Naufrage avec pertes de vie
du véhicule amphibie à passagers Lady Duck
dans la rivière des Outaouais
près de la marina de Hull
Gatineau (Québec)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Vers 16 h 10 le 23 juin 2002, le véhicule amphibie Lady Duck a pris l'eau sur la rivière des Outaouais alors qu'il faisait une visite touristique sur terre et sur l'eau de la région de la capitale nationale. Le véhicule a coulé rapidement par l'avant par huit mètres d'eau près de la marina de Hull, à Gatineau (Québec). Sur les 12 personnes à bord, 6 passagers, le conducteur et la guide touristique ont réussi à quitter le véhicule et ont été recueillis par des embarcations privées qui étaient sur les lieux au moment du naufrage. Quatre passagers sont restés coincés dans le véhicule et se sont noyés. Aucun dommage à l'environnement n'a été déclaré par suite de l'accident.
1.0 Renseignements de base
1.1 Fiche technique du véhicule
« LADY DUCK » | |
---|---|
Numéro d'enrégistrement/ d'immatriculation |
BP2 110 (immatriculation routière de l'Ontario) |
Port d'immatriculation | Exemption d'être immatriculé(véhicule amphibie) |
Pavillon | Sans objet |
Type | Véhicule amphibie à passagers |
Jauge bruteNote de bas de page 1 | Moins de 5,0 |
LongueurNote de bas de page 2 | 8,46 m |
Tirant d'eau | 0,84 m |
Construction | 2001 |
Groupe propulseur | 1 moteur semi-hors-bord Mercruiser, Alpha One, de 100kW entraînant une hélice simple |
Équipage | 2 personnes |
Passagers | 10 personnes (12 au maximum) |
Propriétaire enregistré | Amphibus Lady Dive Inc., St. Isidore, Ontario |
1.1.1 Description du véhicule
Le Lady Duck est un véhicule amphibie aménagé pour transporter jusqu'à 12 passagers pour des visites guidées sur terre et sur l'eau dans la région de la capitale nationale (RCN)Note de bas de page 3 et sur la rivière des Outaouais. Le véhicule a été conçu et construit par son propriétaire, qui l'a mis en service au début de la saison touristique en juin 2001.
Le véhicule est basé sur un châssis de camion Ford F-350 transformé (voir la photo 1). Le moteur à essence d'origine sert à l'exploitation sur route. Un moteur semi-hors-bord Mercruiser à essence a été ajouté à l'arrière pour assurer la propulsion sur l'eau. La figure 1 représente le schéma général du véhicule.
Le bas du châssis est entouré de tôle d'acier soudée et boulonnée, et les côtés sont prolongés vers le haut pour envelopper une structure flottante. Les roues et la suspension du camion se trouvent à l'extérieur de la coque étanche. La largeur utile du châssis est augmentée par l'ajout, de chaque côté, de caissons (flotteurs) partiellement remplis de mousse plastique rigide pour améliorer la stabilité transversale et la flottabilité ainsi que pour régulariser l'assiette sur l'eau.
Une rampe d'embarquement des passagers est placée au coin arrière gauche du véhicule. Elle est attachée à un seuil métallique par des charnières. Un joint souple assure l'étanchéité du compartiment passagers. La rampe est soulevée en position fermée par un treuil électrique et fixée en place par des moraillons disposés de chaque côté.
Onze sièges passagers individuels sont disposés de part et d'autre du compartiment passagers, soit cinq à bâbord et six à tribord. Il y a deux sièges dans la cabine du véhicule, celui de gauche pour le conducteur et celui de droite pour le guide touristique. En cas de pleine charge payante, le siège du guide touristique sert de 12e siège passager, et le guide touristique demeure debout ou accroupi au milieu de l'allée de la cabine.
Un auvent en toile surplombant le pont assure une protection contre les intempéries. Des écrans transparents déroulables de protection contre les intempéries sont disposés de chaque côté du compartiment passagers pour assurer une protection supplémentaire.
Un gilet de sauvetage approuvé est rangé dans un casier sous chaque siège passager et, au moment de l'accident, trois gilets de sauvetage pour enfants se trouvaient à l'extrême arrière du véhicule. Douze autres vêtements de flottaison individuels (VFI) approuvés pour adultes étaient placés à côté des sièges dans le compartiment passagers; ils étaient facilement accessibles.
On a installé devant le compartiment moteur avant du véhicule une visière métallique dans le but d'empêcher l'eau de pénétrer dans la coque du véhicule lorsque celui-ci se déplace sur l'eau.
L'air requis pour l'alimentation et le refroidissement du moteur routier est fourni par deux ouvertures triangulaires de ventilation dans le capot ainsi que par deux manches à air d'un diamètre de 76 mm (3 po) en forme de coude, placées à l'avant, au-dessus de la visière.
Le véhicule est doté de cinq points de vidange, chacun comportant un robinet à bille actionné manuellement (robinet) et protégé, immédiatement en amont, par un clapet de non-retour à battant, tous deux montés sur le même bout mâle d'un tuyau et fermés par un bouchon en acier vissé. Quatre des points de vidange ont un diamètre de 19 mm (¾ po) et le cinquième, de 12 mm (½ po). Les points de vidange sont aménagés de façon à faciliter l'évacuation à terre de toute accumulation d'eau dans les fonds du véhicule (voir la figure 1).
Le véhicule est muni de six pompes d'assèchement submersibles électriques. Une pompe d'un débit nominal de 1 250 gallons US/h (78,8 L/min) et une autre d'un débit nominal de 630 gallons US/h (39,7 L/min) sont situées dans les puisards bâbord et tribord se prolongeant sous le fond de la coque à peu près à mi-longueur du véhicule. On appelle ces deux pompes les pompes d'assèchement principales. Deux autres pompes, chacune d'un débit nominal de 1 250 gallons US/h (78,8 L/min), sont situées dans la coque un peu à l'avant des puisards; elles constituent les pompes d'assèchement de secoursNote de bas de page 4.
Une pompe d'assèchement submersible d'un débit nominal de 1 100 gallons US/h (69,4 L/min), dotée d'un interrupteur automatique à flotteur, est située à l'extrémité avant du compartiment moteur avant. Une autre pompe d'assèchement submersible, d'un débit nominal de 630 gallons US/h (39,7 L/min) et également dotée d'un interrupteur automatique à flotteur, est située dans le compartiment du moteur semi-hors-bord Mercruiser à l'extrémité arrière du véhicule.
Une pompe d'assèchement manuelle se trouve du côté bâbord à l'arrière du siège du conducteur; elle est dotée d'un tuyau de refoulement flexible rejetant l'eau par-dessus bord. Toutes les pompes d'assèchement électriques, sauf celle du compartiment du moteur semi-hors-bord, peuvent être actionnées depuis le poste de conduite. Il n'y avait aucune alarme de niveau d'eau élevé dans la cale.
Parmi les aides aux communications figuraient une radio très haute fréquence (VHF), un système de sonorisation et un appareil radio émetteur-récepteur, tous placés près du poste de conduite.
1.2 Déroulement du voyage
1.2.1 Exploitation du véhicule sur terre
Le dimanche 23 juin 2002, le conducteur se rend à la propriété de l'entreprise et, conformément aux instructions existantes, il effectue une inspection et d'autres opérations en vue de préparer le Lady Duck pour des excursions. Il conduit ensuite le véhicule à la marina de Hull pour mener vers 8 h 20 des tests opérationnels sur l'eau. À l'issue des tests, à 8 h 35, le véhicule est conduit au kiosque de l'entreprise sur la rue Sparks à Ottawa.
Vers 10 h 30, après avoir terminé une excursion sur la terre ferme, le conducteur apprend qu'un autre véhicule de l'entreprise (le Lady Dive III) est tombé en panne et que le Lady Duck effectuera la prochaine excursion amphibie.
1.2.2 Première excursion amphibie de la journée
La portion marine de l'excursion débute vers 11 h. Lors du fonctionnement normal des pompes d'assèchement principales, on ne voit aucune eau s'écouler par les sorties d'eau situées vers le milieu du véhicule. Le conducteur actionne alors les pompes d'assèchement de secours et constate que de l'eau sort par intermittence de chaque côté du véhicule, près du milieu.
Par radio, le conducteur informe le mécanicien de l'entreprise de la situation. On lui suggère d'éteindre les pompes d'assèchement pendant quelques minutes, puis de les essayer de nouveau. Cette opération s'avère infructueuse et la portion marine de l'excursion se poursuit avec les pompes d'assèchement de secours en marche continue.
À son retour au kiosque, le conducteur appelle de nouveau le mécanicien pour obtenir des directives supplémentaires. Il reçoit instruction d'inspecter les fusibles et il constate que les deux fusibles des pompes d'assèchement sont brûlés. Ces fusibles sont remplacés par de nouveaux, de 20 ampères.
1.2.3 Deuxième excursion amphibie de la journée
Avant de quitter pour la deuxième excursion amphibie de la journée, le conducteur reçoit du gestionnaire de l'entreprise instruction de prolonger la portion terrestre et de raccourcir la portion marine, en raison du nombre important d'embarcations sur la rivière, de façon à ajouter environ 15 minutes à la portion terrestre et de raccourcir la portion marine en proportion. La portion marine de l'excursion consiste à mener le véhicule un peu en amont du pont Alexandra, puis en aval du pont Macdonald-Cartier assez près des chutes Rideau pour que les passagers puissent les voir, avant de revenir à la rampe de la marina de Hull.
Vers 15 h, le Lady Duck débute l'excursion amphibie avec à bord le conducteur, 10 passagers et une guide touristique. Au début de l'excursion, la guide renseigne les passagers sur les mesures de sécurité pertinentes à la portion terrestre de l'excursion, en français et en anglais. Avant que le véhicule n'entre à l'eau à la rampe de la marina de Hull vers 15 h 40, la guide touristique donne des consignes de sécurité aux passagers pour la portion marine de l'excursion.
Lorsque le véhicule entre à l'eau, les pompes d'assèchement sont actionnées d'office pour éliminer toute eau se trouvant dans la coque. Comme on ne voit aucune eau s'écouler par les sorties d'eau situées vers le milieu du véhicule, les pompes d'assèchement de secours sont également actionnées pour éliminer l'accumulation d'eau à bord. On constate par la suite que de l'eau s'écoule par intermittence des sorties d'eau situées des deux côtés vers le milieu du véhicule.
La pompe d'assèchement située dans le compartiment moteur avant est également actionnée manuellement. Une lampe témoin rouge s'allume près du poste de conduite, indiquant que la pompe est alimentée en électricité. Le commutateur est alors placé en position de marche automatique et la pompe est réputée être en marche.
Une fois le véhicule à flot, le moteur avant tournant au point mort, le moteur semi-hors-bord est mis en marche et la portion marine de l'excursion commence. Le véhicule est mené du côté d'Ottawa de la rivière, d'abord à environ 8 km/h puis plus lentement à l'approche des divers points d'intérêt, pour permettre aux passagers de prendre des photos.
Le temps est beau et dégagé, avec peu de vent. La rivière est relativement calme, avec des vagues causées par le sillage des bateaux et des autres embarcations dans le secteur de l'excursion. À l'occasion, le véhicule rencontre des vagues qui surmontent le capot pour éclabousser le pare-brise. Par ailleurs, des embruns s'introduisent par les fenêtres ouvertes de part et d'autre des sièges du conducteur et de la guide touristique.
Vers 16 h 8, vers la fin de l'excursion, en retournant à la marina de Hull à environ 8 km/h, le conducteur constate que l'avant du véhicule flotte dans une position plus basse que la normale et que de l'eau s'écoule continuellement des deux côtés près du milieu du véhicule. Il ordonne alors aux quatre passagers se trouvant le plus à l'avant et à la guide touristique de se rendre à l'arrière du véhicule pour tenter de diminuer l'enfoncement avant.
L'enfoncement avant continue d'augmenter. Constatant que la sécurité des passagers est en jeu, le conducteur ordonne à la guide touristique de dire aux passagers de mettre un VFI. Le véhicule est alors détourné vers le point le plus proche sur la rive québécoise. Le conducteur lance un Mayday sur la voie 16 VHF réservée aux urgences. Il donne le nom et la position du véhicule et précise le nombre de passagers à bord. Vers 16 h 10, la situation se détériore rapidement; l'eau s'accumule à l'avant du véhicule. Le conducteur ordonne aux passagers d'évacuer le véhicule qui est en train de couler. Le conducteur quitte son poste, se dirige vers l'arrière et, avec sept autres personnes, réussit à sortir du véhicule qui coule. Les quatre autres passagers restent coincés dans l'auvent en toile et coulent avec le véhicule par 8 m de fond.
Le conducteur, la guide touristique et quatre des passagers qui ont réussi à sortir du véhicule pendant qu'il coulait sont rapidement recueillis par le bateau ponton Le Pirr'eau qui se trouve à proximité du Lady Duck. Deux autres passagers sont recueillis par l'embarcation de plaisance Marina de Hull, qui a rapidement réagi après avoir observé le naufrage. Les corps des quatre passagers qui ont coulé avec le véhicule seront récupérés plus tard. Par la suite, ils seront examinés par le coroner. Celui-ci déterminera que les décès sont attribuables à la noyade associée à l'hypothermie.
Après avoir été recueillis, les survivants ont été amenés au bureau de la marina de Hull où ils ont reçu des premiers soins. Ceux qui n'avaient pas de blessure apparente ont ensuite pu quitter la marina. Le conducteur et deux passagers, qui avaient besoin de soins médicaux supplémentaires, ont été transportés à l'hôpital général d'Ottawa où ils ont reçu leur congé plus tard le même jour.
1.3 Victimes
Équipage | Passagers | Tiers | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | - | 4 | - | 4 |
Disparus | - | - | - | - |
Blessés graves | - | - | - | - |
Blessés légers/Indemnes | 2 | 6 | - | 8 |
Total | 2 | 10 | - | 12 |
1.4 Sauvetage
Le message de détresse que le conducteur du Lady Duck a diffusé par radio sur la voie 16 VHF a été reçu par certaines embarcations de plaisance qui se trouvaient dans les parages. Cependant, le conducteur n'a pas eu le temps d'accuser réception de leurs réponses avant d'abandonner le véhicule.
Plusieurs personnes qui se trouvaient dans les environs ont fait le 911 avec des téléphones cellulaires pour signaler l'accident aux services téléphoniques d'urgence et aux autorités de HullNote de bas de page 5 et d'Ottawa. Les secouristes des services d'incendie et de police d'Ottawa et de Hull ont été avisés entre 16 h 12 et 16 h 15 et sont arrivés sur les lieux à 16 h 20.
À 16 h 35, le centre des Services de communications et de trafic maritimes (SCTM) de Prescott a été informé de l'accident par l'embarcation de plaisance Catch the Sun. Le centre des SCTM de Prescott a transmis l'information au centre des SCTM de Québec.
Les services de police et d'incendie de Hull ont mis leur embarcation de sauvetage à l'eau peu après 16 h 20. Le chef des opérations de la police de Hull a assumé le rôle de commandant sur place.
Les plongeurs du service d'incendie de Hull n'étant pas équipés pour descendre par 8 m de fond jusqu'au véhicule, on a fait appel aux services de l'équipe de récupération sous-marine d'Ottawa. Vers 18 h, celle-ci a récupéré les corps des quatre passagers. Toutes les victimes ont été trouvées à l'arrière du Lady Duck, flottant contre le dessous de l'auvent. Deux victimes adultes portaient des VFI pour adultes. Avant le naufrage, les deux victimes plus jeunes portaient des VFI pour adultes mais, lorsqu'elles ont été retrouvées, une d'entre elles portait le VFI pour adultes partiellement enfilé et l'autre ne portait pas de VFI.
1.5 Récupération du véhicule
1.5.1 Opérations de récupération
Le véhicule a coulé par 8 m de fond, à environ 90 m de la rive québécoise et 120 m à l'est de la rampe de la marina de Hull, à la position approximative de 45°26,1′ de latitude nord, 75°42,3′ de longitude ouest. Le véhicule faisait face à l'ouest et reposait à l'endroit, avec ses roues avant et son moteur semi-hors-bord tournés vers la droite. Des plongeurs ont par la suite redressé les roues avant du véhicule pour qu'il soit plus facile de le tirer hors de l'eau. Après la prise d'un grand nombre d'images vidéo du véhicule, y compris de son accastillage et de la position de tous les commutateurs des pompes d'assèchement, le Lady Duck a été récupéré le 27 juin 2002 et transporté au Laboratoire technique du BST à Ottawa pour une inspection plus poussée.
1.5.2 État du véhicule au moment de sa récupération
Le moteur semi-hors-bord Mercruiser était en position relevée.
La rampe d'embarquement à l'extrême arrière du compartiment passagers était en position relevée, entièrement fixée contre le joint souple d'étanchéité entourant l'ouverture d'accès.
Les cinq robinets de vidange étaient en position fermée, leurs bouchons de vidange en acier vissés en place.
L'auvent en toile surplombant le compartiment passagers était en place, fixé à son cadre métallique. Un écran transparent déroulable de protection contre les intempéries à tribord près du milieu du véhicule ainsi que l'écran le plus à l'avant à bâbord étaient solidement fixés en position abaissée. L'écran le plus à l'avant à tribord et deux autres écrans à bâbord étaient détachés et pendaient librement. Les autres écrans transparents déroulables étaient fixés en position relevée.
1.5.3 Examen du véhicule après la récupération
Après la récupération, l'eau s'écoulait librement par plusieurs ouvertures de la coque du véhicule partiellement immergé. Pour le vider plus rapidement, on a enlevé les bouchons de vidange vissés des points de vidange et on a ouvert les cinq robinets.
À bord du véhicule, on a fait les constatations suivantes :
- La clé de contact était en position de marche et le moteur avant, qui tournait lorsque le véhicule a coulé, avait subi d'importants dommages mécaniques et électriques en raison de l'ingestion d'eau.
- Le levier de vitesse du moteur Mercruiser était au point mort; la clé de contact était en position de marche et le moteur avait subi d'importants dommages mécaniques et électriques.
- Sur le panneau au plafond près de la position de conduite, les commutateurs des pompes d'assèchement principales et de secours étaient tous en position de marche.
- Le commutateur sur le panneau placé sous la colonne de direction, qui contrôlait la pompe d'assèchement du compartiment moteur avant, était en position de marche automatique.
- Le commutateur de commande locale de la pompe d'assèchement du compartiment moteur arrière était en position d'arrêt.
- Les fixations d'un siège passager du côté tribord étaient rompues.
- Des tapis en caoutchouc recouvrant le plancher du compartiment passagers s'étaient soulevés. Des panneaux en bois situés sous les tapis en caoutchouc et donnant accès aux pompes d'assèchement étaient déplacés.
- Une bouée de sauvetage approuvée d'un diamètre de 610 mm ainsi qu'une ligne d'attrape se trouvant à l'extrême arrière du compartiment passagers étaient assujetties en place avec une corde élastique.
- Deux bouées décoratives non normalisées étaient fixées de façon permanente à l'extérieur du véhicule, à l'arrière du compartiment passagers. Ces bouées portaient un avis en relief : « Attention Parents. Ceci n'est pas un appareil de sauvetage approuvé svp ne laissez pas votre enfant sans surveillance. »
- Dix gilets de sauvetage approuvés pour adultes ont été retrouvés dans des casiers sous les sièges passagers; deux autres gilets de sauvetage pour adultes et trois gilets de sauvetage pour enfants ont été récupérés séparément.
- Parmi les VFI qui devaient se trouver près de chacun des sièges passagers, huit ont été récupérés.
- Un assortiment complet d'équipement de sécurité et d'autres dispositifs a été retrouvé à bord du véhicule, dont :
- un pistolet lance-fusées, des fusées éclairantes et une corne pneumatique portative;
- une trousse de premiers soins et une lampe de poche;
- une trousse de sécurité nautique;
- un manche de direction de secours pour le moteur semi-hors-bord;
- trois extincteurs;
- une ancre Danforth et un câblot d'ancre;
- une trousse à outils de mécanique;
- des amarres;
- deux pagaies;
- de l'huile à moteur de rechange;
- des câbles de démarrage;
- un journal de bord;
- des listes de contrôle avant départ du véhicule;
- des fusibles de rechange (30 et 15 ampères).
1.6 Disposition des sièges passagers
Les sièges passagers étaient disposés des côtés bâbord et tribord du véhicule, et une allée centrale assurait l'accès à l'avant et à l'arrière. Des casiers en métal formant la base des sièges étaient fixés au plancher en contreplaqué de 12 mm (½ po) par des vis de 3 mm (1/8 po) de diamètre. Dans la cabine de pilotage, les sièges du conducteur et du passager étaient les sièges de camion Ford d'origine. Le nombre de vis fixant la base des sièges passagers variait de trois à six. Le plancher en contreplaqué et les assises métalliques aux points de raccordement vissés étaient détériorés.
En vertu du Règlement sur la sécurité des véhicules automobiles de Transports Canada, la norme 207 exige que les ancrages des sièges puissent supporter l'application d'une force égale à 20 fois le poids du siège (20 gNote de bas de page 6) dans le sens longitudinal et au centre de gravité du siège. Les tests et les calculs du BST indiquent qu'il faudrait une force de 9,7 g pour détacher du plancher un siège du Lady Duck ancré grâce à quatre fixations (voir l'annexe G - Liste des rapports connexes).
1.7 Système de pompes d'assèchement
1.7.1 Disposition des pompes d'assèchement
Les inspections effectuées par le BST après l'accident ont révélé que la pompe d'assèchement électrique principale bâbord (Attwood V625), située et fixée dans un puisard près du milieu du véhicule, était dotée d'un filtre à tamis fin. Un tuyau de refoulement flexible d'un diamètre de 20 mm (¾ po) était fixé à un orifice de refoulement pour évacuation à l'extérieur d'un diamètre de 11 mm (7/16 po). Cet orifice de refoulement était situé 100 mm (4 po) sous le plat-bord, ce qui créait une charge de pression de fonctionnement de quelque 1 100 mm (43 po) à la pompe. L'endroit où était situé l'orifice de refoulement pour évacuation à l'extérieur permettait de voir à partir du siège du conducteur, en regardant dans le rétroviseur gauche, si de l'eau était rejetée. L'interrupteur de la pompe était situé sur un panneau au plafond près du siège du conducteur.
La pompe d'assèchement électrique principale tribord (Attwood V1250), située et fixée dans un puisard près du milieu du véhicule, était dotée d'un filtre à tamis fin. La tuyauterie de refoulement comprenait diverses longueurs de tuyau flexible en plastique de type concertina d'un diamètre de 25 mm (1 po), de tuyaux en caoutchouc de 20 mm et de 16 mm (¾ po et 5/8 po) de diamètre et de raccords en virole métallique d'un diamètre de 12 mm (½ po). La tuyauterie de refoulement se dirigeait vers l'arrière le long du côté tribord du compartiment passagers. Elle traversait le tableau arrière quelque 240 mm (9 ½ po) au-dessus de la ligne de flottaison en charge, ce qui créait une charge de pression de fonctionnement de quelque 900 mm (35 ½ po) à la pompe. L'extrémité du tuyau de refoulement flexible saillait du tableau arrière, se prolongeant à quelque 305 mm (12 po) sous la ligne de flottaison en charge et n'était pas visible pour le conducteur (voir la photo 2).
Un orifice de refoulement jouxtant la pompe et se trouvant à quelque 100 mm (4 po) sous le plat-bord était bouché, étant devenu redondant après que le tuyau de refoulement d'origine de la pompe avait été redirigé vers l'arrière en passant par le tableau arrière. L'interrupteur de la pompe était situé sur un panneau au plafond près du siège du conducteur.
Les pompes d'assèchement submersibles électriques de secours bâbord et tribord (Attwood V1250), situées chacune à environ 610 mm (24 po) devant les puisards, n'étaient ni dotées de filtres à tamis ni fixées au fond de la coque. Chaque pompe était dotée d'un tuyau de refoulement flexible d'un diamètre de 25 mm (1 po) fixé à un orifice de refoulement d'un diamètre de 11 mm (7/16 po) situé 150 mm (6 po) sous le plat-bord, ce qui créait une charge de pression de fonctionnement de quelque 1 070 mm (42 po) à la pompe. L'emplacement des raccords externes de chaque côté près du milieu du véhicule permettait au conducteur de les voir dans les rétroviseurs de gauche et de droite. Les interrupteurs des pompes étaient situés sur un panneau au plafond près du siège du conducteur.
La pompe d'assèchement submersible électrique (Attwood V625) située dans le compartiment moteur arrière était dotée d'un interrupteur à flotteur. La pompe était commandée localement par un commutateur à action manuelle ou automatique. Un tuyau flexible d'un diamètre de 20 mm (¾ po) et d'une longueur d'environ 610 mm (24 po) était fixé à la sortie de la pompe mais ne menait pas à l'extérieur, de sorte que toute eau rejetée par la pompe serait demeurée à l'intérieur du véhicule.
Une pompe d'assèchement submersible électrique (Rule Mate 1100) intégrant un interrupteur à flotteur était située à l'extrémité avant du compartiment moteur avant. La pompe était actionnée à partir d'un panneau situé sous la colonne de direction par un commutateur à trois positions : « automatique », « arrêt » et « manuel ». En mode manuel, un ressort de rappel faisait en sorte que le commutateur devait être maintenu en position pour que la pompe continue de fonctionner. Un tuyau de refoulement flexible en plastique de type concertina d'un diamètre de 25 mm (1 po) passait par-dessus le sommet de la visière et du joint d'étanchéité souple du capot, vers l'avant, sortant à quelque 460 mm (18 po) au-dessus de la ligne de flottaison en charge. Le tuyau se prolongeait à quelque 200 mm (8 po) sous la ligne de flottaison en charge à l'avant du véhicule et se trouvait hors de la vue du conducteur (voir la photo 3). Lorsque le capot était fermé, le tuyau de refoulement était comprimé là où il passait par-dessus le joint d'étanchéité avant, ce qui limitait le débit de l'eau rejetée par la pompe.
Une pompe manuelle à piston (Beckson « Thirsty Mate » 136PF6) d'un diamètre de 38 mm (1 ½ po), située du côté bâbord à l'arrière du siège du conducteur, était dotée d'un tuyau de refoulement flexible pouvant être dirigé par-dessus bord au-dessus du plat-bord. La pompe aspirait à moins de 12 mm (½ po) du bordé de fond. Le cylindre de la pompe sous le plancher en contreplaqué était comprimé localement, mais la pompe fonctionnait librement. Le débit dépendait de la force et de l'endurance de l'utilisateur.
Un tuyau d'aspiration de pompe doté d'une bride de raccordement d'un diamètre de 20 mm (¾ po), d'un coude et d'un filtre était situé près de la base du siège de passager le plus à l'avant, du côté bâbord du véhicule. Le tuyau d'aspiration pénétrait le plancher en contreplaqué et descendait dans la coque jusqu'à moins de 12 mm (½ po) du bordé de fond. Ce dispositif est devenu redondant lorsqu'une petite pompe d'assèchement à essence à laquelle il était raccordé a été enlevée du véhicule quelque temps avant l'accident.
La figure 3 montre l'emplacement des pompes d'assèchement. Le tableau 1 présente une description sommaire des pompes d'assèchement et de leur état. Voir les résultats des examens et des essais visant les pompes d'assèchement à l'annexe A.
Pompes principales |
Pompes de recours | Compar- timent moteur avant |
Compar- timent moteur arrière |
Pompe manuelle | |||
---|---|---|---|---|---|---|---|
P1, bâbord |
P1, tribord | P2, bâbord |
P2, tribord | P3 | P4 | P.M. | |
Marque Modèle |
Attwood V625 |
Attwood V1250 |
Attwood V1250 |
Attwood V1250 |
Rule Mate 1100 |
Attwood V625 |
Beckson modèle 136PF6 |
Débit nominal (L/min) | 39,7 | 78,8 | 78,8 | 78,8 | 69,4 | 9,7 | - |
Restriction | 11 mm | 12 mm | 11 mm | 11 mm | 25 mm | 20 mm | - |
Filtre | fin | fin | aucun | aucun | aucun | aucun | aucun |
Charge de pression réelle | 1 100 mm | 900 mm | 1 070 mm | 1 070 mm | engorgée | refoulement intérieur | refoulement intérieur, tuyau non raccordé |
Évacuation observable par le conducteur | oui | non | oui | oui | non | non | oui |
Commandes | tableau de bord | tableau de bord | tableau de bord | tableau de bord | colonne + interrupteur à flotteur | interrupteur à flotteur local | commande manuelle |
État | inopérante, électrique- ment inopérante |
inopérante, bloquée par des débris solides | en état de marche, débit de 21,2 L/min | en état de marche, débit de 21,2 L/min | inopérante, dommages par échauffement | en état de marche, mais refoulement à l'intérieur | en état de marche, mais refoulement à l'intérieur |
Commentaires |
- | Siphonne- ment |
- | - | - | - | - |
Tableau 1. - Pompes d'assèchement
1.7.2 État des pompes d'assèchement
Le débit nominal de refoulement est généralement celui qui est réalisable à une charge de pression nulle. La capacité d'exploitation réelle dépend de plusieurs paramètres de l'aménagement du dispositif, notamment :
- de la charge de pression de fonctionnement;
- de la longueur et du diamètre des tuyaux de refoulement;
- du diamètre et de l'emplacement du refoulement;
- de l'absence de restriction à l'aspiration de la pompe;
- des instructions d'installation du fabricant.
Sur les six pompes d'assèchement électriques à bord du véhicule au moment de l'événement, il s'est avéré que deux étaient effectivement en état de marche. Le débit réel mesuré au cours des tests menés avec les deux pompes d'assèchement de secours (Attwood V1250) qui étaient en état de marche était de 335 gallons US/h (21,2 L/min) dans chaque cas. Ce débit correspond à environ 36 % du débit nominal de ce modèle de pompe à une charge de pression de 3,3 pieds (1 m), avec une alimentation électrique de 13,6 volts. La réduction du débit nominal est attribuable en partie à la tension réelle disponible durant les tests (environ 12,5 volts), à l'obstruction du filtre à tamis par de la boue et des débris et à une certaine usure interne de la pompe. Cependant, la principale cause de la réduction est la contre-pression supérieure aux pompes, causée par la restriction prononcée et subite de la surface d'écoulement, à 19 % de celle de la tuyauterie de refoulement d'origine d'un diamètre de 25 mm (1 po), à l'endroit où elle est fixée à l'orifice de refoulement pour évacuation à l'extérieur d'un diamètre de 11 mm (7/16 po).
Des inspections supplémentaires ont révélé que les circuits électriques des pompes d'assèchement principales Attwood V625 et V1250 comportaient des fusibles de 15 ampères et de 20 ampères, au lieu des fusibles de 2 ampères et de 4 ampères préconisés d'après les indications figurant sur les corps de pompe respectifs et d'après les instructions d'installation du fabricant (formulaire 69439, révision B). De plus, ces instructions contenaient l'information suivante :
- [Traduction]
AVERTISSEMENT :
Utiliser toujours un fusible dont la résistance correspond à ce qui est recommandé pour votre modèle de pompe. Le fait de ne pas utiliser le fusible approprié augmente les risques de blessures et d'incendie. - Les pompes Attwood ont été conçues pour pomper L'EAU STAGNANTE SEULEMENT. Elles ne sont pas conçues pour empêcher l'accumulation rapide d'eau dans le bateau à cause du mauvais temps, des avaries à la coque, ou de toute condition de navigation dangereuse.
- INSTRUCTIONS POUR LES RACCORDS ÉLECTRIQUES :
REMARQUE : La garantie du produit sera annulée si les raccords électriques ne sont pas rendus étanches et les fusibles de la pompe ne sont pas convenablement installés.
Le câblage des pompes d'assèchement et les autres circuits électriques comportaient des raccords qui avaient été serrés à la main et enveloppés de ruban isolant. Les connexions ne comportaient pas de raccordements soudés et protégés par une gaine thermorétrécissable comme le veut l'usage dans les applications marines et automobiles.
Les pompes d'assèchement principales étaient fixées à des supports de montage horizontaux fournis par le fabricant, qui étaient situés dans les puisards. Les pompes d'assèchement de secours et celles disposées aux extrémités avant et arrière du véhicule n'étaient fixées à aucun élément de structure. Ces pompes pouvaient se déplacer ou tomber en cas de chocs dus à une surface routière irrégulière ou à une subite entrée d'eau dans la coque.
1.7.3 Exigences applicables au pompage d'assèchement
Les exigences en matière de pompage d'assèchement pour les petits navires à passagers sont fixées par le Règlement sur les machines de navires et le Règlement sur les petits bâtiments. En ce qui concerne le Lady Duck, le Règlement sur les machines de navires exige au moins deux pompes d'assèchement efficaces; le Règlement sur les petits bâtiments exige une écope et une pompe d'assèchement manuelle. Cependant, les exigences réglementaires ont été conçues pour de petits navires exploités à des fins commerciales, et construits et aménagés de façon conventionnelle; en outre, elles sont implicitement fondées sur l'hypothèse que les embarcations ont un niveau acceptable d'étanchéité à l'eau et possèdent un franc-bord suffisant pour l'utilisation prévue.
Le Lady Duck, qui n'était pas de construction conventionnelle, était doté de six pompes d'assèchement électriques et d'une pompe d'assèchement manuelle. Au moment du naufrage, deux des pompes électriques étaient en état de marche. Le Lady Duck n'était pas équipé d'alarme de niveau d'eau élevé dans la cale, et aucune n'était requise par la réglementation.
1.8 Essais de fonctionnement du véhicule
1.8.1 Préparation et déroulement des essais
Une série d'essais a été réalisée par le BST pour déterminer l'assiette, le franc-bord, la production de vagues et d'autres caractéristiques opérationnelles du Lady Duck à diverses vitesses, en présence de vagues de hauteurs différentes et dans diverses conditions d'envahissement par l'eau. Ces essais avaient pour but d'obtenir une base d'évaluation des conditions d'exploitation du véhicule au moment du naufrage.
Les essais ont été réalisés avec trois employés du BST à bord du véhicule, ce dernier étant chargé de sacs de sable pour simuler les conditions typiques de l'exploitation à pleine charge. La visière métallique à l'avant du compartiment du moteur routier a été fixée en position complètement relevée; les côtés du capot, les ouvertures de ventilation du moteur et les manches à air avant ont été temporairement imperméabilisés. Le joint en mousse flexible autour du capot et du sommet de la visière à l'extrémité avant du compartiment moteur avant a été maintenu dans sa condition d'origine de fonctionnement. Le moteur semi-hors-bord Mercruiser à l'extrémité arrière du véhicule a été mis en état de marche pour les essais à l'eau, mais le moteur routier à l'extrémité avant n'a pas été remis en état de marche.
L'équipement d'origine des pompes d'assèchement électriques endommagées ou inopérantes a été remplacé par de nouvelles pompes de modèles et de capacités semblables. La tuyauterie d'origine du système de pompes d'assèchement et les orifices de refoulement ont été conservés. Le tuyau de refoulement de la pompe d'assèchement principale tribord, qui ressortait du tableau arrière, a été élevé hors de l'eau pour éviter toute entrée d'eau par siphonnement durant les essais de vitesse. Le plancher en contreplaqué du compartiment passagers a été enlevé pour permettre d'observer la structure interne de la coque, le tube d'étambot, les pompes d'assèchement et la tuyauterie.
Des cadres de mesurage du franc-bord ont été disposés aux extrémités avant et arrière du véhicule, avec une traverse fixée sur le cadre avant, de niveau avec le sommet de la visière interne fixe. Les cadres ont été disposés de façon à donner des indications externes claires sur l'enfoncement avant ou arrière et le franc-bord réel au cours des essais de vitesse, de vagues de proue et d'envahissement par l'eau.
Les essais et tests ont été consignés au moyen de photos, de vidéos et d'autres documents par le personnel du BST sur terre et à bord du véhicule. Les inspections du véhicule et tous les essais à l'eau ont été faits en présence et sous observation de représentants du ministère des Transports de l'Ontario, de Transports Canada, du bureau du coroner du Québec et du propriétaire. Ces représentants ont également reçu des copies des résultats des essais suivants :
- tests de l'intégrité de la coque, de l'assiette et du franc-bord;
- essais de vitesse, de vagues de proue et du franc-bord avant;
- essais de l'effet de siphonnement de la tuyauterie d'assèchement;
- essais de mise à l'eau par la rampe;
- mesure de l'entrée d'eau et de l'assiette pour diverses valeurs de franc-bord avant.
1.8.2 Tests de l'intégrité de la coque, de l'assiette et du franc-bord
Lorsque le véhicule a été mis à l'eau au début des essais, une importante quantité d'eau est entrée dans la coque au palier principal d'arbre de transmission. Le palier au moment des essais était dans le même état qu'au moment où le véhicule a été récupéré. Le palier avait été remplacé trois jours avant l'accident. Pour réduire l'entrée d'eau et permettre la poursuite des essais, le véhicule a été retiré de l'eau et le palier a été soigneusement enduit de graisse pompée par l'entremise d'un tuyau graisseur situé à l'extrémité externe du boîtier du palier accessible à partir de l'extérieur de la limite étanche de la coque.
En raison de l'utilisation routière, le palier d'arbre de transmission (modèle Fafnir RCJ-1-15/16) était un roulement à rouleaux de type industriel qui n'était pas expressément conçu pour servir dans le cas des tubes d'étambot. La disposition selon laquelle l'arbre de transmission pénétrait dans la coque n'était pas conforme à la pratique acceptée pour les tubes d'étambot. Le boîtier du palier n'incorporait aucune garniture compressible ou de joint d'étanchéité à l'extrémité intérieure pour empêcher l'entrée d'une quantité excessive d'eau dans la coque et il ne se prêtait pas facilement à une inspection.
Au début des essais de vitesse progressifs, on a enregistré une assiette arrière initiale de 250 mm (10 po) et un franc-bord de 470 mm (18 ½ po) à la visière avant. Tout au long des essais, l'étanchéité de la coque était compromise en raison de l'infiltration continue au roulement du palier d'arbre de transmission, aux endroits où il y avait des fractures dans la tôle de bordé près des passages de roue avant et arrière ainsi qu'à l'endroit où le système de direction des roues pénétrait la coque.
Les fractures et l'emplacement des fractures sont vraisemblablement attribuables à la flexion de la coque et aux effets de choc imposés aux renforts de coque de construction légère soudés par intermittence ainsi qu'aux tôles de bordé lorsque le véhicule circulait sur terre sur des surfaces routières irrégulières et bosselées, lorsque le véhicule a percuté le fond de la rivière et pendant les opérations de récupération.
L'importance de l'entrée d'eau par ces sources variait selon la vitesse et l'assiette du véhicule, et leur effet combiné n'a pas été déterminé car on ne pouvait pas le distinguer des autres sources simultanées et plus importantes qui se sont manifestées pendant les essais. Cependant, le véhicule a été asséché avant le début des essais de vitesse successifs, de sorte que les effets négatifs cumulatifs de ces fuites pour l'assiette et le franc-bord avant ont été minimisés pour chaque essai.
1.8.3 Essais de vitesse, de vagues de proue et du franc-bord avant
Douze essais ont été effectués avec le capot temporairement étanchéisé, seul le joint supérieur de la visière avant étant laissé dans son état d'origine tel qu'au moment de l'accident. Six des essais ont été menés en eau calme et les autres, dans des vagues créées par des embarcations d'escorte, simulant les conditions de vagues susceptibles de prévaloir lors de l'exploitation réelle avec des passagers à bord (jusqu'à une hauteur approximative de 600 mm).
Tous les essais de vitesse ont été effectués à l'aide de mesures par un radar à partir de la rive. Il n'y avait aucun butoir limitant le déplacement de la manette des gaz du moteur semi-hors-bord Mercruiser pour imposer une limite à la vitesse du véhicule. La vitesse maximale enregistrée durant les essais a été obtenue avec la manette des gaz poussée au maximum.
À mesure que la vitesse augmentait, la hauteur des vagues de proue et la réduction concomitante du franc-bord réel à la traverse de la visière avant ont été observées et enregistrées sur vidéo à partir des embarcations d'escorte ainsi qu'à partir de la rive. L'apparition et l'augmentation ultérieure de débordements d'eau au-dessus de la visière avant à mesure que la vitesse augmentait ont également été observées et enregistrées par une caméra vidéo installée à l'intérieur du compartiment moteur avant.
Les essais de vitesse ont été menés à des vitesses progressivement plus grandes, de 5 km/h à un maximum de 10,25 km/h; la hauteur des vagues de proue correspondantes a varié de 90 mm (8 ½ po) à plus de 470 mm (18 ½ po). À des vitesses ne dépassant pas 5 km/h (voir la photo 4), les vagues de proue étaient relativement petites. Cependant, à mesure que la vitesse augmentait, les vagues de proue augmentaient de façon disproportionnée et le franc-bord initial réel de la visière, 470 mm (18 ½ po), s'est grandement réduit.
En eau calme à 8 km/h, la vague de proue atteignait une hauteur d'environ 265 mm (10 ½ po) et le franc-bord avant jusqu'au sommet de la visière était réduit à 205 mm (8 po) (voir la photo 5). À une vitesse de 9,85 km/h, la vague de proue atteignait la hauteur de la visière avant (voir la photo 6). À la vitesse maximale de 10,25 km/h, la vague de proue recouvrait en partie le capot d'eau et de forts embruns, l'eau débordant au-dessus de la visière avant. La configuration du sommet de la visière avant et le joint d'étanchéité qui y était fixé étaient inefficaces pour empêcher l'entrée d'eau par l'espace demeurant entre le sommet du joint d'étanchéité et la face inférieure du capot.
Les obturations temporaires fixées sur les côtés du capot, les ouvertures de ventilation du moteur et les manches à air avant ont été efficaces. Cependant, à plus de 10 km/h, l'eau débordait constamment le joint supérieur de la visière et s'accumulait dans la moitié avant du véhicule. La quantité d'eau provenant de cette source n'a pas été déterminée en raison de l'accumulation simultanée d'eau provenant du tube d'étambot et des fuites de la coque. La pompe d'assèchement avant et les deux pompes d'assèchement principales ont été actionnées pour éliminer toute l'eau accumulée dans le véhicule.
Six essais de vitesse menés dans une eau perturbée par le sillage des embarcations d'escorte ont démontré que le débordement au-dessus de la visière survenait plus tôt et à des vitesses moindres que dans des conditions d'eau calme. À des vitesses supérieures, l'eau et les forts embruns couvrant le capot parvenaient à l'occasion jusqu'au pare-brise. L'entrée d'eau et la quantité d'eau accumulée étaient aussi plus grandes; la pompe d'assèchement avant, les deux pompes d'assèchement principales et les deux pompes de secours ont été utilisées pour éliminer l'eau accumulée dans le véhicule.
Huit essais de vitesse ont été menés avec les obturations imperméables temporaires retirées des côtés du capot, des ouvertures de ventilation et des manches à air avant - soit dans des conditions d'exploitation semblables à celles du moment de l'accident. Quatre des essais ont été effectués en eau calme et les autres, en eau perturbée.
Considérablement plus d'eau est entrée et est demeurée dans le véhicule dans la condition non étanchéisée. En eau perturbée à 8,3 km/h, l'eau débordait au-dessus du sommet de la visière et un envahissement par les hauts survenait par les ouvertures de ventilation, les manches à air avant et les côtés du capot (voir la photo 7). À 9,75 km/h, l'envahissement par les hauts était considérablement plus important, l'eau débordant continuellement au-dessus de la visière, et une forte quantité s'accumulait dans la moitié avant de la coque (voir la photo 8). La pompe d'assèchement avant, les deux pompes d'assèchement principales et les deux pompes d'assèchement de secours ont été utilisées pour éliminer l'eau accumulée dans le véhicule.
Dans l'eau perturbée, de forts embruns et une certaine quantité d'eau « solide » recouvraient le capot, entraînant un fort envahissement par les hauts par les ouvertures de ventilation, les manches à air et les côtés du capot. Cependant, la plus forte entrée d'eau était à l'avant, par-delà le joint à l'avant du capot et au-dessus de la visière avant, où le débordement entraînait un effet continu de chute d'eau. À 10,24 km/h, l'envahissement par les hauts et l'accumulation rapide d'eau dans la moitié avant du véhicule prenaient des proportions telles qu'il a été jugé imprudent de continuer à cette vitesse le temps requis pour terminer le parcours des essais sans faire fonctionner toutes les pompes d'assèchement de la partie avant.
Les pompes d'assèchement au milieu du véhicule et la pompe avant ont été utilisées entre chacun des essais pour faire en sorte que la coque soit essentiellement à sec avant le début de chaque essai suivant. Cette mesure a été prise pour garantir que les francs-bords réels avant enregistrés durant tous les essais de vitesse étaient les meilleurs possibles et, par conséquent, qu'ils pourraient seulement être réduits, en utilisation réelle, par toute accumulation d'eau passée inaperçue. Une telle réduction nuirait aux caractéristiques de tenue sur l'eau du véhicule, entraînant soit une réduction de la vitesse à laquelle apparaîtrait l'envahissement par les hauts par le capot non imperméabilisé et au-dessus de la visière, soit l'accélération de l'entrée d'eau à une vitesse donnée.
Les résultats des essais démontrent qu'en raison de l'effet de vague de proue, le franc-bord avant du véhicule immobile, soit 470 mm (18 ½ po), est réduit de moitié à une vitesse de 7,6 km/h. À cette vitesse, le franc-bord résiduel de 235 mm (9 ¼ po) serait maintenu seulement tant que la coque ne contenait pas d'eau.
1.8.4 Essais de l'effet de siphonnement de la tuyauterie d'assèchement
La section 1.7.1 et l'annexe A décrivent en détail les pompes et la tuyauterie de refoulement. Des tests ont été effectués pour vérifier l'apparition de tout effet de siphonnement découlant de la disposition de la tuyauterie de refoulement de la pompe d'assèchement principale dans le puisard tribord près du milieu du véhicule. La tuyauterie de refoulement et la pompe ne comportaient aucun dispositif pour éviter le refoulement d'eau dans la coque en cas de mauvais fonctionnement de la pompe une fois que la tuyauterie était amorcée.
Les tests ont été effectués avec l'extrémité extérieure de la tuyauterie de refoulement se prolongeant au-delà du tableau arrière et quelque 305 mm (12 po) sous la surface de l'eau, ce qui correspond aux conditions similaires d'exploitation au moment du naufrage. Les tests avec la tuyauterie de refoulement non amorcée démontrent que l'effet de siphonnement ne se produit pas lorsque le véhicule est immobile ou qu'il se déplace vers l'avant ou vers l'arrière.
Des tests supplémentaires ont été effectués après que la tuyauterie a été amorcée en actionnant très brièvement la pompe d'assèchement principale. Ils ont démontré que de l'eau était siphonnée dans la coque de façon constante et continue. Cette entrée d'eau continuait lorsque le véhicule était stationnaire, lorsqu'il se déplaçait lentement vers l'avant ou l'arrière et lorsqu'il avançait à 8 km/h.
En raison de l'entrée d'eau simultanée dans la coque à partir d'autres sources, la quantité d'eau amenée par le seul effet de siphonnement n'a pas pu être déterminée durant les tests sur l'eau. Cependant, des simulations en laboratoire de la condition en charge, avec la tuyauterie de refoulement immergée comme dans les conditions d'exploitation, ont démontré un débit constant de quelque 11,5 L/min.
1.8.5 Essais de mise à l'eau par la rampe
Des essais ont été effectués pour déterminer les caractéristiques du véhicule lors de la mise à l'eau et pour vérifier combien d'eau entrait dans le véhicule en passant au-dessus de la visière avant, par les manches à air, par les ouvertures de ventilation du capot et par les côtés du capot, lorsque le véhicule entrait dans l'eau à diverses vitesses. La pente de la rampe de la marina de Hull est de 1:6,4 et le véhicule était dans une condition simulée de charge maximum, avec un franc-bord avant réel initial de 470 mm (18 ½ po) jusqu'au sommet de la visière.
Des vitesses de mise à l'eau variant de 3 km/h à 11 km/h ont été enregistrées par un radar de mesure de la vitesse. Pour la première série d'essais, toutes les ouvertures sauf l'extrémité avant du capot ont été temporairement étanchéisées, tandis que les obturations temporaires ont été enlevées pour une deuxième série d'essais. Pendant tous les essais, le joint en mousse fixé au sommet de la visière à l'avant du capot a été laissé dans sa condition initiale telle que durant l'exploitation.
Le véhicule a d'abord été treuillé dans l'eau à une vitesse minimale, avec le capot complètement ouvert. Le franc-bord avant auquel l'avant du véhicule s'est relevé et est devenu complètement flottant s'est avéré être de 240 mm (9 ½ po). Le véhicule a été maintenu dans cette position environ 10 minutes avant d'être tiré hors de l'eau et les quelque six litres d'eau qui s'étaient accumulés en raison des fuites à la coque ont été évacués.
Aux vitesses inférieures de mise à l'eau, la visière n'était pas submergée et, s'il y avait un peu d'embruns qui recouvraient le capot, il n'y avait que peu ou pas d'entrée d'eau dans la coque. Cependant, à une vitesse de mise à l'eau de 11 km/h, la visière était submergée, le capot et le pare-brise étaient complètement arrosés et quelque 29 litres d'eau avaient été pris à bord.
À une vitesse de mise à l'eau de 8 km/h, avec toutes les obturations temporaires enlevées du capot, la visière était à peine submergée, le capot brièvement arrosé et 22 litres d'eau avaient été pris à bord (voir la photo 9). À une vitesse de mise à l'eau de 10 km/h, la visière était submergée d'environ 80 mm (3 ¼ po), le capot et le pare-brise étaient complètement arrosés et quelque 32 litres d'eau avaient été pris à bord.
Lorsque le véhicule était en condition de charge maximale, les vitesses de mises à l'eau dépassant 8 km/h entraînaient une importante entrée d'eau. Dans l'exploitation, en l'absence d'alarme de niveau d'eau élevé dans la cale, la quantité réelle d'eau embarquée au début de chaque excursion ne peut pas être connue. Son refoulement dépendait de la mise en marche rapide de la pompe d'assèchement avant.
1.8.6 Mesure de l'entrée d'eau et de l'assiette pour diverses valeurs de franc-bord avant
Une série d'essais d'entrée d'eau a été effectuée pour déterminer le changement dans l'assiette et la quantité d'eau requise pour réduire le franc-bord avant réel à la hauteur des vagues de proue engendrées à diverses vitesses.
La combinaison du franc-bord avant réduit en raison de l'eau accumulée à l'intérieur du véhicule et de la hauteur de la vague de proue à une vitesse donnée représente l'assiette et la vitesse auxquelles l'eau commencerait à déborder au-dessus de la visière et entraînerait un envahissement par les hauts continu et important dans la partie avant de la coque.
Un franc-bord avant de 470 mm (18 ½ po) et un enfoncement arrière de 254 mm (10 po) ont été enregistrés au début des essais d'envahissement par l'eau, lorsque le véhicule ne contenait qu'une petite quantité d'eau au fond de la cale. Le véhicule a ensuite été progressivement rempli d'eau avec plusieurs barils de 210 litres et, en raison de la configuration du véhicule, l'eau s'est accumulée dans la moitié avant de la coque. À mesure que le poids de l'eau augmentait, le franc-bord avant diminuait et l'enfoncement arrière se réduisait graduellement.
La quantité réelle d'eau et les mesures de l'enfoncement avant et arrière ont été enregistrées pour diverses valeurs de franc-bord directement liées à la hauteur des vagues de proue déterminées au cours des essais de vitesse. Lorsque l'eau du septième baril est entrée dans la coque, le véhicule a commencé à s'enfoncer par l'avant, et une petite quantité d'eau qui s'était infiltrée par la coque et qui s'était accumulée à l'extrémité arrière du compartiment passagers a commencé à se déplacer vers l'avant.
Les données des tests révèlent que le véhicule adoptait une assiette nulle lorsque 1 375 litres d'eau avaient été embarqués et qu'à ce moment, le franc-bord avant réel était de 240 mm (9 ½ po). Les essais de vitesse précédents montrent que la hauteur de la vague de proue engendrée à 7,6 km/h était de 240 mm (9 ½ po), de sorte que cette vague arriverait au niveau du sommet de la visière avant à cette vitesse, en eau calme et avec le véhicule dans une condition semblable d'envahissement par l'eau.
1.9 Déroulement du naufrage
1.9.1 Trajet du véhicule et lieu du naufrage
Avant le départ, le conducteur a reçu instruction de réduire la durée de la portion marine de l'excursion à environ 30 minutes; le Lady Duck devait visiter brièvement les environs des chutes Rideau. En retournant à la marina de Hull, près du pont Macdonald-Cartier, le véhicule est passé à proximité d'une embarcation de plaisance dont le pilote a fait une remarque sur l'apparence et l'assiette du véhicule d'excursion et en a pris une photo (voir la photo 10).
Les relevés de photogéométrie et de triangulation effectués après le naufrage ont permis de déterminer que la position du véhicule au moment où la photo a été prise était environ 250 m à l'est du pont Macdonald-Cartier. Ces relevés et la photo ont également permis de déterminer la vitesse du véhicule à ce moment.
L'examen de la photo 10 à la lumière des essais du BST touchant la vitesse, la vague de proue, l'assiette, le franc-bord avant et l'envahissement par l'eau ainsi que des renseignements connexes révèlent :
- que l'assiette nulle du véhicule est compatible avec l'hypothèse que 1 375 litres d'eau auraient été embarqués et retenus à bord et que le franc-bord avant aurait été réduit à environ 240 mm (9 ½ po);
- que la vague de proue recouvre la partie avant du capot, submergeant la visière et pénétrant par les manches à air avant;
- que la hauteur de la vague de proue à 8 km/h est d'environ 267 mm (10 ½ po) et dépasse le franc-bord avant réduit de l'assiette nulle;
- que tous les passagers sont encore assis et ne sont pas encore avertis du danger;
- qu'une vitesse moyenne de 8 km/h maintenue pendant cinq minutes est plausible compte tenu de la distance entre le lieu du naufrage et la position du véhicule au moment de la photo.
1.9.2 Envahissement par les hauts et déroulement du naufrage
Les essais ont indiqué comment l'étanchéité de la coque était compromise. L'accumulation d'eau entrée dans la coque par suite du siphonnement et des fuites au palier d'arbre de transmission ainsi qu'aux fractures de la coque a commencé à entraîner une réduction du franc-bord avant, avant que ne débute l'envahissement par-dessus la visière avant. De plus, à des vitesses modérées, le franc-bord avant était réduit de moitié par l'effet de vague de proue, laissant insuffisamment de marge de franc-bord pour éviter l'entrée d'eau dans la coque en cas d'accumulation d'eau ou en présence de vagues naturelles ou du sillage d'autres embarcations à proximité.
La pompe d'assèchement avant, qui était la mieux placée pour éliminer une accumulation d'eau à l'avant du véhicule, était inopérante et les pompes d'assèchement de secours près du milieu du véhicule n'ont pas endigué tout l'envahissement d'eau. À mesure que le véhicule se dirigeait vers la marina de Hull, l'eau s'accumulait dans l'extrémité avant de la coque et le véhicule continuait à s'enfoncer de plus en plus par l'avant, entraînant une accélération de l'envahissement par les hauts. Le cycle a continué jusqu'à ce que la réserve de flottabilité à l'avant soit épuisée, et le véhicule a subitement coulé par l'avant.
La séquence d'événements la plus vraisemblable est illustrée à la figure 4.
Vitesse 5 km/h; franc-bord avant = 470 mm; hauteur de la vague de proue = 89 mm; assiette arrière = 254 mm. L'eau infiltrée par la coque et le palier d'arbre de transmission commence à s'accumuler. Les pompes d'assèchement principales de bâbord et de tribord sont actionnées (pompe de bâbord inopérante).
Vitesse 5 km/h; franc-bord avant = 432 mm; hauteur de la vague de proue = 89 mm; assiette arrière = 216 mm. L'infiltration d'eau par la coque et le palier d'arbre de transmission se poursuit. La pompe d'assèchement principale de tribord est bloquée par des débris solides. L'inondation par effet de siphonnement débute. Les deux pompes de secours sont actionnées.
Vitesse 5 km/h; franc-bord avant = 292 mm; hauteur de la vague de proue = 89 mm; assiette arrière = 38 mm. L'infiltration d'eau par la coque, par le palier d'arbre de transmission et par effet de siphonnement se poursuit. Les pompes d'assèchement de secours continuent de fonctionner.
Le véhicule retourne vers la marina. Vitesse 8 km/h; franc-bord avant = 292 mm; hauteur de la vague de proue = 267 mm; assiette arrière = 38 mm. L'infiltration d'eau par la coque, par le palier d'arbre de transmission et par effet de siphonnement se poursuit. La vague de proue commence à déborder par-dessus la visière et l'envahissement par les hauts commence à l'extrémité avant. Les pompes d'assèchement de secours continuent de fonctionner.
Message de détresse lancé alors que le véhicule se dirige vers la rive à environ 8 km/h. Hauteur de la vague de proue = 267 mm. L'infiltration d'eau par la coque, par le palier d'arbre de transmission et par effet de siphonnement se poursuit. L'envahissement par les hauts entrâine une accumulation, la vague de proue débordant par-dessus la visière et s'introduisant par les manches à air, les côtés du capot et les ouvertures de ventilation. L'assiette avant augmente à mesure que le véhicule s'enfonce et que la réserve de flottabilité diminue (voir la photo 10).
L'envahissement par le haut se généralise. L'assiette avant augmente subitement puisque la réserve de flottabilité est épuisée, et le véhicule coule rapidement par la proue.
Figure 4. Déroulement du naufrage
1.10 Inspection du véhicule par le ministère des Transports de l'Ontario
À la demande du BST, le véhicule a fait l'objet d'une inspection de la sécurité des véhicules routiers du ministère des Transports de l'Ontario les 3 et 4 septembre 2002, alors que le véhicule se trouvait au Laboratoire technique du BST. L'inspection a révélé que les manquements suivants étaient évidents le jour de l'accident :
- La vignette d'immatriculation sur la plaque BP2 110 indiquait une date d'expiration d'octobre 2001. La plaque expirait le 31 octobre 2001, comme le prévoyait le permis A1699127. Ce véhicule était en exploitation dans la ville d'Ottawa le 23 juin 2002 alors que l'immatriculation était échue depuis 7 mois et 23 jours. Les dossiers du ministère des Transports de l'Ontario révèlent que l'immatriculation a été renouvelée le 31 juillet 2002 pour une période se terminant le 31 octobre 2002.
- Le certificat d'inspection annuelle et la vignette correspondante étaient échus.
- La vignette d'inspection annuelle (no F656674) était fixée irrégulièrement dans le coin inférieur gauche du pare-brise et la date perforée était celle d'avril 2001. Une copie du certificat d'inspection annuelle (no F531222) se trouvant à bord comportait la description du véhicule, le numéro d'identification du véhicule et le numéro de plaque du véhicule, le tout correspondant au véhicule en cause sauf que le numéro de certificat ne correspondait pas à la vignette apposée. La vignette d'inspection annuelle était invalide. Aucune preuve d'inspection semi-annuelle n'était apposée sur le véhicule.
- Le véhicule ne comportait ni feux d'identification arrière, ni feux latéraux de gabarit ou feux d'encombrement.
- Les sièges passagers n'étaient pas solidement fixés.
- Les portières du conducteur et du passager avant ne s'ouvraient pas. La carrosserie du véhicule avait été modifiée par l'ajout d'un flotteur qui empêchait effectivement d'ouvrir la portière.
- Le support de suspension du troisième essieu était fissuré et cassé.
- Les pneus du troisième essieu ne répondaient pas aux normes minimales en matière de profondeur des sculptures et de dommages à la surface de roulement.
- En raison du montage inadéquat du troisième essieu, l'efficacité des freins était réduite.
- Le véhicule n'était pas doté d'au moins deux portières ou sorties. Il n'y avait aucune portière de sortie de secours. La rampe d'embarquement arrière ne permettait pas la libre évacuation des passagers.
Il n'a pas été possible de mettre le moteur routier en marche durant l'inspection du véhicule puisque celui-ci n'avait pas été remis en état après l'accident. Par conséquent, il n'a pas été possible d'effectuer une inspection complète du véhicule en regard des normes minimales.
Le 18 novembre 2002, la plaque d'immatriculation a été retirée du véhicule par le ministère des Transports de l'Ontario, et le véhicule a été déclaré inapte en raison de son état.
1.11 Inspection et certification des véhicules (marine)
1.11.1 Exigences d'inspection pour les petits navires à passagers
En tant qu'embarcation ayant une jauge brute inférieure à 5 et ne transportant pas plus de 12 passagers, le Lady Duck n'était pas assujetti au Règlement sur la construction de coques ou au Règlement sur l'inspection des coques pris en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada. Cependant, il doit faire l'objet d'une inspection en vertu du paragraphe 316(3) de la Loi sur la marine marchande du Canada et il était assujetti à d'autres règlements, dont le Règlement sur les petits bâtiments, le Règlement sur les abordages et le Règlement sur les machines de navires.
Lorsqu'il était à l'eau, le véhicule devait respecter les exigences de la partie IV du Règlement sur les petits bâtiments concernant l'équipement de sauvetage, de sécurité et de navigation et celles du Règlement sur les abordages concernant les feux de navigation et les avertisseurs sonores. Le propriétaire a la responsabilité d'assurer la conformité.
De plus, en tant que véhicule à passagers allant à l'eau ayant une jauge brute inférieure à 15, ne transportant pas plus de 12 passagers et ayant été mis en service au printemps 2001, le Lady Duck était visé par le Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments, qui a découlé du Programme provisoire de conformité des petits navires à passagersNote de bas de page 7. Les lignes directrices provisoires à l'annexe B du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments étaient en vigueur jusqu'à ce que les Normes de construction des petits bateaux (TP 1332) soient révisées.
Le Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments est un programme volontaire en vertu duquel tous les propriétaires et exploitants de petits bâtiments sont incités à adopter un régime d'inspection par autosurveillance. Ils peuvent ainsi vérifier que leurs bâtiments respectent les exigences en matière de sécurité applicables à leurs activités, en vertu desquelles les bâtiments doivent :
- subir une première inspection, à l'issue de laquelle un « avis de visite » leur sera délivré;
- posséder un « rapport d'information annuel sur la navigabilité » rempli chaque année par le propriétaire;
- subir une inspection aléatoire et un contrôle de conformité, exécutés par un inspecteur de la sécurité maritime, à la suite desquels une « attestation de conformité » sera délivrée;
- être approuvé par Transports Canada et être soumis à une inspection durant la construction.
Il y a des indications contradictoires quant à l'information qui a été échangée entre le propriétaire et l'organisme de réglementation au sujet de la première inspection. Cependant, il n'existe aucun dossier voulant qu'une demande officielle d'inspection ait été présentée à Transports Canada.
Le 10 juin 1999, dans une note de service adressée à tous les inspecteurs de Transports Canada, le président du Bureau d'inspection des navires à vapeur indiquait que ce programme provisoire était conçu pour promouvoir la sécurité tout en offrant aux propriétaires et exploitants un délai raisonnable afin de réagir aux changements.
Pour la mise en oeuvre du programme, une norme a été élaborée. La note de service affirmait que cette norme provisoire n'était pas hautement prescriptive et laissait une grande discrétion à l'inspecteur, et que toutes les décisions respectant l'intention sous-jacente des objectifs du programme seraient appuyées par la direction. L'intention du programme consistait à permettre aux inspecteurs de prendre des décisions fondées sur une approche globale en matière de sécurité plutôt que sur une stricte application des règlements. Nonobstant le programme, un inspecteur devait toujours appliquer les dispositions de la Loi sur la marine marchande du Canada exigeant que soit détenu un navire réputé être en mauvais état, dangereux ou défectueux.
Le programme devait être mis en oeuvre uniquement selon la nécessité, sous l'autorité du Bureau d'inspection des navires à vapeur et avec l'approbation du Comité national de gestion de la sécurité maritime. L'information sur le programme a été officiellement communiquée aux inspecteurs par l'entremise de bulletins de la sécurité des navires. Les gestionnaires ont été renseignés au sujet du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments par les directeurs régionaux. Ils devaient ensuite renseigner les inspecteurs et chaque bureau devait désigner un inspecteur comme premier responsable des petits bâtiments. Cet inspecteur devait recevoir une formation quant à l'application du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments et servir de personne-ressource au sein du bureau à l'égard de toute question concernant les petits bâtiments.
Transports Canada a créé un cours d'inspection des petits navires à passagers pour ses gestionnaires et ses inspecteurs. Un cours pilote a été offert en mars 2002 (voir l'annexe F - Cours d'inspection des petits navires à passagers, vue d'ensemble). De plus, deux cours ont été donnés en septembre et en décembre 2002. En juillet 2003, 74 gestionnaires et inspecteurs avaient suivi le cours; il est prévu d'offrir des séances supplémentaires.
1.11.2 Inspection du Lady Duck à la suite d'un accident précédent
Le 30 juin 2001, le Lady Duck a été en cause dans un accident (rapport M01C0033 du BST). Une brève description de l'accident et des mesures prises figure à l'annexe C.
À la suite de cet accident, le BST et Transports Canada ont effectué, de façon indépendante et en fonction de leurs mandats respectifs, des examens et des tests visant à évaluer l'étanchéité de la coque. Des évaluations des exigences de sécurité dont l'étanchéité, les francs-bords réels, l'assiette et la stabilité ont été complétées à la satisfaction de Transports Canada. Des tests connexes concernant l'assiette du véhicule et sa stabilité transversale à l'état intact ont été effectués par Transports Canada sous l'égide du Programme provisoire de conformité des petits navires à passagers; le BST y a assisté comme observateur. Durant ces évaluations, qui ont été effectuées avec le véhicule à terre et à flot, à des vitesses quelque peu inférieures à celles pratiquées pendant le service, il n'y a eu que des entrées d'eau minimes.
Transports Canada, ayant effectué une première inspection, a délivré le 3 juillet 2001 un formulaire S.I. 7 limitant l'exploitation du véhicule jusqu'à ce que les exigences et normes applicables en matière de sécurité soient respectées. Le formulaire S.I. 7 exigeait que 18 mesures correctives soient prises pour répondre aux exigences de la première inspection en vertu du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments. Le propriétaire a alors communiqué avec le bureau régional de Transports Canada à Sarnia (Ontario) pour obtenir des clarifications quant au fondement de ces exigences. Après en avoir discuté avec le propriétaire, le bureau régional de Transports Canada a consulté le bureau régional de Transports Canada à Kingston (Ontario) et le gestionnaire responsable des inspections des petits navires.
Dans une lettre adressée au propriétaire le 4 juillet 2001, les points figurant dans le formulaire S.I. 7 étaient passés en revue et respectivement marqués de la mention « demeure en vigueur » ou « aucune exigence réglementaire précise; il s'agit uniquement d'une recommandation de l'inspecteur » (voir l'annexe E). Les points se trouvant dans le premier cas relevaient tous de la réglementation, tandis que les points se trouvant dans le second cas étaient des exigences en matière de sécurité formulées dans le Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments. Un exemplaire du Bulletin de la sécurité des navires 04/2001, décrivant le Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments, a également été remis au propriétaire à ce moment. Par la suite, le propriétaire n'a pas demandé d'être ajouté sur la liste d'envoi d'information éventuelle sur la sécurité et Transports Canada ne l'y a pas ajouté.
Transports Canada a ensuite produit un nouveau formulaire S.I. 7 comportant huit points supplémentaires à régler au plus tard le 31 juillet 2001 pour que le véhicule soit autorisé à reprendre son service. Ce formulaire informait également le propriétaire qu'il devait aviser Transports Canada si une infiltration d'eau anormale était constatée à l'avenir.
Le 1er août 2001, un formulaire S.I. 7 supplémentaire a été délivré, exigeant que les deux éléments suivants soient ajoutés à la liste de contrôle de l'exploitant du Lady Duck : le ventilateur d'extraction devait être actionné avant de faire démarrer le moteur marin et la pompe d'assèchement avant devait demeurer en mode « automatique ».
Le 6 mai 2002, Transports Canada a effectué une inspection aléatoire et un contrôle de conformité sous l'égide du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments. L'inspection consistait à examiner visuellement l'équipement de sécurité et de navigation, y compris la vérification du nombre requis de gilets de sauvetage, relativement aux exigences réglementaires du Règlement sur les petits bâtiments et du Règlement sur les abordages et à réaliser un bref essai du véhicule sur l'eau. L'inspecteur n'a réitéré aucun des points figurant sur le formulaire S.I. 7 précédent qui avaient été révisés par Transports Canada et identifiés comme recommandations, et a limité l'inspection à l'observation des exigences réglementaires. L'inspection comprenait également des tests des pompes d'assèchement pour confirmer leur fonctionnement (elles ont été actionnées et on les a entendues fonctionner). La section contrôle de conformité du Certificat d'inspection du navire (SIC) 99 a alors été remplie.
Lors de cette inspection, le capot du véhicule comportait deux ouvertures triangulaires de ventilation. Deux manches à air supplémentaires d'un diamètre de 75 mm (3 po), situées vers l'avant du capot au-dessus de la visière, ont été ajoutées par le propriétaire après l'inspection. Cette modification n'a pas été déclarée à Transports Canada, nonobstant le fait que le SIC 99Note de bas de page 8 comportait un avertissement limitant sa validité tel que le bâtiment était configuré à la date de l'inspection et précisant qu'aucune modification ne devait être apportée au bâtiment sans l'autorisation préalable de la Sécurité maritime de Transports Canada.
1.11.3 Enregistrement et octroi de licences pour les petits bâtiments commerciaux
Le Lady Duck est un véhicule amphibie à passagers détenant une plaque d'immatriculation provinciale de véhicule automobile pour l'exploitation sur la route; il est expressément exclu des exigences d'obtention de permis de la partie I du Règlement sur les petits bâtiments (voir les exigences imposées par la loi et les règlements, alinéa 7(2)d) du Règlement sur les petits bâtiments à l'annexe B).
En vertu d'un protocole d'entente entre Transports Canada et le ministère des Pêches et des OcéansNote de bas de page 9, les ministères ont convenu que la responsabilité et l'autorité en matière d'octroi de licences aux petits bâtiments, à l'exception des petits bâtiments commerciaux, relèvent du ministère des Pêches et des Océans tandis que la responsabilité et l'autorité en matière de l'immatriculation des navires, y compris les petits bâtiments commerciaux, relèvent de Transports Canada.
En tant que véhicule amphibie ayant une jauge brute inférieure à 15, le Lady Duck ne se retrouve dans ni l'une ni l'autre des bases de données des licences ou des immatriculations; il n'y avait aucune obligation d'enregistrer un véhicule amphibie pour lequel un permis provincial de circulation routière était exigé.
1.12 Qualification et accréditation du personnel
1.12.1 Formation du conducteur
Le conducteur du Lady Duck n'était pas tenu de posséder un certificat de navigation parce que le Lady Duck avait une jauge brute inférieure à 5 et ne transportait pas plus de 12 passagers. Toutefois, le conducteur était titulaire d'un brevet de capitaine avec restrictions (certificat du ministre, Transports Canada)Note de bas de page 10 visant l'exploitation du Lady Dive I et du Lady Dive II, d'un certificat restreint de mécanicien (certificat du ministre, Transports Canada)Note de bas de page 11, d'un certificat d'examinateur, capitaine/mécanicien avec restrictionsNote de bas de page 12 visant l'exploitation du Lady Dive III et d'un certificat restreint d'opérateur radio, tous valides au moment de l'accident. Le conducteur était également titulaire d'un permis valide pour véhicules routiers à passagers délivré par le ministère des Transports de l'Ontario.
En avril 2002, le conducteur avait suivi un cours sur les fonctions d'urgence en mer (FUM) au Collège Saint-Laurent à Kingston. Il avait reçu en tout 45,5 heures de formation couvrant toutes les sections du programme approuvé pour le cours FUM A1, cours élémentaire de sécurité (19,5 heures), et le cours FUM A2, cours de sécurité pour les petits bâtiments (26 heures).
Un des objectifs du cours élémentaire de sécurité consiste à garantir que les gens de mer sont en mesure d'offrir de l'aide en cas d'incendie et d'autres situations d'abandon ou d'urgence. Durant le cours, cinq heures sont consacrées à l'équipement de sauvetage et à l'abandon, y compris la théorie et l'application pratique. Le contenu du cours comprend de la formation sur l'utilisation de gilets de sauvetage, de combinaisons d'immersion, de bouées de sauvetage, de radeaux de sauvetage, d'équipement divers ainsi que de canots de secours et de leurs dispositifs de mise à l'eau.
Avant de débuter le service des excursions, les conducteurs de l'entreprise recevaient d'employés de l'entreprise de 12 à 40 heures d'instruction à bord du Lady Duck et de deux véhicules amphibie à passagers de plus grandes dimensions. Le conducteur au moment de l'accident était au service de l'entreprise depuis le mois de mai 2001 et il estimait avoir reçu 12 heures de formation pratique sur les plus grands véhicules de l'entreprise. Il avait réussi au printemps précédent une évaluation pratique pour son brevet de capitaine avec restrictions aux commandes d'un de ces véhicules.
La formation à bord du Lady Duck comprenait une sensibilisation aux diverses commandes et modalités opérationnelles du véhicule. En général, les conducteurs s'entraînaient et apprenaient à maîtriser le comportement des véhicules en manoeuvre, en portant une attention particulière au moment d'entrer à l'eau et d'en sortir à la rampe de la marina de Hull. La formation traitait de l'emplacement et du mode de fonctionnement du véhicule, notamment des feux de signalisation routiers et marins, du klaxon, du système de sonorisation, de la radio VHF, des pompes d'assèchement, des extincteurs et du rangement des gilets de sauvetage du véhicule. Le conducteur au moment de l'accident avait reçu sa formation sur le Lady Duck du mécanicien de l'entreprise avant de commencer à conduire le véhicule.
Durant la formation aux préparatifs routiniers nécessaires au Lady Duck, les conducteurs étaient verbalement avisés de vérifier les niveaux de carburant pour les moteurs avant et arrière ansi que des autres fluides et de contrôler l'état de marche de tous les autres systèmes avant de débuter le service passagers.
La formation à l'exploitation routinière exigeait également que les conducteurs vérifient l'état de marche des pompes d'assèchement une fois sur l'eau ainsi que la fermeture des robinets et des bouchons de vidange avant de commencer leur service et entre les excursions, lorsque le véhicule était stationné sur terre.
1.12.2 Qualification et formation des guides touristiques
C'était le deuxième été que la guide touristique à bord du véhicule était employée par l'entreprise. Elle avait passé en tout moins de six mois de service à bord et n'avait pas terminé la formation FUM. Le Règlement sur l'armement en équipage des navires exige que chaque membre d'équipage réussisse une formation FUM avant d'avoir terminé six mois de service à bord.
Les guides touristiques étaient affectés au Lady Duck, au Lady Dive I ou au Lady Dive III. Ces deux derniers sont différents et considérablement plus grands que le Lady Duck. Ils disposent de plus de 40 places assises et transportent un radeau de sauvetage en plus d'autre équipement d'urgence et de sauvetage requis.
Aucun programme de formation officiel n'était offert aux guides avant de débuter les excursions sur un ou l'autre des véhicules amphibie. Il n'y avait pas non plus de politiques ou de procédures écrites propres à l'entreprise sur la nature et les modalités de la formation initiale des guides touristiques. Les guides recevaient un texte qu'ils devaient étudier. Ce texte décrivait les divers sites visités sur terre et sur l'eau et comprenait deux éléments touchant la sécurité :
- le guide demandait aux passagers, pour leur sécurité, de demeurer dans leur siège et de toujours garder bras et jambes à l'intérieur de l'amphibus;
- le guide devait montrer aux passagers où se trouvaient les gilets de sauvetage et les sorties de secours et les avisait qu'ils pouvaient se lever quelques-uns à la fois pour prendre des photos.
Les nouveaux guides touristiques accompagnaient des guides d'expérience pour comprendre comment les excursions devaient se dérouler. Une fois que le guide d'expérience était convaincu qu'un nouveau guide se montrait suffisamment à l'aise avec le texte et pour communiquer avec les passagers, il pouvait être affecté à des excursions en compagnie d'un conducteur.
En ce qui concerne l'équipement de sécurité à bord des véhicules amphibie, on montrait aux guides touristiques l'emplacement des VFI, des gilets de sauvetage, des bouées de sauvetage, des sorties de secours et, dans le cas du Lady Dive I et du Lady Dive III, de la rampe d'embarquement arrière.
Au printemps 2002, le guide principal responsable de l'affectation des guides touristiques a organisé une réunion de tous les guides embauchés. Lors de cette réunion, les guides ont monté à bord du Lady Dive I et ont fait une excursion de familiarisation sur terre dans la ville. Après l'excursion, un mécanicien de l'entreprise a renseigné les guides sur l'emplacement de l'équipement de sécurité à bord du Lady Dive I. Le mécanicien les a également renseignés sur l'emplacement de l'équipement de sécurité à bord du Lady Duck. Cette réunion a été organisée sur l'initiative du guide principal et non par suite d'une exigence de l'entreprise.
Les guides touristiques n'avaient reçu aucune formation pratique sur la façon d'utiliser l'équipement de sécurité et leur texte ne demandait aucune démonstration de la façon d'enfiler un gilet de sauvetage. Même si on indique qu'une démonstration des gilets de sauvetage est effectuée à bord des plus grands véhicules amphibie, la façon d'enfiler un gilet de sauvetage et un VFI ne faisait pas partie des consignes de sécurité courantes données à bord du Lady Duck.
L'entreprise ne fournissait aucune documentation aux équipages et ne leur donnait aucune formation sur les modalités d'évacuation d'urgence. Les rôles du conducteur et du guide touristique n'étaient pas définis en cas d'abandon du Lady Duck.
La recherche a démontré que, dans les évacuations d'urgence, particulièrement à bord d'un aéronef, le leadership qu'assure le personnel de bord, en donnant des indications fermes et en démontrant le comportement convenable, aide à diminuer les délais d'évacuation et à réduire la panique chez les passagers. Comme les urgences sont rares, la recherche souligne également l'importance d'une formation initiale rigoureuse et de recyclage fréquentNote de bas de page 13Note de bas de page 14.
1.12.3 Compétences et formation du mécanicien
Le mécanicien à temps plein de l'entreprise responsable de l'entretien du véhicule n'avait aucune formation officielle et ne détenait aucun certificat. Son expérience professionnelle en mécanique se résumait à quatre saisons passées avec cette entreprise.
1.13 Procédures normales d'exploitation de l'entreprise
À la suite de l'accident précédent (rapport M01C0033 du BST) survenu le 30 juin 2001 et mettant en cause le même véhicule, un système officiel a été adopté pour vérifier et enregistrer l'exécution des méthodes courantes de préparation des véhicules pendant et avant le service quotidien (voir l'annexe C). Le conducteur devait vérifier l'état des robinets, signer la liste de contrôle de sécurité et la faire contresigner par le guide touristique ou le préposé au kiosque; la liste était conservée à terre. La liste précisait le nombre de passagers à bord, les noms du conducteur et du guide, l'heure de départ ainsi que l'heure d'entrée et de sortie de l'eau et du retour au kiosque.
Le formulaire S.I. 7 délivré le 1er août 2001 exigeait que deux éléments soient ajoutés à la liste de contrôle : le ventilateur d'extraction devait être actionné avant de faire démarrer le moteur marin et la pompe d'assèchement avant devait être en mode « automatique ». Le 12 août 2001, ces points n'avaient toujours pas été ajoutés à la liste de contrôle de l'entreprise.
Pour le jour de l'accident de 2002, aucune liste de contrôle n'a été récupérée ni fournie par le propriétaire. Cependant, un document a été récupéré du véhicule pour le jour de l'accident; le conducteur y avait indiqué l'exécution du test sur l'eau et du tour d'inspection du véhicule.
À l'exception de ces deux documents, l'entreprise n'avait aucune forme officielle de procédure normale d'exploitationFootnote 15 ni aucune politique écrite quant à la formation du personnel.
1.14 Conditions météorologiques
Entre 12 h et 17 h le 23 juin 2002, la station météorologique de l'aéroport de Gatineau a enregistré des vents du sud-ouest soufflant à 7 km/h avec des rafales jusqu'à 15 km/h. Des orages et des averses ont été enregistrés après l'accident, de 17 h 7 à 19 h 13, avec des rafales du nord-ouest jusqu'à 28 km/h, avec des rafales jusqu'à 56 km/h à 18 h.
Puisque l'accident est survenu vers 16 h 10, on a jugé que les conditions météorologiques n'avaient joué aucun rôle dans l'accident.
1.15 Dossier de l'entretien du véhicule
Un rapport d'inspection du véhicule par le conducteur était tenu par les mécaniciens de l'entreprise sous l'égide du ministère des Transports de l'Ontario, aux fins de l'inspection quotidienne du véhicule. Ce document servait à consigner les défectuosités et les réparations; toutefois, il ne renfermait aucune référence à la réparation ou à l'entretien des pompes d'assèchement. Aucun autre registre de l'entretien n'était disponible aux fins d'examen après l'accident.
1.16 Communications
Il n'y avait à bord du véhicule aucun système d'alerte automatique ou manuel par radiotéléphone tel qu'un système d'appel sélectif numérique ou une radiobalise de localisation des sinistres pour alerter les instances de recherche et sauvetage (SAR). Aucun équipement du genre n'était exigé pour cette classe de bâtiment.
La portée des antennes VHF directionnelles du centre des SCTM de Prescott et du centre des SCTM de Montréal n'atteint pas la région de la capitale nationale. Il n'y a aucun projet visant à offrir la couverture radio dans la région d'Ottawa. Deux embarcations auxiliaires de la Garde côtière canadienne (GCC)Note de bas de page 16 et toute autre embarcation privée ou exploitée à des fins commerciales se trouvant dans les parages et étant à l'écoute de la voie 16 VHF (voie réservée aux urgences) peuvent intervenir en cas d'urgence.
En 1999, les responsables du service 911 de Hull (aujourd'hui Gatineau) ont proposé à la GCC qu'une station VHF maritime soit incorporée à leur système. Cependant, aucune mesure supplémentaire n'a été prise en ce sens.
Le Règlement de 1999 sur les stations de navires (radio) précise les exigences relatives à l'équipement radio qui doit être à bord des navires de commerce aux fins des communications de détresse, d'urgence, de sécurité et d'ordre général. Les navires transportant plus de six passagers et effectuant un voyage à l'intérieur d'une zone de couverture VHF devront être munis d'un radiotéléphone VHF. Une modification proposée au règlement exigera que les navires à passagers qui effectuent un voyage à l'extérieur d'une zone de couverture VHF devront être munis d'équipement radio leur permettant de demeurer en communication bilatérale avec un centre des SCTM ou avec une personne à terre. La modification au règlement a été publiée dans la Gazette du Canada, partie I, le 12 avril 2003 (vol. 137, no 15). Il est prévu que la modification entrera en vigueur en 2004.
1.17 Sécurité des passagers
1.17.1 Consignes de sécurité aux passagers
Les exigences relatives aux consignes de sécurité figurent à la partie IV du Règlement sur les petits bâtiments, article 26.1 (pour le texte des lois, règlements ou publications, voir l'annexe B). Les alinéas 1a), 1d), 1e) et 1f) ainsi que l'article 2 sont pertinents dans le cas du Lady Duck. Avant de débuter la portion terrestre de l'excursion, la guide a donné des consignes aux passagers sur les procédures et les dispositifs de sécurité, en anglais et en français. Ces consignes de sécurité indiquaient aux passagers de demeurer dans leur siège et de conserver en tout temps bras et jambes à l'intérieur du véhicule.
Avant la portion marine de l'excursion, la guide a donné d'autres consignes de sécurité en anglais et en français et a informé les passagers qu'un « gilet de sauvetage » était accroché à côté de chaque siège, que des gilets de sauvetage pour enfants se trouvaient à l'arrière du véhicule et que les sorties de secours étaient les fenêtres le long de chaque côté du véhicule ainsi que la fenêtre arrière au-dessus des escaliers escamotables. Pendant la transition, les passagers ont été priés de demeurer assis jusqu'à ce que le véhicule soit entré à l'eau et soit à flot; ils pourraient alors se lever quelques-uns à la fois pour prendre des photos.
Les « gilets de sauvetage » mentionnés par la guide étaient en réalité des VFI et non les gilets de sauvetage de type trou de serrure approuvés; ces derniers étaient rangés sous les sièges passagers. Les gilets de sauvetage pour enfants étaient convenables pour le genre d'exploitation en cause.
Aucune démonstration n'a été faite de la façon d'enfiler ni le gilet de sauvetage de type trou de serrure approuvé ni le VFI. L'emplacement de la bouée de sauvetage et de l'équipement de détresse n'a pas été signalé aux passagers, ni le moyen de les utiliser.
1.17.2 Déroulement de l'évacuation
Après avoir ordonné l'évacuation, alors qu'il se déplaçait vers l'arrière pour aider les passagers à enfiler leur VFI, le conducteur a été emporté par une des fenêtres faisant office de sortie. Pour évacuer le véhicule, tous les autres occupants se sont dirigés vers la sortie arrière, par où ils étaient entrés.
La guide et un passager, constatant qu'il y avait un engorgement à cette sortie, ont évacué le véhicule en passant par la fenêtre près du siège le plus à l'arrière du côté bâbord. Il paraît que le véhicule était presque à la verticale et la guide a utilisé l'auvent pour s'aider à s'extraire de l'eau. Le passager a aussi rapporté avoir eu de la difficulté à sortir par la fenêtre de côté.
Les passagers qui sont sortis par l'arrière ont connu des difficultés parce qu'ils devaient grimper jusqu'à l'ouverture au sommet de la rampe d'embarquement levée et parce que cette ouverture était de petites dimensions; certains se sont blessés légèrement en passant par cette ouverture.
Tous les témoignages font état de la difficulté de l'évacuation en raison de la rapidité du naufrage, de l'assiette adoptée par le véhicule en coulant et de l'engorgement à la sortie arrière. Il paraît que la panique s'est répandue pendant que les passagers tentaient d'évacuer le bâtiment par la sortie arrière.
1.17.3 Disponibilité et utilisation de l'équipement de sauvetage
Au cours de l'évacuation, un des survivants s'est accroché à un VFI. Deux autres portaient chacun un VFI lorsqu'ils sont sortis mais celui-ci n'était pas attaché. Une survivante a reçu un gilet de sauvetage avant de sortir, mais il s'agissait d'un gilet pour enfant et il était trop petit pour que sa tête puisse y passer. Un autre passager a également utilisé un gilet pour enfant en arrivant à la surface, mais il ne s'agissait pas d'un dispositif de flottaison adéquat pour cette personne. Le conducteur et un des passagers n'avaient pas enfilé de VFI, le conducteur parce qu'il avait été emporté par-dessus bord alors qu'il se déplaçait vers l'arrière du véhicule et l'autre personne, parce qu'elle s'était rendue à l'arrière du véhicule à la demande du conducteur et ne pouvait plus accéder au VFI de son siège. Après avoir été éjecté du véhicule, le conducteur a pu enrouler son bras autour d'un VFI flottant dans l'eau.
1.17.4 Exigences relativement à l'équipement de sauvetage
Les exigences relativement à l'équipement de sauvetage pour les bâtiments commerciaux de plus de 8 m de longueur figurent dans la partie IV du Règlement sur les petits bâtiments, article 29 (pour le texte des lois, règlements ou publications, voir l'annexe B). L'équipement de sauvetage à bord de tels bâtiments doit assurer un niveau de sécurité répondant au moins à ces normes.
Conformément au Bulletin de la sécurité des navires 04/2001 et au Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments, annexe B, article 2, alinéa g), de l'équipement supplémentaire est recommandé, dont un radeau de sauvetage pneumatique et une plate-forme pneumatique ou un canot de secours convenable. Le formulaire S.I. 7 (voir l'annexe E) précisait ces points; à la suite d'un examen de Transports Canada, ils ont été identifiés comme simples recommandations de l'inspecteur.
Dans le cours d'inspection des petits navires à passagers, les inspecteurs de la sécurité maritime reçoivent des instructions visant les inspections de l'équipement de sauvetage et les consignes de sécurité à l'intention des passagers. Même si les conseils s'appliquent aux petits bâtiments à passagers et surtout les bâtiments ayant une jauge brute de 15 ou moins qui transportent plus de 12 passagers, un grand nombre des éléments d'inspection, comme les gilets de sauvetage, les bouées de sauvetage et les consignes de sécurité, étaient pertinents pour le Lady Duck.
Les inspecteurs étaient tenus de veiller à ce que tous les gilets de sauvetage soient vérifiés pour ce qui concerne la solidité de leur enveloppe extérieure ainsi que la solidité et l'intégrité de toutes les attaches; ils devaient également vérifier que le ruban rétroréfléchissant était complet et fixé au bon endroit et qu'un sifflet était attaché. De plus, les inspecteurs devaient vérifier que le rangement des gilets de sauvetage était facilement repérable, accessible et signalé, et que les gilets de sauvetage pour enfants étaient rangés séparément et faciles à récupérer.
Le cours d'inspection des petits navires à passagers enseigne que les bouées de sauvetage doivent être vérifiées pour contrôler le respect des règlements et que les inspecteurs devraient informer les propriétaires ou exploitants que, même si la loi ne les y oblige pas, ils sont encouragés à prévoir des appareils flottants à dégagement hydrostatique.
1.17.4.1 Gilets de sauvetage
Le gilet de sauvetage normalisé approuvé à bord du Lady Duck est le type à trou de serrure fabriqué conformément aux dispositions des articles 3 à 7 de la norme 65-GP-14MFootnote 17 de l'Office des normes générales du Canada (ONGC). Douze gilets de sauvetage pour adultes et trois gilets de sauvetage pour enfants ont été récupérés. Au moment de l'accident, le Lady Duck avait à son bord le nombre requis de gilets de sauvetage.
Les gilets de sauvetage pour adultes qui ont été récupérés avaient été approuvés par Transports Canada en 1972, six ans avant l'entrée en vigueur de la norme CAN/CGSB 65-GP-14M. Même si les gilets de sauvetage étaient plus vieux que ne le veut la norme publiée, il n'était pas obligatoire de les remplacer pourvu qu'ils soient inspectés individuellement chaque année par un inspecteur de Transports Canada et que leur état s'avère adéquat pour la fonction prévue. L'inspection en question viserait notamment l'intégrité des coutures et des attaches, la flottabilité, la décoloration du tissu et la présence des marques et des sifflets requis. L'inspection aléatoire de Transports Canada qui a eu lieu le 6 mai 2002 comprenait une vérification du nombre et du bon état des gilets de sauvetage.
L'examen des gilets de sauvetage après l'accident a révélé que cinq des gilets de sauvetage pour adultes qui ont été récupérés n'étaient pas dotés de sifflets et qu'aucun ne portait le ruban rétroréfléchissant comme l'exige la norme CAN/CGSB 65-GP-14M. Le marquage, y compris le diagramme de profil, était délavé, dans certains cas au point d'être illisible. Sur certains gilets de sauvetage, les bouts des rubans d'attache étaient effilochés.
Les trois gilets de sauvetage pour enfants qui ont été récupérés étaient approuvés par Transports Canada, étaient dotés de sifflets et de rubans rétroréfléchissants et portaient le marquage approprié. Sur deux des gilets pour enfants, le diagramme de profil mesurait 55 mm par 70 mm, soit moins que les 55 mm par 115 mm requis.
Les gilets de sauvetage pour adultes étaient rangés dans des casiers sous chacun des sièges passagers. L'examen effectué après l'accident a révélé qu'il n'était pas facile de retirer les gilets de sauvetage de sous les sièges puisqu'ils avaient tendance à s'accrocher sur le bord de la boîte métallique dans laquelle ils étaient rangés. En retirant les gilets de sauvetage durant l'enquête, il fallait être prudent pour éviter de déchirer l'enveloppe extérieure en tissu du gilet. En outre, puisqu'il était nécessaire de quitter son siège pour avoir accès aux gilets de sauvetage, l'allée simple pourrait être considérablement engorgée. Dans trois des onze casiers, on a trouvé divers objets (une corde en nylon, un contenant d'huile à moteur et un jeu de câbles de démarrage) rangés par-dessus les gilets (voir la photo 11).
Les gilets de sauvetage pour adultes étaient rangés dans des casiers sous chacun des sièges passagers. L'examen effectué après l'accident a révélé qu'il n'était pas facile de retirer les gilets de sauvetage de sous les sièges puisqu'ils avaient tendance à s'accrocher sur le bord de la boîte métallique dans laquelle ils étaient rangés. En retirant les gilets de sauvetage durant l'enquête, il fallait être prudent pour éviter de déchirer l'enveloppe extérieure en tissu du gilet. En outre, puisqu'il était nécessaire de quitter son siège pour avoir accès aux gilets de sauvetage, l'allée simple pourrait être considérablement engorgée. Dans trois des onze casiers, on a trouvé divers objets (une corde en nylon, un contenant d'huile à moteur et un jeu de câbles de démarrage) rangés par-dessus les gilets (voir la photo 11).
Les gilets de sauvetage pour enfants étaient rangés à l'arrière du véhicule, empilés au-dessus du compartiment du moteur semi-hors-bord.
1.17.4.2 Bouée de sauvetage
Le Lady Duck n'était pas doté d'une bouée de sauvetage appropriée. La bouée qui se trouvait à bord avait un diamètre de 610 mm (voir l'annexe E), plutôt que de 762 mm comme l'exige la partie IV, article 29, du Règlement sur les petits bâtiments. La bouée de 762 mm est la plus grande des bouées requises en vertu du Règlement sur les petits bâtiments et elle fait l'objet d'une liste d'exigences plus exhaustive que la bouée de 610 mm; entre autres, du ruban rétroréfléchissant doit être apposé à quatre endroits équidistants autour du milieu de la bouée et une ligne de sauvetage d'au moins 9 m doit y être attachée.
L'examen de la bouée de 610 mm a révélé que, même si elle portait le numéro d'approbation de Transports Canada TC.143.014.045, elle ne respectait pas les normes applicables précisées dans le document TP 7325, Normes relatives aux bouées de sauvetage et leurs accessoires et à l'article 8, annexe III du Règlement sur les petits bâtiments. Les guirlandes étaient de longueurs variables (570, 590, 600 et 610 mm) plutôt que de la longueur requise d'au moins 610 mm dans tous les cas. La bouée était fixée au sommet de la cloison arrière au-dessus du compartiment du moteur semi-hors-bord au moyen d'une corde élastique dont les crochets étaient réunis derrière la bouée. En raison du mode de fixation, la bouée n'aurait pas été immédiatement disponible.
Dans le formulaire S.I. 7 du 3 juillet 2001, l'inspecteur de Transports Canada avait demandé que le véhicule soit doté de deux bouées de sauvetage de 610 mm de diamètre. Une lettre de Transports Canada du 4 juillet 2001 avait modifié cette requête, n'exigeant qu'une bouée de sauvetage approuvée, avec une corde de 9 m.
1.17.4.3 Vêtements de flottaison individuels
Un vêtement de flottaison individuel (VFI) est défini de la façon suivante dans le Règlement sur les petits bâtiments :
engin de sauvetage flottant, autre qu'un gilet de sauvetage, qui est destiné à être porté par une personne et qui est conforme aux normes établies à l'article 1.3 de l'annexe III.
L'article 1.3 de l'annexe III indique que les normes applicables aux VFI sont les suivantes :
- . . . celles prévues dans :
- la norme CAN/CGSB-65.11-M88 de l'Office des normes générales du Canada, intitulée Vêtements de flottaison individuels;
- la norme UL 1180 des laboratoires des assureurs, intitulée Fully Inflatable Recreational Personal Flotation Devices, qui comprend le supplément canadien.
Bien que ce ne soit pas exigé par le Règlement sur les petits bâtiments, le Lady Duck était équipé de 12 VFI situés sur des crochets à côté des sièges passagers; ils étaient facilement accessibles sans restriction. Tous les VFI récupérés étaient de taille « grande » à « très grande ;» convenant à des personnes ayant un tour de poitrine de 102 cm à 122 cm (40 po à 48 po) ou pesant plus de 41 kilogrammes (90 livres). Les VFI portaient une étiquette indiquant qu'ils respectaient la norme CAN/CGSB-65.11-M88 et qu'ils étaient approuvés par la GCC.
Au moment de l'accident, deux jeunes victimes portaient des VFI pour adultes; ces VFI étaient trop grands pour elles.
1.17.5 Évacuation d'urgence
Lorsque les passagers montent à bord, ils le font au moyen d'une rampe d'embarquement située dans le coin arrière gauche du véhicule. Après que tous les passagers se sont embarqués, la rampe est remontée grâce à un treuil électrique dans une ouverture faisant 1 830 mm de hauteur et 685 mm de largeur (72 po de hauteur et 27 po de largeur), formant une barrière étanche lors de la circulation sur l'eau. Une fois que la rampe a été fixée en place, l'ouverture, qui sert aussi de sortie en cas d'évacuation, est réduite à 788 mm de hauteur (31 po) pour une largeur variant de 685 mm (27 po) à 533 mm (21 po) près du sommet de la sortie (voir la photo 12).
La rampe est articulée : lorsqu'elle est relevée, ses deux marches inférieures se replient à l'envers contre l'extérieur du véhicule. Une fois que le véhicule est à l'eau, la rampe d'embarquement ne peut pas être abaissée (voir la photo 13).
Pour accéder à cette sortie arrière en cas d'évacuation d'urgence, les passagers doivent parcourir un passage large de 584 mm (23 po) puis faire deux tournants pour se retrouver entre le siège le plus à l'arrière du côté bâbord et le côté gauche avant du compartiment du moteur semi-hors-bord. La largeur minimale de ce parcours est de 514 mm (20 ¼ po). Une fois arrivés à la sortie, pour arriver à l'ouverture disponible au sommet des escaliers escamotables, les passagers doivent grimper à une hauteur d'environ 1 016 mm (40 po), sans disposer de point d'appui permanent où poser le pied pour les y aider. Le sommet des escaliers escamotables et le montage du treuil comportent plusieurs extrémités métalliques pointues. Les deux marches inférieures de la rampe se replient à l'envers contre l'extérieur du véhicule. La première de ces marches se présente presque comme une glissade pour quelqu'un tentant d'évacuer le véhicule par cette sortie. Une fois que les passagers arrivent au sommet des escaliers escamotables, il n'y a aucune plate-forme sur laquelle prendre pied pour faciliter le passage à l'eau. Les passagers doivent trouver une position pour sauter sans structure de soutien pour les y aider, tout en veillant à éviter le danger que représentent les marches extérieures et le moteur semi-hors-bord.
Des normes d'ergonomie, comme la norme militaire 1472D (MIL STD 1472D), donnent des indications utiles pour la conception, entre autres, de voies de sortie tenant compte de la population d'utilisateurs. Le paragraphe 5.6.3.2 de cette norme, touchant les dimensions des dégagements, prévoit que les dimensions des passages et accès, qui doivent permettre le passage du corps ou de parties du corps, tiendront compte des dimensions corporelles du 95e percentile.
Dans le paragraphe 5.7.8.3 visant le passage du corps, la norme prévoit que, pour des ouvertures rectangulaires d'accès latéral devant permettre le passage du corps, les dimensions devraient être d'au moins 660 mm (26 po) de hauteur ou de profondeur dans le cas du port de vêtements légers et de 740 mm (29 po) dans le cas du port de vêtements encombrants; la largeur devrait être de 760 mm (30 po) dans le cas du port de vêtements légers et de 860 mm (34 po) dans le cas du port de vêtements encombrants.
En ce qui concerne la sortie arrière du Lady Duck, la hauteur de l'ouverture, 788 mm (31 po), dépasse ce que préconise la norme MIL STD 1472D, mais la largeur de 685 mm (27 po) se réduisant à 533 mm (21 po) est insuffisante pour l'éventail complet des utilisateurs en vertu de la règle du 95e percentile.
Il est important de noter que le chapitre 4 du Code international de sécurité des bateaux à grande vitesse donne des indications sur l'aménagement et les dimensions des voies d'évacuation. En ce qui concerne les dimensions des passages et accès faisant partie des voies d'évacuation, le paragraphe 4.7.13 indique que les dimensions devraient permettre le mouvement facile de personnes portant un gilet de sauvetage. Il ne devrait y avoir aucune protubérance qui pourrait causer des blessures, accrocher les vêtements, endommager les gilets de sauvetage ou compliquer l'évacuation de personnes handicapées.
Selon l'article 8 (chargement de passagers) de l'annexe B du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments, le chargement de passagers des navires de classe I et II sera établi à raison d'une place assise ferme de 610 mm par passager. Les sièges doivent être espacés de 300 mm dans l'axe longitudinal et les allées doivent avoir au moins 755 mm de largeur. Les navires de classe III, comme le Lady Duck, sont seulement tenus de comprendre une place convenable pour chaque personne à bord.
Un auvent d'une pièce en tissu était fixé à un cadre métallique construit de sorte que ses structures de soutien formaient les cadres des fenêtres de chaque côté du véhicule. Ces cadres n'empêchaient pas l'évacuation par les ouvertures. Chaque cadre de fenêtre était enveloppé individuellement de tissu fixé par des fermetures éclair. Huit des ouvertures des fenêtres mesuraient environ 864 mm sur 914 mm (34 po sur 36 po) de l'intérieur. Il y avait également, immédiatement derrière la cabine des deux côtés du véhicule, des ouvertures mesurant 495 mm (19 ½ po) de largeur mais de forme irrégulière à la verticale suivant la pente négative de l'auvent en toile. Une fenêtre supplémentaire, située à l'extrémité tribord arrière, avait une largeur de 533 mm (21 po) et était également de forme irrégulière à la verticale pour suivre les dimensions du véhicule.
Les écrans transparents déroulables de protection contre les intempéries de chaque côté du véhicule étaient dotés de fermetures éclair et de boutons-pression servant à les fixer. Les fermetures éclair étaient de deux types : de grandes fermetures avec des glissières à deux côtés et de petites fermetures avec des glissières d'un seul côté. Parmi les grandes ouvertures sur les côtés du véhicule, quatre étaient dotées de petites fermetures de chaque côté de l'écran, tandis que deux avaient de grandes fermetures de chaque côté de l'écran et deux autres, une combinaison des deux. Lorsque les écrans étaient en place, toutes les glissières des petites fermetures éclair étaient à l'extérieur du véhicule (un des écrans déroulables de protection contre les intempéries, vers le mi-point du côté tribord, était déroulé et fermement fixé le jour de l'accident). Lorsque les écrans étaient déroulés, aucune des glissières n'était visible ou facilement accessible de l'intérieur du véhicule puisqu'elles se trouvaient 50 mm (2 po) sous le plat-bord; tel était aussi le cas des boutons-pression qui étaient fixés à l'extérieur du véhicule.
Les sorties latérales et arrière n'étaient pas identifiées comme des sorties de secours, et il n'y avait aucune exigence qu'elles le soient. Aucune indication n'avait été donnée aux passagers sur la façon de les utiliser. Il n'y avait de carte de consignes de sécurité à aucun des sièges passagers; rien n'exigeait d'ailleurs qu'il y en ait.
1.17.5.2 Portières de la cabine du véhicule
Les portières de la cabine des deux côtés du véhicule étaient bloquées de façon permanente; seules les vitres pouvaient être levées ou baissées, n'offrant qu'une solution limitée comme sortie de secours de la cabine en cas d'évacuation.
1.18 Organismes de sécurité au service des petits bâtiments à passagers
Des programmes ont été créés pour aider les propriétaires et exploitants de petits navires à passagers à respecter les régimes réglementaires et volontaires de sécurité de Transports Canada. Parmi eux figurent les dispositions sur l'octroi de permis aux entreprises par les autorités provinciales ou municipales, lesquelles exigent une preuve de conformité (p. ex., un certificat d'inspection) comme condition à la délivrance d'un permis. Le Québec dispose d'un programme général décrit à la section 1.18.1, tandis que Victoria (Colombie-Britannique) dispose d'un programme exigeant que les petits navires servant à l'observation des baleines respectent les normes édictées par une association d'industries de concert avec Transports Canada, qui sont décrites à la section 1.18.2. L'Association canadienne des propriétaires de navires à passagers (CPVA), décrite à la section 1.18.3, a mis au point un cours de formation en matière de sécurité à l'intention de ses membres; toutefois, ses membres ne sont pas représentatifs de l'ensemble des secteurs de l'industrie ni des régions du pays.
1.18.1 Commission des transports du Québec
Dans la province de Québec, la Commission des transports du Québec a été créée pour rehausser la sécurité publique dans les transports routiers, maritimes et ferroviaires. Sa mission comprend également la protection du patrimoine routier et la gestion de l'activité économique dans un grand nombre de secteurs des transports de façon à assurer la disponibilité et la qualité du service.
Toute personne qui offre des services commerciaux de transport de passagers sur l'eau doit détenir un permis de la Commission. Ce permis offre l'assurance que le détenteur possède les connaissances et les compétences requises pour fournir de tels services, qu'il dispose des assurances stipulées par le règlement et que l'embarcation utilisée respecte les exigences en matière de sécurité. Pour obtenir le permis, les transporteurs doivent fournir un équipage possédant les connaissances et l'expérience pertinentes pour leur permettre d'utiliser le permis à bon escient.
Les transporteurs doivent également fournir à la Commission un certificat d'assurance affirmant que chacune des embarcations visées par une demande de permis est protégée par une assurance maritime en responsabilité civile d'au moins cinq millions de dollars. Cette exigence s'applique à tout bâtiment ayant une jauge brute supérieure à 5 ou pouvant transporter plus de 12 passagers. Les transporteurs doivent également respecter les exigences de Transports Canada en produisant un certificat d'inspection délivré par Transports Canada.
Pour les embarcations de moindre capacité, il faut une lettre de conformité délivrée soit par un expert maritime agréé par Transports Canada ou par un inspecteur de Transports Canada, de même qu'une note confirmant la capacité de l'embarcation et la compétence de l'équipage pour se livrer à des activités commerciales sur un territoire donné. Pour les embarcations ayant une jauge brute de 5 ou moins ou pouvant transporter au plus 12 passagers, le certificat d'assurance maritime en responsabilité civile doit être d'au moins un million de dollars par embarcation.
Assurer la qualification du personnel et la qualité du bâtiment ainsi que détenir une assurance sont les premières conditions rattachées au permis de transport maritime de passagers dans toutes les catégories de bâtiments.
Depuis l'entrée en vigueur du Règlement sur le transport maritime de passagers, en 1988, 252 bâtiments ont été enregistrés auprès de la Commission, dont 86 ayant une jauge brute de 5 ou moins et 106 pouvant transporter au plus 12 passagers.
Du fait que le véhicule était immatriculé en Ontario, le Lady Duck n'était pas tenu de détenir un permis délivré par la Commission. Il n'existe aucun organisme analogue en Ontario.
1.18.2 Normes de sécurité des navires pour les exploitants de navires d'observation des baleines
Dans la province de la Colombie-Britannique, grâce à une collaboration avec Transports Canada et la Whale Watch Operators Association Northwest, des normes de sécurité ont été adoptées pour l'exploitation de navires d'une jauge brute de 5 ou moins, transportant au plus 12 passagers et servant à l'observation des baleines dans la région du Grand Victoria.
Les normes comportent les trois éléments suivants :
- Normes applicables aux entreprises se livrant à l'observation des baleines dans la région de Victoria et exploitant des navires d'une jauge brute inférieure à 5 et transportant au plus 12 passagers
- Ces normes ont été soumises à Transports Canada en vue d'en faire une norme de Transports Canada. Elles prévoient des exigences précises en matière de sécurité concernant la construction et la navigabilité des navires, l'équipement de sécurité, l'équipement de communication, l'équipement de navigation et la compétence de l'exploitant.
- Code de conduite
- Le code a été élaboré par la Whale Watch Operators Association Northwest à titre de ligne directrice concernant les procédures d'exploitation en vue d'assurer la sécurité et le confort des personnes à bord de navires pneumatiques à coque rigide servant à l'observation des baleines. Le code n'est pas destiné à faire partie des normes de Transports Canada. Il contient, entre autres, des lignes directrices quant à la sécurité des personnes à bord, la météo, les zones où règnent des conditions défavorables, les limites de vitesse et l'étiquette pour les exploitants.
- Programme de formation à l'intention des exploitants se livrant à l'observation des baleines (port de Victoria et ses approches) pour les navires de commerce d'une jauge brute ne dépassant pas 5 et transportant au plus 12 passagers
- Le programme de formation a été préparé par Transports Canada (Victoria) en consultation avec la Whale Watch Operators Association Northwest. Il n'est pas destiné à être intégré aux normes de Transports Canada. Il présente un aperçu de l'information jugée essentielle à l'exécution en toute sécurité des fonctions d'un exploitant. Le tout vise à servir de guide en vue de l'examen des exploitants.
Il n'existe pas dans la province de l'Ontario de normes semblables applicables au Lady Duck.
1.18.3 Association canadienne des propriétaires de navires à passagers
L'Association canadienne des propriétaires de navires à passagers (CPVA) compte plus de 120 propriétaires et exploitants de navires de commerce à passagers qui offrent des services de transport au public dans les eaux canadiennes.
La CPVA vise à constituer un forum pour l'échange d'idées et d'information parmi les membres et à entretenir un dialogue avec les organismes de réglementation au sujet des règles qui régissent l'industrie. Elle fait la promotion des idéaux de la sécurité maritime auprès de ses membres ainsi que la promotion de la qualité des services offerts au public voyageur.
La CPVA a mis au point un cours de formation sur la sécurité à l'intention du personnel non-breveté qui travaille à bord de navires à passagers saisonniers. L'objectif du cours est d'offrir un cours portant sur la sécurité propre au navire en question qui pourrait être donné par un officier breveté ou une autre personne approuvée lors d'une session d'une journée au début de la saison. Ce cours est un substitut du cours FUM A1 qui avait reçu une approbation provisoire le 28 mars 2002 et l'approbation définive de Transports Canada deux jours avant l'accident à l'étude. Il comprend des éléments théoriques et pratiques sur les urgences, les interventions d'urgence, les dispositifs de sauvetage, l'abandon, la survie, la lutte contre les incendies, les accidents à bord et les opérations de sauvetage. L'exploitant du Lady Duck n'était pas membre de cette association.
2.0 Analyse
L'analyse portera sur l'état de fonctionnement du véhicule, l'inspection du véhicule, la sécurité des passagers, la gestion de la sécurité, la culture de sécurité réglementaire, les communications d'urgence, la diffusion d'information sur la sécurité et la navigabilité du véhicule.
2.1 Caractéristiques et mode d'exploitation du véhicule
2.1.1 Système de pompes du véhicule
Lorsque le conducteur du Lady Duck a réalisé que l'avant du véhicule était plus bas que la normale, il a vérifié que les pompes d'assèchement de secours rejetaient de l'eau. Cependant, la capacité de refoulement de ces deux pompes n'a pas endigué l'entrée d'eau croissante par-dessus la visière avant. Le véhicule a ainsi continué de s'enfoncer par l'avant. Ces pompes étaient les seules en état de marche dont l'évacuation pouvait être observée à partir du siège du conducteur. Les deux pompes d'assèchement principales étaient inopérantes (voir l'annexe A - Examen et vérification des pompes d'assèchement).
Les petits navires de dimensions semblables à celles du Lady Duck doivent être dotés d'une pompe manuelle et d'une écope. La présence d'une pompe d'assèchement manuelle et de six pompes motorisées à bord du Lady Duck surpasse largement l'équipement normal prévu sur un navire de dimensions comparables et servant à des fins comparables. La disposition des pompes découle des préoccupations de Transports Canada en ce qui concerne la distribution requise des pompes pour les zones les plus basses des compartiments moteurs avant et arrière ainsi que de la faiblesse possible de l'étanchéité du véhicule. Les préoccupations suivantes ont été signalées dans des formulaires S.I. 7 délivrés par Transports Canada :
- assurer l'étanchéité du compartiment moteur avant;
- prévoir dans le compartiment avant une pompe d'assèchement supplémentaire fonctionnant en permanence en mode automatique;
- prévoir une pompe d'assèchement supplémentaire dans le compartiment moteur arrière;
- améliorer les joints d'étanchéité de la porte arrière;
- aviser Transports Canada de toute infiltration d'eau anormale qui serait constatée.
La visière avant était fixée en place, mais les pompes d'assèchement n'étaient pas installées conformément aux indications du fabricant. En particulier, les raccords électriques des pompes n'étaient pas étanches ni fixés correctement, et les fusibles des pompes principales étaient d'un calibre excessif. Des débris dans le rotor des pompes ont entraîné leur blocage et, comme les fusibles étaient d'un calibre excessif, leurs moteurs sont devenus inopérants. Sur les six pompes d'assèchement électriques, les deux qui étaient effectivement en état de marche n'ont pas endigué l'entrée d'eau.
La personne aux commandes de tout navire doit constamment être consciente des conditions d'exploitation du navire. L'eau retenue à l'intérieur d'un navire peut causer de graves problèmes de fonctionnement compromettant la sécurité. Les petits navires y sont particulièrement sensibles en raison des marges de sécurité limitées.
Dans le cas à l'étude, lorsque le véhicule est entré à l'eau, le conducteur a allumé les deux pompes d'assèchement principales, prévoyant qu'elles évacueraient de chaque côté du véhicule. Après avoir constaté qu'il n'y avait pas d'évacuation d'eau près du milieu du navire, il a actionné les deux pompes de secours et il a vu de l'eau sortir des deux côtés du véhicule. Cette séquence d'événements est logique compte tenu de sa connaissance de l'emplacement précédent de la tuyauterie de refoulement des quatre pompes, et elle indique qu'il ignorait le fait que la tuyauterie de refoulement de la pompe d'assèchement principale du côté tribord avait été déplacée vers l'arrière, hors de sa vue. Après l'entrée à l'eau du véhicule, la pompe d'assèchement principale du côté tribord est tombée en panne. Comme le véhicule est demeuré à flot environ 30 minutes après avoir quitté la rampe de la marina de Hull, on estime que 345 litres d'eau auraient pénétré dans la coque en raison de l'effet de siphonnement par la tuyauterie de refoulement de la pompe d'assèchement principale du côté tribord, qui était inactive.
Sur les navires de peu de franc-bord, le conducteur doit être conscient de la présence d'eau dans les fonds de cale et il doit être sûr que le système de pompes d'assèchement suffit à endiguer toute entrée d'eau. Le fait de compter sur les systèmes de pompes d'assèchement peut faire en sorte que le conducteur ne reconnaisse ou n'apprécie pas rapidement la présence ou la gravité d'une condition dangereuse qui évolue. Par conséquent, le conducteur est privé de renseignements précieux qui lui permettraient de prendre rapidement les décisions utiles pour réussir à reconnaître et redresser une situation qui évolue. Comme il n'y avait pas d'alarme de niveau d'eau élevé dans la cale et que la condition des fonds de cale ne pouvait pas être observée par le conducteur, la perception du danger a été retardée par manque d'information sur la quantité d'eau dans les fonds.
2.1.2 Consignes de sécurité à l'intention des passagers
La guide touristique n'avait suivi aucune formation officielle ni reçu d'instructions écrites concernant les consignes de sécurité à donner aux passagers avant le départ. Par conséquent, seules des indications verbales incomplètes étaient données, et les passagers n'étaient pas renseignés sur l'emplacement et l'utilisation de tout l'équipement de sécurité.
De plus, les passagers n'ont pas bénéficié d'une démonstration de la façon d'enfiler correctement un gilet de sauvetage. La taille d'un gilet de sauvetage ou d'un VFI doit convenir à la taille corporelle pour être efficace. Si la taille du gilet est trop grande ou trop petite ou si le gilet n'est pas enfilé correctement, il y a risque de subir des blessures, voire de se noyer. Dans le cas à l'étude, les VFI portés par deux des victimes étaient trop grands pour leur taille corporelle.
Bien que les passagers aient été informés que la sortie arrière et les fenêtres latérales étaient des sorties de secours, aucune indication n'a été donnée sur ce qu'il fallait faire en cas d'évacuation. Par exemple, on n'a pas montré aux passagers comment ouvrir les fenêtres si elles étaient fixées au moyen des fermetures éclair. Les passagers n'ont pas été invités à repérer la sortie la plus proche et n'ont pas été avisés que ce ne serait pas nécessairement l'endroit par où ils étaient montés à bord.
Il est reconnu dans l'industrie du transport de passagers que le fait d'offrir des renseignements de sécurité en temps utile aide les passagers à se préparer à une situation d'urgence. Cette information favorise l'aptitude d'un passager à assumer une certaine responsabilité pour sa propre sécurité, ce qui atténue une part du risque auquel il peut être exposé. Le Bureau a présenté des recommandations à la suite des enquêtes menées dans les cas du Tan 1 (rapport M93L0004 du BST) et du True North II (rapport M00C0033 du BST), en reconnaissance des grands avantages que présentent les exposés sur la sécurité. Le 1er mai 2002, une modification au Règlement sur les petits bâtiments imposant ces exposés est entrée en vigueur. Cependant, l'accident du Lady Duck démontre que, soit cette exigence n'est peut-être pas connue de tous les exploitants de petits navires à passagers, soit son importance pour la sécurité n'est peut-être pas entièrement perçue.
2.1.3 Formation en matière d'évacuation d'urgence
Avant la submersion rapide du véhicule, un grand nombre des occupants avaient enfilé un VFI et s'étaient dirigés vers la sortie arrière pour évacuer le véhicule. Le conducteur a ordonné aux passagers d'évacuer le véhicule et la guide touristique a tenté de jeter des VFI ou des gilets de sauvetage aux passagers, mais l'équipage n'a donné aucune directive et n'a pas facilité l'évacuation par d'autres sorties.
L'entreprise n'avait pas de politiques officielles ni de procédures ou de plan de formation en ce qui concerne l'évacuation d'un véhicule. Bien que le conducteur ait reçu des instructions à ce sujet durant le cours FUM A1 et A2, il n'y avait ni formation ni exercices sur les véhicules de l'entreprise, y compris le Lady Duck, pour mettre cette formation en perspective. De plus, aucun des guides touristiques n'avait reçu de la formation pratique au sujet de l'équipement de sécurité, y compris les extincteurs, l'équipement de sauvetage et, dans le cas des plus grands véhicules de l'entreprise, les embarcations de sauvetage.
Les sorties par les fenêtres latérales étaient plus grandes que la sortie arrière et pouvaient servir à l'évacuation, mais 11 des occupants se sont d'abord tournés vers la sortie arrière. Quelques-uns d'entre eux l'ont peut-être fait parce que le conducteur leur avait demandé de se déplacer vers l'arrière du véhicule. Les autres réagissaient peut-être de la façon que l'on a déjà constatée dans d'autres évacuations : les gens ont tendance à sortir par où ils sont entrés. Seuls deux occupants, ayant compris qu'il y avait un engorgement à la sortie arrière, ont choisi de sortir par une fenêtre latérale.
Des études sur l'évacuation des avions ont démontré que les passagers ont tendance à rechercher et à attendre des directives de la part de l'équipage professionneNote de bas de page 18. Dans le cas à l'étude, l'entreprise n'avait ni politiques ni procédures pour la formation des guides touristiques en ce qui concerne la sécurité. Sans formation en évacuation d'urgence, les membres d'équipage des petits navires à passagers ne sont ni conscientisés ni préparés à la dynamique d'une urgence; ils doivent alors improviser dans une situation où chaque seconde compte.
Le fait de former les conducteurs et les guides touristiques sur la façon de faciliter une évacuation du Lady Duck et, durant l'exposé sur la sécurité, d'insister sur le fait que les fenêtres latérales constituaient la voie d'évacuation privilégiée aurait permis de donner aux passagers les indications voulues pour éviter les engorgements et aurait vraisemblablement facilité une évacuation ordonnée.
2.1.4 Équipement de sauvetage
La réglementation exige un équipement en gilets de sauvetage approuvés. Le gilet de sauvetage, qui a été mis au point à l'intention des marins, vise à assurer la flottabilité et, dans le cas d'une personne blessée, à maintenir hors de l'eau la tête de la personne qui le porte même si elle est inconsciente. Quant au VFI, il a été conçu pour les utilisateurs d'embarcations de plaisance. La logique sous-tendant le VFI est que, s'il n'offre pas la même sécurité qu'un gilet de sauvetage, puisqu'il ne gardera pas hors de l'eau le visage de la personne qui le porte, il peut néanmoins maintenir une personne à flot et il est plus susceptible d'être porté qu'un gilet de sauvetage plus efficace, mais encombrant.
L'équipement en VFI à bord du Lady Duck n'a pas été découragé lors d'une inspection effectuée par Transports Canada en mai 2002. Les VFI demeuraient la première défense pour assurer la survie à l'eau. Durant l'évacuation, les passagers qui avaient enfilé un VFI avant l'évacuation sont demeurés à flot jusqu'à ce qu'ils soient recueillis par des navigateurs se trouvant à proximité. Les VFI ne sont pas l'équipement de sauvetage approuvé pour le véhicule, mais il se peut que, pour un véhicule comme le Lady Duck, qui peut couler rapidement en raison de la configuration de sa coque et du manque de flottabilité inhérente, leur utilisation soit plus appropriée que celle d'un gilet de sauvetage. Toutefois, même s'ils sont plus faciles à enfiler et plus confortables à porter, ils n'offrent pas tous les avantages d'un gilet de sauvetage approuvé.
Une lacune en matière de sécurité concernant l'accessibilité des gilets de sauvetage avait été signalée dans des accidents précédents dont celui du True North II (rapport M00C0033 du BST) et celui d'un petit bateau affrété non ponté (rapport M92W1031 du BST). Le Bureau, s'inquiétant quant à l'accessibilité des gilets de sauvetage en cas d'urgence, avait recommandé que Transports Canada exige l'entreposage de gilets de sauvetage de sorte qu'ils soient aisément accessibles.Note de bas de page 19
Dans le cas à l'étude, si les passagers avaient tenté de récupérer les gilets de sauvetage de leurs casiers sous les sièges passagers, il y aurait eu une congestion dans l'étroite allée centrale. Durant l'examen du véhicule après l'accident, les enquêteurs ont eu de la difficulté à retirer les gilets de sauvetage sans déchirer leur enveloppe extérieure contre les bords des casiers métalliques; les passagers auraient à plus forte raison risqué de compromettre l'intégrité des gilets de sauvetage. De plus, d'autres objets qui se trouvaient par-dessus les gilets de sauvetage auraient compliqué leur extraction rapide. Il s'agit d'un problème persistant sur les petits navires à passagers.
Les gilets de sauvetage normalisés approuvés devaient respecter la norme CAN/CGSB 65-GP-14M de septembre 1978 spécifiée dans le Règlement sur l'équipement de sauvetage. L'examen des gilets de sauvetage après l'accident a révélé que certains des gilets de sauvetage pour enfants respectaient ces exigences et qu'aucun des gilets de sauvetage pour adultes qui ont été récupérés ne les respectaient.
Les gilets de sauvetage à bord du Lady Duck dataient de 30 ans, mais il demeurerait acceptable de les conserver à bord tant que chacun respecte les exigences réglementaires. Un processus d'inspection courant permettrait de garantir que l'équipement inadéquat serait remplacé. Cependant, pour qu'un tel processus soit efficace, il devrait être régulier. Des inspections aléatoires ne permettraient pas d'éliminer rapidement de l'équipement inadéquat.
Deux bouées de sauvetage décoratives non normalisées étaient fixées de façon permanente à l'extérieur du véhicule. Ces articles ne faisaient pas partie de l'équipement de sauvetage, quoiqu'ils étaient d'une taille semblable et ressemblaient à la bouée de sauvetage approuvée de 610 mm. Sur le plan de la sécurité, l'utilisation de bouées de sauvetage ou d'autre équipement de sécurité comme décorations peut porter à confusion.
2.1.5 Signalisation d'urgence
On pourrait renforcer les connaissances des passagers sur les renseignements importants sur la sécurité qui leur sont donnés dans le cadre des exposés sur la sécurité en ayant une signalisation d'urgence et en affichant des consignes de sécurité. Il n'y avait ni l'un ni l'autre à bord du Lady Duck. L'affichage des consignes de sécurité et la mention de leur existence durant les exposés sur la sécurité prépareraient mieux les passagers aux situations d'urgence. Une signalisation sur les fenêtres latérales aurait pu rappeler que ces fenêtres peuvent servir de sortie de secours.
2.1.6 Caractère adéquat de la sortie arrière comme sortie principale en cas d'évacuation
Avant la partie marine de l'excursion, les passagers ont été informés que les ouvertures des fenêtres de chaque côté et à l'arrière du véhicule pouvaient servir de sorties de secours. Selon les normes conventionnelles en matière d'ergonomie, il faudrait que toute ouverture présentée comme une sortie de secours soit suffisamment grande pour permettre le passage d'une personne de dimensions corporelles du 95e percentile portant un gilet de sauvetage approuvé. Les dimensions et l'emplacement des fenêtres latérales permettaient aisément l'évacuation d'une personne portant un gilet de sauvetage, mais la largeur de la sortie arrière ne respectait pas les normes conventionnelles. L'utilisation de la sortie arrière était d'autant plus compliquée que, par souci de protéger l'étanchéité du navire, la rampe d'embarquement ne pouvait pas être abaissée une fois que le véhicule était à l'eau; or, en position relevée, elle réduisait l'ouverture utile. Lors de l'évacuation du Lady Duck, la sortie arrière n'était pas aisément accessible et ses dimensions rendaient la sortie difficile. Compte tenu des limitations de cette sortie, les fenêtres latérales devraient constituer les sorties principales en cas d'évacuation.
2.1.7 Écrans transparents déroulables sur les côtés
Lors de l'excursion qui a mené à l'accident, deux écrans transparents déroulables de protection du véhicule étaient déroulés et fixés par des fermetures éclair. Bien que personne n'ait tenté d'évacuer le véhicule par ces sorties, la possibilité d'utiliser toute fenêtre fixée par une fermeture éclair comme sortie est douteuse car les glissières des fermetures éclair sont alors inaccessibles. Néanmoins, il aurait été difficile d'ouvrir ces fenêtres si elles avaient été fermées par les fermetures éclair en raison de leur dispositif de fermeture.
2.1.8 Conception de l'auvent en toile
Les risques associés aux auvents continus sur les navires dépourvus de réserve inhérente de flottabilité, comme le Lady Duck, ont été étudiés par le National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis (voir l'annexe D). Lors de l'enquête menée sur le naufrage du véhicule amphibie à passagers Miss Majestic, le NTSB a conclu que l'auvent du Miss Majestic avait grandement réduit les chances de survie des passagers.
Le NTSB a recommandé qu'à moins que ces véhicules ne soient dotés d'une réserve de flottabilité suffisante pour demeurer à l'endroit et à flot lorsqu'ils sont complètement inondés, [Traduction] les auvents soient enlevés ou remplacés par des auvents approuvés par la Garde côtière américaine lorsqu'ils se déplacent sur l'eau. Un auvent approuvé ne doit pas, en cas de naufrage, gêner l'évacuation des passagers, ni à l'horizontale, ni à la verticale (M-02-2). Le NTSB a également recommandé que [Traduction], sur les véhicules amphibie à passagers dont les auvents ont été enlevés et qui ne disposent pas d'une réserve de flottabilité suffisante, tous les passagers doivent enfiler un gilet de sauvetage avant le début de la navigation sur l'eau (M-02-3).
Le Lady Duck a coulé si rapidement que certains des passagers ont été incapables de quitter le véhicule avant qu'il ne soit sous l'eau et ils se sont noyés. Pendant que le véhicule coulait, la flottabilité naturelle des victimes, dont certaines portaient un VFI, les a pressées contre l'auvent, ce qui les a empêchées d'évacuer le véhicule. Si l'auvent avait été conçu pour être facilement enlevé avant d'entrer à l'eau et si les passagers avaient été tenus de porter un gilet de sauvetage, les difficultés d'évacuation auraient été atténuées.
2.1.9 Octroi de permis et certification
Les véhicules amphibie ne sont pas tenus d'obtenir un permis en vertu du Règlement sur les petits bâtiments. Par conséquent, un véhicule amphibie d'une jauge brute inférieure à 15 n'est pas consigné dans la base de données des embarcations de plaisance du ministère des Pêches et des Océans ni dans la base de données des petits bâtiments commerciaux de Transports Canada.
Les exploitants de camions et d'autobus en Ontario sont tenus de s'enregistrer auprès du ministère des Transports de l'Ontario comme utilisateurs de véhicules à des fins commerciales. Quiconque exploite un véhicule commercial à moteur sans être enregistré commet une infraction. Dès l'enregistrement, un dossier est ouvert pour consigner les données sur l'octroi de permis et le respect de la loi (accidents, condamnations, inspections).
Les véhicules amphibie sont exploités sur terre et sur l'eau, et sont assujettis à deux régimes réglementaires (provincial et fédéral). En raison d'un manque d'expérience maritime, les propriétaires de véhicules amphibie peuvent mener leurs activités sans être conscients des exigences du secteur maritime. Il n'y a actuellement aucun régime en place pour garantir que Transports Canada soit mis au courant de l'entrée en service d'un véhicule amphibie. Si on exigeait du requérant d'un certificat d'immatriculation provincial qu'il communique avec Transports Canada en ce qui a trait aux exigences du secteur maritime, on atténuerait les risques.
2.1.10 Caractéristiques et état de fonctionnement du véhicule
Après l'accident, le véhicule a fait l'objet d'inspections et de tests visant la structure, la mécanique, les pompes et d'autre équipement de sécurité. Une série d'essais de vitesse, de franc-bord, d'assiette, de production de vagues et d'envahissement par l'eau a également été effectuée pour déterminer les caractéristiques opérationnelles et l'état matériel du Lady Duck. L'examen et l'analyse des résultats de ces inspections et de ces essais ont démontré que la sécurité et le bon fonctionnement du véhicule étaient compromis en raison des éléments suivants :
- L'état du véhicule était tel que l'étanchéité ne pouvait pas être assurée. L'étanchéité était compromise par des fractures, par l'absence de garnitures et de joints d'étanchéité efficaces et par l'effet de siphonnement par la tuyauterie d'assèchement.
- En eau calme, le Lady Duck était susceptible d'embarquer de l'eau par l'avant, en raison du peu de franc-bord avant initial à l'arrêt et de la réduction proportionnelle du franc-bord avant réel lorsque le déplacement du véhicule créait une vague de proue.
- En eau perturbée par le sillage d'autres embarcations, le Lady Duck était fortement susceptible d'embarquer de l'eau quand il rencontrait des vagues moyennes.
- Le franc-bord avant réel à l'arrêt, lorsque le véhicule était chargé, lorsqu'il était réduit par l'accumulation progressive d'eau dans la coque, était insuffisant pour empêcher le débordement des vagues de proue associées au déplacement du véhicule à la vitesse normale.
- En raison de la construction non étanche du capot et de l'installation, après l'inspection de Transports Canada, de manches à air d'un diamètre de 75 mm (3 po) à l'extrémité avant, l'eau pouvait entrer lorsque le franc-bord avant était réduit et que le véhicule rencontrait des vagues.
- En raison de la conception et de la construction du véhicule, toute l'eau des fonds de cale et l'eau embarquée s'accumulait d'abord dans la moitié avant de la coque, entraînant un moment de changement d'assiette et une réduction du franc-bord avant réel. Le franc-bord avant étant ainsi réduit, le véhicule était plus susceptible d'embarquer de l'eau à faible vitesse que lorsque ses fonds de cale étaient complètement asséchés.
- Les essais de mise à l'eau à la marina de Hull ont révélé que, lorsque la visière était submergée avant que l'avant du véhicule ne flotte complètement, le véhicule embarquait de l'eau qui s'accumulait dans un puisard expressément desservi par la pompe d'assèchement avant. La défectuosité de cette pompe ne pouvait qu'entraîner l'accumulation d'eau embarquée, ce qui réduirait le franc-bord avant réel au début de chaque excursion sur l'eau.
En cas de mauvais fonctionnement ou de panne d'une pompe, toute accumulation, dont celle de l'eau infiltrée en raison de fuites dans la coque, ne pouvait être décelée par le conducteur. Le poids combiné de l'eau embarquée et de l'eau s'infiltrant par les fuites au palier d'arbre de transmission et par l'effet de siphonnement de la tuyauterie d'assèchement avait pour effet de réduire le franc-bord avant. En conséquence, le véhicule était plus susceptible d'embarquer de l'eau par-dessus la visière à mesure que la vitesse augmentait et qu'il traversait sa propre vague de proue et le sillage d'autres embarcations.
En somme, le fait de limiter la vitesse du véhicule, de maintenir un franc-bord suffisant, de préserver l'étanchéité du véhicule, et de disposer de pompes d'assèchement en parfait état de marche et dotées d'alarmes aurait dans une grande mesure atténué les risques que présente la conception non conventionnelle de ce véhicule.
2.2 Gestion de la sécurité
La gestion efficace de la sécurité exige que toutes les organisations, petites ou grandes, soient conscientes des risques associés à leurs activités, qu'elles aient la compétence requise pour les gérer et qu'elles prennent les mesures qui s'imposent pour assurer la sécurité. Cependant, il n'y a pas d'exigence réglementaire voulant que les exploitants de petits navires à passagers aient un système de gestion de la sécurité en place.
Le bilan qui ressort de cette enquête est celui d'une entreprise faisant le minimum pour assurer la conformité aux règlements plutôt que de chercher à réduire les risques par tous les moyens possibles.
2.2.1 Connaissance des risques que présentait l'exploitation du Lady Duck
Le Lady Duck a été conçu et construit par son exploitant pour effectuer des excursions amphibie. Les caractéristiques du véhicule révèlent un manque de sensibilisation aux normes de construction et d'entretien applicables au secteur maritime : le véhicule avait peu de franc-bord, il était dépourvu de raccords étanches aux endroits où des éléments traversaient la coque et son système de pompes d'assèchement des fonds était défectueux. Le tout créait le risque d'une entrée d'eau régulière. Ce risque était dans une certaine mesure atténué par l'aménagement de systèmes de vidange et l'installation de pompes d'assèchement supplémentaires.
2.2.2 Capacité de gérer les risques
En général, les organisations ont deux façons de gérer les risques efficacement. Pour les tâches nouvelles ou inhabituelles, elles peuvent miser sur l'expertise et la formation pour les faire exécuter en toute sécurité. Pour les opérations routinières, des procédures peuvent être établies pour déterminer comment les tâches seront exécutées.
Le présent accident a révélé de nombreux aspects des activités de l'entreprise où les procédures demeuraient officieuses et n'étaient pas consignées par écrit, notamment :
- les connaissances minimales requises de la part des conducteurs et des guides touristiques n'étaient pas définies et aucun document ne précisait le processus de formation;
- les défectuosités du véhicule étaient déclarées par le conducteur dans un journal en vue d'interventions d'entretien, mais les conducteurs ne passaient pas ce journal en revue de façon systématique;
- aucune indication n'était donnée aux conducteurs pour ce qui est des conditions minimales de fonctionnement de l'équipement du véhicule; on considérait qu'il relevait du jugement du conducteur de déterminer si le véhicule était apte au service;
- malgré le risque que le franc-bord insuffisant du véhicule soit outrepassé par la vague de proue à certaines vitesses, aucun dispositif matériel ou administratif n'était en place pour éviter que le véhicule ne soit exploité à ces vitesses;
- aucune procédure ou plan d'urgence n'indiquait au conducteur ou au guide touristique comment assurer les communications d'urgence ou réagir à des situations d'urgence ni comment évacuer rapidement le véhicule dans des conditions extrêmes.
En raison de cette absence de procédures officielles, il revenait aux conducteurs de prendre les décisions concernant l'exploitation du véhicule en toute sécurité.
Le présent accident révèle également que la formation fournie par l'entreprise aux conducteurs pour leur permettre de prendre de telles décisions efficacement était minimale et officieuse. Le conducteur en cause dans l'accident aurait reçu de l'entreprise 12 heures de formation à la conduite du véhicule amphibie. Pour pouvoir comprendre les systèmes du véhicule (y compris les pompes d'assèchement), le conducteur a bénéficié d'explications informelles fournies par le mécanicien de l'entreprise. Aucun dossier n'était disponible pour vérifier la quantité de formation fournie ou le niveau de compétence atteint pour ce qui est de comprendre le véhicule et ses systèmes. Face à une situation où aucune des deux pompes d'assèchement ne semblait évacuer de l'eau, le conducteur n'avait ni la formation requise pour évaluer correctement le danger associé à cette défectuosité, ni une procédure officielle lui indiquant des mesures précises à prendre. Le tout a créé une situation où, dans le cadre de communications orales, le conducteur s'en est remis au jugement du mécanicien, alors que celui-ci estimait qu'il appartenait au conducteur de décider si le véhicule pouvait continuer d'être utilisé.
Ainsi, l'entreprise exploitant le Lady Duck n'a démontré ni une connaissance suffisante des risques associés à l'exploitation du véhicule dans un milieu marin, ni la compétence requise pour gérer ces risques efficacement.
2.2.3 Engagement envers la sécurité
L'entreprise n'a pas démontré un engagement envers la sécurité en ce sens où elle n'a pas sollicité l'avis de Transports Canada sur l'état du navire et elle était réticente à observer les recommandations qui n'étaient pas expressément requises en vertu de la réglementation, comme en témoignent les faits suivants :
- selon toute évidence, ni le propriétaire ni le constructeur n'a avisé Transports Canada du début de la construction du véhicule et il n'y a pas de documents relativement à une demande officielle d'inspection pendant sa construction;
- après l'accident survenu le 30 juin 2001, le propriétaire a questionné Transports Canada au sujet de la nécessité d'appliquer les mesures correctives prévues par l'inspecteur dans le formulaire S.I. 7, et même si le propriétaire a fait suite aux éléments exigés par la réglementation, pas tous les points identifiés comme des recommandations n'ont été réglés;
- Transports Canada n'a pas été informé de modifications qui ont été apportées au véhicule (ajout de manches à air sur le capot et modification du système de pompes d'assèchement des fonds) et qui risquaient de compromettre son étanchéité;
- bien que certains des véhicules amphibie de l'entreprise aient été équipés d'alarmes de niveau d'eau élevé dans la cale, il n'y en avait pas sur le Lady Duck car la réglementation ne l'exigeait pas du fait qu'il s'agissait d'un plus petit navire.
Les statistiques du BST démontrent qu'il y a un nombre disproportionné de pertes de vie dans des accidents touchant de plus petits naviresNote de bas de page 20. Des risques particuliers sont associés à l'exploitation de petits navires à passagers, en raison des conditions d'exploitation ou des caractéristiques des navires. Un système efficace de gestion de la sécurité est essentiel dans toute organisation pour garantir que les personnes de tous les échelons disposent des connaissances et des outils qu'il faut pour gérer efficacement le risque. Actuellement, il n'y a à l'endroit d'exploitants de petits navires à passagers aucune exigence en ce qui concerne la surveillance ou les conseils visant la sécurité de la part d'un organisme de réglementation.
2.3 Réglementation des petits navires à passagers et sécurité
Le public compte sur le fait qu'une entreprise commerciale soit suffisamment réglementée pour assurer un niveau de sécurité satisfaisant. Les voyageurs ne font probablement pas de différence entre grands ou petits navires à passagers en ce qui concerne le niveau de risque. La plupart supposent que des mesures ont été prises pour garantir que tout navire, peu importe ses dimensions ou la région où il est exploité, est entretenu convenablement, que l'équipage est compétent, que le navire sera exploité en toute sécurité et que des mesures d'urgence sont prévues en cas de besoin. Dans cette optique, le mandat de Transports Canada en matière de sécurité maritime englobe des responsabilités envers la promotion de la sécurité des navires et de la protection de l'environnement.
Il y a toutefois d'importants défis à relever dans la réalisation de ce mandat à l'égard de la réglementation des petits navires à passagers, en raison des facteurs suivants :
- les ressources limitées;
- le grand nombre de petits navires à passagers en exploitation;
- l'impossibilité de réglementer chaque éventualité et chaque innovation en matière de construction et d'exploitation de petits navires commerciaux;
- la diversité et la dispersion géographique des exploitants;
- les connaissances et l'expérience nautiques limitées de certains exploitants et propriétaires;
- la réticence de certains propriétaires à appliquer des recommandations qui dépassent les exigences réglementaires.
2.3.1 Complexité et caractère adéquat des exigences en matière de sécurité
Compte tenu des importants défis à relever pour la promotion de la sécurité des petits navires à passagers, le cadre réglementaire doit être clair, facile à appliquer et à même d'assurer un niveau de sécurité adéquat, quelles que soient les dimensions et la configuration d'un navire.
Les exigences maritimes actuelles contenues dans la Loi sur la marine marchande du Canada, sa réglementation, ses normes et ses lignes directrices sont complexes et, dès lors, il est difficile pour les propriétaires, les exploitants et les inspecteurs de Transports Canada de déterminer quelles exigences s'appliquent à une classe donnée de navires. Ce fait a été reconnu par Transports Canada et est pris en compte dans la formation donnée aux inspecteurs à l'égard des inspections de petits navires commerciaux.
Cette complexité a été démontrée dans le présent accident à l'égard de l'exigence d'une première inspection du Lady Duck. Au moment du premier événement, Transports Canada a déterminé que ce véhicule, d'une jauge brute inférieure à 5, n'était pas tenu de subir une première inspection. Néanmoins, après avoir examiné le cadre réglementaire, le véhicule a plus tard subi une première inspection. La complexité de la réglementation est évidente dans ce qui suit :
- En vertu du paragraphe 316(3) de la Loi sur la marine marchande du Canada, tout navire canadien doit faire inspecter sa coque, ses machines et son équipement avant son entrée en service. En vertu de l'article 406, des navires tels que le Lady Duck sont exemptés d'inspection annuelle. Selon la loi, les inspections doivent être effectuées conformément à la réglementation.
- Le Règlement sur l'inspection des coques n'est pas applicable aux navires d'une jauge brute inférieure à 5. Ce fait a entraîné l'interprétation selon laquelle le Lady Duck n'avait pas besoin d'une première inspection.
- Après l'accident de 2001, le véhicule a fait l'objet d'une première inspection sous l'égide du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments. Bien qu'il s'agisse d'un programme provisoire qui n'a pas de force réglementaire, il prévoit une première inspection obligatoire, comme l'exige la Loi sur la marine marchande du Canada.
En effectuant une première inspection, l'inspecteur doit déterminer quels règlements sont d'application, la Loi sur la marine marchande du Canada exigeant que les inspections soient effectuées conformément à la réglementation. Le tableau A du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtimentsNote de bas de page 21 est utile à cet égard, proposant une matrice des exigences en matière de sécurité pour les petits navires à passagers. Pour les navires comme le Lady Duck, la matrice indique que les exigences sont la Loi sur la marine marchande du Canada, les lignes directrices de l'annexe B jusqu'à ce que le document TP 1332 soit révisé et le Règlement sur les petits bâtiments. Par conséquent, un inspecteur examinant les exigences constatera que la Loi sur la marine marchande du Canada prévoit une première inspection et que l'annexe B contient des lignes directrices provisoires (qui ne sont pas exécutoires), si bien que le Règlement sur les petits bâtiments demeurera la seule exigence exécutoire durant une inspection.
Le cadre réglementaire qui était applicable au Lady Duck ne traitait pas correctement du risque associé à l'exploitation du véhicule. Le Lady Duck avait subi une première inspection, mais comme sa jauge brute était inférieure à 5 et qu'il ne transportait pas plus de 12 passagers, il n'était pas assujetti aux exigences concernant la construction, la réglementation n'exigeait pas que la conduite du véhicule soit assurée par un conducteur qualifié, et l'entreprise n'était pas tenue d'avoir une structure de gestion de la sécurité en place. Par contre, lorsque plus de 12 passagers sont transportés, les navires sont assujettis à des exigences supplémentaires concernant la coque, les machines, les installations électriques, l'équipement de lutte contre les incendies, l'équipement de sauvetage et la stabilité, ce qui assure aux passagers un plus haut niveau de sécurité.
Par conséquent, l'efficacité du cadre réglementaire est compromise du fait que la complexité de la réglementation, des normes et des programmes qui s'appliquent aux petits navires à passagers peut ne pas être facilement comprise par les propriétaires, les exploitants et les inspecteurs qui doivent les appliquer. En outre, le cadre réglementaire actuel ne traite pas de tous les aspects des activités des petits navires à passagers. Par conséquent, des navires qui peuvent ne pas être conformes aux exigences pour leur utilisation prévue peuvent être en exploitation, ce qui fait courir des risques aux passagers.
2.3.2 Promotion de la sécurité par opposition au contrôle de la conformité
Après le naufrage du petit navire à passagers True North II (rapport M00C0033 du BST), le Bureau a indiqué que, pour réaliser les objectifs de sécurité du régime d'inspection des navires de Transports Canada, les lacunes systémiques devaient être examinées dans un contexte plus vaste. Le Bureau, s'inquiétant du fait qu'une démarche strictement réglementaire puisse entraîner une vision trop étroite où les inspecteurs de la sécurité ne se pencheraient pas sur les lacunes non visées par la réglementation, a recommandé que :
le ministère des Transports, Sécurité maritime, mette en place au sein de son organisation une approche à la sécurité qui permettra à la direction et aux inspecteurs de relever les pratiques et conditions dangereuses et d'y remédier, et faire en sorte que les inspections ne se limitent pas à un contrôle de la conformité aux règles.
Recommandation M01-02 du BST(publiée le 11 mai 2001
Cette recommandation encourage une culture où les inspecteurs sont habilités à examiner des aspects non visés par la réglementation et à se pencher sur toute lacune en matière de sécurité. En réponse à cette recommandation, Transports Canada a déclaré :
qu'il s'emploie à inculquer dans son organisation une culture qui incite les inspecteurs à examiner les activités et le rendement de l'équipement en plus des règlements normatifs.
Cela témoigne d'une volonté de la part de Transports Canada de s'orienter davantage en vue de promouvoir la sécurité, en plus d'assurer la conformité. Cependant, d'après l'enquête visant le Lady Duck, il est évident que la prestation de services et les pratiques organisationnelles ne sont pas encore entièrement alignées sur cette volonté.
La différence entre l'objectif décrit par Transports Canada et les pratiques observées dans cet accident est révélatrice des difficultés à surmonter pour apporter des changements dans une organisation dont les activités quotidiennes sont fondées sur le contrôle de la conformité au moyen de dispositions réglementaires exécutoires. Lors de la première inspection (en 2001), les inspecteurs ont appliqué les exigences de sécurité du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments, qui visaient à compléter le cadre réglementaire pour les petits navires à passagers. Les gestionnaires régionaux, face à une demande de clarification du propriétaire et sachant que les exigences en matière de sécurité du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments n'avaient pas un caractère exécutoire, ont transformé certaines de ces exigences en recommandations et les ont communiquées au propriétaire à titre de simples recommandations de l'inspecteur. Dans ce cas, l'approche strictement réglementaire a fait en sorte que les gestionnaires n'ont pas pu appuyer des exigences en matière de sécurité qui n'avaient pas un caractère exécutoire. Par conséquent, à l'inspection aléatoire ultérieure, au printemps 2002, l'inspecteur a choisi de s'en remettre à la réglementation applicable, à l'exclusion du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments ou d'autres critères d'évaluation.
Transports Canada poursuit ses efforts en vue d'inculquer une façon d'aborder la sécurité où les inspecteurs sur le terrain peuvent appliquer leur compétence maritime pour déterminer le caractère adéquat d'un navire et de son équipage ainsi que l'aptitude du propriétaire à exploiter le navire en toute sécurité. Ces inspecteurs ont besoin des outils qui leur permettraient de prendre des mesures appropriées lorsqu'il s'avère qu'il existe une situation dangereuse. En outre, les propriétaires et les exploitants de navires doivent prendre en considération et appliquer les recommandations des inspecteurs portant sur l'exploitation de leur navire en toute sécurité, ou proposer des solutions de rechange acceptables. La volonté de promouvoir la sécurité en plus d'assurer la conformité exigera un effort à long terme à tous les niveaux des milieux maritimes.
La persistance d'une démarche strictement réglementaire mine les efforts que déploie Transports Canada pour créer au sein du milieu maritime une culture où les inspecteurs, les propriétaires et les exploitants vont au-delà des règlements en vue de gérer les risques. Cette situation fait que des lacunes en matière de sécurité peuvent passer inaperçues, ce qui fait courir des risques aux passagers.
2.3.3 Navigabilité
La condition correspondant à la sécurité et à la validité d'ensemble de tout navire ou petite embarcation est souvent appelée « état de navigabilité ». Même si le terme est couramment utilisé, la détermination de cet état dépend des circonstances précises prises en considération. La présente Loi sur la marine marchande du Canada (1985) et la plus récente version révisée, la Loi sur la marine marchande du Canada (2001), mentionnent le terme mais ne le définissent pas expressément. Toutefois, toutes les définitions acceptées font référence au caractère adéquat d'un navire pour le voyage prévu. Par exemple :
- selon le Black's Law Dictionary (5e édition, St. Paul (Minnesota), West Publishing Co., 1979), [Traduction] un navire est en « état de navigabilité » s'il est adéquatement construit, préparé, équipé et fourni, et s'il est doté d'un équipage compétent pour le voyage prévu. Il doit en outre, en général, être assez fort et assez étanche, et doté des équipements connexes adéquats pour lui permettre de se livrer en toute sécurité au commerce auquel il est destiné.
- L'International Maritime Dictionary (2e édition, Van Nostrand Reinhold Co.) définit la « navigabilité » comme [Traduction] le caractère adéquat d'un navire en matière de matériaux, de construction, d'équipement, d'équipage et d'outillage pour le commerce ou le service auquel il sert.
Les essais réalisés par le BST ont révélé des lacunes en matière de sécurité mettant en cause la « la navigabilité » du Lady Duck, notamment :
- le manque d'étanchéité du véhicule;
- des pompes défectueuses;
- un franc-bord insuffisant en regard des conditions d'exploitation;
- de l'équipement qui laisse à désirer et en mauvais état;
- l'inaptitude du personnel à réagir efficacement en cas d'urgence.
Pour assurer l'état de navigabilité d'un navire, une personne ou une organisation qui contrôle l'exploitation d'un navire doit déterminer le risque associé au voyage ou au service prévu et la façon dont la construction, la préparation, l'équipage et l'équipement parent à ce risque.
Les personnes ou organisations qui déterminent si un navire est en état de navigabilité sont le propriétaire, l'exploitant et l'organisme de réglementation. Lorsque le propriétaire, l'exploitant et l'organisme de réglementation ne prennent pas les mesures nécessaires, un navire peut ne pas être en état de navigabilité.
2.4 Communications d'urgence
La mission des SCTM de la GCC consiste en partie à fournir au milieu maritime des services de communications et de contrôle du trafic pour garantir la sécurité des personnes en mer conformément à des accords internationauxNote de bas de page 22. La question des communications et de la portée des antennes des SCTM sur la rivière des Outaouais a été abordée dans le rapport d'enquête du BST sur un accident mettant en cause le navire à passagers Miss Gatineau (rapport M00L0043 du BST) et dans le rapport d'enquête du BST sur l'accident précédent du Lady Duck (rapport M01C0033 du BST).
À l'heure actuelle, au moins 21 navires à passagers commerciaux et de nombreuses embarcations de plaisance naviguent sur la rivière des Outaouais entre Carillon (Québec) et Ottawa (Ontario). Pourtant, les SCTM de la GCC ne fournissent pas de service VHF dans la région d'Ottawa. Les navires à l'extérieur de la zone de couverture VHF et à moins de cinq milles de la rive ne sont pas tenus d'être dotés d'un radiotéléphone VHF. Par conséquent, les navires naviguant sur la rivière des Outaouais entre Carillon et la région d'Ottawa ne peuvent pas accéder aux services de SAR (y compris les services municipaux de police et d'incendie) par l'entremise du système de communication des SCTM au moyen de radiotéléphones VHF. Les exploitants de navires qui utilisent la radio VHF comme premier moyen de communiquer une situation d'urgence s'exposent donc à des risques dans la mesure où ils comptent uniquement sur deux embarcations auxiliaires de la GCC ou d'autres embarcations commerciales ou privées qui peuvent ou non être à l'écoute de la voie 16 VHF. Les services d'incendie d'Ottawa et de Gatineau sont dotés de l'équipement nécessaire pour les urgences maritimes et le mettent en oeuvre lorsqu'ils sont alertés au moyen du système 911.
La modification proposée au Règlement de 1999 sur les stations de navires (radio), précisant l'équipement radio obligatoire pour les navires commerciaux, a paru le 12 avril 2003 dans la Gazette du Canada, partie 1 (vol. 137, no 15). Tous les navires à passagers faisant un voyage à l'extérieur d'une zone de couverture VHF seront tenus d'être dotés d'un équipement radio permettant d'établir des communications bidirectionnelles continues avec un centre des SCTM ou une personne à terre. Il est prévu que la modification proposée entrera en vigueur en 2004.
En ce qui concerne l'accident en question, des personnes se trouvant dans les parages ont appelé le 911 par téléphone cellulaire. Comme l'entreprise n'avait pas de procédures normales d'exploitation officielles ni de plan de mesures d'urgence et comme le conducteur n'avait pas été formé en vue de telles urgences, le message de détresse du conducteur a été émis sur la voie 16 VHF (réservée aux urgences). La marina de Hull étant à l'écoute de la voie 68, cet appel n'a probablement été reçu par aucun organisme compétent bien qu'il puisse avoir été reçu par des navires privés à l'écoute de la voie 16 VHF. En somme, les navires émettant des appels de détresse dans cette zone ne peuvent pas communiquer avec les SCTM sur la voie réservée aux urgences; ils doivent s'en remettre aux services d'urgence 911 et aux navires locaux qui peuvent être à l'écoute de la voie d'urgence. L'absence d'écoute efficace et de moyens de communication officiels pour les urgences constitue un facteur de risque pour les personnes à bord d'un navire en détresse.
2.5 Diffusion des renseignements sur la sécurité
Par le passé, les renseignements sur la sécurité (c.-à-d. les bulletins de la sécurité des navires) étaient envoyés aux intéressés par la poste au moyen d'une liste d'envoi. Depuis quelques années, cependant, les bulletins de la sécurité des navires sont aussi affichés sur InternetNote de bas de page 23. Toute personne peut demander d'être ajoutée à la liste d'envoi, mais ce n'est pas tous les exploitants de petits navires qui connaissent son existence. Un examen de la liste d'envoi des bulletins de la sécurité des navires tenue par Transports Canada a révélé qu'un grand nombre d'exploitants de petits navires, y compris le propriétaire du Lady Duck, n'y figurent pas.
En réponse à l'Avis de sécurité maritime 07/01 (rapport M01L0100 du BST) que le BST a envoyé à Transports Canada, Transports Canada a reconnu que la méthode actuelle de diffusion des renseignements sur la sécurité n'est pas toujours efficace. Une évaluation du système est donc en cours pour déterminer quelle serait la façon la plus efficace de communiquer les renseignements pertinents à des publics précis de façon à améliorer la sécurité.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- L'état du véhicule était tel que l'étanchéité n'a pas pu être maintenue et il y avait une constante entrée d'eau dans la coque.
- La construction non étanchéisée du capot du véhicule, la présence de manches à air d'un diamètre de 75 mm (3 po) à l'extrémité avant du capot et le franc-bord avant insuffisant lorsque le véhicule était chargé ont permis l'entrée d'eau à partir des vagues de proue associées au déplacement du navire à la vitesse normale.
- L'absence d'information sur la quantité d'eau dans les fonds de cale, en même temps que l'absence d'alarme de niveau d'eau élevé dans la cale et l'emplacement d'une sortie d'eau hors de la vue du conducteur, a privé le conducteur d'information essentielle pour déclarer une urgence en temps utile.
- L'installation par l'entreprise des pompes d'assèchement n'était pas conforme aux instructions du fabricant. Sur les six pompes d'assèchement électriques présentes, les deux qui étaient en état de marche n'ont pas permis d'empêcher l'entrée d'eau.
- L'entreprise n'avait pas de structure de gestion de la sécurité ni de système de gestion de la sécurité efficaces en place; les procédures d'exploitation du Lady Duck étaient officieuses et non écrites.
- Le cadre réglementaire applicable au Lady Duck ne tenait pas correctement compte du risque associé à l'exploitation du véhicule, en ce sens où le Lady Duck n'était pas assujetti à des exigences visant la construction ni n'exigeait un conducteur qualifié, et l'entreprise n'était pas tenue d'avoir une structure de gestion de la sécurité en place.
- La sortie arrière ne respectait pas les normes d'ergonomie pertinentes pour permettre à toute la gamme d'utilisateurs d'y passer facilement.
- La flottabilité naturelle des victimes, dont certaines avaient enfilé un vêtement de flottaison individuel (VFI), les a pressées contre l'auvent surplombant le compartiment passagers, ce qui a empêché l'évacuation verticale.
3.2 Faits établis quant aux risques
- Les exposés sur la sécurité ne précisaient pas la présence de gilets de sauvetage à bord ni leur emplacement. Aucune démonstration n'a été faite de la façon d'enfiler un gilet de sauvetage ou un VFI. L'emplacement des gilets de sauvetage à bord n'était pas indiqué.
- La réglementation, les normes et les programmes applicables aux petits navires à passagers sont si complexes qu'ils peuvent ne pas être aisément compris par les inspecteurs, les propriétaires et les exploitants qui doivent les appliquer. Cette complexité réduit l'efficacité du cadre réglementaire de sécurité.
- Le cadre réglementaire actuel ne traite pas de tous les aspects des activités des petits navires à passagers. Par conséquent, des navires qui peuvent ne pas être conformes aux exigences pour leur utilisation prévue peuvent être en exploitation, ce qui fait courir des risques aux passagers.
- Le recours par Transports Canada à une démarche strictement réglementaire continue de miner ses efforts en vue de créer au sein des milieux maritimes une culture où les inspecteurs, les propriétaires et les exploitants voient au-delà de la réglementation et gèrent les risques. Il en découle une situation où les lacunes en matière de sécurité peuvent passer inaperçues, ce qui fait courir des risques aux passagers et aux membres d'équipage.
- Aucune des sorties n'était signalée comme sortie de secours. Aucune indication n'était donnée, que ce soit par la signalisation ou durant les exposés sur la sécurité, sur la façon de les ouvrir.
- Les glissières des fermetures éclair servant à fixer les écrans transparents déroulables de protection contre les intempéries n'étaient ni visibles ni faciles à atteindre à partir de l'intérieur du véhicule. De telles conditions compromettent la sécurité des passagers.
- Les casiers sous les sièges passagers ne permettaient pas d'avoir facilement accès aux gilets de sauvetage. Des gilets de sauvetage qui ne sont pas facilement accessibles ne peuvent être utiles dans des situations d'urgence, ce qui compromet la sécurité des passagers et des membres d'équipage.
- Étant donné l'insuffisance de formation pratique, les guides touristiques sont mal préparés à utiliser correctement l'équipement de sécurité en cas d'urgence.
- Les Services de communications et de trafic maritimes ne fournissent pas de couverture très haute fréquence (VHF) dans la région d'Ottawa. Les messages de détresse peuvent seulement être captés par deux embarcations auxiliaires de la Garde côtière canadienne, ainsi que par des embarcations privées et des navires de commerce se trouvant dans les parages. Ces embarcations et ces navires ne sont à l'écoute de la voie 16 VHF réservée aux urgences que par intermittence.
3.3 Autres faits établis
- Les VFI portés par deux des victimes étaient trop grands pour leur taille.
- Certains des gilets de sauvetage pour enfants et aucun des gilets de sauvetage pour adultes qui ont été récupérés après l'accident ne respectaient les exigences de la norme CAN/CGSB 65-GP-14M de septembre 1978.
- La bouée de sauvetage transportée à bord ne respectait pas les normes applicables à ce véhicule et elle était fixée de telle façon qu'elle ne pouvait pas être facilement utilisée.
- L'usage de bouées de sauvetage non normalisées ou de tout équipement de sauvetage à titre décoratif peut porter à confusion sur le plan de la sécurité.
- La méthode actuelle de diffusion des renseignements sur la sécurité au moyen des bulletins de la sécurité des navires est inefficace puisqu'un grand nombre d'exploitants de petits navires, y compris le propriétaire du Lady Duck, ne connaissent pas l'existence de ces bulletins.
- Des essais réalisés par le BST ont démontré que la résistance des ancrages des sièges du Lady Duck était inférieure aux exigences du Règlement sur la sécurité des véhicules automobiles de Transports Canada.
- L'inspection du véhicule à titre de transporteur routier effectuée par le ministère des Transports de l'Ontario a révélé des lacunes qui avaient un impact considérable sur la sécurité du véhicule sur la route.
- L'absence de coordination entre Transports Canada et le ministère des Transports de l'Ontario fait que les propriétaires de véhicules amphibie immatriculés par le ministère des Transports de l'Ontario peuvent exploiter leurs véhicules sans être au courant des exigences du secteur maritime et il est possible que l'entrée en service à des fins commerciales d'un nouveau véhicule amphibie ne soit pas signalée à Transports Canada.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures de sécurité prises
4.1.1 Exposés sur la sécurité avant le départ
En juillet 2002, le Bureau de la sécurité des transport du Canada (BST) a envoyé à Transports Canada l'Avis de sécurité maritime 07/02 indiquant que des mesures devraient être prises pour garantir que les exploitants de navires à passagers effectuent les exposés sur la sécurité requis avant le départ et que ces exposés soient conformes à l'esprit de la réglementation.
Transports Canada a répondu que les mesures suivantes, entre autres, avaient été prises jusqu'à présent :
- Le 11 juillet 2002, une lettre a été adressée aux exploitants en Ontario et à un fabricant de véhicules amphibie à passagers pour les informer que la réglementation exige la présentation aux passagers d'un exposé sur la sécurité. Des lettres semblables ont été adressées aux exploitants de véhicules amphibie à passagers partout au pays. La même information, y compris la mention des exposés sur la sécurité à l'intention des passagers, a été communiquée sous forme d'avis aux inspecteurs maritimes de Transports Canada.
- Le 27 juillet 2002, Transports Canada a diffusé le Bulletin de la sécurité des navires 06/2002 pour informer les exploitants de la modification à la réglementation exigeant les exposés sur la sécurité à bord de tous les navires à passagers et pour souligner l'importance de ces exposés.
- Transports Canada a ajouté ce Bulletin de la sécurité des navires et une discussion des exposés sur la sécurité au programme du cours d'inspection des petits navires à passagers.
En outre, Transports Canada indique que des efforts sont déployés pour faire en sorte que le grand public s'attende à recevoir et exige un exposé sur la sécurité avant le départ. Parmi ces efforts, au 3 juillet 2003, trois annonces d'intérêt public avaient été diffusés sur Météo Média et le Weather Network et des affiches étaient disposées dans des régions touristiques.
4.1.2 Système de pompes d'assèchement
En août 2002, le BST a envoyé à Transports Canada l'Avis de sécurité maritime 08/02 indiquant les lacunes de fonctionnement du système de pompes d'assèchement.
Transports Canada a répondu que les mesures suivantes avaient été prises :
- Immédiatement après l'accident, tous les véhicules amphibie à passagers ont été inspectés, y compris les systèmes de pompes d'assèchement et les systèmes d'alarme.
- Le 11 juillet 2002, une lettre a été adressée aux exploitants en Ontario et à un fabricant de véhicules amphibie à passagers pour les informer des mesures de précaution appropriées et des pratiques exemplaires en matière de système de pompes d'assèchement. La même information a été communiquée sous forme d'avis aux inspecteurs maritimes de Transports Canada.
- Le 23 août 2002, Transports Canada a diffusé le Bulletin de la sécurité des navires 09/2002 soulignant l'importance des systèmes de pompes d'assèchement et d'alarmes pour les petits navires.
4.1.3 Exigences en matière de bouées de sauvetage
Le 23 décembre 2002, le BST a envoyé à Transports Canada la Lettre d'information sur la sécurité maritime 12/02 indiquant que le véhicule avait à son bord une bouée de sauvetage d'un diamètre de 610 mm plutôt qu'une bouée approuvée de 762 mm comme l'exige le Règlement sur les petits bâtiments. De plus, l'examen de la bouée de 610 mm a révélé que, même si elle portait le numéro d'approbation TC.143.014.045 de Transports Canada, elle ne respectait pas les normes applicables précisées aussi bien dans le document TP 7325, Normes relatives aux bouées de sauvetage et leurs accessoires, qu'à l'article 8, annexe III du Règlement sur les petits bâtiments. Les guirlandes de la bouée étaient de longueurs variables (570, 590, 600 et 610 mm) plutôt que de la longueur minimum requise de 610 mm. De plus, la bouée était fixée au sommet de la cloison arrière du véhicule au moyen d'une corde élastique dont les crochets étaient réunis à l'arrière de la bouée, hors de la vue. En raison du mode de fixation, la bouée n'aurait pas été immédiatement accessible.
Transports Canada a répondu qu'il convenait du fait que la bouée aurait dû avoir un diamètre de 762 mm et qu'il semblait que le fabricant n'ait pas produit la bouée conformément au prototype approuvé. Transports Canada a rencontré le fabricant et passé en revue ses modalités d'assurance de la qualité et d'inspection. Une vérification de quatre bouées de sauvetage a révélé que les guirlandes répondaient aux normes applicables. Transports Canada a prévu une inspection supplémentaire au printemps 2004.
4.1.4 Règlement sur les petits bâtiments
Le 10 janvier 2003, le BST a envoyé à Transports Canada la Lettre d'information sur la sécurité maritime 01/03 l'informant qu'un examen sommaire du Règlement sur les petits bâtiments avait révélé des incohérences qui pouvaient être source de confusion pour les exploitants tenus de respecter la réglementation et pour les inspecteurs qui doivent en contrôler l'application.
Transports Canada a répondu que, par suite d'initiatives en cours, des modifications au Règlement sur les petits bâtiments avaient été publiées en décembre 2003 dans la Gazette du Canada, partie 1, dont les suivantes :
- intégrer des renvois au document TP 1332, Normes de construction des petits bateaux, ce qui établit des normes minimales obligatoires. La présentation du document TP 1332 a du reste été revue pour en faciliter la lecture;
- établissement d'exigences visant l'équipement de sauvetage pour les navires d'une jauge brute inférieure à 15;
- élimination des incohérences en ce qui concerne les gilets de sauvetage;
- introduction de nouvelles exigences en ce qui concerne la stabilité des nouveaux navires.
Les modifications intégrant le document TP 1332, dont l'entrée en vigueur est prévue en 2004, exigeront que les nouveaux petits navires respectent cette norme de construction. Les petits navires existants, y compris les petits navires à passagers, devront respecter la norme dans la mesure où il est raisonnable et pratique de l'exiger.
Les incohérences concernant les bouées de sauvetage seront réglées dans le deuxième volet de la réforme réglementaire, dont le début est prévu en 2005 ou plus tôt.
4.1.5 Gilets de sauvetage
À la réunion de novembre 2002 du Conseil consultatif maritime canadien, Transports Canada a annoncé que les modifications à la réglementation en cours de préparation comprennent l'exigence que tous les navires à passagers transportent suffisamment de gilets de sauvetage pour enfants et que tous les gilets de sauvetage soient conservés en un lieu facilement accessible et clairement signalé. Le Règlement sur l'équipement de sauvetage a par la suite été modifié, le 24 février 2004. Cependant, il ne s'applique pas aux navires d'une jauge brute inférieure à 5 et ne transportant pas plus de 12 passagers. Il est prévu que ces navires seront visés par des modifications semblables proposées au Règlement sur les petits bâtiments.
4.1.6 Sécurité des petits navires commerciaux
À la réunion de novembre 2002 du Conseil consultatif maritime canadien, le groupe de travail sur les petits bâtiments a notamment proposé que Transports Canada prépare un exposé exhaustif sur la mise en oeuvre de l'évaluation de la stabilité et de la flottabilité de l'Organisation internationale de normalisation (ISO) pour tous les navires nouveaux ou existants faisant entre 6 m et 12 m de longueur et ne transportant pas plus de 12 passagers.
Une étude a été entreprise pour examiner la sécurité des véhicules amphibie et les questions suivantes seront étudiées : l'intégrité de la coque, les pompes d'assèchement, les sorties de secours, les sièges, la stabilité du véhicule à l'état intact et en état d'avarie, l'exploitation et le personnel. L'étude vise à aider Transports Canada à prendre des décisions à l'égard de tels véhicules.
Le Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (TP 14070), qui vise à donner aux propriétaires et aux exploitants une vue d'ensemble des méthodes sûres d'exploitation, de la certification, de la construction et des exigences de sécurité, vient d'être terminé et publié.
De plus, Transports Canada a adopté une politique visant l'évaluation de la stabilité des navires existants. Les propriétaires peuvent choisir de faire évaluer leur navire en fonction des normes élaborées par les États-Unis, le Royaume-Uni ou l'ISO. En outre, il y aura un quatrième choix pour évaluer la stabilité, soit une exigence simplifiée de Transports Canada en matière de stabilité fondée sur l'ISO. Pour les navires qui ne s'éloignent pas à plus de 20 milles marins de la rive, les propriétaires peuvent choisir une des trois normes, ou un ensemble d'exigences simplifiées.
Un avis renseignant les propriétaires et les exploitants de cette politique est en voie de préparation aux fins d'information publique et devrait être émis d'ici la fin du mois de mai 2004. Des exposés sur la politique et les modalités d'évaluation des navires par rapport aux exigences simplifiées ont été présentés dans toutes les régions de Transports Canada.
En 2003, Transports Canada a lancé le cours sur les compétences des conducteurs de petits bâtiments pour assurer, entre autres, une formation minimale des exploitants de petits navires à passagers d'une jauge brute inférieure à 5. Les buts de ce cours non obligatoire consistent notamment à donner aux participants une compréhension de base des risques associés à leur navire et de la prévention des incidents à bord, les connaissances nécessaires face aux urgences, et les connaissances et compétences voulues pour exploiter un navire en toute sécurité dans des eaux abritées. Pour obtenir une certification après la réussite de ce cours, les participants doivent avoir satisfait aux critères de service admissible et réussi la formation de base sur la sécurité des petits bâtiments (FUM A3) ainsi que le certificat de base en secourisme en mer ou l'équivalent. La possibilité de rendre le cours sur les compétences obligatoire sera examinée par Transports Canada dans un document de discussion, au titre de la réglementation visant le personnel maritime, intitulé Marine Personnel Regulations (ce document n'existe pas en français).
4.1.7 Exigences en matière de communications radio
Des modifications au Règlement de 1999 sur les stations de navires (radio), publiées le 12 avril 2003 dans la Gazette du Canada, partie I, exigeront que les navires pontés de plus de 8 m de longueur soient dotés d'un radiotéléphone VHF d'appel sélectif numérique lorsqu'ils effectuent des voyages de cabotage, sauf pour les voyages de cabotage de classe IV qui se trouvent dans une zone de couverture des services du trafic maritime. Cela ne s'applique pas aux bâtiments effectuant des voyages en eaux intérieures ou secondaires.
Bien que ces modifications ne s'appliquent pas à des véhicules comme le Lady Duck, une modification supplémentaire à la réglementation est en voie de préparation pour exiger que tous les navires à passagers qui ne sont pas actuellement tenus d'être dotés d'une radio VHF, quelle que soit leur région d'utilisation, disposent d'un moyen fiable de communication bidirectionnelle. Lorsque la modification entrera en vigueur, les navires exploités dans les zones de couverture VHF devront être dotés d'un radiotéléphone VHF, tandis que les navires exploités dans des zones sans couverture VHF devront disposer d'un autre moyen de communication avec un responsable à terre. En ce qui concerne l'inspection, l'exploitant ou le capitaine devra démontrer la capacité opérationnelle du moyen choisi de communication bidirectionnelle.
4.1.8 Système d'inspection des petits bâtiments
Transports Canada a mis au point une base de données servant à consigner les détails des inspections. Une étude recommandant un cadre d'évaluation des facteurs de risque touchant les petits navires a été achevée. Ses conclusions seront combinées aux données recueillies par le Système d'inspection des petits bâtiments pour créer des indices des risques des navires, de façon à aider au choix des navires pour des inspections aléatoires ou ciblées de contrôle de conformité.
4.2 Mesures à prendre
Pour garantir la navigabilité d'un navire, c'est-à-dire son adaptation à l'utilisation prévue, les risques particuliers des activités en cause doivent être bien compris et des mesures doivent être prises pour les atténuer. Cela s'applique non seulement à la construction de la coque, à ses machines et à son équipement, mais aussi aux compétences de son équipage et à son exploitation.
Dans cette optique, le propriétaire ou l'exploitant doit continuellement reconnaître et contrôler les risques qui peuvent survenir dans les activités quotidiennes. Les options d'atténuation des risques doivent être examinées et les moyens adéquats (administratifs ou physiques) doivent être prévus pour réduire ou éliminer la probabilité ou les conséquences d'un événement regrettable.
Pour atténuer les risques les plus communs, l'organisme de réglementation doit créer un cadre qui est facile à comprendre et à appliquer par les propriétaires et exploitants de petits navires à passagers. De plus, face aux risques propres à une activité donnée, l'organisme de réglementation doit prendre des mesures pour que les propriétaires et exploitants disposent des mécanismes permettant de reconnaître et d'atténuer les risques de façon continue.
4.2.1 Gestion de la sécurité par les exploitants de petits navires à passagers
Entre 1975 et 2002, on a enregistré 166 accidents touchant des petits navires à passagers, qui ont entraîné 57 pertes de vie. En comparaison, durant la même période, on a enregistré 5 pertes de vie par suite de 1 083 accidents touchant l'ensemble des autres navires à passagers. Ainsi, les passagers en cause dans un accident à bord d'un petit navire à passagers sont plus susceptibles de souffrir des conséquences graves. Par conséquent, les risques associés à l'exploitation de petits navires à passagers doivent être cernés et atténués de façon à prévenir les accidents et à réduire les répercussions des accidents.
La gestion efficace de la sécurité exige que les exploitants sachent reconnaître les risques associés à leurs activités, évaluer les conséquences possibles et déterminer des stratégies d'atténuation pour réduire les risques au strict minimum. Cependant, comme le présent accident le démontre, les exploitants de petits navires à passagers peuvent ne pas être conscients des risques associés à l'exploitation de leurs navires et ne pas posséder la compétence nécessaire pour gérer ces risques.
Un système de gestion de la sécurité constitue un « processus de gestion des risques liés à la sécurité systématique, exhaustif, clair et précis »Note de bas de page 24 et est considéré comme le mécanisme permettant à des propriétaires et des exploitants bien renseignés de reconnaître et d'atténuer efficacement les risques. Un système de gestion de la sécurité dans le secteur maritime doit comprendre, entre autres, les éléments suivants :
- des procédures et des directives visant à assurer la gestion et l'exploitation en toute sécurité des navires;
- des niveaux d'autorité définis et des voies de communication efficaces entre les responsables à terre et les responsables à bord de chaque navire ainsi que parmi eux;
- des procédures pour l'entretien des navires;
- des procédures pour la déclaration des accidents, des incidents et des situations dangereuses;
- des procédures pour se préparer aux situations d'urgence et y réagir;
- l'analyse et la consignation des leçons apprises.
Le Bureau constate que le Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (TP 14070) de Transports Canada englobe certains des principes sous-tendant un système de gestion de la sécurité efficace. Cependant, il ne va pas jusqu'à fournir les moyens ou la structure permettant l'application de ces principes.
Comme le présent accident l'a démontré, l'absence de structure officielle pour l'entretien du véhicule et les mesures d'urgence peut compromettre la sécurité des passagers. Bien que des dispositions réglementaires entrent en vigueur dans d'autres modes de transport en vue d'exiger un système de gestion de la sécurité de la plupart des exploitants, le Code international de gestion de la sécurité (Code ISM), qui précise les exigences en matière de gestion de la sécurité maritime, n'est d'application que pour certains navires ressortissant à la Convention de sécurité, dont les navires à passagers et les navires de charge d'une jauge brute de plus de 500. Or, les navires qui demeurent dans les eaux canadiennes ne sont pas considérés des navires ressortissant à la Convention de sécurité. Dès lors, même si le Code ISM est appliqué volontairement par de nombreux exploitants de grands navires à passagers, il n'y a aucune exigence réglementaire voulant que les exploitants de petits navires à passagers disposent d'un système de gestion de la sécurité.
À la demande de Transports Canada, une étude sur la possibilité de prévoir un système de gestion de la sécurité pour la flotte intérieure canadienne (y compris les petits navires à passagers) non soumise au Code ISM a été complétée en mai 2002Note de bas de page 25. L'étude signale que d'autres pays, comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et le Danemark, ont instauré ou préparent des exigences visant des systèmes de type gestion de la sécurité applicables à leurs petits navires à passagers. Cette application des principes de la gestion de la sécurité aux petits navires veut en général pallier les lacunes en matière de sécurité et assurer une meilleure sécurité conformément aux attentes du public voyageur. Transports Canada examine actuellement les résultats de l'étude.
Reconnaissant que le Code ISM peut outrepasser la capacité de la plupart des petits exploitants, un système adapté aux besoins des exploitants de petits navires à passagers et intégrant les principes d'une gestion efficace de la sécurité aiderait ces exploitants à garantir que leurs entreprises, leurs navires et leurs membres d'équipage sont aptes aux activités prévues. Compte tenu des avantages associés à la prévention des accidents et de la nécessité d'une démarche structurée pour que les exploitants puissent gérer efficacement et de façon continue les risques liés à leurs activités, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports prenne des mesures pour assurer que les entreprises exploitant des petits navires à passagers aient un système de gestion de la sécurité en place.
Recommandation M04-01 du BST
4.2.2 Caractère adéquat du cadre réglementaire pour les petits navires à passagers
Le cadre réglementaire actuel ne traite pas de tous les aspects de l'exploitation des petits navires à passagers d'une jauge brute inférieure à 15 ou transportant au plus 12 passagers. Comme l'a démontré le présent accident, la Loi sur la marine marchande du Canada, sa réglementation, ses normes et ses lignes directrices sont complexes et leur mise en application par les inspecteurs, propriétaires et exploitants de navires n'est pas uniforme.
Transports Canada reconnaît la complexité de son cadre réglementaire. La Loi sur la marine marchande du Canada sera remplacée par la Loi sur la marine marchande du Canada (2001), qui a reçu la sanction royale en novembre 2001. Son entrée en vigueur est prévue en 2006. Pour lui donner tous ses effets, plus de 100 règlements doivent être révisés et restructurés. La rédaction des règlements se poursuit en deux phases. La phase 1 concerne notamment de nouveaux règlements nécessaires pour appuyer la nouvelle loi; en outre, des règlements existants qui ne concordent pas avec la loi doivent être révisés. La phase 2 concernera les règlements qui concordent avec la nouvelle loi mais qui doivent être modernisés. Les règlements dont la réforme n'est pas urgente aux fins de la sécurité seront également révisés et modifiés dans la phase 2Note de bas de page 26.
Dans le cadre de la phase 1, certaines initiatives en cours toucheront les petits navires à passagers. Par exemple, l'exigence d'un capitaine breveté pour les navires à passagers commerciaux d'une jauge brute inférieure à 5 et l'obligation de compléter les cours pertinents de fonctions d'urgence en mer (FUM) avant d'obtenir un brevet de capitaine avec restrictions sont envisagées dans le cadre de la réforme du Règlement sur l'armement en équipage des navires et du Règlement sur la délivrance des brevets et certificats (marine).
Par ailleurs, Transports Canada a présenté une modification qui intégrera des renvois aux Normes de construction des petits bateaux (TP 1332). Les nouveaux petits navires à passagers devront respecter la norme. Les petits navires à passagers existants devront la respecter seulement dans la mesure où il est raisonnable et pratique de l'exiger.
Cependant, il reste d'autres lacunes en matière de sécurité qui, selon le Bureau, doivent être éliminées. Par exemple, même si les membres d'équipage sont actuellement tenus de recevoir une formation de base en sécurité d'un établissement reconnu avant d'avoir accumulé six mois de service à bord d'un navire canadien, il faut parfois deux saisons ou plus à bord de petits navires à passagers dont les activités sont saisonnières avant d'en arriver à six mois. Il n'est pas rare que les exploitants saisonniers engagent de nouveaux membres d'équipage au début d'une nouvelle saison. Le Bureau est encouragé du fait que la coopération entre Transports Canada et l'Association canadienne des propriétaires de navires à passagers (CPVA), qui regroupe quelque 50 exploitants commerciaux, a mené à l'élaboration d'un cours interne approuvé par Transports Canada. Cependant, les membres de cette association ne représentent qu'un faible pourcentage des petits navires à passagers en service.
Le régime réglementaire actuel des petits navires à passagers s'applique à une vaste gamme de navires dont le profil de risque varie grandement. De plus, des dispositions réglementaires prescriptives et des normes de référence ont été établies d'après ce que l'on peut appeler des critères « arbitraires », comme des restrictions quant à la longueur, à la jauge brute ou au nombre de passagers. Une telle démarche ne tient pas nécessairement compte des risques inhérents à des activités données. Ainsi, alors que chaque navire à passagers autorisé à transporter plus de 12 passagers est tenu de disposer d'un équipage suffisant pour diriger et contrôler les passagers à bord en cas d'urgence, aucune exigence analogue n'existe pour les navires à passagers transportant 12 passagers ou moins.
Dans le passé, il y a eu une tendance chez les propriétaires et exploitants de petits navires à passagers à compter sur les inspections annuelles de Transports Canada comme moyen d'assurer leur conformité. Par suite de l'augmentation du seuil d'exemption des inspections annuelles, Transports Canada mise davantage sur l'auto-inspection. En effet, la conformité réglementaire des petits navires à passagers d'une jauge brute de 15 ou moins doit être assurée par l'auto-inspection des propriétaires et exploitants, lesquels peuvent ne pas maîtriser toutes les exigences relatives à la sécurité. Jusqu'à ce que le cadre réglementaire puisse être aisément compris, la mise en oeuvre d'un régime d'auto-inspection demeurera problématique et le public voyageur continuera d'être exposé à des risques.
L'application du cadre réglementaire actuel et futur exige un registre à jour des navires en exploitation. Transports Canada estime qu'environ 10 000 petits navires à passagers d'une jauge brute de 15 ou moins sont tenus de détenir un permis ou d'être immatriculés, mais indique qu'en décembre 2003, il y avait 736 petits navires à passagers détenant un permis et 375 qui étaient immatriculés. Transports Canada prend des mesures pour régler cette anomalie en mettant en place un registre des petits bâtiments et prévoit avoir identifié tous les navires d'ici 2011.
Le Bureau reconnaît l'intérêt des initiatives prises par Transports Canada pour réformer le cadre réglementaire actuel en vue de le simplifier et de le rendre plus applicable et efficace. Cependant, compte tenu du délai prévu, jusqu'en 2006, pour le parachèvement de cette réforme et du grand nombre de petits navires à passagers qui doivent encore être identifiés, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports accélère l'élaboration d'un cadre réglementaire qui soit facilement compris et applicable à tous les petits navires à passagers et à leurs activités.
Recommandation M04-02 du BST
4.2.3 Évacuation des passagers
Lors d'une urgence, les passagers ont besoin de temps pour accéder à des gilets de sauvetage et les enfiler ainsi que pour repérer les issues de secours et s'y rendre. Le temps nécessaire pour sortir en toute sécurité d'un navire en détresse doit être inférieur au temps qu'il faut au navire pour être envahi par l'eau et couler. Les grands navires à passager doivent être subdivisés pour contrôler l'envahissement par l'eau, mais ce n'est pas le cas des petits navires à passagers non pontés, qui ne sont pas non plus tenus d'être foncièrement insubmersibles en cas d'envahissement par l'eau. Par conséquent, pour ces navires, il est essentiel que la décision d'évacuer soit prise rapidement et que l'évacuation efficace des passagers se fasse avant que la flottabilité soit compromise et que le navire coule. Les mesures de sécurité doivent donc garantir que la submersion d'un navire sera retardée au moins le temps nécessaire pour envoyer des messages de détresse et terminer l'évacuation en toute sécurité.
Le 1er mai 1999, le véhicule amphibie à passagers Miss Majestic, avec à son bord un conducteur et 20 passagers, est entré sur le lac Hamilton près de Hot Springs (Arkansas), aux États-Unis au cours d'une excursion. Environ sept minutes après être entré à l'eau, le véhicule a donné de la bande sur bâbord puis a coulé rapidement par l'arrière. Un passager s'est échappé du véhicule avant qu'il ne coule, mais les autres passagers et le conducteur sont restés prisonniers de l'auvent surplombant le véhicule et ont été entraînés sous l'eau. Pendant que le véhicule coulait, six passagers et le conducteur ont réussi à sortir et ont été recueillis par des embarcations de plaisance qui se trouvaient à proximité. Les 13 autres passagers, dont trois enfants, ont perdu la vie. L'auvent continu qui a piégé les passagers dans le véhicule a contribué au nombre élevé de pertes de vie.
Par suite de l'accident et de l'enquête qui a suivi, le National Transportation Safety Board (NTSB) a recommandé que :
[Traduction] la Garde côtière américaine exige que les exploitants de véhicules amphibie à passagers assurent une réserve de flottabilité par des moyens passifs, comme des compartiments étanches, une flottabilité structurelle ou des mesures équivalentes, de sorte que les véhicules demeurent à flot et à l'endroit en cas d'envahissement par l'eau même s'ils transportent une pleine charge de passagers et de membres d'équipage.
Recommandation M02-1 du NTSB
et que :
[Traduction] jusqu'à ce que les propriétaires assurent une réserve de flottabilité suffisante pour leurs véhicules amphibie à passagers de sorte que les véhicules demeurent à l'endroit et à flot lorsqu'ils sont pleinement envahis par l'eau (selon M-02-1), entre autres, l'enlèvement des auvents pour la circulation sur l'eau, ou la pose d'un auvent approuvé par la Garde côtière américaine qui ne gêne pas l'évacuation des passagers ni horizontalement ni verticalement en cas de naufrage.
Recommandation M02-2 du NTSB
En formulant ces recommandations, le NTSB a souligné le lien essentiel entre la réserve de flottabilité d'un navire et ses caractéristiques permettant l'évacuation en toute sécurité en cas d'urgence.
Les passagers et les membres d'équipage du Lady Duck ont connu des difficultés semblables pendant l'évacuation en raison de la rapidité du naufrage, de l'assiette du véhicule pendant qu'il a coulé et de l'auvent qui empêchait les passagers de flotter librement à la surface. De plus, d'autres éléments de la conception, comme le passage étroit entre les sièges, la sortie inadéquate à l'arrière, les deux fenêtres qui étaient maintenues par des fermetures éclair et l'absence de signalisation des issues sur les fenêtres latérales, ont contribué à l'engorgement lorsque les passagers ont tenté d'évacuer le navire. Comme dans le cas du Miss Majestic, le Lady Duck a coulé si rapidement que certains des passagers ont été incapables de sortir du véhicule et se sont noyés.
Les petits navires à passagers sont rarement d'une conception normalisée, de sorte que les dispositions pour l'embarquement, les places à bord et le débarquement des passagers varient grandement, surtout dans le cas de navires non conventionnels comme le Lady Duck. Transports Canada dispose de normes pour les véhicules à passagers commerciaux comme les autobus, les trains et les avions ainsi que, dans une moindre mesure, pour les petits navires à passagers qui ont une jauge brute supérieure à 15 ou qui transportent plus de 12 passagersNote de bas de page 27. Cependant, il n'y a pas de dispositions réglementaires exigeant que les petits navires à passagers, comme le Lady Duck, soient conçus de façon ergonomique pour donner aux passagers et membres d'équipage le plus de chances possible d'évacuer en toute sécurité en cas d'urgence.
Le Bureau est au courant des modifications proposées en vue d'intégrer des renvois aux Normes de construction des petits bateaux (TP 1332). Cependant, il ressort que les petits navires commerciaux de plus de 6 m, comme le Lady Duck, ne sont pas tenus d'offrir une réserve de flottabilité suffisante pour éviter la submersion et qu'il n'y a pas de dispositions concernant l'évacuation rapide et facile des passagers en cas d'urgence. Par conséquent, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports prenne des mesures pour assurer que les petits navires à passagers comportent une réserve de flottabilité suffisante ou d'autres éléments de conception qui permettent l'évacuation en toute sécurité, rapide et facile des passagers et des membres d'équipage en cas d'urgence.
Recommandation M04-03 du BST
4.2.4 Communications de détresse et coordination des opérations de recherche et sauvetage
Dans les situations d'urgence, les membres d'équipage et les passagers comptent sur la possibilité d'alerter rapidement des tiers pouvant offrir de l'aide. Les radios VHF marines constituent un moyen fiable d'émettre des appels de détresse dès lors que des voies VHF réservées aux urgences font l'objet d'une écoute et que les appels peuvent être reçus par d'autres navires en mesure d'offrir une aide immédiate. Cette aptitude de communiquer sur des voies d'accès libre permet aussi la coordination efficace des opérations de recherche et sauvetage (SAR) par les autorités compétentes.
Cependant, ces avantages du recours à la radio VHF peuvent ne pas se matérialiser dans les régions où il n'y a pas d'écoute continue. Un navire diffusant un appel de détresse sur la voie 16 VHF doit donc compter sur des navires dans les parages qui peuvent ou non être à l'écoute de la fréquence.
Sur la rivière des Outaouais, la couverture SAR de la Garde côtière canadienne (GCC) est assurée seulement jusqu'au barrage de Carillon, près de la frontière interprovinciale entre l'Ontario et le Québec. Il se trouve que la limite de propagation vers l'ouest de la couverture VHF de la GCC se termine aussi à Carillon. De là jusqu'à Ottawa le long de la rivière des Outaouais, soit sur quelque 70 milles, l'écoute locale de la radio VHF est effectuée de façon intermittente par la police, les embarcations auxiliaires de la GCC, des embarcations privées et commerciales, des marinas et des clubs de voile de la région. D'autres services, comme le 911, les téléphones cellulaires et d'autres fréquences radio (p. ex., la bande publique), servent à signaler les urgences sur la rivière des Outaouais.
Des publications nautiques, telles que le Guide nautique de la voie navigable de la Rideau et de la rivière des Outaouais, décrivent les réseaux et services des communications VHF. Cependant, ces publications ne donnent pas d'indications sur l'absence de couverture VHF pour cette portion de la rivière des Outaouais en vue de mieux renseigner les navigateurs et les préparer en cas d'urgence exigeant une aide extérieure.
En plus du présent accident, 10 accidents mettant en cause des navires commerciaux transportant des passagers sur la rivière des Outaouais ont été déclarés au BST depuis 2000. À la suite de l'enquête sur un de ces accidents, où un passager a fait une chute par-dessus bordNote de bas de page 28, le Bureau a fait état de préoccupations liées à la sécurité du fait que « les centres des SCTM [Services de communications et de trafic maritimes] ne sont pas toujours en mesure d'assurer l'écoute des communications sur la voie 16 VHF dans la région d'Ottawa et que les services de recherche et sauvetage de la GCC ne sont pas à même d'organiser et de coordonner de manière efficace les communications locales et les ressources de recherche et sauvetage ».
À la suite d'un accident ultérieur mettant en cause un autre navire à passagersNote de bas de page 29, l'enquête a révélé une lacune semblable en matière de sécurité. Par conséquent, le Bureau a réitéré ses préoccupations liées à la sécurité, affirmant que :
Le Bureau s'interroge sur l'efficacité des ressources SAR et de la couverture des SCTM dans la RCN [région de la capitale nationale] parce que, du fait que les SCTM n'assurent pas l'écoute sur la voie 16 VHF réservée aux appels d'urgence dans la portion de la rivière des Outaouais comprise dans la RCN, il est difficile de déployer en temps voulu les embarcations et d'assurer la coordination efficace de l'opération conformément au plan SAR de la GCC.
Le Bureau a de plus encouragé l'organisation de la GCC chargée des opérations de SAR à « reconsidérer le plan pour la région ».
En 1999, la GCC a rencontré des autorités locales de la protection civile pour discuter de questions entourant la sécurité nautique, dont l'absence d'écoute des communications radio et de coordination des mesures d'urgence pour la rivière des Outaouais et la RCN. Bien que la nécessité de s'attaquer aux questions des communications et de la coordination ait été reconnue, aucune mesure supplémentaire notable n'a été prise jusqu'à présent.
Des modifications proposées au Règlement de 1999 sur les stations de navires (radio) exigeront que les navires à passagers exploités dans des régions où aucune écoute VHF n'est assurée soient dotés d'un moyen de communiquer avec un responsable à terre. La plupart des navires à passagers naviguant sur la rivière des Outaouais disposent déjà d'un tel moyen - les téléphones cellulaires. Bien que les téléphones cellulaires puissent offrir une certaine sécurité supplémentaire, ils ne peuvent pas remplacer les communications VHF. Ils peuvent certes servir à appeler les autorités et les informer d'une situation d'urgence, mais ils sont inefficaces pour alerter d'autres navires qui seraient les mieux placés pour offrir une aide immédiate et ne sont pas utiles pour la coordination d'un sauvetage.
Compte tenu du nombre de navires à passagers commerciaux et d'embarcations de plaisance dans la RCN, il est essentiel que les intervenants dans les activités de SAR prévoient le moyen d'être alertés immédiatement et de coordonner les interventions en cas d'urgence. Il y a diverses autorités et organisations le long de la rivière des Outaouais qui peuvent être appelées à participer à une opération maritime de SAR. Bien que certains corps de police et de pompiers aient consenti des efforts pour doter leurs unités maritimes de radios VHF, il n'y a aucun moyen coordonné pour assurer l'écoute des messages de détresse par radio VHF et la disponibilité de ressources organisées et coordonnées efficacement. Par conséquent, les interventions face aux situations d'urgence sur la rivière des Outaouais ne sont pas nécessairement coordonnées efficacement.
Le Secrétariat national Recherche et sauvetage, un organisme gouvernemental indépendant relevant du ministre de la Défense nationale, est chargé de promouvoir le Programme de recherche et sauvetage national. Le programme regroupe tous les services de SAR assurés par des organismes ou des particuliers au Canada, quels que soient le type d'activité en cause ou l'administration dont ils relèvent.
Compte tenu du leadership qu'est appelé à assurer le Secrétariat national Recherche et sauvetage auprès d'autorités fédérales, provinciales et locales ainsi que d'autres organisations en vue de rehausser et de normaliser la qualité des services de SAR et d'atténuer les risques associés à un système de SAR dont la coordination laisse à désirer, le Bureau recommande que :
le Secrétariat national Recherche et sauvetage, en collaboration avec les autorités et organisations locales, favorise la mise en place d'un système pour assurer l'écoute des appels de détresse et la coordination efficace des interventions de recherche et sauvetage en cas de situations d'urgence touchant des navires sur la rivière des Outaouais entre Ottawa et Carillon.
Recommandation M04-04 du BST
4.3 Préoccupations liées à la sécurité
4.3.1 Échange d'information sur la sécurité à l'égard des véhicules amphibie
Dans leurs activités quotidiennes, les véhicules amphibie comme le Lady Duck sont exploités dans deux environnements distincts et, par conséquent, dans des aires de compétence fédérale et provinciale. Dans le cas du Lady Duck, Transports Canada et le ministère des Transports de l'Ontario devaient respectivement s'assurer que le véhicule convenait à l'exploitation dans ses modes maritime et terrestre.
Tout accident ou dommage découlant des activités maritimes est du ressort de Transports Canada. Ainsi, à la suite d'un accident maritime, le véhicule sera inspecté pour vérifier que l'accident n'a pas nui à la navigabilité ou à la sécurité des passagers. Par contre, l'information sur les accidents survenant à terre est déclarée au ministère des Transports de l'Ontario, mais n'est pas transmise à Transports Canada, et Transports Canada n'informe pas le ministère des Transports de l'Ontario des incidents maritimes déclarés. Les dommages subis dans de tels accidents peuvent entraîner des défectuosités qui, si elles ne portent pas à conséquence sérieuse pour les activités terrestres, peuvent miner le rendement et la sécurité du véhicule dans l'eau.
Lorsqu'un nouvel exploitant s'adresse au ministère des Transports de l'Ontario pour obtenir un certificat d'immatriculation d'utilisateur de véhicule commercial, le ministère des Transports de l'Ontario recueille de l'information pertinente à l'immatriculation et à la conformité, comme les accidents, les condamnations et les inspections, qu'elle verse dans une base de données sur les exploitants de véhicules commerciaux. L'information contenue dans cette base de données permet d'évaluer de façon continue le rendement d'une entreprise en matière de sécurité. Cependant, cette information n'est pas fournie à Transports Canada; il n'y a d'ailleurs aucune exigence en ce sens.
Un des buts du Programme de surveillance et d'inspection des petits bâtiments consiste à reconnaître les navires qui peuvent poser des risques élevés pour la sécuritéNote de bas de page 30. L'information détenue par des organismes provinciaux pourrait aider Transports Canada à évaluer la sécurité de véhicules amphibie et le dossier de l'exploitant en matière de sécurité. Il serait ainsi plus facile de reconnaître les véhicules à haut risque. Le Bureau croit que l'échange d'information entre Transports Canada et le ministère des Transports de l'Ontario est essentiel à la sécurité des activités maritime et terrestre. Le Bureau se préoccupe du fait que, sans échange d'information entre les organismes provinciaux et Transports Canada, des conditions dangereuses peuvent passer inaperçues et ainsi compromettre la sécurité des passagers et des membres d'équipage.
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .