux extrémités du triage pour augmenter la visibilité, la sécurité et la productivité la nuit. Le jour de l'événement, au cours des travaux de nuit, il était impossible d'observer les voies à partir des deux extrémités puisque le centre du triage n'était pas éclairé. Cependant, si la voie avait été libre, les employés auraient pu voir de la lumière à l'extrémité opposée de la voie ainsi que des reflets lumineux sur les rails.
Lorsque le contremaître a regardé la voie VC-64, il n'y avait pas de lumière, ce qui l'a probablement incité à venir à la conclusion erronée que la voie était libre. L'absence d'éclairage dans le centre du triage a fait qu'il a été plus difficile pour le contremaître de percevoir correctement que la voie VC-64 était occupée. Lorsque des triages ferroviaires ne sont pas pourvus d'un éclairage approprié pour des manœuvres de nuit, la visibilité le long de certaines voies de triage peut être compromise, rendant plus difficile la vérification de l'état de la voie et augmentant le risque de collision et de déraillement dans le triage.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- La collision et le déraillement se sont produits lorsque 55 wagons ont été poussés, sans protection, sur la voie VC-64 où ils ont heurté un groupe de wagons immobilisés. L'équipe avait pour intention de pousser les wagons sur la voie VC-63 puisqu'elle savait que cette voie était libre.
- Malgré les exigences qui demandent que le mouvement soit l'objet d'une protection visuelle continue, le véhicule de tête n'était pas protégé visuellement pendant le mouvement.
- Un niveau de vigilance réduit a joué un rôle dans les décisions du contremaître, y compris celle de contourner l'exigence sur la protection visuelle du véhicule de tête du mouvement, ainsi que dans les gestes qu'il a posés qui ont mené à l'erreur d'acheminement de la manœuvre 602 sur la voie VC-64.
- Même si le contremaître était formé et qualifié pour ce poste, il avait une expérience limitée à titre de contremaître et ne connaissait pas très bien les méthodes d'exploitation au triage Scotford.
Faits établis quant aux risques
- Lorsque des triages ferroviaires ne sont pas pourvus d'un éclairage approprié pour des manœuvres de nuit, la visibilité le long de certaines voies de triage peut être compromise, rendant plus difficile la vérification de l'état de la voie et augmentant le risque de collision et de déraillement dans le triage.